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Décisions

CA Pau, 1re ch., 26 septembre 2013, n° 12-00014

PAU

Arrêt

Confirmation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Castagne

Conseillers :

M. Augey, Mme Beneix

Avocats :

Me Besse, SCP Duale-Ligney

TGI Dax, du 23 nov. 2011

23 novembre 2011

FAITS

A la suite d'un démarchage à domicile, Mme D. a, suivant bons de commande des 6 octobre et 16 novembre 2006, acquis un système de détection-intrusion-incendie et de vidéosurveillance de son domicile auprès de la SARL Azur Alarme et lui en a confié l'installation, pour les montants de 5 862,64 euro et 36 916,56 euro, qu'elle a financés grâce à deux prêts contractés auprès de la banque Sofinco.

Estimant que les travaux d'installation seraient inachevés, Mme D. a, suivant courrier du 11 juillet 2007, notifié l'annulation du marché et des prêts et sollicité la remise en état des lieux.

PROCEDURE

Par actes des 18 et 31 mars 2008, Mme D. a assigné la SARL Azur Alarme et la SA Sofinco devant le Tribunal de grande instance de Dax sur le fondement des articles L. 311-20 et 21 du Code de la consommation, en nullité des commandes et des crédits accessoires à la vente.

Par acte du 12 septembre 2008 la SA Sofinco a assigné Mme D. en paiement de la somme de 46 881,89 euro en remboursement des prêts.

Les deux instances ont été jointes par ordonnance du juge de la mise en état du 28 novembre 2008, qui a, en outre, désigné M. B. en qualité d'expert aux fins de vérifier l'étendue et la qualité des travaux réalisés par la SARL Azur Alarme.

Parallèlement, cette société a été admise en liquidation judiciaire par jugement du Tribunal de commerce de la Roche-sur-Yon en date du 5 janvier 2011 et Me Pelletier a été désigné en qualité de mandataire liquidateur.

Suivant jugement du 23 novembre 2011, le Tribunal de grande instance de Dax a débouté Mme D. de l'ensemble de ses demandes et l'a condamnée à payer à la SA Sofinco la somme de 46 881,89 euro avec intérêts conventionnels sur la somme de 43 538,78 euro à compter du 2 juillet 2008. Le tribunal a débouté les parties de leurs plus amples demandes.

Mme D. a interjeté appel de cette décision suivant déclaration au greffe en date du 3 janvier 2012.

Par ordonnance du 5 décembre 2012, le magistrat de la mise en état a :

- dit n'y avoir lieu à prononcer la caducité de la déclaration d'appel,

- déclaré irrecevables les conclusions remises au greffe par la SA CA Consumer Finance (ex Sofinco) le 8 octobre 2012, par application de l'article 909 du Code de procédure civile.

Ladite ordonnance n'a pas été déférée dans les 15 jours de sa date par application de l'article 916 du Code de procédure civile.

Me Pelletier, ès qualités de mandataire liquidateur de la société Azur Alarme devenue Azur Protech, n'a pas constitué avocat bien que régulièrement cité à personne par l'appelante suivant acte du 29 mars 2012.

Mme D. dans ses dernières écritures en date du 27 mars 2012, demande à la Cour, sur le fondement des articles 11 de la directive européenne 87/102 du 22 décembre 1986, L. 311-20 et 21, L. 122- 8 et 9 du Code de la consommation :

- de réformer le jugement,

- d'annuler la vente relative au bon de commande n° 01 49 53 du 16 novembre 2006 à l'origine de la facture n° FC 200 510 370 d'un montant de 36 916,56 euro,

- d'en tirer toutes les conséquences juridiques concernant le contrat de financement conclu avec la Sofinco par l'intermédiaire de la SARL Azur Alarme,

- au surplus et au besoin, de condamner Me Pelletier, ès qualités de mandataire liquidateur de la SARL Azur Alarme, à la relever de toute condamnation à l'égard de la société Sofinco,

- d'allouer à titre de dommages-intérêts la somme de 5 000 euro,

- de condamner Me Pelletier, ès qualités de mandataire liquidateur de la SARL Azur Alarme, à lui verser la somme de 1 500 euro sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

- de condamner Me Pelletier, ès qualités de mandataire liquidateur de la SARL Azur Alarme, aux entiers dépens de la procédure en ce compris les frais d'expertise et d'exécution.

Mme D. soutient avoir été victime d'un abus de faiblesse lors de la vente et de la signature des procès-verbaux de réception sans réserve alors que les travaux n'étaient pas achevés. Elle justifie qu'au moment des faits, elle n'était pas en mesure d'apprécier la portée de ses engagements en raison d'une forte dépression dont elle souffre depuis le décès de son mari.

Par ailleurs, elle soutient les défauts d'installation du matériel de vidéosurveillance auxquels l'expert a remédié lui-même, le manquement au devoir de conseil, la disproportion des emprunts avec ses facultés de remboursement et avec la valeur du bien commandé et facturé, qui au surplus apparaît totalement inutile dès lors qu'elle possédait déjà un système d'alarme.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 13 mai 2013.

MOTIVATION

Mme D. sollicite la nullité de la seule commande n° 01 49 53 du 16 novembre 2006 d'un matériel de vidéosurveillance, à l'origine de la facture n° FC 200 510 370 du 8 décembre 2006 d'un montant de 36 916,56 euro.

Elle invoque les dispositions des articles suivants du Code de la consommation :

- L. 311-20 sur l'interdiction faite au vendeur de faire signer à l'acheteur un crédit d'un montant supérieur à la valeur du bien acquis,

- L. 311-21 relatif à l'information du débiteur en cas de modification du taux du crédit,

- L. 122-8 et 9 sur l'abus de faiblesse.

Or, ainsi que l'a justement rappelé le premier juge :

- le prêt affecté à l'achat du matériel de vidéosurveillance en date du 16 novembre 2006, d'un montant de 36 900 euro n'est pas supérieur au prix d'achat du bien d'un montant de 36 916,56 euro figurant sur le bon de commande n° 01 49 53 du même jour (et sur la facture n° FC 200 510 370 du 8 décembre 2006 ainsi que l'a constaté l'expert),

- les dispositions relatives à l'information du consommateur sur la modification du taux d'intérêts ne sont pas applicables à la cause,

- la preuve de l'abus de faiblesse n'est pas rapportée par le certificat médical du docteur W., en date du 12 mars 2007, indiquant qu'il " traite Mme D. pour un syndrome dépressif " et celui du docteur G.- L. du 18 mai 2007, indiquant que Mme D. présente " une fragilité psychique liée à des événements douloureux de son existence ". Ces certificats, outre qu'ils ne sont pas contemporains des actes litigieux, ne démontrent ni la vulnérabilité de l'appelante aux sollicitations commerciales ni l'altération de son jugement ; par ailleurs, Mme D. ne démontre pas la connaissance du vendeur de son état de santé dépressif voire d'une quelconque fragilité ni d'aucun fait constitutif d'une contrainte ou d'une ruse pour la déterminer à conclure.

Mme D. invoque l'expertise de M. B. mettant en évidence les malfaçons, défauts d'installation et non-achèvement des travaux interdisant l'utilisation du matériel au jour de l'expertise.

L'expert précise en effet que :

- les travaux d'installation du premier matériel ont été réceptionnés le 18 octobre 2006 sans réserve et les seconds, le 8 décembre 2006, également sans réserve,

- mais l'installation de vidéosurveillance n'est pas fonctionnelle en raison en premier lieu de l'absence d'alimentation électrique sur prise de courant 230 volts. Il précise que le raccordement électrique réalisé à l'aide d'une rallonge n'est pas conforme aux règles de l'art et présente un caractère de dangerosité évident. La SARL Azur Alarme n'a pas vérifié la conformité de l'alimentation électrique équipant l'immeuble au matériel vendu,

- les racks installés en comble ne sont pas protégés des poussières ni des contraintes climatiques,

- et une caméra n'est pas opérationnelle de même qu'un des deux écrans proposés n'a pas été installé.

L'expert a également mis en évidence les défauts et manquements affectant la première installation (détection intrusion incendie) dont il estime le coût de la remise en état à 8 115 euro, mais cette question ne fait pas l'objet du litige en appel, celui-ci étant circonscrit à la seule installation de vidéosurveillance.

Toutefois, Mme D., en poursuivant la nullité de la vente pour abus de faiblesse et non la résolution du contrat, ne tire aucune des conséquences juridiques des manquements du vendeur à son obligation de délivrance prévues aux articles L. 311-31 et suivants du Code de la consommation (anciens articles L. 311-20 et 21) mais en déduit seulement, la preuve de l'abus de faiblesse dont elle aurait été victime : elle soutient en effet, que c'est bien parce que son jugement était altéré qu'elle a pu accepter sans réserve, lors du paiement le 8 décembre 2006, les travaux d'installation alors qu'ils n'étaient pas achevés et que la vidéosurveillance ne fonctionnait pas. Or, en l'absence de preuves objectives de la vulnérabilité et de l'altération du jugement, ainsi que de l'élément intentionnel de l'auteur des agissements critiqués, l'action de démarchage à domicile n'est pas répréhensible.

S'il est vrai que l'action a été initialement engagée par les assignations des 18 et 31 mars 2008 sur le fondement des anciens articles L. 311-20 et 21 du Code de la consommation dans leur rédaction antérieure à la loi du 1er juillet 2010, relatifs à l'obligation de délivrance du vendeur et à l'interdépendance des contrats de vente et de prêt, force est de constater que ce moyen n'a pas été repris en cause d'appel et que le juge n'a pas la faculté de modifier les fondements juridiques de l'action.

Dans ces conditions, le jugement déféré doit être confirmé en toutes ses dispositions.

Par ces motifs, LA COUR, après en avoir délibéré, statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire et en dernier ressort, Confirme le jugement du Tribunal de grande instance de Dax en date du 23 novembre 2011 en toutes ses dispositions ; Condamne Mme D. aux dépens d'appel ; Autorise, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile, les avocats de la cause qui en ont fait la demande à recouvrer directement contre la partie condamnée ceux des dépens dont ils auraient fait l'avance sans avoir reçu provision.