CA Toulouse, 3e ch. sect. 1, 17 septembre 2013, n° 12-00234
TOULOUSE
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Guillemain, Fethi
Défendeur :
Chocolaterie Excellence (SAS)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Bensussan
Conseillers :
MM. Moulis, Poque
Avocats :
Mes Gros, Thevenot, Lorin
FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Le 29 décembre 2009, Madame Najat Fethi s'est rendu chez une amie qui lui a offert un chocolat ; en croquant dans le chocolat, son bridge a été détérioré par un morceau dur se trouvant à l'intérieur.
Le chocolat, de marque Thuries, avait été fabriqué par la société Chocolaterie Excellence.
Par acte du 28 janvier 2011, Madame Najat Fethi a fait assigner devant le Tribunal d'instance d'Albi la société Chocolaterie Excellence pour obtenir, sous le bénéfice de l'exécution provisoire, sa condamnation à lui payer les sommes de :
- 4 096,30 euro correspondant aux soins effectués et à prévoir,
- 2 000 euro au titre des souffrances endurées,
- 1 000 euro pour résistance abusive,
- 1 000 euro sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.
Par jugement du 5 décembre 2011, le Tribunal d'instance d'Albi a rejeté l'ensemble des demandes de Madame Najat El Khadar épouse Fethi et l'a condamné à payer à la société Chocolaterie Excellence la somme de 1 000 euro sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile outre les dépens.
Par déclaration du 17 janvier 2012, Madame Najat El Khadar épouse Fethi a interjeté appel de ce jugement.
Dans ses conclusions du 23 février 2012, l'appelante demande à la cour de :
- réformer le jugement entrepris,
-juger que la société Chocolaterie Excellence a commercialisé un produit défectueux n'offrant pas la sécurité à laquelle le consommateur pouvait s'attendre,
- condamner la Chocolaterie Excellence à lui payer :
4 096,30 euro correspondant aux soins réparatifs dentaires,
2 000 euro au titre des souffrances endurées,
1 000 euro pour résistance abusive,
2 000 sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.
- subsidiairement, sur le préjudice, ordonner une mesure d'expertise.
Elle soutient que :
- le produit défectueux est une noisette entière enveloppée d'une fine couche de chocolat, vendu comme " noisettes chocolatées ",
- le produit comprenait un amalgame de sucre de la taille d'un petit caillou mais il est anormal que ce sucre se soit amalgamé et ait acquis une dureté, qui n'est pas admissible dans la confiserie considérée,
- la nature même de la confiserie, telle que l'on peut l'appréhender par son aspect extérieur et sa désignation, induit la façon de la consommer et une confiserie dure sera consommée en la faisant fondre dans la bouche,
- les chocolats, même s'il s'agit de noisette enrobée, sont normalement croqués puisqu'on ne s'attend pas à y trouver un élément dur,
- en l'espèce c'est l'amalgame de sucre et son caractère particulièrement dur qui constitue la défectuosité du produit qui n'offre pas la sécurité à laquelle on pourrait s'attendre,
- l'emballage ne comportait aucun avertissement quant au fait que du sucre amalgamé pouvait se trouver dans les noisettes chocolatées, pour laisser comprendre qu'il s'agissait de confiserie qu'il valait mieux laisser fondre dans la bouche que croquer.
Dans ses écritures du 3 avril 2012, la société Chocolaterie Excellence conclut à la confirmation de la décision entreprise et subsidiairement,
- constater l'absence de lien de causalité entre les problèmes dentaires de Madame Fethi et le fait d'avoir croqué dans une noisette chocolatée,
- constater que la pose d'implant et de bridge fait doublon et que les justificatifs ne sont que des devis sans aucun comparatif,
- débouter la demanderesse,
En tout état de cause,
- condamner Madame Fethi à lui payer la somme de 3 000 euro sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
Elle fait essentiellement valoir que :
- un amalgame de sucre dans une confiserie ne peut être considéré comme un corps étranger,
- la liste des ingrédients figure sur le paquet et la présence de sucre est parfaitement normale,
- Madame Fethi ne prouve pas que l'amalgame est anormalement gros et dur et constitue un défaut du produit,
- elle n'a pris aucun engagement sur la taille de chaque noisette, la densité du sucre dans chaque chocolat ou encore la quantité de chocolat dans l'enrobage de chaque noisette,
- la confiserie n'est pas rendue impropre à la consommation par une densité de sucre plus ou moins importante,
- la dureté de la noisette chocolatée, préalablement caramélisée est la même que celle du caramel d'un berlingot ou de tout autre confiserie du même type,
- la liste des ingrédients confirme la présence d'éléments dits durs comme la noisette et le sucre,
- la demanderesse ne produit aucune pièce démontrant que les dommages invoqués sont liés au fait d'avoir croqué dans la noisette chocolatée et vu la taille de la confiserie il apparaît surprenant qu'elle se soit abîmé trois dents,
- les justificatifs produits ne sont que des devis et la pose d'implants et de bridge fait doublon.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Il résulte de l'article 1386-1 que le producteur est responsable du dommage causé par un défaut de son produit, qu'il soit lié ou non par un contrat avec la victime.
Pour engager la responsabilité du producteur, la défectuosité du produit doit consister en un défaut de sécurité ayant causé un dommage à une personne ou à un bien autre que le produit défectueux lui-même ; il appartient au demandeur de prouver le dommage, le défaut et le lien de causalité entre le défaut et le dommage.
Le premier juge a exactement relevé que :
- le chocolat litigieux contenait des noisettes caramélisées, dont le sucre est le premier ingrédient,
- la présence de sucre caramélisé et amalgamé est parfaitement normale dans ce type de produit,
- la confiserie ne peut être rendue impropre à la consommation et présenter un défaut de sécurité par la présence de sucre d'une densité plus ou moins importante.
Madame Fethi ne rapporte pas la preuve que l'amalgame de sucre était anormalement gros et dur et qu'elle n'offre pas la sécurité à laquelle on peut légitimement s'attendre.
Elle ne prouve pas davantage que les dommages qu'elle invoque sont liés au fait d'avoir croqué dans la noisette chocolatée.
Le jugement entrepris qui l'a débouté de ses demandes sera confirmé.
Par ces motifs LA COUR, Confirme le jugement entrepris, y Ajoutant, Condamne Madame Najat El Khadar épouse Fethi à payer à la société Chocolaterie Excellence la somme de 1 200 euro sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, Condamne Madame Najat El Khadar épouse Fethi aux dépens dont distraction en application de l'article 699 du Code de procédure civile.