CA Riom, 3e ch. civ. et com., 30 novembre 2016, n° 15/01150
RIOM
Arrêt
PARTIES
Défendeur :
Murprotec (SA)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Riffaud
Conseillers :
M. Juillard, M. Kheitmi
EXPOSE DU LITIGE :
Le 21 octobre 2013, Mme G. a signé, avec la société Mur Protect, un premier contrat de fourniture et d'installation d'une centrale de traitement d'air pour un prix de 5 380 euros et un second contrat concernant un dispositif contre les remontées capillaires d'un coût de 9 400 euros, l'ensemble étant destiné à sa résidence secondaire situé sur la commune de Neuf Eglises (63).
Les travaux ont été réceptionnés sans réserve suivant deux procès-verbaux des 28 et 31 octobre 2013.
Ne parvenant pas à être réglée la SA Mur Protect a assigné Mme G. le 7 août 2014 en référé et le dossier a été renvoyé au fond aboutissant au jugement du tribunal de grande instance de Clermont-Ferrand en date du 25 février 2015, rejetant les nullités soulevées par Mme G. et la condamnant à payer la somme de 11 776 euros avec intérêts au taux légal à compter du 7 août 2014, ainsi qu'aux dépens et au paiement d'une somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile.
Par déclaration reçue au greffe le 21 avril 2015 Mme G. a interjeté appel de cette décision.
Cette dernière par conclusions signifiées par voie de communication électronique, le 20 juillet 2015, demande à la cour, au visa des articles L.121-25 et 26 du Code de la consommation la réformation de la décision et le constat que le délai de rétractation n'a pas été respecté puisqu'un acompte a été perçu le 28 octobre 2013 pour un contrat signé le 21 octobre 2013, que dès lors la nullité du contrat s'impose ainsi que le bénéfice d'une somme de 5 000 euros pour le préjudice souffert, outre l'octroi d'une somme de 17 000 euros à titre de dommages et intérêts, mais également la mise à la charge de la SA Mur Protect des dépens qui seront distraits en faveur de maître A. et d'une somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile.
Elle fait valoir que le délai de rétractation doit courir à compter du lendemain du jour où a été conclu le contrat conformément à la jurisprudence. Elle ajoute que la sanction au plan civil est fondée sur l'article 6 du Code civil qui permet de prononcer la nullité du contrat et en l'espèce il conviendra d'y ajouter une somme de 5 000 euros en réparation du 'préjudice souffert, outre une somme de 17 000 euros de dommages et intérêts.
En réponse, la SA Mur Protect par conclusions signifiées par voie de communication électronique, le 9 septembre 2015, sollicite de la cour, au visa des articles L.121-23 à 26 du Code de la consommation, la confirmation de la décision frappée d'appel en précisant que les intérêts débuteront le 5 décembre 2013, le débouté de toutes les demandes de l'appelante, ainsi que le bénéfice des dépens distraits au profit de maître D. et l'octroi d'une somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile.
Elle soutient que Mme G. est de mauvaise foi et veut échapper au paiement des travaux.
Elle estime avoir respecté le délai de rétractation de 7 jours dans la mesure où le jour de la signature du contrat doit être pris en compte. Dès lors, la concluante pouvait prendre un chèque d'acompte dès le 28 octobre 2013, d'autant qu'il n'a pas été encaissé immédiatement.
La cour se réfère aux écritures des parties pour plus ample exposé du litige et de leurs moyens conformément à l'article 455 du Code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 26 mai 2016.
Motifs de la décision
Sur le délai de rétractation
Il résulte de l'article L. 121-25 ancien du Code de la consommation applicable à l'espèce que le délai de rétractation était de 7 jours à compter de la commande ou de l'engagement d'achat et que si ce délai se termine un jour férié, chômé ou un dimanche il est prorogé jusqu'au premier jour ouvrable.
Ce droit de repentir du consommateur démarché à son domicile est d'ordre public et son bénéficiaire ne peut y renoncer.
Il n'est pas contestable que la computation des délais retenue par la jurisprudence prévoyait, à l'époque de la conclusion du contrat en cause, que le jour de la signature du contrat (le 21 octobre 2013) ne comptait pas dans le calcul des 7 jours. Il est également constant que les textes actuels (L.222-6 à 8 du Code de la consommation) retiennent le même mode de calcul du délai et ont porté à 14 jours le délai de rétractation du consommateur afin notamment de prendre en considération la directive européenne numéro 2011/83/UE du 25 octobre 2011.
Dès lors, il convient de considérer que la computation du délai de 7 jours applicable à l'espèce doit débuter le mardi 22 octobre 2013 à zéro heure et se terminer le 7ème jour à 24 heures à savoir le lundi 28 octobre 2013 à minuit.
Or, en l'occurrence un chèque a bien été établi le 28 octobre 2013 par l'appelante et pris par la SA Mur Protect en contradiction avec la prohibition absolue de procéder ainsi en application de l'article L.121-26 ancien du Code de la consommation qui édictait que nul ne peut exiger ou obtenir du client, directement ou indirectement, à quelque titre ni sous quelque forme que ce soit une contrepartie quelconque ni aucun engagement.
Partant, la cour ne peut qu'annuler les deux contrats souscrits au mépris des obligations des textes sus-visés. En effet, afin d'appliquer l'effectivité des sanctions civiles liées aux manquements d'une société vis à vis des droits d'un consommateur et au regard de l'article 6 du Code civil qui précise qu'on ne peut déroger, par des conventions particulières, aux lois qui intéressent l'ordre public, le prononcé de l'annulation s'impose en l'espèce, d'autant qu'il existe une sanction pénale attachée à un tel comportement fautif démontrant ainsi la volonté du législateur de protéger les consommateurs.
En conséquence, le jugement sera réformé et la cour prononcera la nullité des contrats en cause.
Mme G. sollicite d'une phrase, sans aucun fondement juridique, la réparation du préjudice souffert (pour un montant de 5 000 euros) sans indiquer ce que serait ledit préjudice. Il s'ensuit que cette demande sera rejetée.
De même, l'appelante sollicite de manière tout aussi succincte le bénéfice d'une somme de 17 000 euros à titre de dommages et intérêts dont la cour ne trouve aucune démonstration, d'autant moins que Mme G. va bénéficier gratuitement d'une installation qui ne présentait aucun défaut. Dès lors, elle sera déboutée de cette demande.
Sur le surplus des demandes
Succombant, la SA Mur Protect devra supporter les dépens de première instance et d'appel qui seront distraits en faveur de maître A. avocat, mais toutefois, en équité, la demande de l'appelante au titre des frais de procès sera rejetée.
Par ces motifs : LA COUR, statuant publiquement, après en avoir délibéré, par arrêt contradictoire et en dernier ressort, mis à la disposition des parties au greffe de la juridiction ; Réforme le jugement, Statuant à nouveau et y ajoutant, Prononce la nullité des contrats souscrits, le 21 octobre 2013, par Mme Ginette G. G. auprès de la SA Mur Protect pour défaut de respect du délai de rétractation de 7 jours ; Déboute Mme Ginette G. G. de ses demandes de réparation du 'préjudice souffert' et de dommages et intérêts ; Condamne la Sa Mur Protect aux dépens de première instance et d'appel qui seront distraits en faveur de maître A. avocat ; Déboute Mme Ginette G. G. de sa demande au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ; Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.