Cass. 3e civ., 5 avril 1968
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
LA COUR : - Sur le premier moyen, pris en ses deux branches : - Attendu qu'il résulte des énonciations de l'arrêt attaqué que Savignac ayant fait construire un immeuble, a chargé Magadoux, décorateur, d'y effectuer des travaux de décoration ;
Qu'après leur exécution, des difficultés s'élevèrent entre les parties, la facture présentée par Magadoux ayant dépassé de près du double le prix originairement convenu ;
Que, sur l'instance en payement formée par Magadoux, Savignac a été condamné à payer le solde réclamé, cependant que Magadoux était condamne à verser a Savignac a titre de dommages-intérêts à raison du dol commis envers celui-ci, une somme de deux mille francs ;
Attendu qu'il est reproche à la cour d'appel d'avoir ainsi statue, alors d'une part, que le prétendu dol allégué à l'encontre de Magadoux ne serait caractérisé que par des motifs dubitatifs, que ni la légèreté, ni l'incompétence retenues contre lui, ne sauraient être considérées comme des manœuvres constitutives de dol, lequel doit être antérieur à la conclusion du contrat, alors, d'autre part qu'il appartenait aux juges d'appel de dire qu'il s'agissait de dol principal ou de dol incident et non à Savignac de choisir entre ces deux hypothèses ;
Mais attendu que si la cour d'appel a fait état d'agissements de Magadoux antérieurs a la conclusion du contrat, d'où pouvait résulter un dol principal, en déclarant que Magadoux avait dans un document intitulé ordre de dépense constituant non une indication globale et très approximative de la dépense envisagée, mais un état détaillé et donc étudié dans lequel était prévu un total de 5 119,25 francs, ce qui était bien précis ;
Elle s'est refusée à prononcer l'annulation du contrat par application de l'article 1116 du Code civil ;
Que pour accorder seulement à Savignac des dommages-intérêts, venant en déduction de son obligation contractuelle envers Magadoux, elle relève : que Magadoux s'est soigneusement gardé, après les prétendues modifications demandées lors de l'exécution des travaux, d'appeler l'attention de Savignac sur l'augmentation des dépenses qui devait résulter soit de l'erreur commise par le décorateur dans ses prévisions initiales, soit de la répercussion pécuniaire des modifications demandées sur des travaux dont elle souligne plus loin l'ampleur et la magnificence non prévues à l'origine ;
Qu'au vu de ces constatations elle a pu faire appel, comme elle le déclare sans ambiguïté, à la notion de dol incident, et a justifié sa décision, les motifs relatifs au dol principal étant surabondants et comme tels, vainement critiqués par le pourvoi ;
Qu'ainsi le moyen doit être écarté ;
Sur le second moyen : - Attendu qu'il est encore vainement soutenu que l'arrêt aurait condamné à tort Magadoux à verser à Savignac des dommages-intérêts, alors que Magadoux avait dans ses conclusions soutenu que son client avait pu se rendre compte au cours de l'exécution des travaux que la dépense serait plus importante qu'il n'était prévu à l'origine ;
Qu'il ne résulterait pas de l'arrêt que Savignac ait subi un dommage quelconque et que c'est par une contradiction évidente qu'il a été admis que le prix demandé par Magadoux correspondait à la valeur des travaux effectués ;
Attendu, en effet, que c'est en vertu de son pouvoir souverain d'appréciation et sans se contredire, que la cour d'appel, répondant aux conclusions dont elle était saisie, a estimé que Savignac n'avait pu se rendre compte de l'importance des dépenses engagées et qu'elle a considère implicitement mais nécessairement que le dommage subi par lui résultait du supplément de prix non prévu à verser à Magadoux ;
Qu'ainsi le moyen n'est pas mieux fonde que le précèdent ;
Par ces motifs : Rejette le pourvoi formé contre l'arrêt rendu le 22 décembre 1965 par la Cour d'appel de Limoges