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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 5, 25 février 2016, n° 14-15368

PARIS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Cipodec (SARL)

Défendeur :

Reverdy (ès qual.) , S2J (SARL), Leasecom (SAS), Leasecom Financial Assets (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Perrin

Conseillers :

M. Dabosville, Mme Rohart-Messager

Avocats :

Me Lugosi, Attlan, Reverdy, Cauwel

T. com. Paris, 17e ch., du 25 juin 2014

25 juin 2014

Rappel des faits et procédure

La société Cipodec, spécialisée dans la découpe des matériaux souples, a fait l'acquisition, entre avril 2011 et décembre 2011, de matériels de défibrillation auprès de la société S2J, lequel matériel a fait l'objet de contrats de location souscrits auprès de la société Leasecom.

La société Cipodec ayant interrompu le paiement des loyers mensuels à compter d'octobre 2012, la société Leasecom a entrepris des démarches invitant le loueur à régulariser sa situation.

C'est dans ce contexte que la société Cipodec a assigné en date des 18 et 19 mars 2013 les sociétés Leasecom et S2J, demandant au tribunal de :

- prononcer la nullité des quatre contrats numéro 211 E72293, 211E72913, 211 E73993, 211 E00606 pour dol,

- condamner solidairement les sociétés S2J et Leasecom à rembourser à la société Cipodec la totalité des loyers indûment versées avec intérêts à compter du premier paiement,

- à titre subsidiaire, ordonner la résiliation judiciaire des quatre contrats précités et condamner les sociétés S2J à garantir toutes condamnations éventuelles à intervenir contre la société Cipodec,

- débouter la société Leasecom de ses demandes, fins et conclusions,

- condamner la société Leasecom à verser à la société Cipodec une somme de 5 000 euro à titre de dommages et intérêts,

- condamner solidairement les sociétés Leasecom et S2J au paiement de 3 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

Par jugement, assorti de l'exécution provisoire, du 26 juin 2014 le Tribunal de commerce de Paris a :

- Débouté la SARL Cipodec de l'ensemble de ses demandes,

- Condamné la SARL Cipodec à payer à la société Leasecom Financial Assets la somme de 31 350,75 euro à titre d'indemnité de résiliation,

- débouté la société Leasecom Financial Assets de sa demande de restitution du matériel loué, sous astreinte,

- débouté la SARL Cipodec de son appel en garantie formé à l'encontre de la société S2J,

- condamné la SARL Cipodec à verser à la société Leasecom la somme de 2 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, débouté la société Leasecom du surplus de sa demande formée de ce chef,

- ordonné l'exécution provisoire de ce jugement, sans constitution de garantie,

- condamné la SARL Cipodec aux dépens.

La société Cipodec a interjeté appel le 18 juillet 2014.

Dans ses dernières conclusions du 14 octobre 2014 la société demande à la cour de :

- Réformer le jugement rendu par le Tribunal de commerce de Paris en date du 25 juin 2014,

A titre principal :

- Constater que les contrats ne satisfont pas aux exigences légales du Code de la consommation, en ce qu'ils ne portent pas mention des textes légales (sic) obligatoirement reproduits,

- Dire et juger que les deux sociétés sont responsables in solidum du défaut de mentions obligatoires,

- En conséquence, prononcer la nullité des 4 contrats n° 211 E 72293 du 22 avril 2011, n° 211 E 72913 du 27 mai 2011, n° 211E73993 du 27 juillet 2011 et n° 211E00606 du 5 décembre 2011,

- Condamner la société Leasecom à rembourser à la société Cipodec la totalité des loyers indûment versés, outre frais et assurance, avec intérêts au taux légal, à compter du premier paiement, soit la somme de 9585,83 euro du 1er mai 2011 au 1er octobre 2012, outre un loyer supplémentaire prélevé en novembre 2013, relativement aux contrats n° 211E72293, 211E2913, 211E73993, 211E00606,

- Fixer la créance de la société S2J, entre les mains du liquidateur judiciaire, Maître Reverdy, à la somme de 9 585,83 euro en remboursement des loyers indûment versés, outre frais et assurance, du 1er mai 2011 au 1er octobre 2012, outre un loyer supplémentaire prélevé en novembre 2013, relativement aux contrats n° 211 E 72293, 211 E 2913, 211E73993, 211E00606, outre intérêt aux taux légal,

- Infirmer la décision du tribunal de commerce en ce qu'il a condamné la société Cipodec au règlement de la somme de 31 350,75 euro.

A titre subsidiaire :

- Constater que les sociétés Leasecom et S2J ont usé de manœuvres dolosives pour obtenir le consentement de la société Cipodec dans la conclusion des contrats n° 211 E 73993 du 27 juillet 2011 et n° 211 E 0606 du 5 décembre 2011,

- Dire et juger que les deux sociétés sont responsables in solidum des manœuvres dolosives,

- En conséquence, prononcer la nullité des 2 contrats numéro 211E73993, 211E00606 pour dol,

- Infirmer la décision du Tribunal de commerce en ce qu'il a condamné la société Cipodec au règlement de la somme de 31 350,75 euro,

- Condamner la société Leasecom à rembourser à la société Cipodec la totalité des loyers indûment versés, outre frais et assurance, avec intérêts au taux légal, à compter du premier paiement, soit la somme de 3 801,64 euro du 1er octobre 2011 au 1er octobre 2012, outre un loyer supplémentaire prélevé en novembre 2013, relativement aux contrats n° 211E73993, 211E00606,

- Fixer la créance de la société S2J, entre les mains du liquidateur judiciaire, Maître Reverdy, à la somme de 3 801,64 euro du 1er octobre 2011 au 1er octobre 2012, outre un loyer supplémentaire prélevé en novembre 2013, relativement aux contrats n° 211E73993, 211E00606 correspondant aux loyers indûment versés outre frais et assurance, outre intérêt au taux légal ;

- Constater, également, que le matériel, objet du contrat n° 211 E 72913 n'a jamais été restitué,

- Dire et juger que les deux sociétés sont responsables in solidum de l'inexécution contractuelle,

- En conséquence, prononcer la résiliation du contrat n° 211 E 72913,

- Condamner la société Leasecom à rembourser à la société Cipodec la totalité des loyers indûment versés, outre frais et assurance, avec intérêts à compter du premier paiement, soit la somme de 4 311,03euro, équivalant au montant des loyers indûment versés avec intérêts au taux légal, à compter du premier paiement intervenu du 1er juin 2011 au 1er octobre 2012, outre un loyer supplémentaire prélevé en novembre 2013, relativement au contrat n° 211E72913,

- Fixer la créance de la société S2J, entre les mains du liquidateur judiciaire, Maître Reverdy, à la somme de 4 311,03 euro, équivalant au montant des loyers indûment versés, outre frais et assurance, avec intérêts au taux légal, à compter du premier paiement intervenu du 1er juin 2011 au 1er octobre 2012, outre un loyer supplémentaire prélevé en novembre 2013, relativement au contrat n° 211E72913 correspondant aux loyers indûment versés,

- En conséquence, condamner la société Leasecom à rembourser à la société Cipodec la totalité des loyers indûment versé, outre frais et assurance, des contrats n° 211E72913 et n° 211E73993, 211E00606 avec intérêts au taux légal, à compter du premier paiement intervenu le 1er juin 2011 jusqu'au 1er octobre 2012, outre un loyer supplémentaire prélevé en novembre 2013, soit la somme de 8 112,67 euro,

- Fixer la créance de la société S2J, entre les mains du liquidateur judiciaire, Maître Reverdy, à la somme de 8 112,67 euro, équivalant au montant des loyers indûment versés, outre les frais et assurances, avec intérêts à compter du premier paiement intervenu le 1er juin 2011 jusqu'au 1er octobre 2012, outre un loyer supplémentaire prélevé en novembre 2013, relatif au contrat n° 211E72913 et n° 211E73993, 211E00606.

A titre infiniment subsidiaire :

- Ordonner la résiliation judiciaire des contrats de location n° 211E72913, 211E73993, 211E00606 en raison du défaut de livraison et de mise à disposition des matériels,

- Dire et juger que les deux sociétés sont responsables in solidum des inexécutions contractuelles,

- En conséquence, infirmer la décision du tribunal de commerce en ce qu'il a condamné la société Cipodec au règlement de la somme de 31 350,75 euro,

- Condamner la société Leasecom à rembourser à la société Cipodec la totalité des loyers indûment versés, outre frais et assurance, avec intérêts à compter du premier paiement, soit la somme de 8 112,67 euro en remboursement des loyers indûment versés du 1er juin 2011 au 1er octobre 2012, outre un loyer supplémentaire prélevé en novembre 2013, relativement aux contrats n° 211E72913, 211E73993, 211E00606,

- Fixer la créance de la société S2J, entre les mains du liquidateur judiciaire, Maître Reverdy, à la somme de 8 112,67 euro en remboursement des loyers indûment versés, outre frais et assurances, du 1er juin 2011 au 1er octobre 2012, outre un loyer supplémentaire prélevé en novembre 2013, relativement aux contrats n° 211E72913, 211E73993, 211E00606.

A titre infiniment infiniment subsidiaire :

- Prononcer la résolution du contrat de vente passé entre la société Leasecom et Cipodec relativement au matériel objet des contrats n° 211E72913, 211E73993, 211E00606 pour inexécution contractuelle de la société S2J et interdépendance des contrats de vente et de location,

- En conséquence, prononcer la résolution des contrats de vente passés entre la société S2J et Leasecom,

- En conséquence, prononcer la résolution subséquente des contrats location n° 211E72913, 211E73993, 211E00606 en raison de l'interdépendance des contrats,

- En conséquence, Condamner la société Leasecom à rembourser à la société Cipodec la totalité des loyers indûment versés avec intérêts à compter du premier paiement, soit la somme de 8 112,67 euro en remboursement des loyers indûment versés du 1er juin 2011 au 1er octobre 2012, outre un loyer supplémentaire prélevé en novembre 2013, relativement aux contrats n° 211E72913, 211E73993, 211E00606.

En tout état de cause,

- Condamner la société Leasecom à verser à la société Cipodec une somme de 5 000 euro à titre de dommages et intérêts,

- Fixer la créance de la société S2J, entre les mains du liquidateur judiciaire, Maître Reverdy, à la somme de 5 000 euro à titre de dommages et intérêts,

- Condamner la société Leasecom au paiement de 10 000 euro au titre de l'article 700 du C.P.C ainsi qu'aux frais et dépens,

- Fixer la créance de la société S2J, entre les mains du liquidateur judiciaire, Maître Reverdy, à la somme de 10 000 euro au titre de l'article 700 du C.P.C ainsi qu'aux frais et dépens, dont distraction sera faite auprès de Maître Maryline Lugosi de la Selarl Moreau-Gervais-Guillou-Vernade-Simon-Lugos, avocat sur son affirmation de droit.

Dans ses dernières conclusions du 9 décembre 2014 la société Leasecom demande à la cour de :

1/ A titre principal,

- Confirmer le jugement en toutes ses dispositions.

2/ Subsidiairement, dans l'hypothèse où les contrats de location seraient résiliés :

- Constater la faute commise par la société Cipodec.

- Condamner la société Cipodec à payer à la société Leasecom la somme soit 29 867,70 euro TTC.

- Constater que la société Cipodec ne démontre pas l'existence d'une faute quelconque commise par la société Leasecom.

- Rejeter la demande de la société Cipodec.

5/ En tout état de cause

- Condamner la société Cipodec à payer à Leasecom la somme de 3 000 euro en application de l'article 700 du CPC.

1. A titre principal :

Sur la nullité des contrats de location n° 211 e 72293 du 22 avril 2011, n° 211 e 72913 du 27 mai 2011, n° 211e73993 du 27 juillet 2011 n° 211e00606 du 5 décembre 2011 pour non-respect des mentions obligatoires du Code de la consommation

Afin de justifier sa demande en nullité des contrats en cause, la société Cipodec invoque les articles L. 121-21 et suivants du Code de la consommation ainsi que quatre arrêts de la 1re Chambre civile de la cour de cassation du 6 janvier 1993.

Elle se réfère à une décision de la cour de cassation selon laquelle un professionnel " a droit à la même protection qu'un particulier pour toute offre à lui faite sortant du cadre spécifique de son activité ".

Elle soutient que la Cour de cassation se réfère à la spécialité du démarché, afin de se prononcer sur l'applicabilité de la loi sur le démarchage.

Elle fait valoir que la loi n'est pas applicable lorsque la spécialité du professionnel lui permet d'apprécier l'opportunité du contrat proposé ; elle lui est, en revanche, applicable lorsque, n'ayant aucune compétence professionnelles en la matière, il " se trouvait dès lors dans le même état d'ignorance que n'importe quel autre consommateur ".

La société Cipodec ajoute que la loi dite " Hamon " du 17 mars 2014, concernant uniquement les contrats conclus après le 13 juin 2014, modifiant la loi relative au démarchage n'a pas pour autant privé le professionnel de la protection relative au démarchage et étend les dispositions protectrices relatives aux démarchages aux contrats hors établissements entre deux professionnels " dès lors que l'objet de ces contrats n'entre pas dans le champ de l'activité principale du professionnel sollicité et que le nombre de salariés employés par celui-ci est inférieur à cinq ".

Elle affirme qu'en l'espèce, le matériel livré n'est pas en lien direct avec l'activité professionnelle exercée par la société Cipodec qui est spécialisée, dans l'industrie textile.

Elle ajoute que ces contrats ne satisfont pas aux exigences légales, notamment les dispositions des articles L. 121-23 à L. 121-26 du Code de la consommation n'y sont pas reproduites.

L'appelante affirme, dans le même registre, que la particularité de la signature des contrats hors la mention de société S2J ne saurait avoir pour effet de contourner les règles d'ordre public, et que par conséquent, les quatre contrats sont alors atteints d'une nullité d'ordre public.

L'intimée réplique en avançant que la société Cipodec est une personne morale, commerçante de surcroît, et qu'elle ne peut invoquer les dispositions de l'article L. 121-21 du Code de la consommation puisque ce dernier est applicable au démarchage auprès de personnes physiques.

2. A titre subsidiaire :

Sur la nullité des contrats de location n° 211e00606 du 5 décembre 2011 et n° 211e73993 du 25 août 2011 et la résiliation judiciaire du contrat n° 211 e 72913 du 31 mai 2011.

2.1 La nullité des contrats passés pour dol.

La société Cipodec invoque les articles 1134, 1108,1109 et 1116 du Code civil et fait valoir que c'est à tort que le tribunal de commerce de Paris a cru pouvoir juger que les manœuvres dolosives invoquées par elles n'émanaient pas de la société de location financière, Leasecom, mais du commercial de la société S2J pour retenir que ces manœuvres dolosives ne pouvaient être opposées à la société Leasecom.

Elle défend la thèse selon laquelle des manœuvres dolosives ont été utilisées par les sociétés Leasecom et S2J pour parvenir à faire régulariser à la société Cipodec des contrats successifs.

Selon la société Cipodec, la société Leasecom l'a démarchée par l'intermédiaire de la société S2J, par des présentations fallacieuses de la nécessité de conclure de nouveaux contrats, et elle obtenu la signature de 4 contrats distincts, alors que celle-ci avait eu tout loisir de penser qu'en réalité les contrats se substituaient les uns aux autres : ainsi son consentement a été obtenu par des manœuvres commerciales dolosives faisant suite à un démarchage et notamment un dialogue au terme duquel le gérant de la société Cipodec a cru à une substitution de chacun des contrats.

Elle affirme que le matériel a prétendument été livré, selon les procès-verbaux de livraison, à même date que la commande du matériel. Or, selon elle il serait totalement " ubuesque ", compte tenu de la nature du matériel en cause, nécessitant une installation et une programmation particulière, d'imaginer que les commerciaux de la société S2J aient en permanence à leur disposition, du matériel de défibrillation cardiaque en stock, qu'ils pourraient livrer et installer au jour même de la commande.

Elle considère que ces documents, à l'instar des contrats de location, ont été purement et simplement régularisés en usant de manœuvres dolosives.

Dans un registre similaire, la société Cipodec avance qu'il est incohérent qu'une société composée seulement de 5 salariés puisse, de manière libre et éclairée et en toute connaissance de cause, conclure 4 contrats distincts correspondants à 5 armoires murales, 6 défibrillateurs, et 2 kits à oxygène, avec un coût mensuel de 510euro HT.

La société Cipodec affirme encore que les constatations de l'officier ministériel permettent d'établir qu'un seul et unique défibrillateur a été installé au sein de la société Cipodec ; que le constat de Maître Reynaud permet, en outre, de démontrer que le numéro de référence du seul défibrillateur présent au sein de la société Cipodec ne correspond même pas au numéro de référence indiqué sur la facture.

Elle fait valoir que les attestations produites au débat, émanant tant du personnel que des clients ou cocontractants de la société Cipodec, témoignent de la livraison d'un seul défibrillateur au sein de la société.

En réponse à ces allégations, l'intimée affirme que Leasecom qui n'était pas présente lors de la signature par Cipodec des contrats de location, ne peut par définition se prononcer sur les circonstances dans lesquelles ces contrats de location ont été conclus par l'intermédiaire de S2J.

L'intimée ajoute à ce propos que la société Cipodec se contente d'affirmations péremptoires et générales quant à l'existence de manœuvres dolosives commises par le fournisseur mais qu'en aucune manière elle ne se livre à une description précise et circonstanciée des manœuvres dont elle prétend avoir été la victime.

2.2 La résiliation judiciaire du contrat n° 211 E 72913 du 27 mai 2011.

La société Cipodec invoque les articles 1134, 1147 et 1108 du Code civil afin de demander la résiliation judiciaire du contrat n° 211 E 72913 passé pour inexécution contractuelle.

Pour l'appelante, les constatations effectuées par les deux Huissiers de Justice mandatés permettent d'établir que le fournisseur a manqué à son obligation contractuelle de livraison et qu'un seul et unique défibrillateur a été installé au sein de la société Cipodec.

Elle considère que les procès-verbaux de livraison ne peuvent établir la réception et la mise à disposition dudit matériel dans la mesure où ceux-ci apparaissent totalement incohérents et fantaisistes.

S'agissant de l'inapplicabilité de l'article 5 des conditions générales de vente du contrat de location, la société Cipodec estime que la société Leasecom ne peut invoquer l'application de la clause aux termes de laquelle, le locataire renoncerait à tous recours contre le bailleur en cas de défaillance ou de vices cachés ou encore renoncerait à tous recours relatif à l'exécution des prestations ou garanties.

Selon elle, l'inexécution contractuelle que constitue l'absence de livraison du matériel n'est pas expressément visée dans les termes de cette clause.

Leasecom répond que la société Cipodec sollicite la résiliation des contrats de location au motif que les équipements n'auraient pas été livrés alors même qu'elle verse aux débats, pour chaque contrat de location, les PV de réception qu'elle a signés, reconnaissant pour chaque contrat la livraison effective des équipements.

Pour l'intimée, la société Cipodec ne démontre pas le défaut de livraison des équipements, et si par impossible Cipodec, parvenait à faire la démonstration que les équipements donnés en location par Leasecom et livrés par S2J hors la présence de Leasecom, n'avaient finalement pas été livrés, la cour se trouverait alors confrontée à la faute contractuelle commise par Cipodec. Cette faute consisterait selon l'intimée en ce que la société Cipodec aurait régularisé avec une négligence coupable, des documents contractuels qui auraient conduit Leasecom à payer à S2J les factures relatives à la fourniture d'équipements non livrés.

L'appelante affirme par ailleurs, en s'appuyant sur la jurisprudence de la Chambre mixte de la Cour de cassation en date du 17 mai 2013 relative à l'interdépendance des contrats, que la résolution du contrat de vente passé entre les sociétés S2J et Leasecom entraînera la résolution subséquent du contrat de location passé entre la société Leasecom et Cipodec.

L'appelante demande par conséquent de prononcer la résolution des contrats de ventes passés entre la société Leasecom et S2J pour inexécution contractuelle et de prononcer, en conséquence, la résolution des contrats accessoires de location financière n° 211E72913, 211E73993, 211E00606.

A ces arguments tirés de la jurisprudence de la chambre mixte, Leasecom répond en soutenant que l'arrêt évoqué n'est pas pertinent et ne trouve pas à s'appliquer en l'espèce.

Pour l'intimée, les situations rapportées démontrent que le contrat de location était intimement lié à un contrat de service et que la mise à disposition de l'équipement était indivisible du service fourni par le fournisseur. Or tel n'est pas le cas en l'espèce.

Ainsi, selon Leasecom, dans l'arrêt n° 11-22.768 (Bar Le Paris), une convention de partenariat qui prévoyait la diffusion d'un contenu interactif était associée à un contrat de location de l'ensemble multimédia qui permettait cette diffusion. Il y avait un équilibre économique entre les deux conventions.

L'intimée affirme également que dans l'arrêt n° 11-22.927 (Business Support Service), une convention de télé sauvegarde était associée à un contrat de location financière. L'interruption des prestations de la convention de partenariat privait l'équipement de tout intérêt.

Pour Leasecom en l'espèce, il n'existe aucun contrat de service qui aurait été convenu entre Cipodec et S2J et dont l'interruption justifierait la résiliation du contrat de location financière.

Sur la demande de dommages et intérêts

L'appelante fait valoir que les manœuvres dolosives employées par la société S2J et Leasecom aux fins de les convaincre de conclure de nouveaux contrats, présentés comme des avenants, constituent une situation extrêmement préjudiciable pour elle, tenue de s'acquitter de 4 montants de loyers correspondant à 6 défibrillateurs alors qu'un seul a été commandé et livré.

L'attitude des sociétés Leasecom et S2J a été, selon l'appelante, particulièrement malhonnête et justifie par conséquent la condamnation de la société Leasecom à lui verser la somme de 5 000 euro à titre de dommages et intérêts, et à voir fixer la créance sur la société S2J à la somme de 10 000 euro à titre de dommages et intérêts.

En réponse à ces demandes, Leasecom avance qu'aucune faute de quelque nature que ce soit ne peut lui être imputée pour s'être vue proposé par S2J de financer dans le cadre de contrats de location, les investissements de Cipodec et s'être engagée dans le cadre des contrats de location sur la foi des documents contractuels qui lui ont été présentés par S2J, lesquels avaient été préalablement acceptés et signés par Cipodec.

L'intimée rappelle que Cipodec a signé les contrats de location, les PV de réception, les autorisations de prélèvement automatique et a bien remis son RIB.

Elle ajoute que si Cipodec est dans l'incapacité totale d'établir la moindre faute susceptible d'avoir été commise par Leasecom, cette dernière peut en revanche, à tout le moins, se prévaloir d'une légèreté coupable de Cipodec.

L'intimée avance que non seulement Leasecom n'a pas commis de faute, mais que seule Cipodec a pu se rendre coupable d'une négligence fautive, préjudiciable à Leasecom.

Leasecom formule une demande reconventionnelle en paiement de la somme de 31 350,75 euro correspondant à l'indemnité de résiliation. Elle invoque à cette fin l'article 10 des conditions générales qui prévoit qu'en cas de résiliation du contrat, ''le Bailleur aura droit à une indemnité égale à tous les loyers dus et à échoir jusqu'au terme de la période initiale, de location majorée de 10 %''.

L'indemnité de résiliation due pour l'ensemble des contrats, en application de l'article 10 s'élève, selon l'intimée, à la somme de 31 350,75 euro.

Cela étant exposé LA COUR

Sur l'application des dispositions des articles L. 121-21 et suivants du Code de la consommation

S'agissant d'une personne morale la société Cipodec n'est pas fondée à prétendre au bénéfice de ces dispositions qui ne s'appliquent, dans l'extension jurisprudentielle qu'elle invoque, qu'aux personnes physiques ;

En conséquence le moyen n'est pas fondé.

Au fond

Les moyens exposés plus haut, sous diverses qualifications tenant au dol, au vice du consentement ou in fine à l'absence de livraison du matériel se heurtent au défaut de preuves de telles allégations et que vient, notamment, contrarier la réalité de bons de livraisons dont la signature n'est pas discutée ;

Ne peuvent y être opposés les témoignages émanant de salariés de l'entreprise, de l'expert-comptable, voire de clients, ou encore deux constats d'huissier, toutes pièces qui, outre le fait qu'elles émanent pour certaines d'entre elles de membres de l'entreprise, attestent uniquement, non de la non-réception des matériels à la date des bons de livraison, mais de ce que, lors de visites, et dans la mesure de ce que les auteurs de ces attestations ont pu constater, postérieurement aux dits bons, un seul défibrillateur aurait été visible ;

Il n'existe également aucun témoignage de ce que les signatures attestant de ces livraisons, espacées en outre dans le temps aient été issues de manœuvres visant à fausser le consentement de leur auteur, en l'espèce un dirigeant d'entreprise qui aurait pu être leurré sur la nature même de son engagement, pourtant très clairement indiquée sur le document instrumentaire, en tant que " Procès-Verbal de Livraison " ;

La seule affirmation que ce dirigeant avait, selon l'appelante, " tout lieu de penser que les contrats se substituaient les uns aux autres " ne permet nullement de présumer ou d'établir l'existence de manœuvres dolosives au sens de l'article 1116 du Code civil, aucune preuve d'agissements déloyaux ou fautifs au sens de cet article n'étant établie ; il n'est pas plus possible de prendre en compte une erreur supposée du dirigeant de Cipodec sur la signification et la portée de sa signature ;

Les parties sont par ailleurs libres de leurs choix en matière économique et il n'appartient pas au juge de dire si l'achat de plusieurs défibrillateurs constitue une incohérence, laquelle, en tout état de cause, ne relèverait pas plus des dispositions précitées ;

S'évince de ce qui précède que les responsabilités tant de la société S2J que de la société Leasecom dans les opérations qui leur sont imputées ne sont pas établies ;

Les moyens invoqués pour écarter la réception du matériel sont en conséquence rejetés, de même que les demande de dommages et intérêts y attenantes ;

La demande de résiliation découlant de l'article 10 du contrat n'est pas discutable, pas plus que le montant des sommes réclamées sur cette base ;

Le jugement est en conséquence confirmé ;

L'équité commande d'allouer à la société Leasecom la somme de 3 000 euro au titre des dispositions de l'article 700 du CPC et de rejeter la demande de la société Cipodec de ce chef ;

Par ces motifs, Confirme le jugement en toutes ses dispositions. Y ajoutant, Condamne la société Cipodec à payer à la société Leasecom la somme de 3000 euro au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile. Rejette toutes autres demandes. Condamne la société Cipodec aux dépens.