ADLC, 3 décembre 2015, n° 15-DCC-157
AUTORITÉ DE LA CONCURRENCE
Décision
Relative à la prise de contrôle exclusif de la société GPG par la société Cerp Bretagne Atlantique
L'Autorité de la concurrence,
Vu le dossier de notification adressé au service des concentrations le 5 octobre 2015 et déclaré complet le 17 novembre 2015, relatif à la prise de contrôle exclusif de la société GPG par la société Cerp Bretagne Atlantique, formalisé par un protocole d'accord de cession de titres du 21 octobre 2015 ; Vu le livre IV du Code de commerce relatif à la liberté des prix et de la concurrence, et notamment ses articles L. 430-1 à L. 430-7 ; Vu les éléments complémentaires transmis par les parties au cours de l'instruction ; Adopte la décision suivante :
I. Les entreprises concernées et l'opération
1. Cerp Bretagne Atlantique est société anonyme coopérative détenue par des pharmaciens coopérateurs. Ce groupe est actif dans plusieurs secteurs de la distribution de médicaments en tant que grossiste répartiteur et dépositaire en France métropolitaine et exportateur de produits pharmaceutiques. Il exerce également une activité de location et de vente de matériel médical. Cerp Bretagne Atlantique contrôle notamment la société Medical Export, filiale du groupe dédiée aux activités hors métropole.
2. GPG est une société détenue par la société Groupement Pharmaceutique Guadeloupéen. Active dans le secteur de la distribution de médicaments, elle exerce une activité de grossiste répartiteur en Guadeloupe.
3. L'opération notifiée, formalisée par un protocole d'accord de cession de titres signé le 21 octobre 2015, prévoit l'acquisition par Cerp Bretagne Atlantique, via Medical Export, de l'intégralité du capital social et des droits de vote de GPG.
4. En ce qu'elle se traduit par la prise de contrôle exclusif de GPG par Cerp Bretagne Atlantique, l'opération constitue une concentration au sens de l'article L. 430-1 du Code de commerce.
5. Les entreprises concernées réalisent ensemble un chiffre d'affaires hors taxe total sur le plan mondial de plus de 75 millions d'euro (Cerp Bretagne Atlantique : 810,9 millions d'euro pour l'exercice clos le 31 décembre 2014 ; GPG : 34,3 millions d'euro pour le même exercice). Chacune de ces entreprises a réalisé dans un département d'Outre-mer un chiffre d'affaires supérieur à 15 millions d'euro (Cerp Bretagne Atlantique : 58,6 millions d'euro à La Réunion pour le même exercice ; GPG : 34,1 millions d'euro en Guadeloupe pour le même exercice). Compte tenu de ces chiffres d'affaires, l'opération ne relève pas de la compétence de l'Union européenne. En revanche, les seuils de contrôle mentionnés au III de l'article L. 430-2 du Code de commerce sont franchis. Cette opération est donc soumise aux dispositions des articles L. 430-3 et suivants du Code de commerce relatifs à la concentration économique.
II. Délimitation des marchés pertinents
6. Les parties sont toutes deux actives dans le secteur de la distribution de médicaments, en tant que grossiste répartiteur.
1. MARCHÉ DE SERVICES
7. Le grossiste-répartiteur est défini à l'article R. 5124-2, 5° du Code de la Santé Publique (" CSP ") comme " l'entreprise se livrant à l'achat et au stockage de médicaments autres que des médicaments expérimentaux, en vue de leur distribution en gros et en l'état ". Cette activité est soumise à certaines obligations, telle que la déclaration du territoire sur lequel est exercée la répartition pharmaceutique. Un grossiste-répartiteur peut, s'il remplit les conditions fixées à cet égard par le Code de la santé publique, et pour autant que cela ne crée pas de rupture d'approvisionnement sur le territoire national, procéder à l'exportation parallèle et/ou à l'importation parallèle de médicaments au sein de l'Union européenne (1).
8. La pratique constante des autorités de concurrence considère que le marché de la répartition pharmaceutique est un marché distinct (2). Plusieurs segmentations de ce marché ont été envisagées, notamment selon le type de produits dans la mesure où il existe des différences entre les médicaments sous brevet, les génériques, les médicaments non-remboursables et les produits parapharmaceutiques en termes de prix, de marges autorisées et de circuit de distribution. D'autres segmentations, selon le canal de distribution ou le type de médicaments (princeps / génériques / OTC) ont également été envisagées (3). Une segmentation entre full-liners et short-liners peut également être envisagée (4) : les full-liners proposent une offre complète, à savoir une livraison conventionnelle et fréquente (plusieurs fois par jour) de tous les produits aux prix légalement autorisés, tandis que les short-liners proposent une " livraison unique " (journalière ou hebdomadaire) des 200 spécialités les plus courantes à des prix beaucoup plus avantageux et à des conditions logistiques moins exigeantes.
9. Au cas d'espèce, il n'est pas nécessaire de se prononcer sur l'ensemble de ces délimitations, les conclusions de l'analyse concurrentielle demeurant inchangées quelle que soit la définition du marché retenue.
2. MARCHÉ GÉOGRAPHIQUE
10. La pratique décisionnelle a laissé ouverte la définition géographique du marché de la répartition pharmaceutique. Le ministre a toutefois relevé que les conditions d'accès au marché étaient homogènes d'une région à l'autre, que la demande se structurait de manière croissante sur une base nationale (constitution de groupements de pharmaciens), et que les principaux opérateurs étaient implantés sur l'ensemble du territoire national (5). Toutefois, le ministre de l'économie a laissé ouverte la question de savoir si le marché pouvait être défini à un niveau national ou local (6).
11. Il n'est pas nécessaire de trancher cette question au cas d'espèce, les conclusions de l'analyse concurrentielle restant inchangées quelle que soit la délimitation géographique retenue. L'analyse sera menée au niveau national, les activités de parties ne se chevauchant pas au niveau local. En effet, GPG est actif uniquement en Guadeloupe, département d'Outre-mer où Cerp Bretagne Atlantique n'est pas présent.
III. Analyse concurrentielle
12. Sur le marché global de la répartition pharmaceutique en France, la part de marché cumulée des parties est estimée à 3,6 %. Ce marché est constitué de quatre acteurs principaux qui détiennent ensemble 85 % de parts de marché : le groupe OCP (34,3 %), Alliance Healthcare (21,8 %), Cerp Rouen (18,8 %) et Cerp Rhin-Rhône Méditerranée (10,9 %) (7).
13. Quelle que soit la segmentation du marché envisagée, la partie notifiante estime que la part de marché cumulée des parties reste inférieure à 5 %.
14. En conséquence, l'opération n'est pas de nature à porter atteinte à la concurrence sur le marché de la répartition pharmaceutique.
DECIDE
Article unique : L'opération notifiée sous le numéro 15-172 est autorisée.
Notes :
1 Voir l'avis de l'Autorité de la concurrence n°13-A-24 du 19 décembre 2013 relatif au fonctionnement de la concurrence dans le secteur de la distribution du médicament à usage humain en ville.
2 Voir en dernier lieu la décision n°15-DCC-113 du 25 août 2015 relative à la prise de contrôle exclusif de la société IMJ Finance par la société Atrilux.
3 Voir notamment la lettre du ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi C2008-111 du 20 novembre 2008 précitée.
4 Voir la décision de la Commission du 30 août 2001, COMP/M.2573, A&C / GROSSFARMA. 3
5 Id.
6 Voir la décision du ministre de l'économie du 20 janvier 2003 relative à une concentration dans le secteur des grossistes répartiteurs pharmaceutiques et la lettre du ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi C2008-111 du 20 novembre 2008 précitée.
7 " La répartition pharmaceutique, l'essentiel 2015 ", Chambre syndicale de la répartition pharmaceutique, 2015.