Cass. 1re civ., 14 janvier 2016, n° 14-29.908
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Batut
Avocats :
SCP Foussard, Froger, SCP Lesourd
LA COUR : - Attendu, selon la décision attaquée (juridiction de proximité de Coutances, 1er septembre 2014), qu'ayant acquis en mai 2004 de M. X des planches de bois pour construire une terrasse, M. Y a constaté, au mois de juin 2011, une dégradation du bois et assigné son vendeur afin d'obtenir l'indemnisation de son préjudice ;
Sur le premier moyen : - Attendu que M. Y fait grief au jugement de le déclarer irrecevable et mal fondé en ses demandes alors, selon le moyen : 1°) qu'il résulte de l'article 1648 du Code civil, dans sa version antérieure à l'ordonnance n° 2005-136 du 17 février 2005 ayant porté le délai pour agir à deux ans à compter de la découverte du vice, que l'action résultant des vices rédhibitoires devait être intentée par l'acquéreur, dans un bref délai, suivant la nature des vices rédhibitoires, et l'usage du lieu où la vente a été faite ; qu'il résulte de l'ordonnance n° 2005-136 du 17 février 2005 que ses dispositions ne sont applicables qu'aux contrats conclus postérieurement à son entrée en vigueur ; qu'en l'espèce, la facture était de mai 2004 ; qu'en déclarant l'action résultant des vices rédhibitoires prescrites en ce qu'elle avait été intentée plus de deux ans après la découverte des désordres, le juge de proximité, qui n'a pas recherché si l'action avait introduite dans un bref délai, a statué par un motif inopérant, en violation l'article 1648 du Code civil, dans sa version antérieure à l'ordonnance n° 2005-136 du 17 février 2005 ; 2°) que le juge qui déclare que la demande dont il est saisi est irrecevable, excède ses pouvoirs en statuant au fond sur cette demande ; qu'en déclarant mal fondée la demande indemnitaire au titre des vices cachés, après avoir pourtant retenu qu'une telle demande était irrecevable comme prescrite, le juge de proximité a excédé ses pouvoirs, en violation de l'article 122 du Code de procédure civile ;
Mais attendu que, d'abord, le jugement relève que la juridiction a été saisie presque trois ans après la découverte des désordres et fait ainsi ressortir que l'action n'a pas été engagée à bref délai, au sens de l'article 1648 du Code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 17 février 2005, la référence à la nécessité d'agir dans le délai de deux ans étant erronée mais surabondante ; qu'ensuite, ayant déclaré l'action irrecevable sur le fondement des vices cachés, la juridiction était tenue de statuer au fond sur l'autre fondement invoqué par M. Y, tenant à un manquement du vendeur à son devoir d'information et de conseil ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
Sur le deuxième moyen : - Attendu que M. Y fait grief au jugement de rejeter sa demande et de le condamner au paiement de dommages-intérêts pour procédure abusive, alors, selon le moyen, que l'obligation de conseil à laquelle est tenu le vendeur lui impose de se renseigner sur les besoins de l'acheteur et de l'informer de l'adéquation du matériel proposé à l'utilisation qui en est prévue ; qu'en se bornant à retenir, pour débouter l'acheteur de sa demande indemnitaire fondée sur un manquement du vendeur à son devoir d'information, que la livraison était conforme à la commande passée et qu'il appartenait à l'acheteur de prendre les mesures nécessaires pour protéger le bois des intempéries, sans rechercher si le vendeur professionnel s'était renseigné sur les besoins de l'acheteur profane, afin d'être en mesure de l'informer quant à l'adéquation de la chose proposée à l'utilisation qui en était prévue, le juge de proximité a privé sa décision de base légale au regard des articles 1147 et 1615 du Code civil ;
Mais attendu que le jugement relève que, selon les déclarations de M. Y, l'entreprise X, auprès de laquelle il a acheté les planches de sapin litigieuses, scie et vend du bois hors imprégnation ; qu'il en résulte qu'il disposait des informations utiles sur les caractéristiques essentielles de la marchandise vendue et ne pouvait ignorer, en choisissant de s'adresser à un professionnel qui vendait du bois non traité, qu'il ne bénéficiait d'aucune protection contre les intempéries ; que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu que le rejet des deux premiers moyens rend sans objet le troisième moyen qui invoque une cassation par voie de conséquence ;
Par ces motifs : rejette le pourvoi.