CA Paris, Pôle 5 ch. 1, 24 mai 2016, n° 15-06153
PARIS
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Levy, Optical center (SAS)
Défendeur :
Optic Kremlin (SARL)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Rajbaut
Conseillers :
Mmes Auroy, Douillet
Avocats :
Mes Brault, Mandel
La société Optical center, créée en 1991 par M. Laurent Levy, qui en est le président, et immatriculée au RCS de Paris sous le numéro 382 372 993, a pour activité la vente au détail d'équipements optiques. Elle exploite une centaine de magasins en France et est aussi franchiseur pour des sociétés exploitant également des magasins d'optique sous son enseigne.
Le 20 mars 2007, M. Levy a déposé la marque communautaire semi-figurative en couleur "Optical center" n° 005771167 qui était enregistrée le 24 avril 2008 dans les produits et services suivants :
en classe 5 : " Produits pharmaceutiques, hygiéniques ; désinfectants ; collyre ; compresses ; solutions pour verre de contact; préparations pour le nettoyage de verre de contact et de verres optiques " ;
en classe 9 : " Lentilles de contact ; lentilles optiques ; loupes (optique) ; articles de lunetterie ; lunettes (optiques) ; châsses (montures) de lunettes ; lunettes de soleil, lunettes de sport ; étuis à lunettes ; instruments à lunette ; niveaux à lunettes ; verres de lunettes ; appareils et instruments optiques ; verre optique ; verres correcteurs (optique) ; verres de contact ; étuis pour verres de contact; loupes (optique) ";
en classe 35 : " Aide à la direction d'entreprises industrielles ou commerciales ; conseils en organisation et direction des affaires ; organisations d'expositions à buts commerciaux ou de publicité ; location d'espaces publicitaires ; location de temps publicitaire sur tout moyen de communication ; location de matériel publicitaire ; étude de marché ; gestion de fichiers informatiques ; consultation pour la direction des affaires, consultation professionnelle d'affaires ; promotion des ventes (pour des tiers) ; publicité en ligne sur un réseau informatique ; publication de textes publicitaires ; courrier publicitaire ; regroupement pour le compte de tiers (à l'exception de leur transport) de produits (à savoir : lunettes, lentilles de contact) ; services d'abonnement à des journaux pour des tiers " ;
en classe 44 : " Services d'opticiens ".
Par acte sous seing privé du 11 février 2013 inscrit le 15 mars 2013 sur les registres de l'OHMI, M. Levy a cédé ses droits sur sa marque à la société Optical center.
La société Optic Kremlin, immatriculée au RCS de Creteil sous le numéro 533 499 661, exploite un fonds de commerce d'achat, vente et commercialisation d'articles d'optique, de lunetterie, d'audition, de services photos et vidéos, et tous accessoires s'y rapportant situé au Kremlin-Bicêtre (94) qu'elle a acquis par acte sous seing privé du 27 juillet 2011 conclu avec la société Opticatlani, franchisée de la société Optical center.
Invoquant l'utilisation par la société Optic Kremlin de "tous ses signes distinctifs", à l'exception du logo, ainsi que d'une enseigne Optical centre et de ses kakémonos (du japonais Kakemono : affiche ou panneau imprimé sur un support souple ou plastifié et pouvant être déroulé), la société Optical center a fait réaliser un premier constat d'huissier le 11 avril 2012.
Par courrier RAR du 23 avril 2012, elle a mis en demeure la société Optic Kremlin de changer d'enseigne et de supprimer " tous les signes distinctifs " et les affiches publicitaires lui appartenant.
Le 14 mai 2012, elle a fait réaliser un deuxième constat par huissier de justice.
Par courrier du 22 mai 2012, la société Optic Kremlin a contesté toute imitation de l'enseigne et tout risque de confusion, en indiquant qu'elle procéderait à une nouvelle vérification de ses supports matériels et kakémonos.
Le 19 juillet 2012, la société Optical center a fait réaliser un troisième constat d'huissier.
Par exploit d'huissier en date du 21 septembre 2012, la société Optical center a assigné la société Optic Kremlin devant le Tribunal de commerce de Creteil en demandant la suppression, sous astreinte, de " tous les signes distinctifs " de la société Optical center et l'indemnisation de son préjudice.
Le 8 décembre 2012, la société Optic Kremlin a déposé plainte pour vol avec dégradations de son enseigne et a fait dresser un procès-verbal de constat par un huissier de justice le 11 février 2013.
Par ordonnance du 21 décembre 2012 rendue sur requête par le président du Tribunal de commerce de Creteil, la société Optical center a été autorisée à faire procéder à un constat d'huissier dans le magasin exploité par la société Optic Kremlin. Ce constat d'huissier a été établi le 2 février 2013.
Par jugement du 18 novembre 2013, le Tribunal de commerce de Creteil s'est déclaré incompétent au profit du Tribunal de grande instance de Paris.
Par conclusions notifiées le 12 septembre 2014, M. Levy est intervenu volontairement à l'instance.
Dans un jugement du 5 mars 2015, le tribunal a notamment :
déclaré irrecevable pour défaut d'intérêt à agir la société Optic Kremlin dans sa demande reconventionnelle en nullité de la marque communautaire semi-figurative en couleurs " Optical center " n° 005771167, annulé l'ordonnance du 21 décembre 2012 rendue par le président du Tribunal de commerce de Créteil, incompétent matériellement, et annulé en conséquence le procès-verbal de constat dressé le 2 février 2013 par Maître Meunier, rejeté les demandes de la société Optical center au titre de la concurrence déloyale et parasitaire, rejeté les demandes de la société Optic Kremlin au titre de la procédure abusive,
condamné in solidum la société Optical center et M. Levy aux dépens et au paiement à la société Optic Kremlin de la somme de 10 000 euro en application de l'article 700 du Code de procédure civile.
Le 19 mars 2015, M. Laurent Levy et de la société Optical center ont interjeté appel de ce jugement.
Dans leurs dernières conclusions transmises le 13 novembre 2015, M. Levy et de la société Optical center demandent à la cour :
de rejeter les exceptions de nullité soulevées par la société Optic Kremlin et de reconnaître la validité de la marque communautaire "Optical center" n° 5771167,
de juger que la société Optic Kremlin s'est rendue coupable d'actes de concurrence déloyale et de parasitisme,
de la condamner à verser à la société Optical center la somme de 169 480 euro à titre de dommages-intérêts pour le préjudice matériel et commercial subi,
d'ordonner la publication, aux frais de la société Optic Kremlin, de tout ou partie du dispositif de l'arrêt dans le quotidien Le Parisien Edition Val de Marne et dans une revue professionnelle au choix de la société Optical center, dans la limite de 10 000 euro par publication et autoriser la société Optical center à procéder aux publications à ses frais avancés,
de débouter la société Optic Kremlin de toutes ses demandes, de la condamner la société Optic Kremlin au paiement d'une somme de 25 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
Dans ses dernières conclusions transmises le 13 juillet 2015, la société Optic Kremlin demande à la cour :
à titre principal :
de confirmer le jugement en toutes ses dispositions dès lors que les appelants n'ont pas dûment saisi la cour de conclusions formulant des critiques du jugement déféré et qu'ils n'ont pas, dans le dispositif de leurs conclusions, contrairement aux dispositions de l'article 954 alinéa 2 du Code de procédure civile, expressément demandé à la cour d'infirmer le jugement relativement aux demandes pour lesquelles ils ont été déboutés en première instance,
à titre subsidiaire :
de la condamner à des dommages-intérêts purement symboliques au cas où la cour, par extraordinaire, infirmerait le jugement et ferait droit à tout ou partie des demandes de la société Optical center,
en tout état de cause :
de condamner in solidum la société Optical center et M. Levy à lui verser la somme de 50 000 euro à titre de dommages-intérêts pour appel abusif,
d'ordonner, à titre de dommages-intérêts complémentaires, la publication de tout ou partie du dispositif de l'arrêt à intervenir, aux frais avancés et exclusifs de la SAS Optical center et de M. Levy, dans trois revues ou magazines au choix de la société Optic Kremlin, dans la limite de 10 000 euro HT par publication, la SAS Optical center et M. Levy devant être condamnés, à ce titre, à consigner la somme de 30 000 euro dans les huit jours suivant la signification de l'arrêt à intervenir,
de condamner la société Optical center et M. Levy in solidum à lui payer la somme de 50 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens d'appel.
MOTIFS DE L'ARRÊT
Considérant qu'en application des dispositions de l'article 455 du Code de procédure civile, il est expressément renvoyé, pour un exposé exhaustif des prétentions et moyens des parties, aux conclusions écrites qu'elles ont transmises, telles que susvisées ;
Sur la validité de la marque communautaire semi-figurative "Optical center" n° 005771167
Considérant qu'il y a lieu de constater que le jugement n'est pas critiqué par la société Optic Kremlin en ce qu'il l'a déclarée irrecevable en sa demande reconventionnelle en nullité de la marque communautaire semi-figurative"Optical center" n° 005771167, pour défaut d'intérêt à agir ;
Que le jugement sera, par conséquent, confirmé de ce chef ;
Sur la concurrence déloyale et parasitaire
Sur la rédaction des conclusions d'appel de la société Optical center et M. Levy
Considérant qu'en application de l'article 954 du Code de procédure civile, les conclusions d'appel doivent formuler expressément les prétentions des parties et les moyens de fait et de droit sur lesquels chacune de ses prétentions est fondée et que les prétentions sont récapitulées sous forme de dispositif, la cour ne devant statuer que sur les prétentions énoncées au dispositif ;
Que cependant, en l'espèce, même si les conclusions de M. Levy et de la société Optical center ne le précisent pas explicitement, elles ne laissent pas subsister d'incertitude sur le fait que les appelants poursuivent l'infirmation du jugement déféré, notamment en ce qu'il les a déboutés de leurs demandes en concurrence déloyale et parasitaire ;
Que sera, par conséquent, rejeté la demande de la société intimée en ce qu'elle tend à la confirmation du jugement pour le seul motif que les conclusions des appelants n'indiquent pas expressément qu'est sollicitée l'infirmation du jugement ;
Sur la validité du procès-verbal de constat du 2 février 2013
Considérant qu'en vertu de l'article L. 716-3 du Code de la propriété intellectuelle, les actions civiles et demandes relatives aux marques, y compris lorsqu'elles portent également sur une question connexe de concurrence déloyale, sont exclusivement portées devant des tribunaux de grande instance ;
Que c'est à juste raison que les premiers juges, après avoir constaté que dans sa requête aux fins de désignation d'un huissier de justice du 17 décembre 2012 adressée au président du Tribunal de commerce de Créteil, la société Optical center imputait à la société Optic Kremlin l'utilisation de " tous ses signes distinctifs " ainsi qu'une " contrefaçon totale et servile " et sollicitait la désignation d'un huissier de justice afin notamment " de constater et noter les conditions d'utilisation de la marque Optical center " et que l'ordonnance présidentielle rendue le 21 décembre 2012 reprenait ces derniers termes pour définir la mission de l'huissier, ont estimé que la protection d'une marque communautaire était en débat et que seul le président du TGI de Paris était, par conséquent, compétent pour ordonner sur requête la mesure d'instruction sollicitée, peu important que l'instance au fond ultérieurement introduite ait concerné seulement la concurrence déloyale et parasitaire;
Que c'est à juste raison que le Tribunal a, par suite, annulé le procès-verbal de constat d'huissier établi le 2 février 2013 en vertu d'une ordonnance rendue par le président du Tribunal de commerce matériellement incompétent ;
Que le jugement déféré doit être confirmé sur ce point, sans qu'il y ait lieu d'examiner le surplus de l'argumentation des parties de ce chef ;
Que le jugement doit cependant être infirmé en ce qu'il a annulé l'ordonnance rendue par le président du Tribunal de commerce de Créteil, seul le procès-verbal de constat d'huissier pouvant être annulé pour les motifs qui viennent d'être exposés, tirés des conditions de délivrance de l'ordonnance ayant autorisé la mesure ;
Sur l'existence d'actes de concurrence déloyale et parasitaire
Considérant que la concurrence déloyale doit être appréciée au regard du principe de la liberté du commerce qui implique qu'un signe ou un produit qui ne fait pas l'objet de droits de propriété intellectuelle, puisse être librement reproduit, sous certaines conditions tenant à l'absence de faute par la création d'un risque de confusion dans l'esprit de la clientèle sur l'origine du produit, circonstance attentatoire à l'exercice paisible et loyal du commerce ; que l'appréciation de la faute au regard du risque de confusion doit résulter d'une approche concrète et circonstanciée des faits de la cause prenant en compte notamment le caractère plus ou moins servile, systématique ou répétitif de la reproduction ou de l'imitation, l'ancienneté d'usage, l'originalité, la notoriété de la prestation copiée ;
Que les agissements parasitaires constituent entre concurrents l'un des éléments de la concurrence déloyale ; qu'ils consistent, pour une personne morale ou physique, à titre lucratif et de façon injustifiée, à s'inspirer ou à copier une valeur économique d'autrui, individualisée et procurant un avantage concurrentiel, fruit d'un savoir-faire, d'un travail intellectuel et d'investissement ;
Considérant qu'en l'espèce, la société Optical center fait grief à la société Optic Kremlin de créer et d'entretenir frauduleusement une confusion dans l'esprit des clients par :
l'imitation de l'enseigne Optical center - qui est aussi un nom commercial et une dénomination - du fait de l'utilisation d'une enseigne Optical centre, obtenue par la seule interversion de deux lettres de l'enseigne laissée sur la façade du magasin à la suite de la cession du fonds de commerce, et de la reprise de la charte graphique de l'ancienne enseigne (enseigne présentée sur un grand panneau blanc ; lettres caissons en PVC blanc avec une surface noire) ainsi que d'un trait rouge au-dessus des lettres rappelant le trait figurant sur la marque communautaire semi-figurative n° 005771167 ; la reprise par la société Optic Kremlin de l'ensemble de ses visuels, éléments de décoration, mobiliers et organisation de l'espace et affiches publicitaires en vitrine ;
Que la société Optic Kremlin oppose, d'une part, que l'enseigne Optical center, dépourvue de caractère distinctif, n'est pas protégeable et qu'en toute hypothèse, les enseignes en cause présentent des différences significatives, exclusives du risque de confusion allégué, d'autre part, que l'utilisation des visuels, décorations, mobiliers etc... est légitime dès lors qu'elle a acquis ces éléments avec le fonds de commerce et enfin que la reprise alléguée de l'agencement intérieur du magasin et d'offres commerciales ne saurait être, en l'espèce, constitutive de concurrence déloyale ou parasitaire ;
Considérant que c'est à juste raison que le tribunal a relevé que les éléments dont l'imitation ou la reprise est invoquée par les appelants ne sont l'objet d'aucun droit privatif et que, dans un contexte de libre concurrence, ils sont donc libres de droits et peuvent être utilisés dans le commerce sans entrave, sauf faute démontrée générant un risque de confusion ou captation indue d'investissements ;
Considérant que le propriétaire d'une enseigne, d'un nom commercial ou d'une dénomination sociale ne peut prétendre en interdire l'usage par un concurrent ou obtenir réparation du préjudice résultant de leur usurpation sur le fondement de l'article 1382 du Code civil que pour autant que le signe invoqué soit distinctif, c'est-à-dire qu'il permette d'identifier l'origine commerciale des services et produits offerts ;
Qu'en l'espèce, alors que l'élément revendiqué de l'enseigne opposée se compose du signe verbal "Optical center" en lettres majuscules noires sur fond blanc - la reprise de l'élément figuratif figurant à gauche de ce signe, représentant une paire de lunettes stylisée, n'étant pas invoquée -, le tribunal a estimé à juste raison, pour des motifs pertinents que la cour adopte, que le signe verbal en cause n'était pas distinctif, décrivant pour tout consommateur, même s'il ne maîtrise pas l'anglais, un centre optique ; qu'il en est de même du nom commercial et de la dénomination sociale, composés des mêmes mots ; que la reprise de ces signes par un concurrent de la société Optical center ne peut donc générer un risque de confusion ; que la confusion entre les deux enseignes dont attestent les pièces produites par les appelants résulte non de la reprise d'éléments verbaux pour partie identiques par la société Optic Kremlin, mais de l'inaptitude intrinsèque de l'enseigne et du nom commercial de la société Optical center à jouer leur rôle d'identification d'une origine commerciale dans l'esprit du consommateur ; qu'au surplus, comme l'ont relevé les premiers juges, les signes verbaux "Optical centre" de l'enseigne de la société Optic Kremlin sont surmontés d'un trait courbe rouge et accompagnés, sur leur gauche, des signes " Optique & Audition " descriptifs des services offerts - et existant sur certaines enseignes Optical center mais figurant alors à droite et sans esperluette - et, perpendiculairement à l'enseigne, d'une paire de lunettes rouges, de sorte que, prise dans son ensemble, l'enseigne litigieuse présente des différences qui ne sont pas insignifiantes par rapport à l'enseigne de la société Optical center ;
Considérant que par ailleurs, il ressort des procès-verbaux de constat d'huissier dressés les 14 mai et 19 juillet 2012 et du témoignage en date du 13 décembre 2012, de Mme De Alfonseca Vilas Boas, salariée de la société Optical center, que la société Optic Kremlin proposait dans le magasin du Kremlin-Bicêtre des offres promotionnelles affichées en vitrine (" - 40 % sur toutes les marques de montures et de verres optiques + 2e paire offerte y compris en progressifs " ; " 990 euro tout compris - forfait auditif - votre appareil numérique (...) + l'adaptation et nos services ") et utilisait des équipements et mobiliers également utilisés dans des magasins Optical center (supports d'exposition pour les montures, signalétiques, tables de vente, chaises et péniches faisant apparaître le logo Optical center) ; que cependant, les offres promotionnelles en cause, au demeurant courantes dans le secteur de l'optique, à supposer qu'elles correspondent à celles antérieurement utilisées par la société Optical center, sont exposées dans une typologie et une présentation d'une grande banalité, de sorte que leur reprise par la société intimée n'est pas fautive dans un contexte de libre concurrence et de libre fixation des prix qui autorise les opérateurs économiques à aligner leurs offres commerciales sur celles de leurs concurrents dès lors que cet alignement ne procède pas d'une entente anticoncurrentielle entre eux ; que l'utilisation d'équipements et de mobiliers estampillés précédemment utilisés par le franchisé de la société Optical center n'est pas davantage fautive dès lors qu'il est établi, au vu de l'acte de cession dommages et intérêts fonds de commerce, que la société Optic Kremlin a régulièrement acquis ces équipements de la société 7 Opticatlani, franchisée de la société Optical center et, au surplus, que la société appelante admet dans ses écritures que la suppression de la marque Optical center apposée sur ces biens était en cours lors des opérations de constat d'huissier ; que les appelants arguent vainement de l'adoption par la société Optic Kremlin d'un agencement intérieur de magasin qui serait conforme à celui des magasins Optical center (" L'ergonomie est identique, les présentoirs se situent tout autour du magasin et plusieurs bureaux, équipés d'ordinateurs et d'un miroir rond, permettant de recevoir les clients se situent au milieu "), cet élément étant largement commandé par la nature de l'activité en cause et commun à de nombreux acteurs du secteur concerné, comme les premiers juges l'ont pertinemment relevé ;
Qu'enfin, les appelants ne justifient pas de l'existence d'investissements particuliers dans le choix du mobilier et l'élaboration de l'agencement revendiqués susceptible d'avoir été indûment captés par la société Optic Kremlin ;
Qu'en conséquence, le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté la société Optical center de ses demandes en concurrence déloyale et parasitaire ;
Sur la demande de publication
Considérant que le sens de la présente décision conduit à rejeter la demande de publication des appelants ;
Sur les demandes de la société Optic Kremlin pour procédure abusive
Considérant que l'exercice d'une action en justice constitue, en principe, un droit et ne dégénère en abus pouvant donner naissance à une dette de dommages et intérêts que dans le cas de malice, de mauvaise foi ou d'erreur grossière équipollente au dol ;
Que le rejet des prétentions de M. Levy et de la société la société Optical center ne permet pas de caractériser, en l'espèce, une faute ayant fait dégénérer en abus leur droit d'agir en justice, les intéressés ayant pu légitimement se méprendre sur l'étendue de leurs droits ; que la société Optic Kremlin invoque vainement des procédures, étrangères à la présente instance, dans lesquelles la société Optical center a obtenu des ordonnances sur requête qui ont ensuite fait l'objet de rétractation ; que, par ailleurs, la société Optic Kremlin ne démontre pas l'existence d'un préjudice distinct de celui causé par la nécessité de se défendre en justice qui sera réparé par l'allocation d'une indemnité sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;
Que les demandes de l'intimée tendant à l'allocation de dommages et intérêts et à l'obtention d'une mesure complémentaire de publication seront, en conséquence, rejetées ;
Sur les dépens et les frais irrépétibles
Considérant que M. Levy et la société Optical center qui succombent en leur appel seront condamnés aux dépens et garderont à sa charge les frais non compris dans les dépens qu'ils ont exposés à l'occasion de la présente instance, les dispositions prises sur les dépens et frais irrépétibles de première instance étant confirmées ;
Considérant que la somme qui doit être mise à la charge des appelants au titre des frais non compris dans les dépens exposés en appel par la société Optic Kremlin peut être équitablement fixée à 15 000 euro ;
Par ces motifs, LA COUR, Rejette la demande de la société Optic Kremlin tendant à la confirmation du jugement pour le seul motif que les conclusions des appelants n'indiquent pas expressément qu'est sollicitée l'infirmation du jugement ; Infirme le jugement déféré en ce qu'il a annulé l'ordonnance du 21 décembre 2012 rendue par le président du Tribunal de commerce de Créteil, Le confirme pour le surplus, Y ajoutant, Déboute M. Levy et la société Optical center de leur demande de publication de la présente décision, Déboute M. Levy et la société Optical center de leurs demandes de dommages et intérêts pour procédure abusive et de publication complémentaire, Condamne in solidum M. Levy et la société Optical center aux dépens d'appel ainsi qu'au paiement à la société Optic Kremlin de la somme de 15 000 euro en application de l'article 700 du Code de procédure civile.