CA Nîmes, 4e ch. com., 19 mai 2016, n° 15-00789
NÎMES
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Ambulances secours services 84 (SARL)
Défendeur :
Renault retail group (SA), Renault (SAS)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
MmeCodol
EXPOSÉ
Vu l'appel interjeté le 20 février 2015 par la SARL Ambulances secours services à l'encontre du jugement prononcé le 13 février 2015 par le Tribunal de Commerce d'Avignon dans l'instance n° 2013 07698, enregistré sous le numéro 15/00789.
Vu l'appel interjeté le 9 avril 2015 par la SAS Renault à l'encontre du jugement prononcé le 13 février 2015 par le Tribunal de Commerce d'Avignon dans l'instance n° 2013 07698, enregistré sous le numéro 15/1688.
Vu l'ordonnance en date du 30 avril 2015 joignant les procédures sous le numéro 15/00789.
Vu les dernières conclusions déposées le 22 février 2016 par la SARL Ambulances secours services appelante et le bordereau de pièces qui y est annexé.
Vu les dernières conclusions déposées le 17 février 2016 par la SAS Renault, intimée et appelante, et le bordereau de pièces qui y est annexé.
Vu les dernières conclusions déposées le 2 novembre 2015 par la SA Renault retail group, intimée, et le bordereau de pièces qui y est annexé.
Vu l'ordonnance de clôture de la procédure en date du 8 février 2016 à effet différé au 3 mars 2016.
Suivant facture du 17 avril 2009, la SARL Ambulances secours services 84 (ci-après nommée le client) a commandé à la SAS Les dauphins un véhicule Renault Trafic L1H1 de 150 CV, n° de série VF1FLAVA69V340431, lequel a été transformé en ambulance médicale. Se plaignant de diverses avaries, le client a confié le véhicule à la SA Renault retail group (ci-après nommé le concessionnaire) afin qu'il soit réparé, ce qui a nécessité 21 interventions.
Par ordonnances du juge des référés du Tribunal de grande instance d'Avignon en date des 3 novembre 2010 et 16 février 2011, une expertise était confiée à MF à l'effet de rechercher au contradictoire de la SAS Les dauphins, du concessionnaire et de la SAS Renault (ci-après nommé le constructeur), la nature des désordres et leurs causes, ainsi que tous les éléments de préjudice pouvant en résulter.
L'expert a établi son rapport le 10 février 2013, en y joignant celui de son sapiteur, l'expert-comptable Jean-Marie B.
Par arrêt du 23 juillet 2014, la cour d'appel de Nîmes, réformant une ordonnance déférée en date du 24 juillet 2013, a condamné le concessionnaire à payer une indemnité provisionnelle de 40 000 euros au client, déboutant ce dernier de sa demande de provision dirigée contre le constructeur.
Par exploit du 27 septembre 2013, le client a fait assigner devant le Tribunal de commerce d'Avignon le concessionnaire et le constructeur en paiement conjoint et solidaire de la somme de :
- 175 313 euros à titre de dommages intérêts au titre de la perte de bénéfices, dont il convient de déduire la provision,
- 4 536,46 euros au titre de la perte financière et agios,
- 20 000 euros en réparation du préjudice lié à la procédure,
- 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.
Par jugement du 13 février 2015, le Tribunal de commerce d'Avignon a, en substance :
- adopté les conclusions de l'expert,
- dit que la concessionnaire a engagé sa responsabilité contractuelle,
- dit que le véhicule comportait un vice caché engageant la responsabilité du constructeur,
- condamné solidairement le concessionnaire et le constructeur à payer au client la somme de 97 573 euros de laquelle doivent être déduits les montants déjà payés à titre provisionnel,
- condamné solidairement le concessionnaire et le constructeur à payer au client une indemnité de 4 000 euros sur le fondement de de l'article 700 du Code de procédure civile,
- condamné solidairement le concessionnaire et le constructeur aux dépens comprenant le coût de l'expertise.
Le client a relevé appel de ce jugement pour voir :
- rejeter la demande de nullité du rapport d'expertise F.,
- déclarer recevable son appel,
- condamner solidairement le concessionnaire et le constructeur à lui payer la somme de 175 313 euros au titre des pertes de bénéfice liées aux pannes subies par le véhicule, outre 6 058 euros liées aux charges supplémentaires engendrées par les dysfonctionnements soit un total de 181 371 euros, dont il conviendra de déduire les sommes réglées à titre provisionnel,
- condamner solidairement le concessionnaire et le constructeur à lui payer la somme de 20 000 euros à titre de dommages intérêts pour préjudice lié à la présente procédure, outre 4 536,46 euros au titre des pertes financières et aux difficultés rencontrées sur le véhicule,
- condamner solidairement le concessionnaire et le constructeur à lui payer la somme de 7 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,
- le jugement déféré devant être confirmé dans toutes ses autres dispositions.
Le constructeur forme appel pour voir, au visa de l'article 276 du Code de procédure civile, 1641 et suivants du Code civil:
- annuler le rapport d'expertise de MF,
- débouter le client et le concessionnaire de toutes leurs demandes,
- condamner le client ou la partie succombant à l'instance à lui payer la somme de 10 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.
Le concessionnaire conclut au visa de l'article 1147 du Code civil à l'infirmation du jugement entrepris qui a reconnu sa responsabilité et demande à voir :
- constater qu'il ne saurait être reconnu responsable originel des désordres, alors même que ces derniers pré existaient à sa première intervention sur le véhicule litigieux,
- constater qu'à l'issue des opérations d'expertise judiciaire, la cause originelle des désordres reste indéterminée,
- constater qu'aucun manquement professionnel ou défaut de diagnostic ne peut lui être imputé au regard des moyens nécessaires, hors de sa compétence et de ses propres moyens, dépêchés tant par l'expert judiciaire que par le constructeur pour mettre un terme aux désordres,
- en conséquence, débouter le client de toutes ses demandes et prononcer sa mise hors de cause.
A titre subsidiaire,
- condamner le constructeur à le garantir de l'ensemble des condamnations prononcées à son encontre,
A titre infiniment subsidiaire,
- confirmer purement et simplement le jugement déféré,
En tout état de cause,
- condamner le succombant au paiement d'une indemnité de 7 500 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.
Pour un plus ample exposé il convient de se référer à la décision déférée et aux conclusions visées supra.
DISCUSSION
Sur la procédure :
Il ne ressort pas des pièces de la procédure de moyen d'irrecevabilité des appels que la Cour devrait relever d'office, et les parties n'élèvent aucune discussion sur ce point.
Sur le fond :
Le constructeur soulève in limine litis une exception de nullité du rapport d'expertise, au visa de l'article 276 du Code civil. Il expose en effet que l'expert n'a pas répondu à son Dire du 19 avril 2012 et que les premiers juges se sont référés à tort à la page 58 du rapport pour considérer qu'il avait été répondu à ce Dire et rejeter son exception.
Le client conclut à la confirmation du jugement déféré sur ce point et fait valoir qu'une inobservation des formalités prescrites par l'article 276 du Code de procédure civile n'entraîne la nullité de l'expertise que si la partie qui l'invoque fait la démonstration d'un grief.
Le Dire du 19 avril 2012 rappelle que 'la société Ambulance secours service ne s'est plainte pour la première fois d'un manque de puissance du moteur que le 24 juillet 2009 à 28.926 kms, c'est-à-dire 23 jours seulement après une intervention du Garage de L'ile qui comprenait, outre une opération d'entretien, un contrôle du boitier accélérateur et un nettoyage d'une broche. Une intervention non conforme de ce garagiste peut donc être parfaitement à l'origine des désordres'.
Comme retenu par les premiers juges, il a été répondu à ce Dire page 58 du rapport d'expertise avec renvoi aux pages 24 à 26 du pré-rapport par confirmation totale de l'expert sur sa description des désordres affectant le véhicule. En conséquence, l'exception de nullité soulevée par le constructeur sera rejetée.
En ce qui concerne la responsabilité du concessionnaire, le Tribunal de commerce a qualifié à juste titre les relations contractuelles nouées avec le client de contrat d'entreprise. Il a estimé que le concessionnaire est débiteur d'une obligation de résultat, renforcée en l'espèce par le fait que le véhicule avait été vendu par lui-même et était en période de garantie au moment des faits.
Le concessionnaire soutient qu'il n'est pas responsable des désordres qui pré existaient à son intervention et n'a pas aucunement manqué à ses obligations professionnelles alors que d'une part, la cause des désordres reste indéterminée et que d'autre part, leur appréhension a nécessité la mise en œuvre de moyens conséquents, tant de la part de l'expert judiciaire que du constructeur.
En ce qui concerne la nature des désordres, la Cour retient les conclusions de l'expert selon lesquelles le véhicule était soumis à des coupures et pertes de puissance du moteur avec éclairage intempestif des voyants au tableau de bord (sans que cela ne soit toujours le cas) et des dysfonctionnements de la climatisation et que ceci est dû, exception faite de la climatisation qui se mettait en veille en raison des microcoupures électriques, aux :
- boîtier et le volet d'accélérateur, vérifiés par le garage Bellone le 1er juillet 2009 avec nettoyage de la broche connectique,
- débitmètre défectueux et remplacé par le garage Renault le 24 juillet 2009 avec vérification du calculateur et du câblage électrique,
- de nouveau au boîtier et volet d'accélérateur remplacés par le garage Renault le 30 décembre 2009 avec contrôle du calculateur et du câblage de la planche de bord,
- à la culasse remplacée par le garage Renault le 27 mai 2010 avec les opérations périphériques d'usage et le remplacement du câblage électrique du moteur,
- au turbo compresseur remplacé par le garage Belonne le 26 mai 2011 avec les opérations périphériques d'usage,
- à l'antivol de direction remplacé par le garage Renault en août 2011, sur lequel ont été retrouvés ensuite 45 défauts enregistrés avec le matériel de diagnostic fourni par le constructeur,
- à la connectique du débitmètre dont les dysfonctionnements moteurs n'étaient pas enregistrés avec le matériel mis à disposition au concessionnaire par le constructeur. A propos de cette pièce, l'expert note dans son rapport que 'les fiches d'intervention jointes au dossier démontrent que les problèmes du débitmètre étaient signalés depuis le tout début et que ce défaut, de toute évidence provoqué par la fiche électrique défaillante, réapparaissait régulièrement. Qu'il convient d'observer que le débitmètre a été remplacé par le garage Renault en date du 24 juillet 2009 et à 28 913 kms et qu'à cette occasion, le câblage a été contrôlé par un technicien qui n'a pas signalé d'anomalie à ce niveau, ni préconisé de travaux. Que d'autre part les cosses de réparation retrouvées sur le câblage de la fiche de connexion ne sont pas d'origine et bien que nous ne puissions la dater, cette modification a été faite, soit lors de cette intervention du 24 juillet 2009 par le garage Renault, soit plus tard, lors du remplacement du câblage électrique du moteur qu'il a effectué le 27 mai 2010. Qu'ainsi et du fait de la présence de cette fiche défectueuse, les interventions réalisées sont restées sans résultat et les dysfonctionnements ont continué.'
Comme relevé par les premiers juges, il est ainsi établi que le véhicule était atteint de dysfonctionnements depuis le début de sa mise en circulation, qui n'ont rien à voir avec l'opération d'entretien effectuée par le garage Bellone le 1er juillet 2009, consistant en un contrôle du boîtier de l'accélérateur et un nettoyage de la broche connectique, sans changement de pièces. Les opérations d'expertise ont par ailleurs démontré qu'à la suite de la mise à disposition par le constructeur d'un logiciel permettant d'entrer dans la racine informatique de la mémoire embarquée du véhicule, 255 incidents du capteur de débit d'air et 45 défauts de l'anti vol ont été constatés (page 19 du pré rapport). Après vérification du câblage et des composants situés entre le débitmètre et le calculateur du véhicule, il a été constaté en premier lieu que les fils électriques étaient raccordés par des cosses de réparation et en second lieu que les dysfonctionnements moteurs se produisaient dès que la fiche de connexion du débitmètre était remuée (pages 21, 26 du pré rapport et 64 du rapport). La fiche de connexion a été remplacée en décembre 2011, à la suite de quoi le véhicule n'a plus présenté de problème de fonctionnement. La connectique défectueuse ayant été installée par le concessionnaire soit le 24 juillet 2009, soit le 27 mai 2010 avec la conséquence relevée par l'expert de ce que, en raison de la présence de cette fiche défectueuse, les interventions réalisées sont restées sans résultat et que les dysfonctionnements ont perduré, le concessionnaire est mal venu à soutenir qu'il a satisfait à son obligation de résultat, dont il ne pourrait s'affranchir qu'en apportant la preuve d'une cause étrangère équipollente à la force majeure. Et ce n'est pas en alléguant une réelle difficulté de diagnostic qu'il apporte cette démonstration puisque c'est par sa faute consistant d'une part en l'installation d'une fiche défectueuse, comportant des cosses de réparation qui n'étaient pas d'origine, d'autre part en ne demandant pas une aide technique au constructeur alors qu'il n'arrivait manifestement pas à diagnostiquer la cause des dysfonctionnements, qu'il a contribué au dommage du client, obligé d'utiliser pendant plusieurs années un véhicule non performant et régulièrement immobilisé au garage.
La responsabilité du concessionnaire étant engagée au visa de l'article 1147 du Code civil, celui-ci demande à ce que le constructeur le garantisse de l'ensemble des condamnations susceptibles d'être prononcées à son encontre. Le constructeur s'y oppose à juste titre, en raison notamment de la faute du concessionnaire relative à la mise en place d'une fiche de connexion défectueuse de sorte que sa responsabilité de réparateur, tenu à une obligation de diagnostic et de résultat est pleinement engagée.
A titre infiniment subsidiaire, le concessionnaire conclut, à l'instar du client, à la confirmation du jugement déféré en ce qu'il a condamné solidairement le concessionnaire et le constructeur, qui ne peut échapper à sa responsabilité compte tenu de l'importance des dysfonctionnements dénoncés peu de temps après la mise en circulation du véhicule et des interventions entreprises au titre de la garantie.
Le constructeur demande à être mis hors de cause, faisant valoir, au visa de l'article 1641 du Code civil que le client doit rapporter la preuve d'un défaut de fabrication du véhicule à l'origine des désordres. Or, ce n'est parce que de nombreux composants ont été remplacés qu'il est apporté la preuve d'un défaut de fabrication du véhicule. En l'espèce, ce sont les diagnostics erronés du concessionnaire qui ont entraîné l'application de la garantie contractuelle du constructeur, de sorte qu'il n'est pas démontré l'existence de vices cachés.
Mais d'une part, les diagnostics erronés du concessionnaire sont dûs au fait qu'ils ont été élaborés à partir de la documentation et du matériel homologué Renault lesquels n'identifiaient pas les dysfonctionnements, ce qui a amené l'expert à solliciter le constructeur afin qu'il fournisse le matériel adéquat, à savoir un PC de diagnostic doté d'un logiciel permettant d'entrer dans la racine informatique de la mémoire embarquée du véhicule, puis un dispositif d'enregistrement (sorte de boîte noire) installé sur le véhicule.
D'autre part, l'expert, après avoir récapitulé l'ensemble des dysfonctionnements constatés sur le véhicule - dont l'enregistrement de 45 défauts sur l'antivol de direction - conclut à une origine d'ordre électrique sur plusieurs composants, ce qui générait des parasites qui polluaient les systèmes électriques et électroniques, sans que tous les dysfonctionnements ne soient enregistrés et répertoriés dans la mémoire embarquée du véhicule, ni même par le matériel de diagnostic du concessionnaire, lequel est fourni par le constructeur dans tout le réseau Renault (page 64 du rapport).
Il s'ensuit que le véhicule vendu au client était atteint de vices indécelables, d'ordre électrique sur plusieurs composants et que ces défauts cachés ont tellement diminué son usage que le client ne l'aurait pas acquis s'il les avait connus, comme le relèvent avec pertinence les premiers juges.
En conséquence, c'est à bon droit que le Tribunal de commerce a condamné solidairement le constructeur et le concessionnaire à réparer les préjudices supportés par le client et consécutifs à leur défaillance.
En ce qui concerne le préjudice subi par le client, celui-ci estime avoir droit à une réparation intégrale et demande à ce que le jugement querellé, qui a fixé l'impact des dysfonctionnements à 69% de la perte du chiffre d'affaires soit infirmé.
Le constructeur soutient que le tribunal a retenu à tort une période d'indemnisation débutant à compter de la mise en circulation du véhicule alors que c'est la date de la 1ère intervention qui aurait dû être prise en compte et que le client n'a subi aucun préjudice dans la mesure où le véhicule n'a pas été immobilisé.
Le concessionnaire conclut à la réduction dans de plus justes proportions du montant des indemnités à allouer au client et de la période d'indemnisation qui ne doit débuter qu'à compter du 1er juillet 2009, date de dénonciation des désordres au 6 octobre 2010 puis du 2 juin 2011 au 15 décembre 2011.
Ainsi que relevés par les premiers juges, il est incontestable que le client a subi des préjudices consécutifs aux dysfonctionnements du véhicule (perte de puissance et arrêts intempestifs du moteur) ajouté aux très nombreuses interventions de dépannage qui ont immobilisé un véhicule aménagé en ambulance et indispensable à l'exploitation commerciale du client, lequel doit amener les personnes transportées le plus rapidement possible à destination.
La période d'indemnisation doit courir entre le 17 avril 2009, les désordres affectant le véhicule ayant débuté dès sa mise en circulation jusqu'à la mi-décembre 2011, date à laquelle l'ambulance a été réparée, hors période d'immobilisation liée au remplacement du turbo ( entre octobre 2010 et juin 2011) eu égard au fait qu'il n'est pas contesté que cette pièce n'a pas été entretenue par le client, ce qui a amené le concessionnaire à ne pas faire application de la garantie.
MB, sapiteur, a estimé que la perte de résultat du client s'élevait à 175 313 euros entre le 17 avril 2009 et le 6 octobre 2010, puis du 2 juin 2011 au 15 décembre 2011. C'est ce montant que réclame le client.
Pour ce faire, le sapiteur a pris en compte les plannings annuels alors qu'ils présentent des écarts significatifs avec les chiffres d'affaire mentionnés sur les liasses fiscales, approximativement de 20% en 2009, 10% en 2010, 4% en 2011. Il est arrivé à la conclusion que la perte totale de chiffre d'affaires s'élevait à 275 000 euros et après imputation des charges variables, évaluées à 36,25%, le sapiteur aboutit à cette perte de bénéfices d'un montant de 175 313 euros.
C'est donc le ralentissement d'activité du client qui a été pris en considération et non une immobilisation totale du véhicule, comme allégué par le constructeur.
Si le principe de réparation intégrale est indéniable, la victime ne saurait être indemnisée au-delà de son préjudice. Compte tenu de la disparité existant entre les chiffres d'affaires ressortant des plannings et des chiffres d'affaire, inférieurs, mentionnés sur les liasses fiscales, c'est à juste titre que les premiers juges n'ont pas retenu la somme proposée par le sapiteur. Pour autant, ils n'auraient pas dû valoriser forfaitement le préjudice retenu à 60% de la perte du chiffre d'affaires. En conséquence, la Cour évalue l'indemnisation du client à la somme " arrondie " de 162 622 euros correspondant à la perte du chiffre d'affaires mensuel après imputation des charges variables d'exploitation (6 637,65 euros) pendant 24,5 mois, dont il conviendra de déduire les provisions déjà versées.
Le client réclame également l'indemnisation de son préjudice consécutif aux charges supplémentaires engendrées par les dysfonctionnements qu'il évalue à 6 058 euros, conformément au montant retenu par le sapiteur.
Le concessionnaire et le constructeur font valoir qu'il n'y a pas de lien direct avec les désordres affectant le véhicule.
C'est par des motifs pertinents que les premiers juges ont refusé de faire droit à ce poste de préjudice dans la mesure où rien ne prouve que les frais bancaires et pénalités relevés dans les documents comptables du client et pris en compte par le sapiteur soient la conséquence directe de la perte d'exploitation résultant des dysfonctionnements du véhicule. Par ailleurs, les factures de location de véhicule produites par le client couvrent une période où l'ambulance était immobilisée en raison de la panne du turbo compresseur. Le client sera donc débouté de sa demande en paiement de ce chef.
Il en est de même pour la demande complémentaire en réparation des intérêts et frais bancaires d'un montant de 1994,61 euros, des majorations pour retard de paiement de l'Urssaf d'un montant de 2 541,85 euros, faute de démonstration d'un lien direct avec la perte d'exploitation résultant des dysfonctionnements du véhicule.
Enfin, " l'indemnisation forfaitaire " de 20 000 euros réclamée pour les désagréments de temps passé et de gestion de procédure, n'est aucunement justifiée, ni en droit, ni en fait. Le jugement déféré qui a débouté le client de cette demande, sera confirmé sur ce point.
Sur les frais de l'instance :
Le concessionnaire et le constructeur, qui succombent, devront supporter les dépens de l'instance et payer solidairement au client une somme équitablement arbitrée, eu égard à leur situation économique, à 5 000 euro en application de l'article 700 du Code de procédure civile.
Par ces motifs, LA COUR, statuant par arrêt contradictoire et en dernier ressort, Reçoit les appels en la forme. Au fond, confirmant le jugement déféré en ses dispositions non contraires aux présentes et le réformant ou complétant sur les chefs suivants, Rejette l'exception de nullité de l'expertise, Condamne solidairement la SAS Renault retail group prise en son établissement d'Avignon et la SAS Renault à payer à la SAS Ambulance services 84 la somme de 162 622 euros, de laquelle seront déduits les montants versés à titre provisionnel, Dit que la SAS Renault retail group prise en son établissement d'Avignon et la SAS Renault supporteront solidairement les dépens de première instance et d'appel, en ce compris les frais d'expertise, et paieront solidairement à la SAS Ambulance services 84 une somme de 5 000 euro par application de l'article 700 du Code de procédure civile. Dit que Me GPR pourra recouvrer directement contre les parties ci-dessus condamnées, ceux des dépens dont il aura fait l'avance sans en recevoir provision, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.