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Décisions

CA Lyon, 1re ch. civ. A, 3 mars 2016, n° 14-04410

LYON

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

STC (SAS), MMA IARD

Défendeur :

STPI Epoxy (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Gaget

Conseillers :

Mme Clement, M. Nicolas

Avocats :

Selarl Laffly & Associés-Lexavoué Lyon, Selas Lamy-Lexel Avocats Associés, Selarl Vital-Durand, Associés, SCP Aguiraud, Nouvellet, Me Nief

T. com. Lyon, du 17 avr. 2014

17 avril 2014

Vu le jugement du Tribunal de commerce de Lyon en date du 17 avril 2014 qui déclare inopposables à la société Epoxy les conditions générales de vente de la société STC, qui dit qu'il n'y a pas eu de cahier des charges, qui condamne la société STC à payer à la société Epoxy les sommes suivantes :

- 69 000 euro à titre de dommages et intérêts concernant la cabine de poudrage,

- 10 965 euro à titre de dommages et intérêts pour le préjudice lié à l'arrêt de la production pendant les travaux de cette cabine,

- 15 984 euro à titre de réparation du vice caché constitué par les défaillances du système d'entrainement par chaînes du traitement de surface,

Qui déboute la société Epoxy de sa demande de reprise des pièces défectueuses et de toutes ses autres demandes y compris de celle concernant le changement de la cuve de dégraissant et qui condamne la société MMA IARD à relever et garantir la société STC de sa condamnation de la somme de 10 965 euro, déduction faite de la franchise contractuelle ;

Vu l'appel régulièrement formé par la société STC le 28 mai 2014 ;

Vu l'appel régulièrement formé par la société Epoxy le 30 mai 2014 ;

Vu l'ordonnance de jonction en date du 10 février 2015 ;

Vu les conclusions en date du 6 octobre 2014 par lesquelles la société Epoxy tend à la confirmation partielle du jugement attaqué en ce qu'il condamne la société STC à verser une somme totale de 95 949 euro à la société Epoxy aux motifs que l'expert judiciaire a retenu la non-conformité de la cabine de poudrage à la commande et aux normes de sécurité en vigueur ainsi que les vices cachés affectant le système d'entrainement du traitement de surface mais par lesquelles elle tend à la réformation du jugement en ce qu'il l'a déboutée de ses demandes concernant les vices cachés affectant la cuve et le préjudice lié à la perte de marge sur coût variable, au motif que tous les organismes spécialisés intervenus en présence de l'expert judiciaire ont conclu que la cuve de dégraissage était impropre à sa destination et que Monsieur Moncorgé, expert-comptable près la cour a évalué le préjudice subi comme étant égal à la perte de marge sur coût variable ;

Vu les mêmes conclusions par lesquelles la société Epoxy demande à la cour de condamner la société STC à lui verser les sommes suivantes :

- 69 000 euro au titre de la remise en conformité de la cabine de poudrage,

- 10 965 euro au titre de la perte de marge pendant les travaux sur la cabine de poudrage,

- 15 984 euro au titre de la remise en état du système d'entrainement,

- 39 927 euro au titre du changement de la cuve de dégraissant,

- 248 100 euro au titre de la perte de marge sur coûts variables,

et qui demande à la cour de condamner la société MMA IARD à garantir la société STC à hauteur de 259 065 euro au titre de la perte de marge pendant les travaux sur la cabine de poudrage et au titre de la perte de marge sur coûts variables, outre la somme de 15 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Vu les conclusions en date du 8 octobre 2014 par lesquelles la société STC tend à la réformation partielle du jugement en ce qu'il l'a condamné à verser à la société Epoxy la somme totale de 95 949 euro, aux motifs que :

- aucun cahier des charges n'a été préalablement élaboré avec la société Epoxy,

- la cabine de poudrage livrée à la date du rapport de la société Dekra est conforme, mesure validée par l'expert judiciaire,

- la société Epoxy a utilisé de manière constante la cabine de poudrage sans qu'il y ait de rapport de non-conformité aux normes de sécurité, ni contravention de l'inspection du Travail,

- le seul constat contradictoire de la société Cetim en date du 9 janvier 2012 a permis de mettre en évidence une inversion des poulies de ventilation, circonstance non-imputable à la société STC,

- la société STC a modifié une cabine de ventilation horizontale en cabine de ventilation verticale pour en assurer la conformité aux normes de sécurité,

- la société Epoxy a eu une utilisation non conforme de la cabine livrée par rapport à l'offre du 23 juillet 2009 et qu'un défaut de maintenance a été constaté,

- l'usage de la cabine de peinture portes ouvertes par la société Epoxy pour des pièces de grande longueur dès l'origine, a été généralisée par la modification du convoyeur de pièces, à l'insu de la société STC ;

Vu les mêmes conclusions par lesquelles la société STC demande à la cour de débouter la société Epoxy de l'ensemble de ses demandes, et à titre infiniment subsidiaire, de condamner la société MMA IARD à la relever et garantir de toutes condamnations au titre des dommages immatériels qui pourraient être prononcées à son encontre au profit de la société Epoxy ;

Vu les conclusions en date du 11 août 2014 par lesquelles la société MMA IARD tend à la réformation du jugement en ce qu'il a mis à la charge de la société STC des condamnations ;

Vu les mêmes conclusions par lesquelles la société MMA IARD demande à la cour à titre principal, de débouter la société Epoxy, à défaut de responsabilité rapportée de la société STC, et à titre subsidiaire, de débouter la société Epoxy de sa réclamation présentée contre l'assureur MMA IARD au visa des exclusions de son contrat en ce qui concerne :

- la remise en conformité de la cabine de poudrage,

- la perte de marge pendant les travaux sur la cabine de poudrage,

- la remise en état du système d'entrainement,

- le changement de la cuve de dégraissant,

- la reprise des malfaçons,

- la perte de marge sur coût variable,

et à titre infiniment subsidiaire, de dire que le préjudice matériel allégué sera arrêté au chiffrage de l'expert pour la valeur maximale de 31 974 euro, et que sur ce dernier montant, seule la somme de 15 000 euro est susceptible d'être garantie par MMA au titre des dommages immatériels non consécutifs, sous déduction de la franchise contractuelle de 3 000 euro, soit 12 000 euro, et en tout état de cause, de condamner la société Epoxy à lui verser la somme de 3 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Vu l'ordonnance de clôture en date du 10 février 2015.

DECISION

1. La société STC a vendu à la société SPTI Epoxy (ci-après Epoxy) une ligne de poudrage semi-automatique à la société Epoxy, spécialisée dans le surfaçage de matériaux, par offre acceptée le 3 septembre 2009 et pour un montant de 560 000 euro HT. La livraison a eu lieu courant décembre 2009.

2. A partir du mois de janvier 2010, de nombreux problèmes sont survenus sur cette ligne. En mars 2011 la société Epoxy fit faire un devis à la société Omia pour reprendre les défauts constatés. La société Epoxy a saisi le juge des référés qui a ordonnée une expertise menée par Monsieur Monchalin.

3. Lors de cette expertise, les différents intervenants ont conclu à la non-conformité de la cabine de poudrage et au fait que la cuve de dégraissage était impropre à sa destination. L'expert a également conclu à l'existence de plusieurs défaillances rendant la ligne non-conforme au cahier des charges et aux normes en vigueur.

Sur l'existence d'un cahier des charges entre la société STC et la société Epoxy :

4. La société Epoxy soutient d'une part que les conditions générales de vente de la société STC lui sont inopposables car elles n'ont pas été signées lors de la commande de la ligne. La société Epoxy expose d'autre part qu'il existait un cahier des charges entre elle et la société STC dans la mesure où elle a envoyé les détails d'une offre proposée par la société Clid, comprenant les exigences, contraintes et dimensions de la ligne souhaitée.

5. De son côté, la société STC soutient qu'il n'existait pas de cahier des charges entre elle et la société Epoxy dans la mesure où le seul document préalable envoyé par la société Epoxy est un plan d'une page établi par la société Clid pour présenter son offre.

6. Comme le soutient, à bon droit, la société Epoxy, les conditions générales de vente de la société STC n'ont pas été annexées au contrat signé par la société Epoxy lors de la commande mais était " à valider " par la suite. Or la preuve de cette acceptation n'est pas rapportée. En conséquence, comme l'a retenu à bon droit le premier juge, les conditions générales de vente de la société STC sont inopposables à la société Epoxy.

7. En revanche, la cour constate, comme l'a encore retenu à bon droit le premier juge, que le seul document que la société Epoxy a transmis à la société STC avant la commande est un simple plan d'une page, sommaire. Si tout au plus ce document donne des indications générales à la société STC, il ne peut s'agir d'un véritable cahier des charges particulier et accepté par la société STC.

8. En conséquence, la cour déclare qu'aucun cahier des charges, en dehors de ce simple plan, n'a été convenu entre les sociétés STC et Epoxy concernant la ligne de poudrage. Le jugement est confirmé sur ce point.

Sur la délivrance conforme :

9. La société Epoxy soutient que la ligne livrée n'est pas conforme à celle qui a été commandée. Elle expose que l'expert a retenu la non-conformité de la cabine de poudrage à la commande et aux normes de sécurité en vigueur. Elle explique que dans la mesure où les dysfonctionnements sont apparus dès l'origine, la maintenance ne peut être en cause. Elle expose encore que les sociétés Cetim et Dekra ont conclu à la non-conformité de la cabine de poudrage. Elle sollicite de ce fait de la société STC le paiement de les somme de 69 000 euro pour la remise en conformité de la cabine et la somme de 10 965 euro pour la perte de marge pendant les travaux sur cette cabine.

10. De son côté, la société STC soutient de son côté qu'en l'absence de cahier des charges et au regard du rapport de la société Dekra en date du 10 juillet 2010, validé par l'expert et de l'utilisation constante par la société Epoxy de la cabine de poudrage sans rapport de non-conformité aux normes de sécurité, ni contravention de l'inspection du travail et également l'utilisation non-conforme de la cabine et son défaut de maintenance, elle n'a pas manqué à son obligation de délivrance conforme de la cabine de poudrage.

11. La cour relève qu'en l'absence de cahier des charges précis, la société STC devait au moins fournir un équipement correspondant au plan qui lui a été transmis et respectant les normes d'hygiène et de sécurité en vigueur, qui est une obligation inhérente à sa charge de professionnelle.

12. La cour constate à la lecture du rapport d'expertise que la cabine de poudrage, telle qu'utilisée suite à la demande de la société Epoxy avec une ventilation verticale, était insuffisamment conçue pour cette destination précise puisqu'elle était prévue pour une ventilation horizontale qui demande moins de puissance. Il en découle que la cabine de poudrage, qui ne répondait donc pas aux normes d'hygiène et de sécurité n'était pas conforme à la commande de la société Epoxy.

13. La cour relève que selon l'expert, ce défaut est imputable en intégralité à la société STC, et non à une mauvaise utilisation ou maintenance de la société Epoxy.

14. En conséquence, et comme l'a retenu à bon droit le premier juge, il convient donc de condamner la société STC à verser à la société Epoxy la somme de 69 000 euro, telle que retenue par l'expert, au titre de la réparation de la ligne de poudrage. La confirmation du jugement s'impose sur ce point.

15. Comme l'a encore retenu à bon droit le premier juge, la société Epoxy qui n'a pu utiliser ce matériel lors des travaux a nécessairement subi un préjudice du fait de l'arrêt de l'activité en découlant. Ce préjudice est en lien direct avec le défaut de conformité imputable à la société STC. Il convient donc la condamner la société STC à verser à la société Epoxy la somme de 10 965 euro, telle que retenue par l'expert-comptable, au titre de ce préjudice. Le jugement est confirmé sur ce point.

Sur les vices cachés affectant la partie "traitement de surface" de la ligne :

16. La société STPI Epoxy soutient que la partie traitement de surface de la ligne était affectée de vices cachés, d'une part sur la partie du système d'entrainement, dont la chaîne était trop lâche, et d'autre part concernant la cuve de dégraissant qui a subi trois incidents, entrainant des fuites. La société Epoxy sollicite la somme de 15 984 euro au titre de la remise en état du système d'entrainement et la somme de 39 927 euro au titre du changement de la cuve de dégraissant.

17. De son côté, la société STC soutient que le vice caché concernant le système d'entrainement n'est pas démontré, dans la mesure où le caractère rédhibitoire et l'origine cachée du vice ne sont pas caractérisées par l'expert.

S'agissant de la cuve de dégraissant, la société STC expose que l'expert a conclu à l'absence de vice caché, qu'il retient que le lien direct de l'un des incidents est l'abaissement des résistances après l'installation, et non la conception de la cuve, et qu'enfin, l'expert retient une erreur d'opération lors d'un essai réalisé avec l'Apave s'agissant du troisième incident.

18. S'agissant d'abord du système d'entrainement de la ligne, la cour relève que le rapport d'expertise conclut à une erreur dans la réalisation des mécaniques. Bien que l'expert ne donne pas d'indication sur l'origine de ce vice, le dysfonctionnement étant apparu seulement quelques semaines après la livraison de la ligne, il convient de considérer que celui-ci était bien antérieur à la livraison. S'agissant de son caractère caché, il ressort des pièces du dossier que ce dysfonctionnement ne pouvait pas être perceptible sans étude, en particulier celle qu'a réalisé l'expert en l'espèce. La cour ajoute que le déraillement du système rendait effectivement cet équipement impropre à sa destination dans la mesure où ce dysfonctionnement entrainait des arrêts réguliers et intempestifs de l'installation.

19. En conséquence, c'est à bon droit que le premier juge a retenu le vice caché concernant le système d'entrainement de la ligne et a condamné la société STC, sur le fondement de l'article 1641 du Code civil à prendre en charge les réparations nécessaires au bon fonctionnement de la machine. Il convient donc de condamner la société STC à verser la somme de 15 984 euro, soit 80 % de la somme facturée par la société Rocha, telle qu'évaluée par l'expert en raison de l'amélioration apportée lors de l'intervention de cette société. La confirmation du jugement s'impose sur ce point.

20. S'agissant ensuite de la cuve de dégraissant, la cour constate que l'expert a conclu à l'absence de vice caché antérieur à la livraison. En raison du caractère technique de l'appréciation, la cour s'en rapporte à la religion de l'expert sur ce point.

21. En conséquence, c'est encore à bon droit que le premier juge a rejeté l'existence d'un vice caché concernant la cuve de dégraissant. Cette demande de la société STPI Epoxy doit être rejetée comme mal fondée. Le jugement est confirmé sur ce point.

Sur le préjudice financier de la société Epoxy résultant de la perte de marge sur coûts variables :

22. La société Epoxy soutient que les différentes interventions afin de réparer la ligne de poudrage lui ont fait subir un préjudice financier de 248 100 euro, tenant à la perte de chiffre d'affaire.

23. De son côté, la société STC soutient que la société Epoxy ne démontre pas d'un lien de causalité suffisant entre les dysfonctionnements de la ligne et le préjudice sollicité. Elle explique que l'analyse de l'expert Moncorgé se fonde sur le postulat théorique que la perte de chiffre d'affaire est nécessairement lié à la panne de la ligne de poudrage.

24. La cour constate en effet que si les calculs effectués par l'expert Moncorgé ne sont pas soumis à discussion en eux-mêmes, le postulat de base n'est qu'hypothétique et théorique. En effet, la société Epoxy ne démontre pas que le remplacement de la ligne de poudrage est à l'origine directe et exclusive de la perte de chiffre d'affaires pour la somme de 248 100 euro, de plus que le remplacement de la cuve de dégraissant, pour laquelle la responsabilité de la société STC n'est pas établie, a participé à l'immobilisation de la ligne.

25. En conséquence, la preuve d'un lien de causalité direct et exclusif entre les dysfonctionnements imputés à la société STC et la perte de chiffre d'affaire de la société Epoxy n'est pas rapportée par cette dernière.

26. C'est donc à bon droit que le jugement a rejeté cette demande, rejet qui doit être confirmé par cette cour.

Sur l'appel en garantie de la société MMA IARD :

27. La présente cour condamne la société STC à verser les sommes de 69 000 euro au titre de la remise en état de la cabine de poudrage, de 10 965 euro concernant la perte de marge pendant les travaux consécutifs, et la somme de 15 984 euro concernant la remise en état du système d'entrainement.

28. La cour constate ensuite que la société STC reconnaît les limitations contractuelles de l'assurance concernant la remise en état de la cabine de poudrage pour un montant de 69 000 euro et pour les modifications du train d'entrainement pour 15 984 euro.

29. La cour constate encore que la société MMA IARD ne conteste pas que sa garantie joue pour le préjudice consécutif à la période de travaux de remise en état de la cabine, entrainant la perte de 10 965 euro.

30. En conséquence, la cour condamne la société MMA IARD à relever et garantir la société STC de cette condamnation, déduction faite de la franchise contractuelle. Le jugement est confirmé en toutes ses dispositions.

31. L'équité commande de ne pas allouer de sommes au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

32. La cour dit que les parties supportent leurs dépens.

Par ces motifs LA COUR, Confirme en toutes ses dispositions le jugement du tribunal de commerce de Lyon en date du 17 avril 2014, Y ajoutant, Dit n'y avoir lieu à faire application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, Dit que chacune les parties conservent à leurs charges les dépens de la procédure d'appel.