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Décisions

CA Paris, Pôle 4 ch. 9, 19 novembre 2015, n° 13-13255

PARIS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Sergent

Défendeur :

PV-CP Distribution (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Gimonet

Conseillers :

Mmes Grasso, Jeanjaquet

Avocats :

Mes Rosano, Vergne, Audinot

TI Paris, 16e arrdt., du 12 févr. 2013

12 février 2013

M. Joël Sergent a souhaité effectuer le 13 mars 2010 sur le site Internet de la société Pierre et Vacances une réservation de studios dans la résidence Les Issambres à Sainte Maxime pour la période du 19 juin au 17 juillet 2010 au tarif de 273 euro la semaine à laquelle la société Pierre et Vacances n'a pas donné suite.

Par acte délivré le 7 juin 2012, M. Sergent a assigné la société Pierre et Vacances Maeva Distribution devant le Tribunal d'instance de Paris 16e arrondissement afin d'obtenir sa condamnation à mettre à sa disposition les trois studios aux dates réservées et aux conditions tarifaires du mois de mars 2010, à lui payer la somme de 2 000 euro en réparation de son préjudice, la somme de 1 200 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile outre les dépens.

Par jugement du 12 février 2013, le tribunal d'instance a condamné la société Pierre et Vacances Maeva Distribution à payer à M. Joël Sergent la somme de 1 500 euro, la somme de 1 200 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires et a condamné Pierre et Vacances Maeva Distribution aux dépens.

Par déclaration du 1er juillet 2013, M. Sergent a relevé appel de la décision.

Selon ses conclusions du 23 décembre 2013, l'appelant sollicite la condamnation de la société Pierre et Vacances Maeva Distribution à mettre à sa disposition trois studios à Sainte Maxime aux calanques des Issambres aux dates initialement réservées soit sur la période comprise entre le 19 juin et le 17 juillet mais au titre de l'année 2014 et 2015 en fonction de la date à laquelle la décision de la cour sera rendue, à lui payer la somme de 2 000 euro à titre de dommages-intérêts toutes causes confondues, la somme de 2 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile outre les entiers dépens qui seront recouvrés directement dans les conditions de l'article 699 du Code de procédure civile.

Il fait valoir qu'il a été bien jugé que l'annonce émise sur Internet par la société Pierre et Vacances était de nature à induire en erreur le consommateur, ce que la société a reconnu aux termes de sa lettre recommandée avec accusé de réception du 9 avril 2010 en indiquant que les conditions de l'offre n'étaient pas clairement lisibles et que la société a commis une faute sur le fondement des articles L 121-1 et suivant du Code de la consommation et 1382 du Code civil ; qu'en conséquence, la société Pierre et Vacances doit mettre à sa disposition les studios qu'il pensait pouvoir réserver aux conditions fixées par l'offre du mois de mars 2010 ; que postérieurement au jugement dans le cadre de pourparlers qui n'ont pas abouti, la société Pierre et Vacances lui a proposé la mise à disposition d'un studio.

Il précise notamment en réplique aux arguments de l'intimée, que c'est en raison de l'impossibilité technique de réserver en ligne les studios litigieux qu'il a décidé d'adresser ses demandes de réservation par courriel ; que l'offre promotionnelle litigieuse faisait bien partie de l'offre Lucky 13 ; qu'il a toujours souhaité réserver trois appartements et non deux comme proposé par la société Pierre et Vacances dans le cadre d'un geste commercial ; qu'il n'a jamais été de mauvaise foi, la société Pierre et Vacances n'ayant cessé de lui faire croire qu'un rapprochement amiable pouvait être envisagé.

Aux termes de ses conclusions du 3 janvier 2014 la société PV-CP Distribution sollicite l'infirmation du jugement et demande que M. Sergent soit débouté de l'intégralité de ses demandes et en toute hypothèse qu'il soit débouté de sa demande de mise à disposition de trois studios à Sainte Maxime, qu'il soit condamné à lui payer la somme de 3 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, outre les entiers dépens qui seront recouvrés directement dans les conditions de l'article 699 du Code de procédure civile.

Elle fait valoir que sur son site Internet, elle a proposé deux offres promotionnelles distinctes dénommées " Lucky 13 " et " vacances promotionnelles d'été ", cette dernière étant une promotion sur le prix d'appel d'une résidence de Pierre et Vacances, la réservation devant, pour en bénéficier, être effectuée plus de 180 jours avant la date de séjour ; que M. Sergent a adressé ses demandes de réservations par mail, après avoir tenté sans succès d'effectuer la commande en ligne, au prix d'appel de 273 euro pour des périodes où ce tarif n'était pas applicable ; que face à l'insistance de M. Sergent, elle a proposé à titre commercial deux appartements pour la période souhaitée au prix d'appel, offre finalement refusée par M. Sergent.

Elle soutient qu'elle n'a pas eu de pratiques trompeuses au sens de l'article L. 121-1 du Code de la consommation ; que le consommateur ne pouvait confondre les deux offres promotionnelles mises en ligne sur le site Internet de P&V l'offre " Lucky 13 " et l'offre " spécial vacances été " qui seule proposait des tarifs promotionnels pour la Résidence les Issambres à Saint Maxime, les deux offres étant bien distinctes, délimitées pas des encarts de couleur différentes et parfaitement différenciées ; qu'il n'existait aucune incertitude sur le prix ni sur la période de réservation puisqu'à coté du prix promotionnel se trouvait une flèche blanche invitant le consommateur à cliquer pour accéder à une page de renvoi précisant les conditions de l'offre et que si M. Sergent avait procédé à sa réservation en ligne, il aurait nécessairement eu connaissance des conditions de l'offre, cette flèche blanche laissait nécessairement entendre que le tarif et les dates données n'étaient qu'indicatifs.

Elle soutient, en toute hypothèse, que M. Sergent ne justifie pas de son préjudice alors qu'aucun lien contractuel ne s'est noué entre les parties ; que M. Sergent a démontré sa mauvaise foi tant dans le déroulement des faits en tentant d'imposer unilatéralement à la société P&V ses conditions de réservation que dans le cadre de la procédure en refusant de signer le protocole transactionnel proposé postérieurement au jugement dont il a tenté de modifier unilatéralement les termes.

SUR CE, LA COUR

Il est constant que c'est à partir de l'offre proposée par Pierre et Vacances sur son site Internet le 13 mars 2010, et plus précisément l'offre " spécial vacances d'été ", présentée à la suite offre promotionnelle intitulé " Lucky 13, 13 euros, 13 mars 13 destinations ", " 24 H pour réserver stock limité ", qui proposait notamment à Sainte Maxime résidences les Issambres, Pierre et Vacances un studio 4/5 personnes du 8 juin au 17 juillet 2010 au prix de 273 euro la semaine que M. Sergent a souhaité effectuer la réservation objet du présent litige.

Pour ce faire, il a adressé le 13 mars 2010, deux mails au service " relations client " à 20 h 10 et à 21 h 39 ainsi libellés : " Votre publicité indiquait que nous pouvions réserver à Sainte Maxime pour 273 euro la semaine un studio 4/5 personnes du 8 mai 2010 au 17 juillet 2010 et il était impossible de faire une réservation au tarif indiqué toute la journée du 13 mars 2010 " ; il demandait ensuite dans son premier mail la location d'un studio 4/5 pour la période du 19 juin au 17 juillet 2010 et dans son second mail celle d'un studio pour la période du 19 juin au 3 juillet 2010 et du 3 juillet au 17 juillet 2010 dans la résidence " Les Issambres " au prix de 273 euro par semaine de location.

Il lui a été répondu par mail du 22 mars 2010 notamment que " le Village Club des Issambres ne faisait pas partie de l'offre Lucky du 13 mars 2010 " et " que le tarif promotionnel que vous avez vu correspondait au prix d'appel c'est-à-dire un studio 4 personnes à la période la moins chère incluant la remise offre glissante incluse. Cette dernière vous permet d'obtenir jusqu'à 30 % de remise sur le prix de votre séjour d'une semaine si vous réservez 6 mois avant votre date de départ; lorsque vous avez consulté notre site Internet le 13 mars 2010, le tarif à partir de 273 euro était valable pour un séjour d'une semaine pendant la période du 18 septembre au 16 octobre 2010 ".

La présentation de l'offre " spécial vacances d'été " sur une page Internet essentiellement consacrée à l'offre promotionnelle " Lucky 13 ", même si elle ne pouvait se confondre totalement avec cette offre au niveau de la présentation, les couleurs étant différentes et les photos ne portant pas le cachet " 13 euro/nuit/pers ", était de nature à présenter cette offre à l'instar de toutes les offres promotionnelles figurant sur la page comme exceptionnelle, limitée à la journée du 13 mars, en proposant un prix attractif fixe de 273 euro la semaine pour Sainte Maxime pour la période du 8 juin au 17 juillet 2010 sous la seule condition ainsi qu'il est mentionné en gros caractère en tête de la page, de réserver dans les 24 h et ce jusqu'à épuisement du stock.

S'il ne peut être contesté ainsi que l'indique la société P&V qu'il s'agissait en réalité d'une publicité avec un simple prix d'appel et qu'en cliquant sur la flèche blanche figurant à côté du prix, les conditions réelles d'une réservation d'un studio à Sainte Maxime sur la période considérée étaient communiquées au consommateur, il n'en reste pas moins que les termes de la publicité étaient totalement mensongers puisque non seulement il n'était pas précisé, ainsi que l'a justement retenu le premier juge, qu'il s'agissait d'un prix d'appel mais surtout, selon les explications de la société P&V elle-même, le tarif de 273 euro était en toute hypothèse impossible à obtenir pour la période pourtant mentionnée sur la publicité en réservant le 13 mars, puisqu'il s'agissait d'un tarif qui supposait une réservation pour la période la moins chère et au moins 180 jours à l'avance soit en l'espèce, ne pouvant intervenir avant le 18 septembre 2010.

En conséquence, c'est à bon droit que le premier juge a considéré que M. Sergent a été victime d'une pratique commerciale trompeuse au sens de l'article L. 121-1 du Code de la consommation et il ne saurait lui être reproché d'avoir tenté d'obtenir de la société P&V qu'elle respecte les termes de son offre publicitaire mensongère en n'utilisant pas le système de réservation via Internet qui en toute hypothèse ne pouvait pas permettre une réservation aux tarifs proposés.

La responsabilité de la société PV-CP Distribution est en conséquence engagée sur le fondement de l'article 1382 du Code civil et elle doit réparer le préjudice moral subi par M. Sergent qui a été trompé sur le fait qu'il pourrait réserver des appartements à un prix avantageux sur la période considérée et qui a justement été évalué par le premier juge à la somme de 1 500 euro.

En revanche, les pourparlers intervenus avec la société Pierre et Vacances en vue d'une tentative de règlement amiable du litige et notamment la proposition faite par la société de louer à M. Sergent au prix de 273 euro un studio 5 personnes du 19 juin au 3 juillet 2010 et du 3 juillet au 17 juillet 2010 à laquelle M. Sergent n'a pas donné suite, ne sauraient créer de liens contractuels entre les parties et permettre à M. Sergent d'obtenir l'exécution forcée de la prestation, étant observé en tout état de cause, que celle-ci n'est plus possible en 2015 comme le demande M. Sergent.

En conséquence, le jugement dont appel sera confirmé en toutes ses dispositions.

M. Sergent, partie perdante en appel, sera condamné aux dépens.

En considération de la situation respective des parties, l'équité commande de ne pas faire application de l'article 700 du Code de procédure civile.

Par ces motifs, Confirme le jugement dans toutes ses dispositions, Y ajoutant, Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du Code de procédure civile en cause d'appel, Condamne M. Joël Sergent aux dépens de l'appel qui seront recouvrés directement dans les conditions de l'article 699 du Code de procédure civile.