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Décisions

CA Rouen, ch. civ. et com., 1 octobre 2015, n° 14-03146

ROUEN

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Petit, Sebert, Ohannessian, Vaccaro, Finares Patrimoine (SAS)

Défendeur :

Reghem, Fiventis Invest (SAS), Fiventis (SAS), Pascual (ès qual.), Seven (SARL), SCP Rouvroy Declercq (ès qual.), Lafarge (ès qual.), Doliger

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Farina

Conseillers :

Mme Aublin-Michel, Bertoux

Avocats :

Mes Scolan, Deschamps, Rogowski, Duval, Tany

T. com. Rouen, du 16 mai 2014

16 mai 2014

EXPOSE DU LITIGE

Le 14 juin 2006 la société Fiventis, dénommée au contrat le franchiseur, a conclu avec :

- 1) " La société anonyme simplifiée en cours de constitution (dénommée le franchisé) fondée par M. Petit, M. Vaccaro, Mme Sebert, et M. Ohannessian, ces quatre associés ayant constitué pour le franchiseur un élément essentiel pour consentir le contrat qui doit être considéré comme intuitu personae à chacun d'eux,

- 2) La ou les sociétés constituées par le franchisé, SARL en cours de constitution dont le capital est détenu par les quatre associés susvisés, dénommée le franchisé et sa filiale ", un contrat intitulé " Contrat de franchise Fiventis ".

Par ce contrat la société Fiventis, franchiseur a conféré au franchisé, le droit d'exploiter le concept et la marque Fiventis, lesquels se définissent comme " un ensemble de savoir-faire et de prestations de nature à optimiser, à travers des outils conçus par le franchiseur, le conseil et la commercialisation sous mandat, à la fois de biens et produits immobiliers, d'assurances de personnes et financiers ".

Sont intervenus au contrat aux côtés du franchiseur :

- la société : Finaxiome (ci-après dénommée Seven)

- la société Techmobis,

- la société Fiventis Invest,

Et en qualité de titulaires des droits de propriété intellectuelle concédés au franchisé :

- M. Doliger (gérant de la société Seven) et M. Reghem ;

Le 27 septembre 2009 M. Petit, M. Vaccaro, Mme Sebert, (sans la participation de M. Ohannessian) M. Feldmann et la société Cipredia ont constitué la SARL Finares Patrimoine en indiquant dans les statuts (déposés le 16 octobre 2006) que celle-ci se substituait à eux comme partie au contrat de franchise, l'immatriculation au registre du commerce et des sociétés emportant reprise des engagements par la société.

La société Finares Patrimoine a réglé un droit d'entrée de 30 000 euro hors taxes.

Alors que le contrat susvisé (article 1.2.2) imposait au franchisé d'adhérer à une organisation professionnelle représentative, la société Finares Patrimoine qui avait entrepris des démarches en ce sens s'est vue opposer un refus des institutions représentatives de la profession (conseil en gestion de patrimoine indépendant CGPI, ou de conseil en investissements financiers CIF), et ce en raison essentiellement de l'absence d'indépendance de la société Finares Patrimoine par rapport au franchiseur.

Reprochant au franchiseur de l'avoir trompée par de fausses affirmations la société Finares Patrimoine a demandé en référé (suivant en cela la procédure prévue en cas de litige par le contrat de franchise (article 10)) la désignation d'un conciliateur, chargé de proposer des analyses juridiques aux questions posées et de tenter de concilier les parties à partir de ces analyses.

Le professeur Courbe, désigné le 21 août 2007 en qualité de conciliateur a tenté en vain de concilier les parties et, conformément aux dispositions contractuelles, leur a notifié une décision de conciliation en date du 19 février 2008 reprenant ses analyses juridiques.

Par décision de référé du 30 novembre 2009 confirmée en appel, la société Fiventis, les sociétés intervenues au contrat de franchise ainsi que M. Doliger et M. Reghem étaient condamnés à payer à la société Finares Patrimoine une provision de 35 880 euro TTC en restitution du droit d'entrée.

Le 21 juillet 2010 la société Finares Patrimoine, M. Petit, Mme Sebert, M. Ohannessian et M. Vaccaro ont fait assigner, devant le Tribunal de commerce de Rouen, en indemnisation de préjudice, sur le fondement contractuel et subsidiairement sur le fondement de la responsabilité délictuelle, les autres signataires du contrat de franchise.

Parallèlement à l'instance ainsi engagée devant la juridiction commerciale, d'autres procédures ont été introduites :

- le 27 septembre 2009 M. Petit, Mme Sebert M. Ohannessian et M. Vaccaro ont chacun agi séparément contre la société Fiventis, devant le Conseil de prud'hommes de Paris, en vue notamment de faire requalifier en contrat de travail le contrat de franchise,

- la société Fiventis (poursuivie en responsabilité par un autre franchisé en vertu d'un autre contrat), a agi en garantie et responsabilité devant le Tribunal de grande instance de Paris contre l'avocat rédacteur du contrat de franchise, étant observé que la société Finares Patrimoine M. Petit, Mme Sebert, M. Ohannessian et M. Vaccaro sont intervenus volontairement à cette instance.

- S'agissant de l'instance prud'homale : le conseil des prud'hommes par jugements distincts du 11 mai 2012 a :

- requalifié pour M. Petit, Mme Sebert, M. Ohannessian et M. Vaccaro le contrat de franchise en contrat de travail.

- alloué aux demandeurs diverses sommes au titre notamment des frais de formation, et du préavis.

Ces jugements ont fait l'objet d'un appel limité aux dispositions relatives au montant des indemnités.

La procédure d'appel est en cours,

- S'agissant de l'action en responsabilité :

- par jugement du 18 décembre 2014 le rédacteur du contrat de franchise et son assureur ont été condamnés à verser à la procédure collective de la société Fiventis des dommages-intérêts en indemnisation du préjudice résultant de condamnations prononcées contre la société Fiventis à la demande d'un autre franchisé,

- M. Petit, Mme Sebert, M. Vaccaro et M. Ohannessian ainsi que la société Finares Patrimoine ont été déclarés irrecevables en leur intervention volontaire, faute de justifier d'un intérêt actuel à agir et de démontrer " l'existence de préjudices certains et directs, distincts de ceux dont l'indemnisation est poursuivie dans le cadre de l'instance devant le Tribunal de commerce de Rouen et devant la Cour d'appel de Paris ",

Le jugement du 18 décembre 2014 a été frappé d'appel.

S'agissant de l'instance engagée devant le tribunal de commerce : après une décision du 11 février 2011 qui a rejeté les exceptions de litispendance et de connexité le tribunal, par jugement du 16 mai 2014, a principalement :

- déclaré, par application de l'article 10.1.7 du contrat de franchise irrecevables les demandeurs, pour défaut d'intérêt à agir,

- condamné les demandeurs à payer aux défendeurs une indemnité pour frais hors dépens,

- rejeté la demande reconventionnelle en paiement formée par M. Doliger et la société Seven.

La société Finares Patrimoine, M. Petit, Mme Sebert, M. Ohannessian et M. Vaccaro, ont interjeté appel de ce jugement dont ils poursuivent l'infirmation.

Par conclusions du 1er avril 2015 ils demandent à la cour sur le fondement notamment des articles 1134, 1147, 1184, 1131, et 1382 du Code civil de :

- à titre liminaire :

- les déclarer recevables en leurs demandes,

- dire qu'à défaut de contestation de la décision du conciliateur dans le délai d'un mois imparti par l'article 10. 1. 7 du contrat, les intimés sont irrecevables en leurs demandes et moyens de défense pour défaut du droit d'agir,

- à titre principal,

- débouter la société Fiventis et M. Reghem de leurs fins de non-recevoir et exceptions,

- dire bien-fondés les demandes de la société Finares Patrimoine, M. Petit Mme Sebert M. Ohannessian et M. Vaccaro,

- homologuer la décision de conciliation du 19 février 2008,

- dire que le contrat de franchise est dépourvu de cause ou que les obligations souscrites reposaient sur une fausse cause,

- annuler en conséquence le contrat de franchise à compter du 14 juin 2006,

- subsidiairement

- prononcer la résolution du contrat de franchise pour manquement du franchiseur à son obligation de transmission de savoir-faire et d'obtention par le franchisé des statuts réglementés de conseil en gestion de patrimoine indépendant ou de conseil en investissements financiers,

- débouter la société Fiventis, la société Seven, Me Pascual ès qualités de mandataire judiciaire de la société Fiventis, M. Lafarge ès qualités de mandataire judiciaire de la société Seven, la société Fiventis Invest ainsi que M. Reghem et M. Doliger de leurs demandes,

- condamner in solidum la société Fiventis Invest ainsi que M. Doliger et M. Reghem à régler à la société Finares Patrimoine la somme de 1 139 296 euro à titre de dommages-intérêts,

- dire que l'absence de cause du contrat de franchise et sa résolution judiciaire ont causé un préjudice personnel à M. Petit, Mme Sebert, M. Ohannessian et M. Vaccaro,

- en conséquence,

- condamner in solidum la société Fiventis Invest M. Doliger et M. Reghem à payer à M. Petit, Mme Sebert, M. Ohannessian et M. Vaccaro la somme de 38 396 euro à titre de dommages-intérêts,

- constater que la société Finares Patrimoine, M. Petit, Mme Sebert, M. Ohannessian et M. Vaccaro sont créanciers des procédures de redressement judiciaire de la société Fiventis et de liquidation judiciaire de la société Seven au titre de dommages-intérêts pour les sommes de :

- la société Finares Patrimoine : 1 139 296 euro,

- associés : 38 396 euro.

- condamner in solidum les mêmes ainsi que Me Pascual ès qualités, et M. Lafarge ès qualités aux dépens et au paiement à chacun des appelants de la somme de 5 000 euro sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

- plus subsidiairement,

- dire recevable bien-fondé les demandes de la société Finares Patrimoine ainsi que de M. Petit, Mme Sebert, M. Ohannessian et M. Vaccaro,

- homologuer la décision de conciliation du 19 février 2008,

- constater la caducité du contrat de franchise à la date du 14 mars 2007

- subsidiairement

- dire que la société Fiventis et ses garants ont commis des fautes en stipulant dans un contrat de franchise une condition suspensive dont la réalisation était par nature incertaine et dans les faits impossible,

- condamner in solidum la société Fiventis Invest M. Doliger et M. Reghem à payer à la société Finares Patrimoine une indemnité de 1 139 196 euro à titre de dommages-intérêts,

- dire que les fautes de la société Fiventis et de ses garants ont causé un préjudice à M. Petit, Mme Sebert, M. Ohannessian et M. Vaccaro,

- condamner in solidum la société Fiventis Invest ainsi que M. Doliger et M. Reghem à régler à M. Petit, Mme Sebert, M. Ohannessian et M. Vaccaro la somme de 38 396 euro de dommages-intérêts,

- constater que la société Finares Patrimoine M. Petit, Mme Sebert, M. Ohannessian et M. Vaccaro sont créanciers des sociétés Fiventis et Seven à titre de dommages-intérêts pour les montants suivants :

- la société Finares Patrimoine : 1 130 196 euro,

- associés : 38 396 euro,

- débouter la société Fiventis, la société Seven Me Pascual ès qualités, M. Lafarge ès qualités, la société Fiventis Invest ainsi que M. Doliger et M. Reghem de leurs demandes,

- condamner in solidum les mêmes ainsi que Me Pascual ès qualités et M. Lafarge ès qualités aux dépens et à payer à chacun d'eux la somme de 5 000 euro sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

Par conclusions du 3 février 2015 la société Fiventis, la société Fiventis Invest et M. Reghem demandent à la cour de :

- déclarer irrecevable faute de droit à agir, la société Finares Patrimoine, en l'absence de reprise des engagements pris par les associés envers le franchiseur.

- à titre subsidiaire,

- au visa des articles 31 et 122 du Code de procédure civile ainsi que des jugements rendus le 11 mai 2012 par le Conseil des prud'hommes de Paris requalifiant le contrat de franchise en contrat de travail :

- déclarer irrecevables les demandes formées par la société Finares Patrimoine et M. Petit, Mme Sebert, M. Ohannessian et M. Vaccaro pour défaut d'intérêt à agir,

- à titre subsidiaire,

- Vu le délai de forclusion prévu par l'article 10.1.7 du contrat de franchise, déclarer irrecevables les demandes formées par la société Finares Patrimoine M. Petit, Mme Sebert, M. Ohannessian et M. Vaccaro,

- à titre subsidiaire,

- Vu l'article 561 du Code de procédure civile,

- déclarer irrecevable la demande nouvelle d'homologation de la décision de conciliation formée par la société Finares Patrimoine M. Petit, Mme Sebert, M. Ohannessian et M. Vaccaro,

- à titre subsidiaire,

- Vu l'article 100 du Code de procédure civile,

- prononcer le dessaisissement de la Cour d'appel de Rouen au profit de la Cour d'appel de Paris (chambre sociale),

- à titre subsidiaire,

- Vu l'article 378 du Code de procédure civile,

- prononcer le sursis à statuer dans l'attente de l'arrêt de la chambre sociale de la Cour d'appel de Paris,

- en tout état de cause,

- Vu les articles 14,15, et 16 du Code de procédure civile,

- déclarer recevable les moyens de défense exposée par M. Reghem la société Fiventis et la société Fiventis Invest,

- au fond,

- au visa des articles 1131 et 1135 du Code civil,

- condamner au titre de la répétition de l'indu la société Finares Patrimoine à payer à la société Fiventis la somme de 35'180 euro représentant le droit forfaitaire d'entrée.

- à titre subsidiaire,

- prononcer la caducité du contrat de franchise avec prise d'effet au 14 mars 2007,

- débouter la société Finares Patrimoine, M. Petit, Mme Sebert, M. Ohannessian et M. Vaccaro de leurs demandes,

- en tout état de cause,

- condamner in solidum en application de l'article 700 du Code de procédure civile au profit de M. Reghem et de la société Fiventis, la société Finares Patrimoine M. Petit, Mme Sebert, M. Ohannessian et M. Vaccaro aux dépens et au paiement d'une indemnité de 5 000 euro chacun,

Par conclusions du 18 février 2015 M. Lafarge ès qualités et M. Doliger demandent à la cour de :

- confirmer le jugement déféré en ce qu'il a déclaré les demandes irrecevables,

- subsidiairement,

- constater que la société Finares Patrimoine n'a pas valablement repris les droits du franchisé dans le contrat de franchise,

- déclarer la société Finares Patrimoine M. Petit, Mme Sebert, M. Ohannessian et M. Vaccaro non fondés en leurs demandes,

- en conséquence rejeter celles-ci,

- plus subsidiairement,

- prononcer la caducité du contrat de franchise avec prise d'effet aux 14 mars 2007 et déclarer la société Finares Patrimoine M. Petit, Mme Sebert, M. Ohannessian et M. Vaccaro infondés à solliciter que M. Doliger et la société Seven en leur demande de garantie des engagements de la société en leurs demandes,

- en conséquence débouter la société Finares Patrimoine M. Petit, Mme Sebert, M. Ohannessian et M. Vaccaro de leurs demandes.

- en tout état de cause,

- mettre hors de cause le commissaire à l'exécution du plan de redressement judiciaire de la société Seven dont la mission a cessé,

- confirmer les dispositions du jugement déféré relativement aux frais hors dépens,

- y ajoutant,

- condamner solidairement la société Finares Patrimoine M. Petit, Mme Sebert, M. Ohannessian et M. Vaccaro aux dépens et à payer à chacun (de la société Seven et M. Doliger) la somme de 60 000 euro à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive ainsi que celle de 20 000 euro sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

Pour un exposé plus ample des faits, de la procédure, des prétentions et des moyens des parties, la cour se réfère aux décisions de justice susvisées et aux dernières conclusions des parties.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 24 avril 2015.

Cela étant exposé

I) Sur la teneur de la décision du conciliateur et sur le fondement des demandes des appelants

Attendu que selon l'article 10 du contrat de franchise : " le conciliateur rendra une décision de conciliation en droit " ;

Que dans sa décision le conciliateur retient les solutions suivantes :

- 1) le contrat peut être considéré comme devenu caduc le 14 mars 2007 à la suite de la non-réalisation d'une de ses conditions substantielles, savoir l'impossibilité d'obtenir le statut de Conseil en Gestion de Patrimoine (CGIP) ou Conseil en investissements financiers (CIF), ce qui rend impossible l'exécution du contrat,

- 2) à titre subsidiaire, l'absence de remise du manuel d'instruction, notamment, permet à la société Finares Patrimoine de contester la transmission du savoir-faire promis, en sorte que la nullité du contrat de franchise pour absence de cause doit être partiellement accueillie, ce qui entraîne non pas l'annulation de l'obligation mais " sa réduction à la mesure de la fraction subsistante " ;

Attendu qu'au visa de la décision du conciliateur dont ils sollicitent l'homologation les appelants demandent :

- à titre principal, sur le fondement des dispositions du contrat de franchise et de la responsabilité contractuelle, l'annulation ou la résolution du contrat et à titre infiniment subsidiaire, voir constater la caducité du contrat et la condamnation de la société Fiventis à réparer les préjudices subis par la société Finares, laquelle aurait pu se développer si le franchiseur lui avait fourni un véritablement savoir-faire et un contrat de franchise lui ayant permis de remplir les deux conditions essentielles, à savoir l'obtention du statut de CGPI et l'adhésion à une organisation professionnelle représentative.

- et à titre subsidiaire, sur le fondement quasi délictuel, la condamnation de la société Finares et de ses garants autres intimés, à réparer les préjudices que ceux-ci leur ont causé à raison de la faute délictuelle commise par ceux-ci puisque le contrat est dès lors réputé ne s'être jamais formé ;

II) Sur les exceptions d'incompétence et les moyens d'irrecevabilité

Attendu que les intimés soulèvent les exceptions d'incompétence, fin de non-recevoir, et autres exceptions suivantes :

- exceptions de litispendance et de connexité en raison de liens existant selon eux entre la présente instance et l'instance prud'homale en cours,

- sursis à statuer dans l'attente de l'issue de l'instance prud'homale en cours devant la chambre sociale de la Cour d'appel de Paris ;

- fins de non-recevoir pour défaut de droit d'agir en raison, selon eux de la forclusion, défaut de qualité et défaut d'intérêt, ainsi que pour impossibilité d'introduire devant des juridictions différentes des instances contradictoires entre elles,

- irrecevabilité de la demande d'homologation de la décision de conciliation considérée comme nouvelle en appel.

a) Sur les exceptions d'incompétence

Attendu que la société Fiventis, la société Fiventis Investi, et M. Reghem font valoir que le litige actuellement en cours devant la chambre sociale de la Cour d'appel de Paris et la présente instance concernent les mêmes parties et portent sur le même objet à savoir l'indemnisation de préjudices ;

Qu'invoquant en conséquence la litispendance entre ces deux instances et subsidiairement l'existence d'un lien de connexité, ils considèrent que la présente juridiction doit se dessaisir au profit de la Cour d'appel de Paris, saisie du litige prud'homal ;

Mais attendu que sans être contredits sur ce point les intimés font valoir que, devant la chambre sociale de la Cour d'appel de Paris, l'appel est limité à la question des indemnités allouées par le conseil des prud'hommes, la requalification du contrat de franchise en contrat de travail n'étant pas remise en cause ;

Que la société Fiventis justifie ces affirmations en produisant aux débats, les dernières conclusions déposées dans le cadre de l'instance prud'homale ;

Attendu que l'objet de l'instance prud'homale diffère de celui de la présente instance ;

Que les instances prud'homales pendantes devant la Cour d'appel de Paris portent exclusivement sur les demandes en paiement d'indemnités liées à la rupture d'un contrat de travail ;

Que dans le cadre de l'instance engagée devant la présente cour, les appelants agissent en indemnisation de préjudice, à titre principal sur le fondement des dispositions du contrat de franchise et, subsidiairement, sur le terrain quasi délictuel ;

Attendu par ailleurs qu'il n'y a pas identité de parties entre les différentes instances concernées dès lors que certaines des parties à la présente instance (la société Finares Patrimoine, la société Fiventis Invest, M. Reghem, M. Doliger, et la société Seven) ne figurent pas dans les instances prud'homales lesquelles opposent à la société Fiventis, chacun de ses cocontractants, personnes physiques ;

Attendu qu'en l'absence d'identité d'objet et de parties l'exception de litispendance prévue par l'article 100 du Code de procédure civile n'est pas fondée;

Que par ailleurs les éléments qui précèdent n'établissent pas l'existence d'un lien de connexité suffisant entre les deux affaires qui conduiraient à les faire instruire et juger ensemble au sens de l'article 101 du Code de procédure civile ;

Que les exceptions d'incompétence soulevées par les intimés ne sont donc pas fondées ;

b) Sur la demande de sursis à statuer

Attendu que les demandes formées respectivement devant la juridiction prud'homale et la présente juridiction ne présentent pas de lien tel qu'il soit nécessaire d'ordonner le sursis à statuer sollicité ; que ce chef de demande n'est donc pas fondé ;

c) Sur les fins de non-recevoir

- Sur la fin de non-recevoir tirée de l'expiration du délai pour agir

Attendu qu'aux termes de l'article 122 du Code de procédure civile constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande sans examen au fond pour défaut de droit d'agir tel notamment, le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription le délai préfix ;

Attendu, en l'espèce, M. Lafarge ès qualités et M. Doliger demandent à la cour de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a déclaré la société Finares Patrimoine, M. Petit, Mme Sebert, M. Ohannessian, et M. Vaccaro irrecevables en leurs demandes pour défaut du droit d'agir faute d'avoir saisi la juridiction commerciale dans le délai d'un mois prévu par l'article 10.1.7 du contrat du 14 juin 2006 ;

Qu'ils font valoir également que, pour leur part, ils sont recevables à invoquer à titre de moyens de défense, même après expiration du délai contractuel, des moyens concernant la décision de conciliation ;

Attendu que, de leur côté, les appelants font valoir que :

- leur saisine du tribunal de commerce en date du 21 juillet 2010 tendait exclusivement à l'homologation la décision du conciliateur et non à contester même partiellement cette décision ;

- les parties et leurs conseils avaient convenu que la décision de conciliation ne devait comporter aucun chiffrage mais seulement des analyses juridiques ;

- le conciliateur précise ainsi que l'article 10 du contrat ne lui impose pas de chiffrer les conséquences de ces analyses juridiques ;

- leur demande d'homologation " partielle " de la décision du conciliateur ne pouvait être qualifiée de " contestation dont le tribunal aurait été saisi hors délai ", puisque le dispositif de l'assignation demandait à la juridiction de retenir les analyses juridiques du conciliateur mais présentait en outre des demandes d'indemnisation du préjudice subi, ce qui explique l'emploi du mot " partiel " dans le dispositif ;

Attendu qu'ils concluent à l'irrecevabilité des demandes et moyens de défense des intimés, faute de contestation de la décision du conciliateur dans le délai d'un mois imparti par l'article 10.1.7 du contrat du 15 juin 2006 ;

Attendu qu'aux termes de l'article 10.1.7 du contrat du 4 février 2006 " la décision de conciliation sera notifiée en lettre recommandée avec avis de réception par le conciliateur à chacune des parties et celui qui entend la contester dispose d'un délai d'un mois à compter de la réception de la lettre recommandée avec avis de réception de notification pour déposer une requête introductive d'instance devant le tribunal compétent de Rouen comme il est dit à l'article 11.2 " ;

Attendu que les parties s'accordent pour attribuer à ces dispositions un caractère impératif ;

Que des termes employés par celles-ci il ressort que le délai qu'elles prévoient ne s'applique qu'à celui qui entend contester la décision de conciliation et non à celui qui sollicite l'homologation ;

Attendu que la décision de conciliation a été rendue le 19 février 2008 ; qu'elle a été régulièrement notifiée aux parties par le conciliateur ; qu'aucune instance n'a été engagée dans le délai prévu par l'article 10.1.7 susvisé ; que le Tribunal de commerce de Rouen a été saisi par assignations du 21 juin 2010 délivrées à la demande de la société Finares Patrimoine, M. Petit, Mme Sebert, M. Ohannessian, et M. Vaccaro ;

Attendu qu'aux termes du dispositif de ces assignations les demandeurs demandaient au tribunal d' " homologuer partiellement l'avis de Monsieur le professeur Courbe du 19 février 2008 ";

Qu'une telle demande n'est pas enfermée dans le délai contractuel d'un mois susvisé, dès lors que dans son principe elle tend à l'homologation de la décision de conciliation ;

Que la question de la détermination de la teneur des analyses juridiques du conciliateur et donc de l'étendue de l'homologation relève du fond du droit, et l'existence d'une discussion sur ces points ne peuvent avoir pour effet d'entraîner l'irrecevabilité de la demande d'homologation ;

Attendu en conséquence que dans la mesure seulement de leurs demandes qui ne remettent pas en cause les analyses juridiques du conciliateur, les demandes des appelants ne peuvent être considérées comme tardives ;

Que la fin de non-recevoir invoquée par M. Lafarge ès qualités et M. Doliger n'est donc pas fondée ;

Attendu que le fait pour les intimés de ne pas avoir engagé d'instance judiciaire dans le délai contractuel ne les prive pas du droit de faire valoir leurs moyens de défense dans le cadre de l'instance engagée par les assignations susvisées ;

Que la fin de non-recevoir invoquée par les appelants n'est donc pas fondée ;

- Sur la fin de non-recevoir tirée du défaut de droit à agir

Attendu que selon les dispositions de l'article 32 du Code de procédure civile " est irrecevable toute prétention émise par ou contre une personne dépourvue du droit d'agir " ;

Attendu que la société Fiventis, la société Fiventis Investi et M. Reghem font valoir que :

- M. Petit, Mme Sebert, M. Ohannessian, et M. Vaccaro ne peuvent plus invoquer dans le cadre de la présente instance un contrat de franchise alors qu'ils ont sollicité et obtenu la requalification de celui-ci en contrat de travail ;

- la décision du 11 mai 2012 par laquelle le Conseil des prud'hommes de Paris a requalifié en contrat de travail le contrat de franchise est définitive quant à cette requalification,

- en conséquence les appelants n'ont pas d'intérêt à agir devant le tribunal de commerce,

- étant unique le contrat conclu le 15 juin 2006 ne peut plus désormais être qualifié de contrat de franchise par les appelants ;

- pour la même raison la société Finares Patrimoine n'a aucun intérêt à agir car le contrat litigieux, qui constitue un acte unique ne peut être opposé que par les consorts Petit, Sebert, Ohenessian, et Vacarro et ce devant une juridiction prud'homale,

- par ailleurs, au regard des dispositions de l'article 210-6 du Code de commerce, la société Finares Patrimoine est irrecevable à agir, car elle n'a pas valablement repris les engagements des associés,

- le rapprochement des énonciations du contrat de franchise et des statuts de la SARL Finares Patrimoine montre que celle-ci ne correspond pas à la SAS mentionnée dans le contrat et que la répartition du capital social de chacune de ces deux sociétés est différente ;

Attendu que les appelants font valoir en réponse que :

- bien que le conseil des prud'hommes ait requalifié le contrat de franchise en contrat de travail, les préjudices subis par la société Finares Patrimoine et ses associés n'ont pas été réparés,

- c'est pourquoi, afin d'indemniser le préjudice subi du fait des irrégularités du contrat de franchise, la société Finares Patrimoine et ses associés ont agi devant le Tribunal de commerce de Rouen ;

- la procédure prud'homale et la procédure commerciale n'ont rien de contradictoire entre elles ;

- en effet la procédure prud'homale a fait reconnaître que le contrat de franchise n'en est pas un, tandis que la procédure commerciale vise quant elle à réparer le préjudice causé par le contrat de franchise, étant précisé que c'est parce qu'il était mal rédigé que le contrat a été requalifié en contrat de travail, la requalification étant entièrement due au franchiseur ainsi qu'au rédacteur de l'acte ;

- les statuts de la société Finares Patrimoine comportent les mentions nécessaires en vue de la reprise des engagements contractés par les associés envers la société Fiventis ;

Attendu que les moyens susvisés ne constituent pas des fins de non-recevoir mais des moyens touchant au fond du droit ; que la recevabilité de l'action de la société Finares Patrimoine et des autres appelants s'apprécie indépendamment de l'examen des questions de fond ainsi posées ; que la société Finares Patrimoine et M. Petit M. Vaccaro, M. Ohannessian et Mme Sebert sont recevables à agir en réparation de préjudice à titre principal sur le fondement du contrat du 14 juin 2006 et à titre subsidiaire sur le fondement quasi-délictuel ;

Que les exceptions d'irrecevabilité formées par les intimés ne peuvent donc pas être retenues ;

Attendu qu'invoquant en outre le principe de la concentration des moyens, les intimés font valoir que, s'agissant du même litige, les appelants auraient dû présenter toutes leurs demandes et moyens devant la même juridiction et que faute de l'avoir fait ils sont privés du droit d'agir devant la présente juridiction ;

Mais attendu que même si elles concernent le même litige, les demandes formées devant la juridiction prud'homale sont différentes, dans leur fondement, des demandes formées devant la juridiction consulaire ; qu'en conséquence le fait pour les appelants d'avoir saisi dans ces conditions deux juridictions distinctes ne saurait entrainer l'irrecevabilité de la présente action ;

Sur l'exception d'irrecevabilité de la demande d'homologation de la décision de conciliation

Attendu que la demande " d'homologation " de la décision de conciliation formée devant la cour ne constitue pas une demande nouvelle au sens de l'article 564 du Code de procédure civile dès lors qu'elle tend aux mêmes fins que la demande " d'homologation partielle " de cette décision soumise au premier juge ;

II) Sur le fond

a) Sur l'action fondée sur le contrat du 14 juin 2006

Attendu que les intimés font valoir que :

- par jugements du 11 mai 2012 le Conseil des prud'hommes de Paris statuant dans les instances engagées séparément par M. Petit, Mme Sebert, M. Ohannessian, et M. Vaccaro, contre la société Fiventis, a requalifié pour chacun de ces demandeurs en contrat de travail le contrat de franchise ;

- les associés n'ont pu transmettre leur contrat de travail à la société Finares Patrimoine, laquelle ne peut en conséquence être considérée comme partie à ces contrats ;

Qu'ils en concluent que les appelants ne peuvent agir devant la présente juridiction sur le fondement du contrat de franchise ;

Attendu que dans sa décision du 19 février 2008 le conciliateur ne s'est pas expressément prononcé sur la question de la requalification du contrat, relevant seulement que dans leurs explications les demandeurs avaient relevé essentiellement à tort des points communs avec le contrat d'agence commerciale et qu'il n'était pas en mesure faute d'exécution du contrat, d'analyser les relations contractuelles des parties et de trancher entre contrat de travail et contrat de franchise ;

Attendu qu'il s'en déduit qu'aucune contestation ou demande d'homologation de la décision du conciliateur ne peut être utilement formée sur la question la qualification du contrat ; qu'il convient de relever qu'aucune des parties n'invoque sur ce point la décision du 19 février 2008 ;

Attendu que des conclusions respectives des parties déposées dans le cadre de la présente instance, il résulte que les appels interjetés contre les jugements du 11 mai 2012 sont limités à la question de l'indemnisation du préjudice, les parties ne remettant pas en cause devant la Cour d'appel de Paris la requalification du contrat de franchise en contrat de travail ;

Attendu que selon le dispositif de leurs dernières conclusions les appelants demandent à la cour de :

- d'annuler le contrat de franchise pour défaut de cause,

- subsidiairement d'en prononcer la résolution,

- et plus subsidiairement d'en constater la caducité ;

Attendu que compte tenu des dispositions non contestées des jugements prud'homaux susvisés relatifs à la qualification des relations contractuelles, le contrat du 14 juin 2006 constitue dans les relations entre la société Fiventis d'une part et chacun de M. Petit, Mme Sebert, M. Ohannessian, et M. Vaccaro, d'autre part un contrat de travail ;

Attendu qu'une telle qualification n'est pas compatible avec celle d'un contrat de franchise, la convention considérée ne pouvant être considérée comme étant à la fois un contrat de travail et un contrat de franchise ; que selon les dispositions de l'article 7. 1. 3 de la convention du 14 juin 2006 " le présent contrat est conclu intuitu personae entre les personnes visées dans la désignation du franchisé " soit M. Petit, M. Vaccaro, Mme Sebert et M. Ohannessian ;

Que la qualification de contrat de travail s'impose désormais à M. Petit, Mme Sebert, M. Ohannessian et M. Vaccaro, qui par voie de conséquence ne sont pas fondés à agir à l'encontre de la société Fiventis, prise en qualité de franchiseur, en vue d'obtenir, sur le fondement des dispositions du contrat du 14 juin 2006, l'annulation ou la résolution d'un contrat de franchise, ou de faire constater la caducité de celui-ci ;

Que M. Petit, Mme Sebert, M. Ohannessian et M. Vaccaro ne sont donc pas fondés à invoquer, devant la présente juridiction, au soutien de leur action, le contrat du 14 juin 2006 ;

Attendu que concernant la société Finares Patrimoine, que selon les termes des dispositions de la convention du 14 juin 2006, M. Petit, Mme Sebert, M. Ohannessian et M. Vaccaro, ont déclaré agir " pour eux-mêmes et pour les sociétés en cours de constitution pour assurer l'activité de franchise dans le contrat " ;

Que selon les dispositions des statuts de la société Finares Patrimoine déposés le 16 octobre 2006, les associés ont déclaré que celle-ci se substituait à eux comme partie au contrat de franchise, l'immatriculation au registre du commerce et des sociétés emportant reprise des engagements par la société.

Que M. Petit, Mme Sebert, M. Ohannessian et M. Vaccaro font valoir qu'ils se sont substitués, la société Finares Patrimoine dans l'exécution de la totalité des obligations qu'ils avaient contractées ;

Attendu que la convention du 14 juin 2006 sert de fondement à l'action, engagée sur le fondement contractuel, à titre principal par la société Finares Patrimoine ; qu'elle constitue pour chacun de M. Petit, Mme Sebert, M. Ohannessian et M. Vaccaro, un contrat de travail ; qu'elle n'a pu, en raison de cette qualification, faire l'objet d'une reprise par la société Finares Patrimoine ;

Que la société Finares Patrimoine qui ne justifie pas de la qualité de partie au contrat du 14 juin 2006 n'est pas fondée à invoquer au soutient de son action les dispositions de ce contrat ;

Attendu que compte tenu de ce qui précède les demandes des appelants formées sur le terrain contractuel seront déclarées mal fondées ;

b) Sur les demandes d'indemnisation formées sur le terrain de la responsabilité quasi-délictuelle

Attendu que les développements qui précédent font ressortir que :

- le contrat du 14 juin 2006 constitue pour M. Petit, M. Vaccaro, M. Ohannessian et Mme Sebert, un contrat de travail,

- en raison de cette qualification la société Finares Patrimoine, ne peut être considérée comme partie au contrat ;

Attendu que sur le fondement quasi-délictuel les appelants demandent à la cour de :

- dire que la société Fiventis et ses garants ont commis des fautes en stipulant dans un contrat de franchise une condition suspensive dont la réalisation était par nature incertaine et dans les faits impossible,

- condamner in solidum la société Fiventis Invest M. Doliger et M. Reghem à payer à la société Finares Patrimoine une indemnité de 1 139 196 euro à titre de dommages-intérêts,

- dire que les fautes de la société Fiventis et de ses garants ont causé un préjudice à M. Petit, Mme Sebert, M. Ohannessian et M. Vaccaro,

- condamner in solidum la société Fiventis Invest ainsi que M. Doliger et M. Reghem à régler à M. Petit, Mme Sebert, M. Ohannessian et M. Vaccaro la somme de 38 396 euro de dommages-intérêts ;

- constater que la société Finares Patrimoine M. Petit, Mme Sebert, M. Ohannessian et M. Vaccaro sont créanciers des sociétés Fiventis et Seven à titre de dommages-intérêts pour les montants suivants :

- la société Finares Patrimoine : 1 130 196 euro,

- associés : 38 396 euro,

Attendu qu'il a été retenu ci-dessus que M. Petit, Mme Sebert, M. Ohannessian et M. Vaccaro, titulaires d'un contrat de travail, ne sont pas fondés à agir sur le fondement du contrat du 14 juin 2006 en responsabilité contractuelle devant le juge commercial ;

Qu'en application du principe du non-cumul des responsabilités contractuelle et quasi-délictuelle M. Petit, Mme Sebert, M. Ohannessian et M. Vaccaro qui ont engagé devant la juridiction prud'homale une action contractuelle contre la société Fiventis ne sont pas fondés à agir contre elle dans le cadre de la présente instance sur le fondement quasi-délictuel ;

Attendu qu'il a été retenu ci-dessus que la société Finares Patrimoine n'est pas partie au contrat du 14 juin 2006, celui-ci dont elle n'a pas acquis le bénéfice, étant qualifié de contrat de travail et n'ayant pu pour cette raison lui être transmis ;

Attendu que la victime d'une faute commise à l'occasion de la formation ou de l'exécution d'un contrat auquel elle n'est pas partie est néanmoins en droit de solliciter sur le fondement de l'article 1382 du Code civil l'indemnisation du préjudice que cette faute lui a occasionné ;

Que la société Finares Patrimoine, tiers au contrat du 14 juin 2006 peut agir en responsabilité pour faute quasi-délictuelle contre la société Fiventis ;

Qu'elle fait valoir que la société Fiventis et le rédacteur du contrat ont commis une faute consistant à prévoir une condition impossible à réaliser dès lors que le lien de dépendance défini dans ce contrat empêche toute adhésion auprès d'un organisme représentatif ;

Attendu que selon l'article 1. 2. 2 du contrat de franchise " le franchisé a été dûment informé qu'en exerçant l'activité de CGPI (ou à terme de CIF), il lui appartient comme conditions substantielles des présentes d'adhérer à une organisation professionnelle représentative, le franchisé devra justifier de cette adhésion au plus tard le 31 décembre de la deuxième année civil suivant la signature du présent contrat " ;

Attendu qu'il n'est pas contesté que la société Finares Patrimoine ayant entrepris des démarches nécessaires afin de bénéficier de l'un des statuts susvisés, CGPI ou à terme CIF, s'est heurtée au refus des institutions représentatives de la profession, qui lui ont opposé l'existence du lien de subordination entre franchisé et franchiseur qui, résultant des stipulations contractuelles, exclut le droit d'accéder à ces statuts ;

Que la non-réalisation de cette condition a empêché l'exécution du contrat de franchise ;

Que la prévision dans le contrat de franchise de stipulations organisant un lien de subordination entre franchiseur et franchisé et faisant ainsi obstacle à la réalisation d'une condition essentielle à l'exécution du contrat constitue une faute ;

Attendu sur le lien de causalité entre cette faute et le dommage allégué, qu'en rendant impossible l'adhésion à une organisation représentative cette faute a fait perdre à la société Finares Patrimoine la chance de pouvoir bénéficier du réseau de franchise et de développer une activité en ce domaine ;

Que la preuve d'un lien de causalité direct et certain entre la faute et le dommage est donc rapportée ;

Attendu que la société Finares Patrimoine impute à la société Fiventis et aux intervenants au contrat de franchise l'entière responsabilité du dommage en résultant ; qu'elle fait valoir que c'est la société Fiventis qui a élaboré, avec son rédacteur, les dispositions contractuelles ;

Mais attendu, concernant le franchiseur et le franchisé, que la formation du contrat résulte de la rencontre des consentements et de l'accord des parties sur des stipulations de la future convention ;

Que la faute ci-dessus caractérisée porte en définitive sur la conception défectueuse d'une stipulation contractuelle librement discutée par les parties ;

Attendu néanmoins que la faute commise par la société Fiventis, professionnelle en matière des techniques de Franchise apparaît d'un niveau de gravité supérieur à celui de ses cocontractants, agissant comme franchisés ;

Attendu que la société Finares Patrimoine soutient que la société Seven, la société Fiventis Invest, M. Doliger et M. Reghem ont également commis une faute, la prévision des dispositions contractuelles susvisées ayant empêché l'exécution du contrat de franchise ;

Qu'il lui appartient de rapporter la preuve de ces affirmations ;

Attendu que le fait pour la société : Finaxiome (devenue société Seven), la société Fiventis Invest, et en qualité de titulaires des droits de propriété intellectuelle concédés au franchisé, M. Doliger et M. Reghem, d'être intervenus au contrat aux côtés du franchiseur ne constitue pas en lui-même la preuve de la faute alléguée ;

Que la société Finares Patrimoine ne précise pas quels seraient, compte tenu en particulier de la qualité en laquelle chacun de ces intimés est intervenu au contrat et des engagements qu'il y a souscrit, les éléments de nature à constituer de leur part une faute délictuelle ;

Que l'action en responsabilité délictuelle formée contre la société Seven, la société Fiventis Invest, M. Doliger et M. Reghem, n'est donc pas fondée ;

Attendu que, concernant la société Fiventis, la cour dispose des éléments suffisants pour fixer à deux tiers la part de responsabilité de cette société dans la survenance du dommage subi par la société Finares Patrimoine, l'autre partie incombant aux parties ayant conclu, en qualité de franchisés, la convention avec la société Fiventis ;

Attendu que, dans cette mesure, la société Fiventis est tenue d'indemniser sur le terrain quasi délictuel le préjudice subi ;

c) Sur le préjudice

Attendu que la société Finares Patrimoine soutient avoir subi deux séries de préjudices :

- l'un antérieur au 19 février 2008 date de la décision de conciliation, devenue définitive,

- l'autre postérieur à cette date,

Attendu qu'elle fait valoir que :

- s'agissant de la période antérieure au 19 février 2008, son préjudice est constitué des éléments suivants :

- au titre de la perte subie : perte d'exploitation d'un montant de 238 024 euro calculée sur la base de documents comptables arrêtés au 31 décembre 2007,

- au titre du gain manqué : calculé à partir des données du prévisionnel établi par l'expert-comptable de la société Fiventis en juin 2006 soit un manque à gagner d'un montant de 160 192 euro correspondant au bénéfice attendu du premier exercice, cumulé sur 4 ans soit la somme de 803 460 euro (la période de 4 ans étant retenue au titre de l'actualisation du préjudice) la rupture du contrat de franchise étant sans influence sur la réalité du préjudice subi ;

- dépense de la somme de la somme de 53 880 euro au titre du droit d'entrée et de la formation ;

- s'agissant de la période allant du 19 février 2008 au 21 juillet 2010 date de l'assignation le dommage porte sur :

- pertes d'exploitation des années 2008 et 2009 : 33 932 euro,

- frais de dissolution et de liquidation amiable prévisibles de la société : 10 000 euro,

- soit au total la somme de 43 932 euro ;

Attendu qu'en cas de perte de chance la réparation du dommage ne peut être totale ; qu'elle doit être mesurée à la chance perdue et ne peut être égale à l'avantage qu'aurait procuré cette chance si elle s'était réalisée (Civ. 1re, 16 juillet 1998) ;

Attendu que concernant les éléments du litige relatifs au préjudice le professeur Courbe note dans sa décision du 19 février 2008 :

- la somme de 45 000 euro (53 820 euro TTC) a été versée au titre du droit d'entrée comprenant en particulier la somme de 15 000 euro HT de formation initiale,

- cette formation a été dispensée au moins de façon incontestable ; par conséquent cette somme ne peut être intégralement remboursée,

- il reste la somme de 30 000 euro ; une partie correspond au droit d'accès au réseau de franchise,

- l'autre correspond à des prestations à fournir pendant la durée du contrat soit 7 ans,

- du fait de la rupture du contrat le 14 mars 2007 une partie seulement de ces prestations a été fournie ;

- la caducité du contrat de franchise n'empêche pas la société Finares Patrimoine d'exercer son activité : de fait il ressort de l'extrait K bis qu'elle a pour objet social " le conseil en gestion, en investissements patrimoniaux et financiers, en transactions immobilières en assurance de personnes et le démarchage financier pour tous les produits sélectionnés par la société Fiventis ainsi que la formation en relation avec l'activité directe ou indirecte de la société ".

- il est apparu au cours de l'audience du 20 décembre 2007 que la société Finares Patrimoine avait pris des contacts avec d'autres réseaux de sorte qu'il y a poursuite d'activité, " laquelle empêche par exemple de considérer que les fonds apportés au moment de la constitution de la société l'ont été en pure perte " ;

- les charges de fonctionnement ont été estimées 9 000 euro mensuels depuis le début de l'exploitation (cf courrier la société Finares Patrimoine adressé à la société Fiventis le 4 juin 2007) ; quant aux gains manqués, ils ont été évalués à hauteur de 12 000 euro mensuels (cf même courrier) ;

Attendu que si ces éléments établissent dans son principe l'existence d'un préjudice, la société la société Finares Patrimoine ne prouve avoir subi une perte d'exploitation sur toute la période qu'elle invoque (juin 2006 à juillet 2010) alors en particulier que le contrat de franchise ayant pris effet en juin 2006, il ne peut être sollicité pour la période antérieure à février 2008, (sous la forme d'une demande d'actualisation de préjudice) une indemnité pour préjudice commercial calculée sur une période de 4 exercices ;

Attendu qu'au vu de ce qui précède et en considération, en particulier le prévisionnel établi par la société Fiventis, des autres documents comptables fournis, des constatations du Professeur Courbe qui en elles-mêmes ne sont pas sérieusement contestées, et du remboursement par la société Fiventis des droits d'entrée, la cour dispose des éléments d'appréciation suffisants pour fixer à la somme de 300 000 euro le dommage résultant de la perte de chance subie par la société Finares Patrimoine ;

Attendu que compte tenu du pourcentage de responsabilité ci-dessus retenu à la charge de la société Fiventis, la société Finares Patrimoine est créancière d'une indemnité de 200 000 euro ;

Attendu que cette somme produira intérêts au taux légal à compter de la date de la présente décision qui en fixe le principe et le montant ;

III) Sur les autres demandes

Attendu que la demande d'indemnisation de préjudice formée par la société Finares Patrimoine étant en partie fondée la demande reconventionnelle en remboursement formée au titre du droit d'entrée; qu'elle ne peut aboutir ;

Attendu qu'en l'absence de preuve d'une faute de nature à faire dégénérer en abus le droit d'agir en justice la demande en paiement de dommages-intérêts pour procédure abusive n'est pas justifiée ;

Attendu qu'il convient de mettre hors de cause la SCP Rouvray-Declerq intimée en qualité de commissaire à l'exécution du plan de la société Seven, mais dont la mission a cessé ;

Attendu que l'équité commande :

- d'allouer à la société Finares Patrimoine une indemnité de 5 000 euro pour frais non répétibles de première instance et d'appel :

- et de rejeter les autres demandes formées sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, étant précisé que la mise en cause des intervenants au contrat du 14 juin 2006 était nécessaire pour leur rendre opposable la présente décision ;

Attendu que compte tenu de la solution donnée au litige les dépens, en application des dispositions de l'article 696 du Code de procédure civile seront mis à la charge de la société Fiventis :

Par ces motifs LA COUR, Statuant contradictoirement par décision mise à disposition au greffe, Met hors de cause la SCP Rouvroy-Declercq intimée en qualité de commissaire à l'exécution du plan de la société Seven, Infirme la décision déférée, Statuant de nouveau, Déclare la société Finares Patrimoine, M. Petit, M. Vaccaro, Mme Sebert, et M. Ohannessian recevables en leurs demandes, Déclare M. Petit M. Vaccaro Mme Sebert et M. Ohannessian mal fondés en leurs demandes, Déclare société Finares Patrimoine mal fondée en ses demandes formées sur le fondement contractuel, Déclare fondée en son principe la demande en réparation de préjudice pour faute quasi-délictuelle formée par la société Finares Patrimoine à l'égard de la société Fiventis, Fixe à 2/3 la part de responsabilité de la société Fiventis dans la perte de chance subie par la société Finares Patrimoine, Fixe à la somme de 200 000 euro, avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision la créance d'indemnité de la société Finares Patrimoine, à inscrire au passif de la procédure collective de la société Fiventis, Condamne société Fiventis à payer à la société Finares Patrimoine la somme de 5 000 euro pour frais non répétibles de première instance et d'appel, Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires au présent dispositif, Condamne la société Fiventis aux dépens de première instance et d'appel, Autorise la distraction des dépens au profit des avocats de la cause dans les termes de l'article 699 du Code de procédure civile.