CA Paris, Pôle 5 ch. 2, 16 octobre 2015, n° 14-20474
PARIS
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
SAS Free
Défendeur :
Free Asap (GIE), Free Asap (SAS)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Aimar
Conseillers :
Mmes Nerot, Renard
Avocats :
Mes Coursin, Teboul-Gelblat, Bourre
Vu les articles 455 et 954 du Code de procédure civile,
Vu le jugement contradictoire du 19 septembre 2013 rendu par le Tribunal de grande instance de
Paris (3ème chambre 1ère section),
Vu l'appel interjeté le 13 octobre 2014 par la SAS Free,
Vu les dernières conclusions de la SAS Free, appelante, en date du 30 juin 2015,
Vu les dernières conclusions du Groupement d'Intérêt Economique GIE Free ASAP et de la SAS
Free ASAP, intimés et incidemment appelants, en date du 25 juin 2015,
Vu l'ordonnance de clôture en date du 2 juillet 2015,
SUR CE, LA COUR,
Il est expressément renvoyé pour un plus ample exposé des faits de la cause et de la procédure à la décision entreprise et aux écritures des parties,
Il sera simplement rappelé que :
La société Free, immatriculée le 18 février 1999 sous le numéro 421 938 861 au registre du commerce et des sociétés de Paris, est un opérateur dans le domaine des télécommunications, ayant notamment pour activité la fourniture d'accès à internet, téléphone, télévision et offrant des services multimédias et informatiques.
Elle est titulaire notamment de deux marques françaises suivantes :
- la marque verbale Free n° 1 734 391 déposée le 25 octobre 1989 pour désigner en classe 38 notamment les services suivant : service télématique grand public, messagerie conviviale, petites annonces, service de stockage, de réception et de diffusion de messages.
- la marque semi figurative 'free, la liberté n'a pas de prix n° 99 785 839 déposée le 8 avril 1999 pour désigner en classes 9, 35, 38, 40, 42 et 45, notamment les services suivants :
Classe 9 : Equipement pour le traitement de l'information et les ordinateurs,
Classe 35 : Publicité. Gestion des affaires commerciales. Gestion de fichiers informatiques,
Classe 38 : Services de courriers électroniques et de diffusion et de diffusion d'informations par voie électronique notamment par les réseaux de communication mondiale de type internet.
Communication par terminaux d'ordinateurs, communications télématiques et téléphoniques, télécommunications, transmission de messages et d'images assistées par ordinateurs, messagerie électronique, information en matière de télécommunication,
Classe 42 : Programmation pour ordinateurs, location de temps d'accès à un centre serveur de base de données notamment pour les réseaux de communication mondiale de type internet.
Elle revendique également la dénomination sociale et le nom commercial Free ainsi que le nom de le domaine www.free.fr qu'elle indique avoir réservé le 5 mars 1999.
Le groupement d'Intérêt Economique Free ASAP ayant pour dénomination sociale GIE Free ASAP, immatriculé le 12 mars 2007 a pour objet social de regrouper des consultants indépendants spécialistes de l'informatique qui travaillent en freelance et de promouvoir les activités de ses membres dans les domaines des prologiciels, des nouvelles technologies et des systèmes d'information.
Le GIE Free ASAP est titulaire de la marque verbale française Free ASAP n° 11 3 836 130 déposée le 1er juin 2011 pour désigner les services suivants : Conseils en organisation et direction des affaires ; gestion de fichiers informatiques ; relations publiques ; vente au détail de prestations d'expertises, d'accompagnement, d'audit et de conseil en systèmes en systèmes d'information ou en systèmes informatiques ; publication électronique de livres et de périodiques en ligne ; conception et développement d'ordinateurs et de logiciels ; élaboration (conception), installation, maintenance, mise à jour ou location de logiciels ; programmation par ordinateurs ; consultation en matière d'ordinateurs ; conversion de données et de programmes informatiques autres que conversion physique ; conversion de données ou de documents d'un support physique vers un support électronique.
La société Free ASAP, immatriculée le 16 novembre 2010, a pour activité la fourniture de prestations d'expertise et de conseils en organisation et en systèmes d'information.
Elle est titulaire du nom de domaine 'free-asap.fr' réservé le 24 novembre 2010.
Ayant découvert et estimé que l'usage du signe Free par le GIE Free ASAP et la société Free ASAP contrefaisait ses marques, nom commercial, dénomination sociale et nom de domaine, la société Free leur a adressé, par courrier recommandé, une mise en demeure en date du 18 novembre 2011, d'avoir à renoncer aux signes litigieux.
C'est dans ces circonstances que par acte d'huissier du 13 février 2012 la société Free a fait assigner devant le Tribunal de grande instance de Paris le GIE Free ASAP et la société Free ASAP en contrefaçon et concurrence déloyale.
Suivant jugement dont appel, le tribunal a essentiellement :
- rejeté la demande de nullité du dépôt initial de la marque verbale française Free n°1734391 et de son renouvellement, formée par la société Free ASAP et le GIE ASAP,
- rejeté la demande en nullité des marques verbales françaises " free " n° 1 734 391 et " free, la liberté n'a pas de prix " n°99 785 839 pour défaut de distinctivité formé car la société Free ASAP et le GIE
ASAP,
- rejeté la fin de non-recevoir sur la prescription de l'action en contrefaçon de la société Free titulaire d'une marque antérieure à l'immatriculation du GIE ASAP le 10 mars 2007,
- débouté la société Free ASAP et le GIE ASAP de leur demande en déchéance pour défaut d'exploitation de la marque verbale française n° 1 734 391 concernant " les services télématiques grand public, messagerie conviviale ",
- prononcé la déchéance des droits de la société Free sur la marque verbale française n°1 734 391 concernant " les services de petites annonces et de stockage, de réception et de diffusion des messages " et ce, à compter du 12 mars 2007,
- prononcé la déchéance des droits de la société Free sur la marque semi figurative française " free, la liberté n'a pas de prix " n° 99 785 839 pour l'ensemble des services concernés à savoir : Equipement pour le traitement de l'information et les ordinateurs. Publicité. Gestion des affaires commerciales.
Gestion de fichiers informatiques; Services de courriers électroniques et de diffusion et de diffusion d'informations par voie électronique notamment par les réseaux de communication mondiale de type internet. Communication par terminaux d'ordinateurs, communications télématiques et téléphoniques, télécommunications, transmission de messages et d'images assistées par ordinateurs, messagerie électronique, information en matière de télécommunication. Programmation pour ordinateurs, location de temps d'accès à un centre serveur de base de données notamment pour les réseaux de communication mondiale de type internet,
- débouté la société Free de sa demande en contrefaçon par imitation de la marque verbale française n° 1 734 391 déposée en classe 38 par la marque verbale française Free ASAP n° 11 3 836 130 déposée le 1er juin 2011 en classes 35, 41 et 42, les dénominations sociales et noms commerciaux GIE Free ASAP du 12 mars 2007 et Free ASAP SAS ainsi que du nom de domaine " free-asap.fr ",
- dit que l'atteinte à la renommée de la marque verbal française Free n° 1 734 391 est établie par la dénomination sociale, le nom commercial Free ASAP et le nom de domaine " free-asap.fr ",
- dit que l'atteinte au nom de domaine free.fr est caractérisée par la dénomination sociale, le nom commercial Free ASAP et le nom de domaine " free-asap.fr ",
- débouté la société Free pour atteintes à sa dénomination sociale, son nom commercial Free,
- en conséquence,
- débouté la société Free de sa demande en nullité de la marque verbale française Free ASAP n° 1
3 836 130,
- ordonné des mesures d'interdiction sous astreinte concernant l'utilisation du signe Free,
- s'est réservé la liquidation de l'astreinte,
- ordonné la radiation du nom de domaine " free-asap.fr ",
- condamné in solidum le GIE Free ASAP et la société Free ASAP à payer à la société Free la somme de 10 000 euro de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi pour les atteintes à la renommée de la marque verbale française n° 1 734 391 et la somme de 5 000 euro de dommages et intérêts e réparation du préjudice subi pour atteinte au nom de domaine free.fr,
- rejeté la demande de publication judiciaire,
- débouté la société Free ASAP et le GIE Free ASAP de leur demande indemnitaire pour comportement fautif de la société Free,
- débouté la société Free de sa demande en nullité de la marque verbale française Free ASAP n° 11 3 836 130,
- ordonné la transmission du jugement devenu définitif à l'INPI pour transcription,
- condamné in solidum le GIE Free ASAP et la société Free ASAP à payer à la société Free la somme de 15 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,
- ordonné l'exécution provisoire de la décision,
- condamné in solidum le GIE Free ASAP et la société Free ASAP aux entiers dépens.
En cause d'appel la société Free demande essentiellement dans ses dernières écritures du 30 juin
2015 de :
- infirmer le jugement en ce qu'il a prononcé la déchéance partielle de la marque Free n° 1 734 391, prononcé la déchéance de la marque figurative Free n°99 785 839 pour l'ensemble des services concernés, débouté la société Free de sa demande en contrefaçon par imitation des deux marques dont elle est titulaire, débouté la société Free de sa demande pour atteinte à sa dénomination sociale et à son nom commercial, débouté la société Free de sa demande de publication judiciaire,
- confirmer le jugement pour le surplus sauf sur le montant des dommages et intérêts qui lui ont été alloués, et statuant à nouveau,
- juger que les marques Free n° 1 734 391 et 99 785 839 sont sérieusement exploitées,
- juger que le dépôt par le GIE Free ASAP de la marque Free ASAP n° 11 3 836 130 et son utilisation pour des services identiques ou similaires aux produits et services des marques Free est fautif en ce qu'il porte atteinte à ces marques,
- juger que le dépôt de la marque litigieuse pour le service " formation " porte atteinte à ces marques renommées Free n° 1 734 391 et 99 785 839,
Subsidiairement,
- juger que l'enregistrement et l'utilisation de la marque litigieuse pour l'intégralité des services qu'elle désigne porte atteinte à la renommée des marques Free et engage la responsabilité civile du GIE,
- juger que le choix et l'emploi du signe Free ASAP à titre de dénominations sociales, de noms commerciaux et de nom de domaine, pour désigner des activités identiques ou à tout le moins similaires, constituent des actes de contrefaçon des marques antérieures Free n° 1 734 391 et 99 785 839 dont est titulaire la société Free et portent atteinte à ces marques renommées,
- juger que le choix et l'emploi du signe Free ASAP à titre de marque, de dénominations sociales, de noms commerciaux et de nom de domaine, portent également atteinte aux droits antérieurs de la société Free sur sa dénomination sociale, son nom commercial et son nom de domaine,
En conséquence,
- prononcer la nullité de la marque Free ASAP n° 11 3 836 130 et transmettre la décision pour transcription à l'INPI,
- ordonner la suppression des dénominations sociales et noms commerciaux du GIE Free ASAP et de la société Free ASAP,
- condamner in solidum les intimés à payer à la société Free les sommes de :
100 000 euro à titre de dommages et intérêts au titre des atteintes à sa marque,
100 000 euro à titre de dommages et intérêts au titre des atteintes à son nom commercial, sa dénomination sociale et son nom de domaine,
- autoriser une publication judiciaire,
- condamner in solidum les intimés à payer à la société Free la somme de 30 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et aux dépens.
Le GIE Free ASAP et la SAS Free ASAP SAS intimés, s'opposent aux prétentions de l'appelante, et pour l'essentiel, demandent dans leurs dernières écritures portant appel incident en date du 25 juin
2015 de :
- déclarer ma fondée la société Free en l'ensemble de ses demandes,
- déclarer recevable et fondé leur appel incident,
- en conséquence,
- " constater " la nullité de l'enregistrement de la marque verbale n° 1 734 391 et dire que cet enregistrement n'a pu être valablement cédé ou renouvelé,
- en tout état de cause, 'constater' la nullité de l'enregistrement n° 1 734 391 en application de l'article 3 de la loi du 31 décembre 1964 et en application de l'article L. 121-1 du Code de la consommation,
- subsidiairement, à défaut de nullité,
- " constater " la déchéance de ladite marque avec effet au 1er avril 1998,
- " constater " la nullité de l'enregistrement n°99 785 839 pour les motifs identiques à ceux qui ont provoqué la nullité de l'enregistrement de la marque n° 1 734 391,
Subsidiairement,
- " constater " sa déchéance à effet du 1er août 2010,
- " constater " le défaut de droit d'agir de la société Free sur le fondement es marques opposées,
- réformer le jugement en ce qu'il a accueilli des demandes d'indemnisation de la société Free au titre de l'atteinte au nom de domaine " free.fr ",
En conséquence,
- rejeter l'ensemble des demandes formées par la société Free sur le fondement des marques 1 734 391 et 99 785 839,
- Subsidiairement, confirmer partiellement le jugement en ce qu'il a prononcé la déchéance partielle de la marque Free n° 1 734 391, prononcé la déchéance de la marque semi figurative n 99 785 839, débouté la société Free de sa demande en contrefaçon des deux marques opposées, de sa demande pour atteinte à sa dénomination sociale et son nom commercial et de sa demande en nullité de la marque verbale Free ASAP n° 11 3 836 130, de sa demande de publication judiciaire,
- dire que les demandes indemnitaires de la société Free constituent un préjudice moral,
- en conséquence condamner la société Free à payer à la société Free ASAP la somme de 60 000 euro et au GIE Free ASAP celle de 60 000 euro en réparation de ce préjudice,
- dire que l'arrêt à intervenir sera transmis à l'INPI pour transcription,
- les autoriser à procéder à une publication,
- condamner la société appelante à leur verser la somme de 20 000 euro sur le fondement de l'article
700 du Code de procédure civile et la condamner aux dépens.
SUR CE
Sur la demande de nullité de l'enregistrement de la marque verbale française Free n° 1 734 391 de la SA Free
Les intimés soutiennent que le dépôt de la marque verbale Free n° 1 434 391 en date du 25 octobre 1989 est irrégulier en raison des mentions qui y figurent et de l'irrégularité des cessions ultérieures.
Cette marque a été acquise en 1999 auprès de la société Nice Matin.
Il ressort des documents communiqués que monsieur Gérard Bavastro a déposé cette marque en son nom et adresse personnels et a signé personnellement le formulaire de dépôt, comme cela ressort de l'examen comparatif de plusieurs documents signés par lui.
Le fait que celui-ci ait mentionné " représenté par monsieur Jean-Pierre Rist " est sans incidence dès lors qu'il a signé lui-même le document. Il en est de même de la circonstance qu'il ait mentionné le cabinet Hautier en tant que destinataire de la correspondance dès lors qu'il avait la faculté du choix de l'adresse de la réception de la correspondance afférente à ce dépôt. L'écriture des services mentionnés, manuscrite ou non est également inopérante pour vicier ce dépôt qui n'a d'ailleurs pas fait l'objet de notification d'irrégularité conformément aux dispositions de l'article 10 du décret 65-621 du 27 juillet 1965 portant application de la loi 64- 1360 du 31 décembre 1964 applicable en l'espèce.
Par acte du 10 février 1994 monsieur Bavastro a cédé cette marque qu'il avait déposée en son nom à la société Nice Matin qui n'a pas contesté la validité de ce dépôt, de sorte que les intimés, tiers à cet acte de cession, n'ont pas qualité pour en contester, plusieurs années après, la validité. Le fait qu'il croyait avoir agi au nom de la société Nice Matin n'altère pas la validité de cette marque dont il était titulaire et qu'il a cédée ultérieurement à la société pour le compte de qui il avait cru agir.
Celle-ci a été acquise par la société Iliad le 18 mars 1999.
Le 11 janvier 2000, la société Iliad a cédé cette marque à la société Proxad, cette cession a été enregistrée le 9 février 2000. Le 8 janvier 2001 l'inscription a été rectifiée au profit de la société Free dont l'absorption par la société Free Télécom a été mentionnée le 21 mars 2003 dont le changement de dénomination en Free a été enregistré à la même date.
Selon les intimés les pouvoirs de mandataire ayant réalisé les inscriptions des 23 avril 1999 et 9 février 2000 lors des transmissions totales de propriété de la marque seraient manquantes.
Cependant les formulaires mentionnent comme cela ressort dans le cadre 7 de ceux-ci, que ces pièces ont été produites et aucune notification de régularisation n'a été délivrée et la marque a été enregistrée.
Les intimés contestent la qualité de monsieur Niel, lors du renouvellement de la marque le 27 avril
1999 par la société Iliad, mais sa qualité de président du conseil d'administration de cette société lors du renouvellement ressort du procès-verbal de la réunion de ce conseil du 22 février 1999, qualité qu'il détenait toujours en juillet 1999 comme cela ressort de l'extrait Kbis communiqué. Il est par ailleurs justifié que le numéro d'inscription de l'acte de transmission totale de propriété du 10 février
1994 figure bien sur le formulaire et le fait que le second numéro d'inscription ne soit pas mentionné n'a aucune incidence sur la régularité de ce renouvellement.
Aucun texte ne prévoyant d'ailleurs la nullité de ce dépôt et de ces transmissions et renouvellements pour ces motifs.
C'est donc à bon droit que le tribunal a rejeté les demandes de nullité formées de ces chefs.
Sur la demande de nullité de la marque verbale française Free n° 1 734 391 de la SAS Free et de la marque semi figurative n° 99 785 839 pour défaut de distinctivité
La marque Free a été déposée et enregistrée le 25 octobre 1989 avant l'entrée en vigueur de la loi du 4 janvier 1991 de sorte que la distinctivité doit s'apprécier au regard des dispositions de la loi du
31 décembre 1964.
En vertu de l'article 3 alinéa 2 de la loi de 1964, est valable la marque n'étant pas exclusivement composée de termes décrivant la qualité essentielle ou la composition du produit ou du service qu'elle désigne au jour du dépôt de la demande d'enregistrement et ce, aux yeux du consommateur moyen du pays dans lequel la marque déposée et au regard de chacun des produits et services visés au dépôt.
L'usage de la marque sous une forme qui diffère de celle sous laquelle elle a été enregistrée est sans incidence sur le caractère distinctif de la marque dès lors que son usage n'altère pas le caractère distinctif de celle-ci, telle que déposée.
Les intimés font valoir que le consommateur français moyen, en particulier dans le domaine des services proposés, est parfaitement conscient de la signification du terme Free en langue anglaise et l'associe à la liberté, la gratuite, en contradiction avec les services non gratuits par l'appelante, trompant ainsi les consommateurs.
Ils ajoutent que ce terme désormais répandu parmi les personnes ayant une connaissance de base de la langue anglaise comme les consommateurs moyens français, est le signe nécessaire pour connaître l'espace libre d'un ordinateur ou d'un serveur et qu'il est dépourvu de distinctivité.
Cependant, comme le fait valoir la société appelante, lors du dépôt de cette marque, en 1989, il n'est pas démontré, aucun document n'étant communiqué à ce titre, que le terme Free avait une signification précise auprès du consommateur moyen francophone et évoquait la qualité essentielle et exclusive des produits qu'elle désigne relatifs aux services de télécommunications et informatiques alors que ce terme de langue anglaise est évocateur, comme le précisent les intimés, de la liberté ou de la gratuité et n'est pas directement rattachable à ces produits et services.
Au jour de son dépôt la marque Free était distinctive et revêt, depuis, un caractère distinctif élevé comme cela résulte des nombreuses pièces communiquées au titre de sa renommée examinée ci-dessous.
Il convient en conséquence de confirmer le jugement sur ce chef de contestation.
Sur la demande de nullité de la marque Free n° 1 734 391 sur le fondement de l'article L. 121-1 du Code de la consommation
Les intimés soutiennent que cette marque est nulle parce que comprise par les consommateurs comme signifiant " gratuit " ce qui est trompeur.
Mais ce terme qui est polysémique peut évoquer aussi bien la liberté que la gratuité qui sont des notions différentes, et la gratuité des services d'accès au réseau internet n'est pas comme le
soutiennent à tort les intimés, ce qui vient immédiatement à la compréhension des internautes moyennant informés, rien dans la communication de la société Free ne faisant penser que ses services sont gratuits.
Il s'ensuit que cette marque Free distinctive et non trompeuse est valable et il convient de confirmer le jugement de ce chef.
Dans la marque semi figurative Free n° 99 785 839 déposée le 8 avril 1999 le terme Free écrit en gros caractères surmontant la phrase 'la liberté n'a pas de prix' écrite en caractères réduits accompagnée d'une silhouette humaine, le terme d'attaque Free est dominant et ne revêt aucun caractère exclusivement descriptif des services visés : publicité, gestion d'affaires, courriers électroniques, de façon générale services informatiques. Elle revêt, associée à son slogan, un caractère totalement arbitraire par rapport à ces services et garantit au contraire sa fonction de garantie de la provenance des produits aux consommateurs de sorte qu'il convient de confirmer le jugement sur ce chef de contestation.
Sur la demande en déchéance des droits de la société Free pour défaut d'exploitation sérieuse sur la marque verbale française Free n° 1 734 391
Aux termes de l'article 714-5 du Code de la propriété intellectuelle encourt la déchéance de ses droits le propriétaire de la marque qui, sans justes motifs, n'en a pas fait un usage sérieux, pour les produits et services visés dans l'enregistrement, pendant une période ininterrompue de cinq ans...est assimilé à un tel usage b) l'usage de la marque sous une forme modifiée n'en altérant pas le caractère distinctif.
Néanmoins, lorsque le propriétaire d'une marque est titulaire d'une marque voisine, il doit être en mesure de fournir des preuves d'exploitation propres à chacune des marques et il ne peut invoquer l'usage d'une marque pour faire échec à la déchéance de ses droits sur l'autre marque.
Les sociétés intimées ont présenté leur demande ne déchéance la première fois par écritures du 12 juin 2012, de sorte que la période d'exploitation à examiner se situe du 12 mars 2007 au 12 mars 2012, voire jusqu'au 12 juin 2012 si l'exploitation s'est poursuivie.
L'usage sérieux devant s'entendre comme l'exploitation, par le titulaire de la marque ou le tiers licencié, de la marque pour les produits et services visés dans le dépôt ou sous une forme modifiée n'altérant pas son caractère distinctif, c'est-à-dire, ne modifiant pas la perception du signe par le public, nonobstant le fait que cette forme différente est elle-même enregistrée comme marque car dans une décision du 18 juillet 2013 la Cour de Justice de l'Union européenne a dit pour droit
" Lorsqu'une marque communautaire n'est pas enregistrée en couleur, mais que son titulaire en a fait un large usage dans une couleur ou une combinaison de couleurs particulières, si bien que, dans l'esprit d'une fraction importante du public, cette marque est désormais associée à cette couleur ou combinaison de couleurs, la ou les couleurs qu'un tiers utilise pour la représentation d'un signe accusé de porter atteinte à ladite marque sont pertinentes dans le cadre de l'appréciation globale du risque de confusion ou de l'appréciation globale du profit indu au sens de cette disposition ".
Or en l'espèce le fait que la marque verbale Free est exploitée en caractères rouge et en italique
Free n'en altère pas le caractère distinctif et cette exploitation doit être prise en compte pour apprécier son usage.
La demande reconventionnelle en déchéance formée en réponse à une demande en contrefaçon est un moyen de défense et s'inscrit dans le périmètre des droits de la marque que le demandeur principal entend opposer à la partie défenderesse ;
Aussi la société Free opposant aux intimés les produits ' service télématique grand public, messagerie conviviale, petites annonces, service de stockage, de réception et de diffusion de messages, relevant de la classe 38, les intimés sont irrecevables à solliciter la déchéance de cette marque pour les produits autres que ceux qui leur sont opposés.
Les intimés dénient tout caractère probant aux documents communiqués pour justifier de l'usage sérieux invoqué pour chacun des services.
Il est justifié cependant que la société Free (pièces 204 à 207) édite sous la marque Free depuis de nombreuses années notamment 2007, 2011, 2014 diverses petites annonces dans des domaines variés : annonces immobilières, qu'en tant qu'opérateur de télécommunications fournissant notamment un accès à internet ses abonnés et offre des services et outils à ses abonnés pour échanger, partager, stocker des données, échanger des fichiers, des mails (15 millions d'adresses mail en 2011) , un service fax, (constat d'huissier du 22 décembre 2009).
La marque Free est également exploitée pour mettre à disposition de ses abonnés d'un espace de stockage d'informations, de vidéos, d'images (pièces 208 et 200) depuis 2009, en 2007, 2012 (pièces
209, 210).
Il est donc amplement justifié de l'exploitation sérieuse de la marque Free n° 1 734 391 pour les produits et services ci-dessus visés pour la période considérée et c'est donc à tort que le tribunal a déchu la société Free de ses droits sur cette marque pour ces produits et services.
Il convient en conséquence de réformer le jugement à ce titre.
Sur la demande en déchéance des droits de la société Free pour défaut d'exploitation sérieuse de la marque semi figurative " Free, la liberté n'a pas de prix " n° 99 785 839
L'exploitation du seul signe Free n'altère pas le caractère distinctif de la marque semi figurative dès lors qu'il correspond à l'élément distinctif et dominant de celle-ci.
Il est justifié par les très nombreux documents communiqués par la société Free qu'elle exploite depuis 2002, 2003 des services d'internet, de téléphone et de télévision, sous la marque Free en italique qui est apposée de façon intégrale sur le boîtier multimédia et seule sur les documents présentant ses services.
Depuis 2005 la télécommande utilisée pour naviguer sur l'écran de télévision et comme manette de jeux comporte la marque Free.
Ce boîtier permettant le traitement de l'information et de se connecter à internet et son accessoire étaient en 2007 commercialisés auprès de 2 626 000 foyers abonnés (pièce 212) et en 2012 ce nombre atteignait celui de 5 147 000 abonnés et cet accessoire. Ce boîtier permet de traiter et de stocker des données : son, vidéos, musique, fichiers informatiques.
La marque Free est également apposée depuis 2008 sur l'adaptateur Free USB WIFI permettant d'utiliser cette technologie et sur la carte sim depuis 2012 (pièce 214) et la société Free a fourni pendant plusieurs années à ses abonnés un CD de programmation et sa pochette sur lesquels est apposée cette marque (pièces 218, 109, 113).
L'essentiel des services proposés par la société Free sont également proposés et commercialisés en ligne sur son site internet.fr sous la marque Free (pièces 34 à 47, 126, 148, 220 à 222).
L'usage de cette marque pour les services équipement pour le traitement de l'information et les ordinateurs en classe 9 et les services de programmation pour ordinateur en classe 42 est dont établi.
Il ressort par ailleurs des nombreuses pièces communiqués à cet effet que la société Free depuis
2004, fournit de façon continue des espaces publicitaires en ligne pour des tiers et qu'elle se situe selon Médiamétrie parmi les 10 premiers sites supports de publicité, service qu'elle exploite, selon les factures, tarifs et conditions générales y afférentes sous la marque Free.
Ce service de publicité recouvre par extension la gestion des affaires commerciales. Elle édite cette dernière activité, sur son site une rubrique shopping par l'intermédiaire de laquelle sont présentés une sélection des produits vendus par différentes sociétés, classés par rubriques et qui permet aux internautes de les acheter (pièces 114, 200).
Les services fournis par la société Free : services d'hébergement de pages personnelles ou de blogs, service TV Perso, service Telesite, service de stockage en réseau impliquent la gestion de fichiers (pièces 15, 111, 114, 191, 200, 233, 234, 235, 236).
Il est donc justifié d'un usage sérieux des services opposés sous la marque Free pour la période considérée relevant de la classe 35 publicité, gestion des affaires commerciales, gestion de fichiers informatiques.
Concernant les services : Services de courriers électroniques et de diffusion et de diffusion d'informations par voie électronique notamment par les réseaux de communication mondiale de type internet. Communication par terminaux d'ordinateurs, communications télématiques et téléphoniques, télécommunications, transmission de messages et d'images assistées par ordinateurs, messagerie électronique, information en matière de télécommunication relavant de la classe 38 et Programmation pour ordinateurs, location de temps d'accès à un centre serveur de base de données notamment pour les réseaux de communication mondiale de type internet, relevant de la classe 42, il ressort des nombreuses pièces communiquées (15, 114, 112, 144 à 147, 200, 234, 238 à 246) que la société Free depuis 2008 et de façon continue, propose à ses abonnés (environ 15 millions en 2011) de communiquer à distance par mails, tchats, blogs, pages internet personnelles, communications téléphoniques, transmissions de données, jeux en ligne, en réseaux.... et ce sous la marque Free précitée.
Il est également établi que depuis l'année 2000 la société Free (pièces 167 à 171, 249 à 251) édite sur son site internet free.fr qui est visité par plusieurs millions de visiteurs des rubriques d'actualité et de diffusion de nouvelles dans des domaines étendus : sport, finances, actualités, politiques, culture, science...sous sa marque 'Free la Liberté n'a pas de prix' et ce service a été déclaré auprès du procureur de la République conformément aux dispositions de la loi sur la presse.
C'est donc à tort que le tribunal a prononcé la déchéance des droits de la société Free sur cette marque pour l'ensemble des produits et services visés. Il convient en conséquence de réformer le jugement de ce chef.
Sur la renommée e la marque verbale française Free
L'article L. 713-5 du Code de la propriété intellectuelle dispose que la reproduction ou l'imitation d'une marque jouissant d'une renommée pour les produits ou services non similaires à ceux désignés dans l'enregistrement engage la responsabilité civile de son auteur si elle est de nature à porter préjudice au propriétaire de la marque ou si cette reproduction ou imitation constitue une exploitation injustifiée de cette dernière.
La marque renommée correspond à une marque enregistrée, connue par une partie significative du public concerné pour tout ou partie des produits et services visés dans le libellé du dépôt.
La société Free immatriculée depuis le 18 février 1999 était au 31 décembre 2006, avant l'immatriculation du GIE en mars 2007, de celle de la société ASAP en novembre 2010 et le dépôt de la marque contestée en juin 2011, le deuxième opérateur français dans le domaine des communications électroniques (pièce 158) et comptait 2 278 000 foyers abonnés qui se sont élevés en juin 2011 à 4 717 000 et en mai 2015 à 5.945.000 et compte actuellement 10 525 0000 abonnés à ses offres mobiles Free lancées en janvier 2012.
Depuis l'année 2000 le site free.fr est classé parmi les sites les plus visités en France selon les mesures faites par Médiamétrie (pièces 34 à 47, 126, 141, 148, 220 à 222) et ce, de façon constante.
La société Free justifie par ailleurs avoir investi en frais publicitaires la somme de 613 565 624 euro depuis 1999 jusqu'en 2014 pour des campagnes publicitaires massives et continues.
L'activité de cette société est relayée par de nombreux articles de presse généralistes ou spécialisé depuis l'année 2000 (pièces 49 à 118, 254 à 258, 297) qui font état de cette renommée et la sympathie attachée à cette marque qualifiée de " puissante " et parmi les " marques préférées " des français.
Cette renommée auprès d'une très large fraction du public français est également établie par de nombreux sondages et études (pièces 67 à 73, 118, 149, 1777, 194 et 258) : capital sympathie, classée en premier par le classement Challenges publié en janvier 2015, sondage TNS Sofres de février 2014 duquel le signe Free est connu par les 96% des personnes interrogées, sondage de satisfaction de UFC-Que Choisir de juillet 2013, enquête de satisfaction de la revue 60 Millions De Consommateurs d'octobre 2012, desquels il résulte que Free est en tête concernant le degré de satisfaction, enquête publiée par le magazine Channelbiz.fr en septembre 2012 de laquelle il ressort que " Free s'impose comme la marque la plus puissante ".
Par ailleurs, cette renommée sur le territoire français a d'ores et déjà été reconnue par les juridictions françaises à de nombreuses reprises (pièces 74 à 82, 142, 150, 259, 260, 298) et les juridictions communautaires (83, 86 à 90, 121, 261 à 263).
Les signes Free de la société Free bénéficient donc d'une large renommée sur le territoire français et la société Free est fondée à se prévaloir de l'article L. 713-5 du Code de la propriété intellectuelle précitée.
Sur la fin de recevoir tirée de la prescription de l'action en contrefaçon de la marque de la société
Free par le nom commercial et la dénomination sociale Free ASAP à l'égard du GIE Free ASAP
Aux termes de l'article L 716-5 du Code de la propriété intellectuelle l'action en contrefaçon se prescrit par trois ans.
L'usage illite d'une marque par un tiers non autorisé constitue un délit continu de sorte que la prescription de l'action ouverte à la société Free ne commence à courir qu'à compter du dernier acte de contrefaçon constaté, or, les faits reprochés n'ont toujours pas cessé de sorte que l'action n'est pas prescrite.
Sur la demande en nullité de la marque déposée par le GIE
Selon l'article L. 711-4 du Code de la propriété intellectuelle, ne peut être adopté comme marque un signe portant atteinte à des droits antérieurs et notamment :
- à une marque antérieurement enregistrée ou notoirement connue au sens de l'article 6 bis de la convention de paris pour la protection de la propriété industrielle,
- à une dénomination ou raison sociale, s'il existe un risque de confusion dans l'esprit du public,
- à un nom commercial ou à une enseigne connue sur l'ensemble du territoire nationale, s'il existe un risque de confusion dans l'esprit du public,
L'article L. 713-3 du même Code dispose que sont interdits, sauf autorisation du propriétaire, s'il peut en résulter un risque de confusion dans l'esprit du public...l'imitation d'une marque et l'usage d'une marque imitée, pour les produits et services identiques ou similaires à ceux désignés dans l'enregistrement.
L'article L. 713-5 du même Code indique :'la reproduction ou l'imitation d'une marque jouissant d'une renommée pour des produits ou services non similaires à ceux désignés dans l'enregistrement engage la responsabilité civile de son auteur si elle est de nature à porter préjudice au propriétaire de la marque ou si cette reproduction ou imitation constitue une exploitation injustifiée de cette dernière.
Les dispositions de l'alinéa précédent sont applicables à la reproduction ou l'imitation d'une marque notoirement connue au sens de l'article 6 bis de la convention de paris pour la protection de la propriété industrielle précitée.
L'article L. 714-3 du même Code prévoit qu'est déclaré nul par décision de justice, l'enregistrement d'une marque qui n'est pas conforme aux dispositions des articles L. 711-1 à L. 711-4.
Le GIE Free ASAP a déposé le 1er juin 2011 la marque Free ASAP n°11 3 836 130 pour désigner les services suivants : Conseils en organisation et direction des affaires ; gestion de fichiers informatiques ; relations publiques ; vente au détail de prestations d'expertises, d'accompagnement, d'audit et de conseil en systèmes en systèmes d'information ou en systèmes informatiques ; publication électronique de livres et de périodiques en ligne ; conception et développement d'ordinateurs et de logiciels ; élaboration (conception), installation, maintenance, mise à jour ou location de logiciels ; programmation par ordinateurs ; consultation en matière d'ordinateurs ; conversion de données et de programmes informatiques autres que conversion physique ; conversion de données ou de documents d'un support physique vers un support électronique.
Les marques en présence sont :
Les marques antérieures de la société Free :
La marque verbale Free déposée le 25 octobre 1989 enregistrée sous le n° 1 734 391 régulièrement renouvelée pour désigner divers services de la classe 38 : service télématique grand public, messagerie conviviale, petites annonces, service de stockage, de réception et de diffusion de messages,
La marque semi figurative associant le terme Free au slogan " la liberté n'a pas de prix " et au dessin d'un petit personnage qui s'élance, déposée le 8 avril 1999, enregistrée sous le n° 99 785 839 régulièrement renouvelée, pour désigner des produits et services des classes 9, 35, 38, 40, 42 et 45, notamment :
- équipement pour le traitement de l'information et les ordinateurs,
- publicité, gestion de fichiers informatiques,
- services de courriers électroniques et de diffusion d'informations par voie électronique notamment pour les réseaux de télécommunication mondiale de type internet, communication par terminaux d'ordinateurs, communications télématiques et téléphoniques, télécommunications, transmission de messages et d'images assistées par ordinateurs, messagerie électronique, information en matière de communication,
- location de temps d'accès à un centre serveur de base de données notamment pour les réseaux de communication mondiale de type internet.
Les produits et services visés par la marque du GIE sont pour partie identiques : gestion de fichiers informatiques, Gestion des affaires commerciales, service télématique, programmation par ordinateurs ou similaires par complémentarité aux services de stockage, réception et diffusion de messages, équipement pour le traitement de l'information et les ordinateurs, gestion des fichiers informatiques, programmation pour ordinateurs, services télématique, télécommunications informations en matières de communications, services de courriers électroniques communications par terminaux d'ordinateurs transmission de messages et d'images par ordinateurs, diffusion d'informations par voie électronique, équipement pour le traitement de l'information et les ordinateurs télécommunications, service télématique, aux marques précédentes, à l'exception du service formation.
La société Free est cependant recevable et fondée à se prévaloir des dispositions de l'article L. 713-5 du CPI s'il existe un risque de confusion pour les produits et services non similaires car il existe un lien entre les services de formation qui peuvent être rendus par internet et les activités de Free de sorte que cette dénomination est de nature à lui porter préjudice en entravant la diversification de celles-ci.
Le signe critiqué ne constituant pas la reproduction à l'identique de la marque première qui lui est opposée, il convient de rechercher s'il n'existe pas entre les signes en présence un risque de confusion (lequel comprend le risque d'association) qui doit être apprécié globalement en tenant compte de tous les facteurs pertinents du cas d'espèce ; que cette appréciation globale doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique et conceptuelle des marques en cause, être fondée sur l'impression d'ensemble produite par celles-ci en tenant compte de leurs éléments distinctifs et dominants ;
En outre, un faible degré de similitude entre les produits ou services désignés peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les signes et inversement
Visuellement, la marque critiquée reprend le terme Free des deux marques précédentes comme terme d'attaque et reprend à l'identique la marque verbale Free et le terme distinctif et dominant qu'il revêt dans l'impression d'ensemble de la marque semi figurative tant de par sa typographie que par la renommée attaché à ce terme, l'acronyme ASAP n'étant pas de nature à altérer cette prédominance.
Phonétiquement, les marques en présence se prononcent de façon identique en terme d'attaque et les signes ajoutés dans la seconde n'altèrent pas l'identité produite entre les deux signes.
Conceptuellement, les signes opposés apparaissent comme une déclinaison du terme Free et ce d'autant que le signe Free est particulièrement notoire dans le secteur de la communication électronique et que l'acronyme ASAP compris dans un sens technique par le consommateur avisé renvoie aux services et activités dirigées vers l'informatique, de sorte que la seconde apparaît comme la déclinaison des marques Free.
Il suit que l'impression d'ensemble qui se dégage de la marque Free ASAP est propre à générer un risque de confusion dans l'esprit du consommateur qui sera conduit, en raison de la reprise du terme notoire Free combinée à la notoriété du terme premier, notamment pour le service de la formation s'agissant de la notoriété, et à l'identité ou à la similarité des produits ou services en cause pour les autres, à confondre ou, à tout le moins, à associer les deux signes et à leur attribuer une origine commune en forme de déclinaison de la marque antérieure ;
Ce dépôt qui est de nature à restreindre l'exploitation de la marque Free et qui l'affaiblit porte atteinte aux droits de la société Free sur ses marques. Celle-ci est en conséquence fondée sur le fondement de l'article L. 711-4 du CPI en sa demande de nullité de ce dépôt de marque.
Il convient dès lors, infirmant le jugement de prononcer la nullité de ce dépôt de marque.
Sur la demande en contrefaçon par imitation de la marque verbale française n° 1 734 391 de la société Free déposée en classe 38 par la marque verbale française Free ASAP n° 11 3 386 130 déposée le 1er juin 2011 en classes 35, 41 t 42, par la réservation et l'exploitation du nom de domaine Free-asap.fr
Aux termes de l'article L. 713-2 du Code de la propriété intellectuelle, sont interdits sauf autorisation du propriétaire :
a) la reproduction, l'usage ou l'apposition d'une marque, même avec l'adjonction de mots tels que " formule, façon, système, imitation, genre, méthode " ainsi que l'usage d'une marque reproduite pour des produits ou services identiques à ceux désignés dans l'enregistrement...
Selon l'article L. 713-3 de ce même Code, sont interdits, sauf autorisation du propriétaire s'il peut en résulter un risque de confusion dans l'esprit du public :
a) la reproduction, l'usage, ou l'apposition d'une marque ainsi que l'usage d'une marque reproduite pour des produits ou services similaires à ceux désignés dans l'enregistrement ;
b) l'imitation d'une marque et l'usage d'une marque imitée pour des produits ou services identiques ou similaires à ceux désignés dans l'enregistrement.
Le dépôt de la marque contrefaisant Free ASAP et son usage, celle-ci étant notamment utilisée sur le site internet Free-asap.fr pour des produits et services identiques ou similaires qui génèrent un risque de confusion sont constitutifs d'actes de contrefaçon.
Par ailleurs la réservation et l'exploitation du nom de domaine Free-asap.fr similaire aux marques antérieures de la société Free et l'exploitation sur le site éponyme d'une activité de conseil en systèmes d'information, similaires aux activités visées par ces marques engendre un risque de confusion constitutifs d'actes de contrefaçon, dès lors que l'adjonction fr désignant la France n'est pas exclusif de ce risque de confusion.
Il en est de même par l'enregistrement de la dénomination sociale par le GIE et la société Free
ASAP.
C'est donc à tort que le tribunal a rejeté la demande de la société Free de ce chef. Il convient réformant le jugement à ce titre de déclarer fondée l'action en contrefaçon de ses marques de la société Free à ce titre.
Sur les atteintes à la dénomination sociale, au nom commercial et au nom de domaine de la société Free
La société Free a été immatriculée le 18 février 1999 sous la dénomination sociale Free qui constitue également son nom commercial et elle est titulaire du nom de domaine Free.fr enregistré le 5 mars 1999.
Ce nom de domaine a été initialement enregistré par les sociétés Proxad et Free SAS du groupe
Free puis transféré le 23 décembre 2008 à la société Free comme cela résulte de l'extrait Whois de " free.fr " au 27 décembre 2012, de la fiche d'identification de ce nom de domaine et de l'attestation circonstanciée établie par l'AFNIC le 21 septembre 2012.
Ce nom de domaine correspond à l'adresse du site " free.fr " qui est massivement exploité et est antérieur à l'immatriculation du GIE Free ASAP du 12 mars 2007, à l'immatriculation de la société Free ASAP du 16 novembre 20210, à la réservation du nom de domaine " free-asap.fr " du 24 novembre 2010 et de la demande d'enregistrement de la marque Free ASAP du 1er juin 2011.
Le GIE Free ASAP a été immatriculé postérieurement le 12 mars 2007 pour une activité de conseil en systèmes informatiques et notamment selon l'article 2 de ses statuts de " promouvoir toutes les activités de ses membres et plus généralement dans des environnements de progiciels intégrés, des progiciels, des nouvelles technologies (type web ou portail)...tous les systèmes d'information. "
Il utilise avec la société Free ASAP immatriculée le 16 novembre 2010 le nom commercial Free ASAP.
Cette dernière exerce l'activité de fourniture de missions d'expertise et de conseil promotion de logiciels dans le même domaine que celui du GE et celle de promouvoir la vente de logiciels édités par ses partenaires.
La société Free ASAP a également enregistré le 24 novembre 2010 le nom de domaine
Free-asap.fr qui renvoie au site éponyme qui est exploité pour présenter ses activités.
Le nom commercial, la dénomination sociale et le nom de domaine en regard de leur valeur commerciale, constituent des signes distinctifs bénéficiant d'une protection juridique autonome dès leur premier usage public, de sorte que la société Free dont il est justifié qu'elle a exploité ces signes distinctifs disponibles avant le dépôt de la marque par l'intimée est fondée à en solliciter la protection.
La reprise, sans nécessité technique, par les intimés du terme Free très distinctif, constituant la dénomination sociale, le nom de domaine et le nom commercial d'une société et d'un groupement directement concurrents disposant sur ces signes distinctifs une antériorité auxquels sont associés une image très favorable pour déclencher à leur profit, l'adjonction de deux termes SAS ou GIE qui ne sont que des termes juridiques ou fr qui n'est que l'extension rattachant les termes à la France sans pouvoir distinctif propres n'affectant pas l'impression de déclinaison du premier, caractérise, un comportement parasitaire à l'égard de la société concurrente.
Les intimés bénéficiant de ce fait, à un moindre coût des investissements et de la notoriété de l'entreprise plus ancienne présente sur le même secteur d'activité de télécommunications et d'informatique.
Ce comportement est donc fautif et engage leur responsabilité. Il convient en conséquence de réformer le jugement à ce titre et de recevoir la société Free en sa demande en réparation à ce titre.
Sur les mesures réparatrices
Le dépôt et l'utilisation de la marque Free ASAP, l'enregistrement et l'exploitation du nom de domaine Free-asap.fr, l'adoption des dénominations sociales et nom commercial GIE Free ASAP, Free ASAP SAS et Free ASAP portent atteinte aux droits privatifs de la société Free sur les deux marques dont elle est titulaire en les banalisant et de ce fait en les dépréciant.
L'utilisation par les intimés du site Free-asap.fr pour désigner des services et exercer des activités identiques ou similaires à la société Free portent atteinte aux signes antérieurs Free de la société éponyme et amoindrissent l'efficacité de ses investissements publicitaires.
Il convient en conséquence de condamner in solidum les intimés à payer à la société appelante la somme de 60 000 euro pour le préjudice résultant des atteintes portées à ses marques et celle de
60 000 euro pour le préjudice résultant des atteintes portées à sa dénomination commerciale, son nom commercial et son nom de domaine.
Il y a lieu de faire droit à la demande de publication judiciaire selon les modalités prévues au présent dispositif.
Les mesures d'interdiction sous astreintes et de radiation du nom de domaine free-asap.fr prononcées par le tribunal doivent être confirmées pour faire cesser les faits illicites selon les mêmes modalités.
Sur les autres demandes
En regard des dispositions de la présente décision la demande reconventionnelle formée par les intimés pour obtenir réparation de leur préjudice moral résultant des demandes indemnitaires formées par la société appelante, est non fondée, et doit être rejetée.
L'équité commande d'allouer à la société appelante la somme de 25 000 euro sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile et de rejeter la demande formée à ce titre par les intimées.
Les dépens resteront à la charge des intimés qui succombent qui seront recouvrés par les avocats de la cause dans les conditions de l'article 699 du Code de procédure civile.
Par ces motifs, Réforme le jugement en ce qu'il a prononcé la déchéance de la marque verbale Free n°1 734 391 concernant " les services de petites annonces et de stockage, de réception et de diffusion des messages " à compter du 12 mars 2007 et prononcé la déchéance des droits de la société Free sur la marque semi-figurative française " Free, la liberté n'a pas de prix " n° 99 785 839 pour l'ensemble des services concernés, débouté la société Free de sa demande en contrefaçon par imitation de ses marques, Débouté la société Free de ses demandes pour atteinte à sa dénomination sociale et à son nom commercial Free et débouté la société Free de sa demande en nullité de la marque verbale Free ASAP n° 11 3 836 130,
Prononce la nullité de la marque Free ASAP n° 11 3 836 130 déposée le 1er juin 2011 par le GIE Free ASAP pour désigner les services suivants : Conseils en organisation et direction des affaires ; gestion de fichiers informatiques ; relations publiques ; vente au détail de prestations d'expertises, d'accompagnement, d'audit et de conseil en systèmes d'information ou en systèmes informatiques ; publication électronique de livres et de périodiques en ligne ; conception et développement d'ordinateurs et de logiciels ; élaboration (conception), installation, maintenance, mise à jour ou location de logiciels ; programmation par ordinateurs ; consultation en matière d'ordinateurs ; conversion de données et de programmes informatiques autres que conversion physique ; conversion de données ou de documents d'un support physique vers un support électronique, Dit que le GIE Free ASAP en déposant la marque Free ASAP et en l'exploitant a commis des actes de contrefaçon des marques Free n° 1 734 391 et n° 99 785 839 dont est titulaire la société
Free, Ordonne la transmission de la présente décision par le greffe à l'Institut National de la Propriété
Industrielle aux fins d'inscription au registre national des marques et autorise la société Free à accomplir cette formalité, si nécessaire, Condamne in solidum les intimés à payer à la société appelante la somme de 60 000 euro en réparation du préjudice subi pour les atteintes à ses marques, et celle de 60 000 euro en réparation du préjudice subi pour les atteintes à sa dénomination sociale, son nom commercial et son nom de domaine, Autorise la société Free à faire publier le texte suivant dans trois publications papier ou électronique de son choix, aux frais avancés et solidaires du GIE Free ASAP et de la société Free ASAP à concurrence de la somme de 5 000 euro TTC par insertion : " par arrêt du 16 octobre 2015, la Cour d'appel de Paris a condamné le GIE Free ASAP et la société Free ASAP pour avoir porté atteinte aux signes distinctifs de la société Free (marques renommées, dénomination sociale, nom commercial et nom de domaine), leur a fait interdiction de continuer, les a condamnés in solidum à lui payer diverses sommes, notamment à titre de dommages et intérêts, ainsi qu'à supporter le coût des publications judiciaires ", Confirme le jugement pour le surplus, Y ajoutant, Condamne in solidum les intimés à payer à la société appelante la somme de 25 000 euro sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, Condamne les intimés aux entiers dépens qui seront recouvrés par les avocats de la cause dans les conditions de l'article 699 du Code de procédure civile.