Cass. com., 6 septembre 2016, n° 14-26.839
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
PARTIES
Demandeur :
Faure Herman (Sté)
Défendeur :
Metering & Technology (SAS)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Mouillard
Avocat général :
M. Debacq
Conseillers :
Mme Darbois, Mme Riffault-Silk
Avocats :
Potier de La Varde, Buk-Lament (SCP), Hémery, Thomas-Raquin (SCP)
LA COUR : - Sur le moyen unique, pris en ses quatrième à sixième branches : - Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 19 septembre 2014), que la société Faure Herman, spécialisée dans la production et la commercialisation de débitmètres, reprochant à la société Metering & Technology (la société M & T), constituée par trois de ses anciens salariés, de commercialiser des produits similaires aux siens, après avoir obtenu l'autorisation de procéder à diverses investigations dans les locaux de cette société, la communication de documents relatifs au développement de ses produits ainsi qu'une mesure d'expertise, l'a assignée en concurrence déloyale et parasitaire ;
Attendu que la société Faure Herman fait grief à l'arrêt du rejet de sa demande et de sa condamnation à la publication, à ses frais, de la décision et au paiement de dommages-intérêts alors, selon le moyen : 1°) que la cour d'appel qui, après avoir constaté que l'hélice d'un débitmètre apparaissait comme un composant fondamental, s'est néanmoins fondée, pour dire qu'il existait des différences entre les produits des sociétés Faure Herman et M & T, sur la circonstance inopérante que les débitmètres comportent plusieurs composants et que la société Faure Herman se prévaut seulement de la reproduction de l'hélice, ce qui n'était pas de nature à exclure un acte de concurrence déloyale relativement à l'élément fondamental qu'est l'hélice, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil ; 2°) qu'en se bornant à relever, pour écarter la concurrence déloyale, que, malgré les similitudes relevées par l'expert entre les turbines des sociétés Faure Herman et M & T, il existait des différences entre ces produits, sans rechercher si les importantes similitudes constatées ne suffisaient pas, nonobstant quelques différences, à créer un risque de confusion dans l'esprit de la clientèle, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil ; 3°) que le fait pour un agent économique de s'immiscer dans le sillage d'un autre afin de tirer profit, sans rien dépenser, de ses efforts et de son savoir-faire constitue un acte de parasitisme ; qu'en se bornant à relever, pour écarter les demandes de la société Faure Herman, que les turbines litigieuses présentaient certaines différences et que la société M & T disposait de moyens propres pour élaborer et commercialiser les débitmètres en cause, sans rechercher, comme elle y était invitée, si le choix par la société M & T, constituée par d'anciens salariés de la société Faure Herman, de commercialiser un produit presque identique à celui de sa concurrente, installée de longue date sur le marché, ne suffisait pas à caractériser un acte de parasitisme économique, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil ;
Mais attendu qu'après avoir indiqué que l'expert avait constaté la très grande proximité des technologies relatives aux débitmètres à hélice mises en œuvre par chacune des deux sociétés, mais aussi décrit les différences existant entre les produits en présence, et avoir retenu qu'au regard de l'étroitesse de ce marché, les marges de progression pour acquérir un avantage technologique et se différencier de la concurrence étaient limitées, l'arrêt relève, d'abord, qu'il n'est pas établi que ces similitudes portent sur des éléments spécifiquement créés par la société Faure Herman, laquelle ne caractérise pas les éléments qui se distingueraient de ceux déjà connus et seraient susceptibles de constituer une appropriation indue de son savoir-faire particulier ; qu'il relève, ensuite, qu'aucun document de cette société n'a été retrouvé dans les locaux de la société M & T et que l'expert a indiqué sur ce point, d'une part, que rien ne permettait de dire que celle-ci avait eu recours à des documents ou des techniques ou secrets de fabrique ou des brevets de la première et, d'autre part, que les trois anciens salariés disposaient des compétences requises pour développer en un court temps deux débitmètres, l'un à ultrasons et l'autre à hélice ; qu'il relève, encore, que les débitmètres à turbine à hélices hélicoïdales à bords d'attaque courbes existaient déjà sur le marché, émanant de la société Enha en 1988 et de la société FMC Smith en 1999 et 2000, que cette technologie faisait l'objet d'une importante communication, notamment de la société Faure Herman elle-même, et que, d'après l'expert, la société M & T n'avait pas développé une technologie innovante par rapport à celle déjà connue ; que l'arrêt retient, enfin, que la société M & T, ayant eu recours à un emprunt et bénéficié d'un crédit d'impôts recherche, a adopté un modèle économique de fonctionnement concentré sur la recherche et le développement d'une seule technologie reproductible, lui permettant de faire des économies d'infrastructure et de masse salariale, à la différence de la société Faure Herman, qui indique travailler à partir d'abaques définissant chaque hélice de façon unique pour tout nouveau débitmètre et dont l'investissement financier allégué ne correspond pas aux frais de recherche et de développement relatifs aux hélices mais aux frais généraux de l'entreprise intervenant sur plusieurs secteurs technologiques et produits ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations, dont elle a déduit que la technologie des débitmètres à turbine à hélices hélicoïdales à bords d'attaque courbes se trouvait dans le domaine public et que la société M & T, qui disposait des moyens humains, financiers et techniques nécessaires, avait utilisé cette technologie commune pour élaborer un débitmètre à hélice se distinguant de ceux conçus par la société Faure Herman, la cour d'appel, qui a ainsi écarté tout acte de concurrence déloyale et de parasitisme et n'était pas tenue de procéder à la recherche inopérante invoquée par la deuxième branche, a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le moyen, pris en ses trois premières branches et en sa septième branche, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Par ces motifs : Rejette le pourvoi.