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Décisions

Cass. 1re civ., 2 juillet 2014, n° 10-19.206

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

PARTIES

Demandeur :

Sartin

Défendeur :

CPAM de Paris, Ucb Pharma (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Gridel

Avocats :

SCP Rocheteau, Uzan-Sarano, Me Ricard

Versailles, 3e Ch., du 1er avr. 2010

1 avril 2010

LA COUR : - Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X est née en 1964, que, sa mère s'étant vue prescrire du Distilbène au cours de la grossesse, elle a recherché la responsabilité de la société UCB Pharma, venant aux droits du laboratoire qui commercialisait le produit, invoquant divers préjudices qu'elle imputait à son exposition in utero au diéthylstilboestrol (DES) ;

Sur le premier moyen, pris en ses deux premières branches, ci-après annexé :

Attendu que Mme X fait grief à l'arrêt de la débouter de son action en responsabilité contre la société UCB Pharma et de toute indemnisation ; Attendu qu'appréciant souverainement les éléments de preuve qui lui étaient soumis, au regard des connaissances scientifiques et de la situation médicale de Mme X, la cour d'appel a retenu que sa grossesse extra utérine était en relation avec des antécédents infectieux et qu'elle ne rapportait pas la preuve, qui lui incombait, de ce que la dysplasie apparue à deux reprises, et qui avait nécessité un traitement par vaporisation au laser, lequel n'avait, au demeurant, entraîné aucune séquelle physique, était imputable à son exposition in utero au DES ; qu'aucun des griefs n'est fondé ;

Et attendu que la troisième branche du moyen n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

Sur le second moyen, pris en sa première branche :

Attendu que cette première branche n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

Mais sur le second moyen, pris en sa seconde branche : - Vu l'article 1382 du Code civil, ensemble le principe de la réparation intégrale ;

Attendu que pour rejeter la demande en réparation du préjudice moral de Mme X, la cour d'appel retient qu'il n'est démontré l'existence d'aucun préjudice persistant, et en tout cas actuel, caractérisé, en liaison directe avec l'exposition in utero de celle-ci au Distilbène, notamment en ce que les experts faisaient état d'une pathologie subie, à tout le moins confuse, mais déniaient fermement le moindre rapport entre les difficultés professionnelles de Mme X au moment de l'expertise et cette exposition, et qu'ils soulignaient l'absence de manifestation de véritable désir d'enfant, liée tant à l'investissement professionnel de Mme X qu'à son angoisse favorisée par un contexte familial ;

Qu'en statuant ainsi, quand elle avait constaté que Mme X avait vécu, depuis son plus jeune âge, dans une atmosphère de crainte, d'abord diffuse, car tenant à l'anxiété de sa mère, médecin, qui connaissait les risques imputés à l'exposition de sa fille in utero au Distilbène, puis par les contrôles gynécologiques majorés, exigés et pratiqués lors des événements médicaux survenus, en raison de son exposition au DES, faisant ainsi ressortir que Mme X avait subi, fût-ce dans le passé, un préjudice moral certain et en lien avec cette exposition, qu'elle se devait de réparer, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences de ses constatations au regard du texte et du principe susvisé ;

Par ces motifs : casse et annule, mais seulement en ses dispositions relatives au préjudice moral éprouvé par Mme X du fait de son exposition in utero au DES, l'arrêt rendu le 1er avril 2010, entre les parties, par la Cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la Cour d'appel de Paris.