CA Paris, Pôle 5 ch. 10, 12 décembre 2016, n° 15-08782
PARIS
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Médiagare (SNC), Médiarail (SNC)
Défendeur :
Marchier (ès. qual.), Pinel, Guillouet (ès. qual.)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Loos
Conseillers :
Mmes Simon-Rossenthal, Castermans
Avocats :
Mes Bernabe, Lousqui, Poltzien, La Burthe
Faits et procédure
Les sociétés Mediagare et Mediarail assurent depuis 2008 l'exploitation à des fins publicitaires d'emplacements situés sur le domaine public dans les gares de la SNCF et RFF, en vertu de conventions d'occupation du domaine public. Elles ont succédé dans cette activité à la société Clear Channel France. M. Pinel a créé en 1977 une entreprise en nom personnel sous l'enseigne "Affichage Pinel Service" qui traite notamment de la mise en œuvre des affichages publicitaires dans les gares Sncf depuis 1997 en effectuant des travaux de pose pour le compte des entreprises en charge de la commercialisation de ces espaces, notamment par Mediagare et Mediarail depuis 2008. Il avait en charge la prestation de pose et d'entretien des panneaux publicitaires de différents formats.
Au cours de l'été 2012, les sociétés Mediagare et Mediarail ont souhaité mettre en concurrence l'ensemble des prestations relatives à l'affichage.
En juillet 2012 elles ont adressé un courrier à M. Pinel mettant un terme à leur relation commerciale à compter du 1er août 2014.
Considérant que M. Pinel contrevenait ses obligations pendant la période de préavis, les sociétés Mediagare et Mediarail, après plusieurs mises en demeure, ont adressé un courrier AR le 28 novembre 2012 notifiant un nouveau préavis se terminant le 30 juin 2013.
Une procédure de redressement judiciaire a été ouverte à l'encontre de M. Pinel convertie le 2 juin 2014 en liquidation judiciaire. Maîtres Marchier et Guillouet ont été respectivement désignés administrateur judiciaire et mandataire liquidateur de M. Pinel.
Par acte du 2 juillet 2013 M. Pinel avait fait assigner les sociétés Mediagare et Mediarail.
Vu le jugement prononcé le 21 avril 2015 par le Tribunal de commerce de Paris qui a :
- pris acte de l'intervention volontaire à la procédure de Maîtres Marchier et Guillouet, respectivement désignés administrateur judiciaire et mandataire liquidateur de M. Pinel,
- débouté les défenderesses de leur demande tendant à écarter les pièces 15, 38, 39, 52, 53, 59, 60, 61-1, 61-2 et 61-3,
- dit qu'en accordant un préavis de 24 mois à M. Pinel, les sociétés Mediagare et Mediarail n'ont pas rompu brutalement leur relation commerciale avec M. Pinel,
- dit que les sociétés Mediagare et Mediarail ont commis une faute engageant leur responsabilité contractuelle en résiliant les préavis qu'elles avaient chacune accordés 13 mois avant leurs termes,
- condamne la société Médiagare à payer à Maître Guillouet, ès qualités, la somme de 273 000 euros à titre de dommages et intérêts pour l'activité "panneaux suspendus",
- condamne la société Médiagare à payer à Maître Guillouet, ès qualités, la somme de 336 700 euros à titre de dommages et intérêts pour l'activité "panneaux non suspendus",
- condamne la société Mediarail à payer à Maître Guillouet, ès qualités, la somme de 573 000 euros à titre de dommages et intérêts pour l'activité "panneaux non suspendus",
- condamne in solidum la société Mediarail et la société Mediagare à payer à Maître Guillouet, ès qualités, la somme de 15 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,
- ordonné l'exécution provisoire,
Vu l'ordonnance du 17 juillet 2015 du délégataire du premier président qui a autorisé la consignation des condamnations,
Vu l'appel déclaré le 27avril 2015 par les sociétés Mediarail et Mediagare,
Vu les dernières conclusions déposées le 26 septembre 2016 par les sociétés Mediarail et Mediagare,
Vu les dernières conclusions déposées le 17 août 2015 par Maître Guillouet, ès qualités de liquidateur judiciaire de l'entreprise Pinel
Les sociétés Mediarail et Mediagare demandent à la cour de statuer ainsi qu'il suit :
- infirmer le jugement déféré en ce qu'il a :
* Débouté les sociétés Mediarail et Mediagare de leur demande d'écarter des débats les pièces adverses 11 15, 38, 39, 52, 53, 59, 60, 61-1, 61-2 et 61-3 ;
* dit que les sociétés Mediarail et Mediagare ont commis une faute engageant leur responsabilité contractuelle en résiliant les préavis qu'elles avaient chacune accordés de 13 mois avant leurs termes;
* condamné la société Médiagare à payer à Maître Guillouet, ès qualités, la somme de 273 000 euros à titre de dommages et intérêts pour l'activité "panneaux suspendus",
* condamné la société Médiagare à payer à Maître Guillouet, ès qualités, la somme de 336 700 euros à titre de dommages et intérêts pour l'activité "panneaux non suspendus",
* condamné la société Mediarail à payer à Maître Guillouet, ès qualités, la somme de 573 000 euros à titre de dommages et intérêts pour l'activité "panneaux non suspendus",
* condamné in solidum la société Mediarail et la société Mediagare à payer à Maître Guillouet, ès qualités, la somme de 15 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,
Statuant de nouveau :
- dire que l'intention frauduleuse de Monsieur Pinel découle nécessairement des falsifications qu'il a opérées sur 10 pièces qu'il a versées aux débats,
- déclarer recevable et bien fondé l'incident de faux en écritures privées,
- écarter des débats les pièces adverses n 15, 38, 39, 52, 53, 59,60, 61-1, 61-2 et 61-3,
Au fond :
- dire que les relations commerciales entre les sociétés Mediarail et Mediagare d'une part, et l'entreprise Pinel, d'autre part, ont débuté en 2008,
- dire que, au vu des manquements graves et répétés dont attestent les sociétés Mediarail et Mediagare, ces dernières ont été fondées à diminuer le délai de préavis laissé à l'entreprise Pinel de 24 à 11 mois,
A titre subsidiaire :
- dire que, en tout état de cause et en raison de l'ancienneté des relations commerciales, un préavis de 11 mois était suffisant pour permettre à l'entreprise Pinel de se réorganiser,
- dire que les sociétés Mediarail et Mediagare n'ont commis aucune faute en rompant leurs relations commerciales avec l'entreprise Pinel,
- dire que les sociétés Mediarail et Mediagare ne sont redevables d'aucune somme à l'égard de Me Guillouet, ès qualités,
A titre très subsidiaire, si les sociétés Mediarail et Mediagare devaient être déclarées fautives :
- dire que seule la marge brute bénéficiaire peut servir à calculer le préjudice indemnisable pour la rupture de relations commerciales établies,
- dire qu'en présence d'une société de prestations de services, le critère de la marge sur coûts variablesne peut être retenu pour calculer le préjudice indernnisable d'une rupture de relations commerciales établies,
- faire siennes les conclusions du rapport établi par Monsieur André Vaillant, expert judiciaire près la Cour d'appel de Douai,
- En conséquence, dire que le préjudice indemnisable de l'Entreprise Pinel ne saurait excéder la somme de 206 659 euros correspondant à l'excédent brut d'exploitation moyen réalisé par cette entreprise entre 2011 et 2012 rapporté à 13 mois de préavis non exécuté,
A titre infiniment subsidiaire, si les sociétés Mediarail et Mediagare devaient être reconnues fautives :
- fixer le préjudice indemnisable au montant du résultat net d'exploitation réalisé en 2012 par l'entreprise Pinel concernant les activités en cause, à savoir, 113 268 euros, enfin, si par impossible et subsidiairement, la cour s'estimait insuffisamment éclairée :
- ordonner toute expertise qu'il plaira à la Cour, aux frais avancés de l'intimée,
- confirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté l'Entreprise Pinel de ses demandes :
a) relatives aux prétendus avantages manifestement disproportionnés et sans contrepartie allégués et prendre acte de l'abandon des demandes de l'intime au de la tarification de ses prestations ;
b) de dommages et intérêts au titre de ses activités portants motorisés et contrôle qualité ;
c) tendant à la publication de la décision ;
d) et plus généralement de ses autres demandes, notamment celles fondées sur les articles 1134 et 1382 du Code civil ;
- dire que l'Entreprise Pinel n'était pas en situation de dépendance économique à l'égard des sociétés Mediarail et Mediagare,
En tout état de cause :
- condamner Maitre Sophie Guillouet, ès qualités, à verser aux sociétés Mediarail et Mediagare la somme de 15 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du Code de Procedure Civile ; Maître Guillouet, ès qualités de liquidateur judiciaire de l'entreprise Pinel, demande à la cour de statuer ainsi qu'il suit :
- débouter les sociétés Mediarail et Mediagare de l'ensemble de leurs demandes,
- dire que les sociétés Mediarail et Mediagare ont commis des fautes et graves manquements aux usages et pratiques honnêtes et loyales du commerce, en obtenant au préjudice de l'entreprise de Monsieur Philippe Pinel des avantages sans contrepartie créant un déséquilibre contractuel, en lui faisant supporter des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties et en lui imposant sous la menace d'une rupture brutale totale ou partielle des relations commerciales, des conditions manifestement abusives concernant les prix, les délais de paiement, les modalités de vente ou les services ne relevant pas des obligations d'achat et de vente,
- dire que les sociétés Mediarail et Mediagare ont commis une faute grave contraire aux usages et pratiques honnêtes et loyales du commerce, en rompant brutalement et sans préavis raisonnable leurs relations commerciales établies ou en réduisant de manière illégitime le préavis applicable,
- dire que les prétendues allégations d'inexécution du marché ne sont pas justifiées et sérieuses et ne pouvaient légitimer la rupture brutale, comme constitutive de " fautes graves ",
Subsidiairement et à raison des mêmes fautes :
- dire que les sociétés Mediarail et Mediagare ont commis une faute de déloyauté et de bonne foi dans l'exécution des relations commerciales habituelles des parties,
Et encore plus subsidiairement :
- dire que les sociétés Mediarail et Mediagare ont, à raison des mêmes manquements, engagé leur responsabilité délictuelle,
En conséquence, dans tous les cas :
A titre principal :
- infirmer partiellement le jugement entrepris en ce qu'il n'a pas retenu l'indemnisation intégrale des préjudices subis par l'intimée,
Et, statuant à nouveau :
- dire les sociétés Mediarail et Mediagare doivent indemnisation intégrale des préjudices subis,
- condamner la société Mediarail à payer à Maître Sophie Guillouet, ès qualité de mandataire liquidateur de Monsieur Philippe Pinel, les sommes de :
* 40 000 euros de dommages intérêts, solidairement avec la société Mediagare au titre des préjudices causés par les fautes sus-évoquées, hors rupture abusive, ou, subsidiairement, sans solidarité, 120 000 euros (40 % à proportion du CA réalisé avec cette société du groupe),
- 1 275 750 euros de dommages intérêts à raison de la rupture brutale de ses relations commerciales établies avec l'entreprise intimée représentée désormais par Maître Sophie Guillouet ès qualités,
- condamner la société Mediagare à payer à Maître Sophie Guillouet, ès qualités, les sommes de :
* 40 000 euros de dommages intérêts, solidairement avec la société Mediarail au titre des préjudices causés par les fautes sus-évoquées, hors rupture abusive, ou, subsidiairement, sans solidarité, 180 000 euros (60 % à proportion du CA réalisé avec cette société du groupe),
- 919 000 euros de dommages intérêts au titre des préjudices subis à raison de la rupture brutale du marché des affichages de panneaux suspendus,
- 749 250 euros de dommages intérêts au titre des préjudices subis à raison de la rupture brutale du marché des affichages des panneaux non suspendus.
Les autres condamnations prononcées par le Tribunal de commerce de Paris à l'encontre des sociétés sociétés Mediarail et Mediagare devant être par ailleurs confirmées par la cour,
Subsidiairement : confirmer l'ensemble des dispositions du jugement entrepris rendu le 21 avril 2015 par le Tribunal de commerce de Paris,
Très subsidiairement :
Après avoir jugé sur les fautes des sociétés sociétés Mediarail et Mediagare ordonner toute expertise qu'il plaira sur l'évaluation des préjudices pour compléter l'information technique de la cour, aux frais alors avancés des sociétés sociétés Mediarail et Mediagare,
- dire que, à défaut de consignation des frais d'expertise par les sociétés Mediarail et Mediagare, Maître Sophie Guillouet, ès qualités, pourra s'y substituer dans un délai de trois mois,
Et y ajoutant, en tout état de cause : condamner solidairement les sociétés Mediarail et Mediagare à payer à Maître Sophie Guillouet, ès qualités, la somme de 20 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.
La déclaration d'appel a été signifiée à M. Pinel et Maître Marchier, administrateur au redressement judiciaire qui n'ont pas été touchés à personne et qui n'ont pas constitué avocat
Sur ce,
a) Sur la mise hors de cause de M. Pinel et Maître Marchier, ès qualités
Le redressement judiciaire de M. Pinel a été converti le 2 juin 2014 en liquidation judiciaire. Ces deux intimés doivent d'office être mis hors de cause.
b) Sur la demande tendant à écarter des pièces
Considérant que les intimées demandent à la cour d'écarter des débats les pièces adverses n° 15, 38, 39, 52, 53, 59, 60, 61-1, 61-2 et 61-3 au motif qu'elles " constituent indiscutablement des faux en écritures privées " ;
Mais considérant que les sociétés intimées ne soulèvent aucune contestation d'écritures au sens des articles 285 et suivants du Code de procédure civile et ne présentent pas de demande de vérification d'écritures ; qu'elles contestent en réalité la portée des pièces qui ne doit pas conduire à leur rejet, le juge du fond devant lors de leur examen apprécier leur valeur probante ; que le jugement déféré doit être confirmé en ce qu'il a rejeté la demande tendant à écarter des débats les 10 pièces litigieuses ;
c) Sur le fond
1°) Sur les avantages manifestement disproportionnés et sans contrepartie
Considérant que Maître Guillouet, ès qualités, ne maintient plus ses contestations relatives à l'absence de variation annuelle des prix ; que, sur le fondement de l'article L. 442-6 1° alinéa du Code de commerce, elle soutient avoir dû assumer des services " exigés sans aucune forme de contrepartie sous la menace d'une rupture du contrat " ; qu'elle relève que, à compter de septembre 2011, en l'absence de contrepartie et sous la menace d'une rupture du contrat, l'entreprise Pinel a dû assumer une charge supplémentaire de stockage du matériel et d'installation d'une benne ; qu'est également stigmatisé le fait que l'entreprise Pinel a été soumise à des règlements retardés ;
Mais considérant qu'il résulte des courriels échangés entre les parties que la décision de stocker les marchandises non plus dans les locaux loués par les appelantes rue Pleyel à Saint Denis (93) mais dans ceux occupés par l'entreprise Pinel, 17 rue Lavoisier à Ozoir la Ferrière (77) résulte d'un accord entre les parties sans preuve de l'exercice de pression ou menace qui ne sauraient se déduire de la seule absence de contrepartie au demeurant non caractérisée puisque les locaux d'Ozoir la Ferrière étaient occupés par l'entreprise Pinel et que l'opération dénoncée n'a pas entraîné de surcoût ;
Considérant que le grief relatif à l'installation d'une benne ne remplit pas plus les conditions de l'article L. 442-6 1° alinéa du Code de commerce puisque, dans un courrier électronique du 8 septembre 2008, M. Pinel lui-même sollicite le dépôt d'une benne à l'année dans son établissement d'Ozoir la Ferrière ;
Considérant enfin que les retards allégués dans le paiement des factures n'est pas prouvé au vu du tableau de règlement produit par les appelantes (pièce n° 38) et qu'aucune réclamation n'a été formulée à ce titre par M. Pinel ; que le jugement déféré doit ainsi être confirmé en ce qu'il a débouté Maître Guillouet, ès qualités, de ses demandes présentées à ce titre ;
2°) Sur la rupture brutale des relations commerciales établies
Considérant que Maître Guillouet, ès qualités, soutient que le marché existait depuis 1977 soit depuis trente-cinq ans au jour de la rupture décidée le 19 juillet 2012 avec prise d'effet au 1er août 2014 ; que, pour ce faire, elle expose que, dès l'âge de 22 ans, M. Pinel a débuté son activité portant la mise en œuvre des affichages publicitaires dans les gares Sncf avec la société Métrobus et a poursuivi avec la société SEP puis France Rail Publicité (FRP), société créée par le même groupe ; qu'elle poursuit en indiquant que la société FRP avait créé une filiale CEP avant de reprendre le marché qu'elle a finalement transmis à une autre filiale dénommée Landimat avec laquelle M. Pinel aurait travaillé ; qu'aucun contrat écrit n'a été établi entre M. Pinel et les sociétés qui se sont succédées dans la concession du marché des affichages publicitaires des gares, toutes issues du groupe Metroplus ;
Mais considérant que Maître Guillouet, ès qualités, ne prouve aucunement l'existence d'une relation commerciale établie entre les parties au sens de l'article L. 442-6 5° du Code de commerce ; que, s'il est constant que l'activité de M. Pinel dans le domaine concerné remonte effectivement à 1977 et que la société Métrobus dépend du même groupe que les sociétés appelantes, il n'est aucunement prouvé que les relations commerciales conclues entre ce dernier et les sociétés Médiagare et Mediarail à compter de 2008 se soient inscrites dans la poursuite de ces relations anciennes ; qu'il convient de dire que les relations commerciales entre les parties sont établies uniquement à compter de l'année 2008 ;
Considérant que, par courriers recommandés du 19 juillet 2012, pour mise en concurrence des prestations, la société Mediagare a informé M. Pinel de la rupture de leurs relations commerciales concernant les prestations de pose, entretien, et décapage de l'affichage publicitaire sur les supports de format 400 x 300 et 400 x 150 cm en Ile de France et les supports 306 x 223 et 400 x 300 à Paris, avec effet au 1er août 2014 ;
Considérant que le délai de préavis ainsi consenti pour une période de 24 mois est respectueux des usages et donnait à M. Pinel la possibilité de se reconvertir quand bien même il employait 25 personnes et soutient que le marché en litige représentait 80 % de son chiffre d'affaires ; que cette durée est exclusive de brutalité ;
Considérant ensuite que, par courriers du 28 novembre 2012 adressés à M. Pinel, la société Mediarail a réduit l'échéance du préavis au 30 juin 2013 en invoquant, pendant la durée du préavis, tant en région IDF que dans les gares parisiennes, les fautes suivantes :
* méconnaissance des règles de sécurité : (gare de magenta le 13 novembre 2012, gare de Javel en septembre 2012)
* mauvaise qualité de l'affichage : (inspection menée dans plusieurs gares les 9 et 10 octobre)
* absence de nettoyage au sol sous les supports et mauvaise gestion des déchets ;
Considérant que, par de justes motifs que la cour adopte, les premiers juges ont relevé que les griefs n'étaient pas caractérisés et qu'en toute hypothèse, la voie médiane consistant à réduire le préavis de 24 mois à 11 mois n'était pas fondée ; qu'en effet soit les fautes sont d'une gravité telle que le contrat ne peut pas être poursuivi, même pendant la période de préavis, soit elles sont compatibles avec la poursuite du préavis sans possibilité d'en réduire la durée ; qu'il convient donc de dire que M. Pinel a subi une rupture brutale des relations contractuelles établies par une réduction de 13 mois du préavis qui lui avait été initialement consenti ;
3°) Sur l'indemnisation
Considérant que, sur demande des appelantes, M. Vaillant a rédigé une expertise relative au préjudice subi par l'entreprise Pinel dans l'hypothèse où la rupture brutale des relations commerciales établies serait retenue ; que, si cette expertise n'est pas judiciaire, elle est néanmoins régulièrement versée aux débats, les éléments qu'elle comporte étant ainsi soumis au débat judiciaire et à la contradiction ; qu'il n'y a pas nécessité d'ordonner une expertise judiciaire ;
Considérant qu'au vu des éléments comptables qui lui ont été fournis et notamment des comptes de résultats, M. Vaillant est parvenu à dégager la marge brute d'exploitation de l'activité "affichage" au titre des contrats Mediagare et Médiarail ; que, pour les années 2011/2012 soit 12 mois, il a chiffré l'Excédent Brut d'Exploitation (EBE) à 190 762 euros soit un montant de 206 659 euros sur 13 mois ;
que le mode de calcul proposé par M. Pinel doit être rejeté puisqu'il fonde l'assiette de son préjudice sur son chiffre d'affaires et non pas sur la perte de marge brute ; que la cour retiendra l'évaluation à laquelle est parvenu M. Vaillant et chiffrera le préjudice subi par M. Pinel pour un préavis réduit de 13 mois à 206 659 euros, les appelantes devant être condamnées solidairement au paiement de cette somme ;
Considérant que la cour a rejeté le grief relatif aux avantages manifestement disproportionnés et sans contrepartie; que les demandes de dommages et intérêts présentées à ce titre doivent être rejetées.
Par ces motifs : la cour, Met hors de cause M. Pinel et Maître Marchier, administrateur au redressement judiciaire de M. Pinel ; Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions sauf celles relatives aux indemnisations allouées à M. Pinel au titre de la rupture ; Statuant de nouveau de ce chef : Condamne solidairement la société Mediagare et la société Mediarail à verser à Maître Guillouet, ès qualités de liquidateur judiciaire de l'entreprise Pinel, la somme de 206 659 euros à titre de dommages et intérêts au titre de la rupture brutale des relations commerciales établies, Rejette toutes autres demandes ; Condamne solidairement la société Mediagare et la société Mediarail aux dépens et accorde à Maître Potzien, avocat, le bénéfice des dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.