CE, juge des référés, 19 avril 2016, n° 398090
CONSEIL D'ÉTAT
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Air Corsica
Défendeur :
Aéroports de Paris
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Avocats :
SCP Lyon-Caen, Thiriez
LE CONSEIL : Vu la procédure suivante : Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés le 18 mars et le 13 avril 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, les sociétés Air Corsica, ASL Airlines, Hex'air et Twin Jet demandent au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du Code de justice administrative : 1°) d'ordonner la suspension de l'exécution de la décision du directeur du transport aérien du ministère de l'environnement, de l'énergie et de la mer portant homologation des tarifs des redevances aéroportuaires d'Aéroports de Paris applicables du 1er avril 2016 au 31 mars 2017, ainsi que de la décision d'Aéroports de Paris relative aux tarifs des redevances aéroportuaires applicables du 1er avril 2016 au 31 mars 2017 ; 2°) de mettre à la charge de l'Etat et de la société Aéroports de Paris la somme de 6 000 euros à verser, chacun, à chacune des sociétés requérantes, au titre de l'article L. 761-1 du Code de justice administrative.
Elles soutiennent que :
- la condition d'urgence est remplie, dès lors que les décisions litigieuses préjudicient de manière grave et immédiate à leurs intérêts, notamment financiers ;
- il existe un doute sérieux quant à la légalité des décisions contestées ;
- la décision d'Aéroport de Paris est entachée d'un vice de procédure dès lors qu'elle n'a pas fait l'objet d'une homologation par une autorité de supervision indépendante au sens de la directive européenne 2009/12/CE du 11 mars 2009 sur les redevances aéroportuaires ;
- les décisions contestées méconnaissent les dispositions de l'article R. 224-2 du Code de l'aviation civile, en ce que les hausses tarifaires prévues pour 2016, d'une part, ne sont pas modérées et, d'autre part, ne sont pas établies en considération du coût des services rendus ;
- la décision d'Aéroport de Paris méconnaît les dispositions de l'article L. 420-2 du Code de commerce et celles de l'article 102 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne dès lors que les hausses tarifaires prévues sont constitutives d'un abus de position dominante ;
- les tarifs contestés présentent un caractère discriminatoire envers les petits appareils, en méconnaissance du principe d'égalité et des stipulations de l'article 3 de la directive 2009/12/CE du 11 mars 2009 sur les redevances aéroportuaires.
Par un mémoire en défense, enregistré le 8 avril 2016, la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer conclut au rejet de la requête et à ce soit mis à la charge des sociétés Air Corsica, ASL Airlines, Hex'air et Twin Jet le versement à l'Etat d'une somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du Code de justice administrative. Elle soutient que la condition d'urgence n'est pas remplie et que les moyens soulevés par les requérantes ne sont pas fondés.
Par deux mémoires en défense, enregistrés les 8 et 14 avril 2016, la société Aéroports de Paris conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de chacune des sociétés requérantes le versement à son profit d'une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du Code de justice administrative. Elle soutient que la condition d'urgence n'est pas remplie et que les moyens soulevés par les requérantes ne sont pas fondés.
Après avoir convoqué à une audience publique, d'une part, les sociétés Air Corsica, ASL Airlines, Hex'air et Twin Jet, d'autre part, la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer et la société Aéroports de Paris ;
Vu le procès-verbal de l'audience publique du 14 avril 2016 à 9 heures 30 au cours de laquelle ont été entendus :
- les représentants des sociétés Air Corsica, ASL Airlines, Hex'air et Twin Jet ;
- Me Thiriez, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat de la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer ;
- les représentants de la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer ;
- les représentants de la société Aéroports de Paris ;
et à l'issue de laquelle le juge des référés a différé la clôture de l'instruction jusqu'au mardi 19 avril 2016 à 11 heures ;
Vu la mesure d'instruction supplémentaire par laquelle le juge des référés a demandé, à l'issue de l'audience, à l'Etat et aux sociétés requérantes de produire des éléments sur les obligations de services public s'imposant sur les liaisons concernées, notamment en termes de plafonnement des tarifs, aux sociétés requérantes de produire des éléments sur le prix effectif des billets vendus et son évolution au cours des dernières années, ainsi que sur l'évolution, au cours de la même période, du nombre de passagers, et à la société Aéroports de Paris de produire des chiffres sur le taux de rentabilité et le taux de couverture des redevances litigieuses ;
Par un nouveau mémoire, enregistré le 18 avril 2016, les sociétés Air Corsica, ASL Airlines, Hex'air et Twin Jet, d'une part, produisent les conventions de délégation de service public en vigueur, ainsi que les justificatifs concernant le paiement par Air Corsica de redevances facturées à Air France au titre de vols opérés en " partage de Code " et, d'autre part, persistent dans leurs conclusions initiales.
Par un nouveau mémoire, enregistré le 18 avril 2016, la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, d'une part, produit les conventions de délégation de service public et les décisions définissant les obligations de service public encadrant l'activité des compagnies requérantes et, d'autre part, persiste dans ses conclusions initiales ;
Par deux nouveaux mémoires, enregistrés les 18 et 19 avril 2016, la société Aéroport de Paris, d'une part, produit un extrait du document sur l'évolution de la structure tarifaire des trois redevances principales aéroportuaires établi pour la réunion de la Commission consultative économique du 25 novembre 2015 et des éléments relatifs au taux de couverture du coût du service par le produit de ces redevances et, d'autre part, persiste dans ses conclusions initiales ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;
- la directive 2009/12/CE du du 11 mars 2009 sur les redevances aéroportuaires ;
- le Code de l'aviation civile ;
- le Code de commerce ;
- le Code des transports ;
- le Code de justice administrative ;
Considérant ce qui suit :
1. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 521-1 du Code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision ".
2. Les sociétés requérantes demandent la suspension de la décision rendue publique le 26 janvier 2016 par laquelle la société Aéroports de Paris a fixé le tarif des redevances aéroportuaires applicables du 1er avril 2016 au 31 mars 2017, ainsi que de la décision du 21 janvier 2016 par laquelle le directeur du transport aérien du ministère de l'environnement, de l'énergie et de la mer a homologué cette décision tarifaire.
3. L'urgence justifie la suspension de l'exécution d'un acte administratif lorsque celui-ci porte atteinte de manière suffisamment grave et immédiate à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu'il entend défendre. Il appartient au juge des référés d'apprécier concrètement, compte tenu des justifications fournies par le requérant, si les effets de l'acte contesté sont de nature à caractériser une urgence justifiant que, sans attendre le jugement de la requête au fond, l'exécution de la décision soit suspendue. L'urgence doit être appréciée objectivement et compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'affaire.
4. Il résulte de l'instruction que les tarifs des redevances aéroportuaires sur les aéroports de Paris-Charles de Gaulle et de Paris-Orly applicables à compter du 1er avril 2016, tels qu'établis et homologués par les décisions contestées, se caractérisent, au regard des tarifs précédemment en vigueur, par une réduction de la redevance passagers, une augmentation de la redevance de stationnement et, pour les appareils de moins de 136 tonnes, une augmentation de la redevance d'atterrissage. La redevance passagers est ainsi, notamment, ramenée de 9,82 euros à 8,92 euros par passager à destination de la métropole et hors correspondance. S'agissant de la redevance de stationnement, sa part fixe, due uniquement pour le stationnement " au contact des aérogares ", est portée de 2,819 euros à 3,65 euros par tonne, et sa part variable de 0,061 euros à 0,063 euros par tonne et par tranche de 10 minutes pour le stationnement au contact et au large, et de 0,128 à 0,132 euros par tonne et par heure pour le stationnement sur les aires de garage. S'agissant de la redevance d'atterrissage, sa part fixe, perçue sur tous les aéronefs, est portée de 188,58 euros à 442,50 euros, tandis que sa part variable, perçue seulement sur les aéronefs de 41 tonnes et plus, et calculée en multipliant un indice fondé sur la masse de l'appareil par un montant en euros, est réduite, ce montant étant ramené de 6,437 euros à 3,80 euros.
5. Les sociétés requérantes soutiennent que ces évolutions se traduiront pour elles, à activité constante, par un surcroît net de charges d'exploitation qui entraînera une dégradation de leurs résultats mettant directement en péril leur équilibre financier et la poursuite de l'exploitation des liaisons aériennes qu'elles assurent avec ces deux aéroports. La société Twin Jet, qui exploite une liaison Périgueux-Orly et une liaison Limoges-Orly, avec des appareils Beechcraft de 19 places et d'une masse de 7,6 tonnes, et qui indique qu'en 2015, son chiffre d'affaires s'est établi à 25 millions d'euros et son résultat net devrait être compris entre 20 000 et 40 000 euros, évalue ce surcroît net de charges à 161 520 euros par an, soit une progression de 85 %, à raison d'une augmentation de la redevance d'atterrissage de 168 150 euros et d'une diminution de la redevance passagers de 6 630 euros. La société Hex'Air, qui exploite une liaison Le Puy-en-Velay-Orly avec un appareil Beechcraft de 19 places et 7,6 tonnes, et qui indique qu'en 2015, son chiffre d'affaires s'est établi à 2 millions d'euros et son résultat net à - 17 500 euros, évalue ce surcroît net de charges à 75 041 euros par an, soit une progression de 81%, à raison d'une augmentation de la redevance d'atterrissage de 78 210 euros et d'une réduction de la redevance passagers de 3 169 euros. La société ASL Airlines, qui exploite une demi-douzaine de liaisons avec Orly ou Paris-Charles de Gaulle avec des appareils Boeing 737 cargo, pour son activité fret, ou Boeing 737 de 147 à 149 places, pour son activité passagers, d'une masse de 61,2 à 70,1 tonnes, et qui indique qu'en 2015 son chiffre d'affaires s'est établi à 177 millions d'euros, son résultat d'exploitation à 700 000 euros et son résultat net à - 700 000 euros, évalue ce surcroît net de charges à 604 127 euros, soit une progression de 28%, à raison d'une augmentation de la redevance d'atterrissage de 676 955 euros et d'une réduction de la redevance passagers de 72 828 euros. La société Air Corsica, qui exploite conjointement avec Air France et Hop' des liaisons entre Orly et Ajaccio, Figari, Bastia et Calvi, avec des appareils ATR 72-500 d'environ 70 places et A 320 d'environ 180 places et 69 tonnes, et qui indique qu'en 2014-2015 son chiffre d'affaires s'est établi à 130 millions d'euros et son résultat opérationnel à - 200 000 euros, évalue le surcroît de redevance d'atterrissage à 418 000 euros et le surcroît de redevance de stationnement à 140 000 euros, sans préciser toutefois le montant escompté de la réduction de la redevance passagers.
6. Il résulte cependant de l'instruction, en premier lieu, que, conformément aux termes de la décision d'homologation du 21 janvier 2016, la société Aéroports de Paris a proposé à l'ensemble des compagnies défavorablement affectées par l'évolution de la structure des redevances aéroportuaires décrite ci-dessus des facilités de paiement permettant, pour les compagnies dont les redevances progresseront, à raison de cette évolution, de 20% à 50%, de réduire cet impact de moitié en 2016, par report en 2017, dans cette proportion, du paiement des factures émises au titre de 2016 et, pour les compagnies dont les redevances progresseront, à raison de cette évolution, de plus de 50 %, de réduire cet impact des deux tiers en 2016 et d'un tiers en 2017, par report en 2019 et 2020, dans ces proportions, du paiement des factures émises au titre de 2016 et 2017. Cette facilité de paiement, qui demeure ouverte aux sociétés requérantes, est de nature à réduire substantiellement les effets de cette évolution sur leur trésorerie en 2016, voire en 2017.
7. En second lieu, toutefois, les sociétés requérantes font valoir que, dès lors qu'un montant est dû par une société, il doit être inscrit en charges pour la totalité dans les comptes de celle-ci, quel que soit le délai de paiement dudit montant, et que, par conséquent, la facilité de paiement ainsi prévue, si elle permettra d'atténuer les effets des hausses de redevances sur leur trésorerie, restera en revanche sans effet sur leurs comptes de résultat.
8. Il résulte cependant de l'instruction, s'agissant de la société ASL Airlines France, que celle-ci est en principe en mesure de répercuter l'évolution des redevances aéroportuaires sur les prix qu'elle facture, que ce soit aux voyagistes qui la sollicitent pour son activité passagers, ou à ses clients pour son activité de fret. Si elle fait valoir que cette répercussion est exclue pour les contrats d'affrètement en cours, qui ne prévoient de clauses de révision du prix d'affrètement que pour le carburant et le dollar, elle ne précise ni la part de son activité qui serait concernée par de tels contrats, ni l'échéance de ces derniers, ni le montant des redevances retenu lors de leur conclusion pour déterminer le prix de l'affrètement, notamment pour les contrats conclus à compter de 2016. Il résulte par ailleurs de l'instruction que la société ASL Airlines France est une filiale du groupe ASL Airlines, qui a dégagé en 2014 un profit net de 17,1 millions d'euros. Dans ces conditions, et en l'état de l'instruction, il n'est pas établi que les décisions contestées portent une atteinte grave et immédiate à la situation financière de la société ASL Airlines France et à la pérennité de son activité.
9. Concernant la société Twin Jet, il résulte de l'instruction que les obligations de service public qui lui sont imposées, respectivement, pour la liaison Périgueux-Paris, par la décision publiée au Journal officiel des communautés européennes le 27 avril 2007, auxquelles renvoie la convention de délégation de service public signée le 14 décembre 2014 et, pour la liaison Paris-Limoges, qui ne fait pas l'objet d'une délégation de service public, par l'arrêté du 9 janvier 2013, qui a fait l'objet d'une communication de la Commission européenne publiée au Journal officiel de l'Union européenne le 23 mars 2013, ne fixent pas de plafond tarifaire. Par conséquent, cette société est en principe en mesure de répercuter l'évolution des redevances aéroportuaires sur le prix des billets. Il n'est pas établi, en l'état de l'instruction et, compte tenu des conditions de la concurrence sur ces deux liaisons, que l'augmentation du prix du billet qui en résulterait entraînerait une réduction du volume des ventes sur ces liaisons de nature à en condamner l'exploitation à brève échéance. Dans ces conditions, il n'est pas établi, en l'état de l'instruction, que les décisions contestées portent une atteinte grave et immédiate à la situation financière de la société Twin Jet et à la pérennité de l'exploitation des liaisons concernées.
10. Concernant la société Corsica Airlines, il résulte de l'instruction que les obligations de service public qui lui sont imposées par les deux conventions de délégation de service public signées le 20 octobre 2015, dans le cadre desquelles elle exploite les liaisons entre Orly et, respectivement, Ajaccio et Figari d'une part, Bastia et Calvi d'autre part, imposent des tarifs maximaux, fixés hors redevance passager, pour les résidents de Corse. Si ces obligations de service public prévoient que ces tarifs maximaux seront révisés chaque saison IATA par l'Office des Transports de la Corse suivant une formule d'indexation représentative de l'évolution des coûts d'exploitation des liaisons aériennes, la société Air Corsica fait valoir qu'à supposer que cette indexation intègre l'évolution des redevances aéroportuaires, une telle révision ne peut être envisagée à brève échéance. Il ressort par ailleurs des indications données à l'audience publique par la société Air Corsica et confirmées par un mémoire ultérieur que les billets vendus aux résidents de Corse, dont le prix est plafonné, représentent la moitié des ventes totales sur ces liaisons, et sont vendus au tarif plafond. Pour ces billets, la société Air Corsica n'est donc pas en mesure de répercuter sur le prix des billets l'augmentation des redevances d'atterrissage et de stationnement, tandis qu'elle est tenue de répercuter la réduction de la redevance passagers. Cependant, elle peut à l'inverse répercuter cette augmentation sur le prix des autres billets vendus, de même qu'elle n'est pas dans l'obligation, sur ces derniers, de répercuter la réduction de la redevance passagers. Or, d'une part, la société Air Corsica n'ayant pas chiffré la réduction escomptée de la redevance passagers sur ces billets, elle n'établit pas avec précision le surcroît net de redevances qu'elle aura à acquitter. D'autre part, il n'est pas établi, en l'état de l'instruction, et compte tenu des conditions de la concurrence sur ces liaisons, que l'augmentation du prix des billets non plafonnés qui permettrait de couvrir ce surcroît net serait susceptible d'entraîner une réduction du volume des ventes sur ces liaisons de nature à en condamner l'exploitation à brève échéance, alors même qu'il ressort des éléments communiqués par la société, à l'appui du mémoire du 18 mars 2016, qu'elle prévoit pour l'exercice 2015-2016 un résultat opérationnel positif d'un million d'euros. Dans ces conditions, et en l'état de l'instruction, il n'est pas établi que les décisions contestées portent une atteinte grave et immédiate à la situation financière de la société Air Corsica et à la pérennité de l'exploitation des liaisons concernées.
11. Concernant la société Hex'Air, il résulte de l'instruction que les obligations de service public qui lui sont imposées par la décision publiée au Journal officiel des communautés européennes le 27 juillet 2007, à laquelle renvoie la délégation de service public signée le 25 novembre 2014 pour l'exploitation de la liaison entre Le Puy-en-Velay et Orly, lui imposent un tarif maximum fixé, hors redevance passager, à 223 euros (valeur janvier 2008). Il ressort des écritures des requérantes et des indications données à l'audience publique par la société Hex'Air que le prix de vente actuel des billets plein tarif serait inférieur de seulement 4 euros à ce plafond, actualisé en valeur 2016, tandis qu'une augmentation du prix des billets de l'ordre de 10 à 15 euros serait nécessaire pour couvrir l'augmentation des redevances. Cependant, il résulte de l'instruction, et notamment des comptes d'exploitation prévisionnels figurant à l'annexe 2 à la convention de délégation de service public mentionnée ci-dessus, que la recette moyenne par passager sur la période 2015-2019 est évaluée à 141,50 euros, cet écart par rapport au prix plein tarif indiqué par la société s'expliquant par le fait que les billets plein tarif ne représentent qu'une fraction des ventes totales, Hex'Air proposant des tarifs nettement inférieurs sous certaines conditions ou à certaines catégories de passagers, en particulier les abonnés. Or, la proportion des billets vendus à plein tarif dans le total des ventes n'a pas été précisée par la société Hex'Air. Dans ces conditions, et en l'état de l'instruction, il n'est pas établi que la société Hex'Air ne serait pas en mesure de couvrir l'augmentation des redevances par une augmentation du prix des billets vendus, que ce soit partiellement sur les billets vendus à un prix d'ores et déjà proche du plafond, ou de façon plus importante sur les autres billets. Il n'est pas davantage établi, en l'état de l'instruction, et compte tenu des conditions de la concurrence sur cette liaison, que l'augmentation du prix du billet qui en résulterait entraînerait une réduction du volume des ventes sur cette liaison de nature à en condamner l'exploitation à brève échéance. Dans ces conditions, et en l'état de l'instruction, il n'est pas établi que les décisions contestées portent une atteinte grave et immédiate à la situation financière de la société Hex'Air et à la pérennité de l'exploitation de la liaison concernée.
12. Il résulte de tout ce qui précède que la condition d'urgence, requise par l'article L. 521-1 du Code de justice administrative pour justifier la suspension des décisions contestées, ne peut être regardée comme remplie. Par suite, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur l'existence d'un doute sérieux quant à la légalité de ces décisions, la requête des sociétés Air Corsica, ASL Airlines, Hex'Air et Twin Jet doit être rejetée, y compris leurs conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du Code de justice administrative. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées au même titre par le ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer et par la société Aéroports de Paris.
Ordonne
Article 1er : La requête des sociétés Air Corsica, ASL Airlines, Hex'air et Twin Jet est rejetée. Article 2: Les conclusions de la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer et de la société Aéroports de Paris présentées au titre de l'article L. 761-1 du Code de justice administrative sont rejetées. Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée aux sociétés Air Corsica, ASL Airlines, Hex'air et Twin Jet, à la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer et à la société Aéroports de Paris.