CA Paris, Pôle 5 ch. 11, 23 septembre 2016, n° 14-07266
PARIS
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Figaromedias (Sasu)
Défendeur :
ENA (SA)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Birolleau
Conseillers :
Mmes Nicoletis, Lis Schaal
La société Figaromedias a pour activité la régie publicitaire de médias. Elle a reçu commande le 18 décembre 2009 d'un ordre d'insertion publicitaire pour les parutions au journal TV magazine en date des 20 mars, 29 mai, 25 septembre et 23 octobre 2010 pour un montant total de 335 000 euros HT.
Les ordres de publicité concernaient une enseigne de matelas, dénommée l'Univers du Sommeil vendus par la société ENA.
Ces insertions publicitaires devaient paraître sur la 4e de couverture pour les parutions des 17 mars et 26 mai 2010 au prix unitaire de 83 750 euros HT et pour la parution de 22 septembre 2010 sur une première double page au prix de 83 500 euros HT, la dernière parution du 20 octobre 2010 étant faite sur la 4e de couverture pour un prix de 100 165 euros TTC.
La dernière facture FP/10010943 n'a pas été réglée à la fin de l'année 2010. La société Figaromedias a accusé réception, le 31 janvier 2011, d'un chèque de 20 000 euros envoyé par la société ENA le 20 janvier 2011, en rappelant à ENA qu'elle restait lui devoir la somme de 80 165 euros et lui accordant un délai de paiement jusqu'à fin février 2011.
Le 25 février 2011, ENA lui a adressé un chèque de 30.000 euros en lui rappelant qu'elle avait un désaccord avec son service commercial à la suite de la non-observation du planning défini pour les parutions dans TV magazine et de la qualité défectueuse de la parution du mois de mars 2010.
Estimant que ENA restait lui devoir un montant de 50 165 euros, Figaromedias a assigné ENA devant le Tribunal de commerce de Paris en paiement au principal de cette somme.
Par jugement du 10 décembre 2013, le tribunal de commerce a débouté les parties de l'ensemble de leurs demandes.
La société Figaromedias a régulièrement interjeté appel de ce jugement.
La société Figaromedias, par conclusions signifiées par le RPVA le 29 septembre 2014, auxquelles il est fait référence pour plus ample exposé des motifs, de leurs moyens et de leur argumentation, conclut à l'infirmation du jugement entrepris, au débouté de ENA de l'ensemble de ses demandes, à sa condamnation à lui payer une somme de 50 165 euros, avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 10 juin 2011 ainsi qu'aux la sommes de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts et de 6 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
Elle soutient qu'il n'y a pas eu de contestation sérieuse de la part de ENA, aucun courrier de protestation pendant l'année 2010 ne lui ayant été adressé, et qu'il y a eu accord de son dirigeant, Monsieur X, pour les modifications dans les parutions. Elle estime donc que la lettre du 18 avril 2011 est une contestation tardive. Elle ajoute que ENA a reconnu lui devoir la somme de 50 000 euros dans son courriel du 16 janvier 2012.
La société ENA, par conclusions signifiées par le RPVA le 29 juillet 2014, conclut au débouté des demandes de la société Figaromedias, à sa condamnation à lui payer les sommes de 150 165 euros, de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et de 6 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
Elle s'appuie sur les articles 4 et 9 du Code des usages de la publicité et estime que les insertions défectueuses des 20 mars 2010 et 25 septembre 2010 ne peuvent donner lieu à paiement. Elle fait valoir que l'ordre de publicité (la 4e de couverture) n'a pas été respecté, qu'il n'y a pas eu d'accord entre les parties pour une substitution, ENA n'ayant jamais accepté une modification de l'insertion du 25 septembre 2010, que Figaromedias n'a pas respecté ses engagements, alors qu'en sa qualité de régie publicitaire maîtrisant totalement le support TV magazine, elle est tenue à une obligation de résultat. Elle soutient qu'il n'y a eu aucune reconnaissance de dette de sa part.
Elle estime subir un préjudice constitué par le prix des insertions défectueuses des 20 mars et 25 septembre 2010 soit après compensation un montant de 150 165 euros.
Sur ce
Considérant que la société ENA a contracté avec Figaromedias aux fins de publication dans le magazine TV Magazine de quatre insertions pour une enseigne de matelas " l'Univers du sommeil ", aux conditions suivantes :
- parution du 20 mars 2010, en page quadri, en 4e de couverture, au tarif brut de 206 000 euros HT ;
- parution du 29 mai 2010, en page quadri, en 4e de couverture, au tarif brut de 206 000 euros HT ;
- parution du 25 septembre 2010, en page quadri, en 4e de couverture, au tarif brut de 206 000 euros HT ;
- parution du 23 octobre 2010, en page quadri, en 4e de couverture, au tarif brut de 206 000 euros HT ;
Que le coût total de 824 000 euros HT a été ramené à 335 000 euros HT après remise de 53,35 %, soit un prix, pour chaque parution, de 83 750 euros HT ;
Que la facture du 21 octobre 2010 d'un montant de 100 165 euros TTC (83 750 euros HT) n'a pas été réglée par ENA ; que ENA a finalement réglé, par chèque du 20 janvier 2011, un montant de 20 000 euros et le 25 février 2011 un montant de 30 000 euros, de sorte qu'un montant de 50 165 euros est réclamé par Figaromedias ;
Considérant qu'il n'est pas contesté par Figaromedias que les parutions du 20 mars 2010 et du 25 septembre 2010 n'étaient pas conformes à la commande ; que celle du 20 mars était de mauvaise qualité et atteinte d'un grave défaut au niveau des couleurs et a été remplacée par une parution à l'intérieur du magazine, le 6 novembre 2010, sur une simple page, et non en 4e de couverture ; que la parution du 25 septembre 2010 a été remplacée par une pleine page à l'intérieur du magazine, et non en 4e de couverture ;
Considérant que Figaromedias ne justifie pas d'un accord formel préalable ou postérieur donné par ENA à une telle substitution ; qu'en revanche, il est établi que ENA n'a pas contesté le montant des factures réclamé par Figaromedias durant l'année 2010, année des parutions ; qu'elle a réglé les montants portant sur les parutions litigieuses ;
Considérant que le litige porte sur le paiement de la dernière parution - celle du 25 septembre 2010 - qui ne comportait aucun défaut ; qu'en outre, la société ENA a réglé un montant de 20 000 euros le 20 janvier 2011 et un montant de 30 000 euros le 25 février 2011 se déduisant du solde réclamé par Figaromedias qui s'élevait à 100 165 euros ;
Que, dans son courrier du 25 février 2011, la société ENA a indiqué : " Nous vous rappelons le désaccord avec le service commercial de Figaromedias, qui ne nous a pas répondu à ce jour, pour la non-observation du planning des parutions dans TV Magazine en 2010 et la qualité défectueuse de la parution du mois de mars 2010 " ; que, le 2 mars 2001, la société ENA a précisé : " Suite à la mauvaise qualité de la parution du 20 mars 2010, la page de substitution n'a pas été en dernière page comme la logique l'aurait commandé mais en page 21 et en date du 6 novembre 2010. A ce jour, nous n'avons toujours pas reçu de réponse à nos demandes d'indemnisations ou d'avoirs concernant la non-exécution du contrat " ; que, dans son courrier du 18 avril 2011, la société ENA sollicite clairement une proposition d'indemnisation de la part de Figaromedias ; que l'ensemble de ces courriers postérieurs aux parutions et au paiement de 50 000 euros sur le solde de 100 165 euros payés en 2011 démontre que la société ENA recherchait un arrangement et ne réclamait pas le remboursement total des parutions du 20 mars 2010 et du 25 septembre 2010 ; que son absence de réclamation au moment des parutions et de leurs substitutions confirme ce point ;
Considérant qu'au vu de ces éléments, la cour estime que le préjudice subi par la société ENA résultant de la non-conformité des parutions litigieuses par rapport à la commande sera justement réparé par la somme de 50 165 euros qui était due par la société ENA sur le solde des factures ; qu'en conséquence, il n'y a pas lieu de condamner la société ENA à payer cette somme ; que le jugement entrepris sera dès lors confirmé ;
Considérant que l'exercice d'une action en justice ne dégénère en abus que s'il constitue un acte de malice ou de mauvaise foi ; que l'abus n'est établi pour aucune des parties ; qu'au surplus, n'est démontré aucun préjudice pouvant donner lieu à des dommages et intérêts ; qu'il y a donc lieu de rejeter les demandes de ces chefs ;
Considérant que l'équité n'impose pas l'application de l'article 700 du Code de procédure civile en cause d'appel ;
Par ces motifs : LA COUR statuant publiquement et contradictoirement, Confirme le jugement entrepris ; Déboute les parties de leurs plus amples prétentions ; Dit n'y avoir lieu à l'application de l'article 700 du Code de procédure civile ; Dit que chaque partie supportera ses dépens.