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Décisions

CA Rennes, 3e ch. com., 10 janvier 2017, n° 14-08360

RENNES

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Assurwest (SARL)

Défendeur :

3G Courtage (SARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Calloch

Conseillers :

Mmes André, Jeannesson

CA Rennes n° 14-08360

10 janvier 2017

Exposé du litige

La SARL Assurwest, exerçant l'activité principale de courtier en assurances, a été immatriculée au registre du commerce et des sociétés le 19 septembre 2002 par MM. Emmanuel G. et Franck de la G., ce dernier ayant en 2005 cédé ses parts aux enfants G.. En 2010, la société Assurwest a racheté à la société Groupe Altitude Conseils (la société GAC) une partie du portefeuille assurances de personnes constitué auprès des sociétés ASAF/AFPS, mandataire de la société AXA.

Les époux Patrick G. et Estelle R., anciens salariés de la société GAC placée en liquidation judiciaire, ont fait immatriculer le 22 mai 2012 la SARL 3G Courtage pour exercer l'activité de courtier mandataire en opérations d'assurances.

Le 15 mai 2012, la société Assurwest a confié à la société 3G Courtage un mandat portant sur la commercialisation de contrats d'assurances. Le 6 décembre 2012, Mme G. agissant pour le compte d'une SARL holding Holdfinassur a émis une lettre d'intention d'acquisition des parts sociales de la société Assurwest au prix de 125 000 euros, le cédant réglant les dettes fournisseurs, fiscales et sociales identifiées au jour de l'acte. Ce projet n'a pas eu de suite.

Le 12 juin 2013, la SARL 3G Courtage et la SARL Assurwest ont signer un accord de principe portant sur la valorisation et la cession du portefeuille de courtage au prix de 320.000 euros, sous réserve d'un accord de financement bancaire qui n'a pas été obtenu. Les relations ont été rompues au mois de septembre 2013, date à laquelle le gérant de la société Assurwest a constaté que la société 3G Courtage exerçait l'activité de courtier en assurances pour son propre compte depuis le mois de mai 2013.

Le 31 décembre 2013, les consorts G. ont cédé l'intégralité de leurs parts à la SARL FL Holding pour le prix d'un euro sur la base des comptes annuels arrêtés au 31 décembre 2012 faisant apparaître un actif net comptable de 45 076 euros pour un total de dettes de 463 929 euros.

Le 7 janvier 2014, la société 3G Courtage a fait assigner la société Assurwest devant le tribunal de commerce de Nantes aux fins d'obtenir, sur le fondement du contrat de mandat, sa condamnation au paiement de la somme de 70 342,129 euros.

Le10 juillet 2014, le tribunal de commerce de Nantes a :

- dit que la SARL 3G Courtage a agi avec déloyauté envers son co-contractant ;

- dit que le contrat signé le 15 mai 2012 a été résilié à bon droit par la SARL Assurwest ;

- débouté les consorts G. de l'ensemble de leurs demandes ;

- condamné la société 3G Courtage à régler à la société Assurwest la somme de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné la société Assurwest à payer la somme de 30.500 euros pour solde des frais de participation au développement commercial ;

- condamné la société Assurwest à régler à la société 3G Courtage la somme de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- ordonné le partage des dépens par moitié entre les deux sociétés.

Les consorts G. ont relevé appel de ce jugement, demandant à la cour de condamner la SARL 3G Courtage solidairement avec les époux G. à payer à :

Emmanuel G., la somme de 50 000 euros à titre de dommages-intérêts ;

Virginie et Lysiane G., chacune la somme de 25 000 euros à titre de dommages-intérêts chacun d'eux, la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

La société Assurwest a également formé appel du jugement rendu le 10 juillet 2014, demandant à la cour de :

1° S'agissant de la responsabilité contractuelle de la société 3 G Courtage pour la période du 15 mai 2012 au 17 mai 2013 :

Constater que la société 3G Courtage en violant manifestement les stipulations du contrat conclu le 15 mai 2012 a engagé sa responsabilité contractuelle ;

En conséquence, la condamner à payer les sommes suivantes :

40 024,36 euros au titre du remboursement des frais occasionnés par l`activité de 3G Courtage indûment mis à la charge d'Assurwest ;

54 500 euros à titre de remboursement de commissions indûment perçues par 3G Courtage en vertu du contrat de mandat du 15 mai 2012 ;

Et constater que la société 3G Courtage n'a toujours pas restitué à Assurwest les documents que cette dernière lui avait confiés dans le cadre de l'exécution du contrat de mandat du 15 mai 2012, énumérés en pièce n°33.l ;

En conséquence, condamner la société 3G Courtage à payer la somme de 42 000 euros, sauf à parfaire, au titre de l'application de l'article 5 du contrat de mandat en date du 15 mai 2012 ;

Enjoindre la société 3G Courtage à lui restituer les documents qu'elle lui avait confiés dans le cadre de l'exécution du contrat de mandat du l5 mai 2012, énumérés en pièce n°33.l immédiatement à compter du prononcé de l'arrêt, sous astreinte de 200 euros par mois de retard ;

2° S'agissant de la responsabilité délictuelle de 3G Courtage à compter du 17 mai 2013,

Constater que la société 3G Courtage a renoncé au mandat que lui avait confié la société Assurwest à compter du 17 mai 2013 ;

Constater que la société 3G Courtage a commis à compter du 17 mai 2013 des actes constitutifs de concurrence déloyale de nature à engager sa responsabilité délictuelle à l'encontre d'Assurwest ;

En conséquence, à titre principal, condamner la société 3G Courtage à payer à la Société Assurwest la somme de 119 864 euros, sauf à parfaire, à titre de dommages et intérêts pour perte de commissions ;

A titre subsidiaire, surseoir à statuer sur le montant du préjudice de la société Assurwest résultant de la perte de commissions,

Enjoindre la société 3G Courtage de communiquer à compter du prononcé de l'arrêt l'ensemble des bordereaux de commissions qui lui ont été versées par toutes compagnies d'assurances, et notamment les compagnies d'assurances SWISS LIFE, MMA et ASAP-AFPS, depuis l'obtention de ses codes courtages en mai 2013 jusqu'à la date de prononcé de l'arrêt à intervenir, et ce sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter du prononcé de l'arrêt ;

A titre infiniment subsidiaire, surseoir à statuer sur le montant du préjudice de la société Assurwest résultant de la perte de commissions,

Désigner Me Jean-Pierre L., huissier de justice, demeurant [...], ou tout autre huissier de justice qu'il plaira aux fins de procéder aux constatations nécessaires pour permettre à Assurwest d'évaluer précisément son préjudice ;

Ordonner à Assurwest de communiquer à Me L., ou à tout autre huissier de justice qui serait désigné, dans un délai de 8 jours à compter du prononcé de l`ordonnance à venir, les éléments suivants

la liste de ses clients (noms, prénoms, classés par ordre alphabétique des patronymes) ayant résilié un ou plusieurs contrats d'assurances depuis le 17 mai 2012, date à laquelle 3G Courtage a obtenu ses premiers codes courtages ;

la liste de ses clients (noms, prénoms, classés par ordre alphabétique des patronymes) ayant émis le souhait, entre le 17 mai 2012 et le 26 septembre 2013, date à laquelle 3G Courtage et les époux G. ont effectivement quitté les locaux d'Assurwest situés à Saint Père en Retz, de souscrire un nouveau contrat ou un contrat d'assurance complémentaire, sans que leurs demandes d'informations n'aient donné lieu à la souscription d'un contrat enregistré sous le code courtage d'Assurwest ;

la liste de tous prospects (noms, prénoms, classés par ordre alphabétique des patronymes) ayant émis le souhait, entre le 17 mai 2012 et le 26 septembre 2013, date à laquelle 3G Courtage et les époux G. ont effectivement quitté les locaux d'Assurwest situés à Saint Père en Retz, de souscrire un contrat d'assurance, sans que leurs demandes d'informations n'aient donné lieu à la souscription d'un contrat enregistré sous le code courtage d'Assurwest ;

Ces éléments devant être communiqués par voie électronique, sous forme d'un fichier PDF, format empêchant toute modification, et de nature à faciliter les constatations de l'huissier de Justice ;

Ordonner à 3G Courtage de communiquer à Me L., dans un délai de 8 jours à compter du prononcé de l'ordonnance à venir, l'ensemble des bordereaux de commissions qui lui ont été versées par toutes compagnies d'assurance, ainsi qu'une liste récapitulative de tous les clients figurant sur l'un de ces bordereaux (noms, prénoms, classés par ordre alphabétique des patronymes), et ce sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

Etant précisé que la liste récapitulative de tous les clients de 3G Courtage figurant sur l'un des bordereaux devra être communiquée à l'huissier de Justice par voie électronique, sous forme d'un fichier PDF, format empêchant toute modification, et ce afin de faciliter les constatations de l'huissier de justice ;

Confier mission à Me L., huissier de justice, de

Convoquer les seuls avocats des parties, ou ces derniers dûment appelés, dans un délai de 15 jours à compter de la réception des éléments devant lui être remis par les parties, à une réunion en son Etude aux fins de procéder aux constatations ci-après décrites ;

Comparer, en présence des avocats des parties, ou ces derniers dûment appelés, les noms figurant sur les documents communiqués par Assurwest et par 3G Courtage ;

Dresser, en présence des avocats des parties, ou ces derniers dûment appelés, la liste des clients figurant tant sur les bordereaux de commissions communiquées par 3G Courtage, que sur l'une des trois listes communiquées par Assurwest, en mentionnant (i) le nom et le prénom du client, (ii) le numéro de la liste Assurwest sur laquelle figurait ce client, et (iii) le montant des commissions perçues par 3G Courtage pour ce client de la part des compagnies d'assurances ;

Indiquer le nombre de clients que comporte chacune des listes produites par les parties ;

Communiquer aux parties, dans un délai de 15 jours à compter de la date des constatations réalisées en présence des avocats des parties, un procès-verbal de constat comportant en annexe la liste susvisée des personnes figurant tant sur les bordereaux de commissions communiqués par 3G Courtage, que sur l'une des trois listes communiquées par 3G Courtage ;

Statuer ce que de droit, sur les frais des opérations de constat et l'éventuelle consignation à effectuer.

Et en tout état de cause, condamner la Société 3G Courtage à lui payer la somme de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice d'image ;

3° S'agissant de la responsabilité délictuelle de Mme R.-G.,

Constater qu'elle a commis d'importantes fautes de gestion de nature à engager sa responsabilité délictuelle personnelle à l'égard d'Assurwest ;

En conséquence, la condamner solidairement au paiement de toutes sommes que la société 3G Courtage sera condamnée à verser à la société Assurwest ;

4° S'agissant de la responsabilité délictuelle de M. G.,

Constater qu'il a engagé sa responsabilité délictuelle personnelle par la participation intentionnelle et active aux agissements frauduleux réalisés au préjudice d'Assurwest ;

En conséquence, condamner solidairement M. G. au paiement de toutes sommes que la société 3G Courtage sera condamnée à verser à la société Assurwest ;

5° Sur les demandes formulées par 3G Courtage et les époux G.,

Dire irrecevables et mal fondées les demandes formulées par la Société 3G Courtage et les époux G. à l'encontre de la Société Assurwest ;

Les débouter de l'ensemble de leurs demandes ;

En tout état de cause enjoindre la société 3G Courtage d'informer les compagnies d'assurances du fait que les contrats listés en pièce n°33.2 d'Assurwest doivent être enregistrés sous le code courtage d'Assurwest, et ce dans un délai d'un mois à compter du prononcé de la décision à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

Ordonner la publication de l'arrêt dans trois titres de presse d'information générale et spécialisée au choix de la société Assurwest et aux frais de la société 3G Courtage ;

Condamner Mme R.-G., M. G. et la société 3G Courtage à payer la somme de 15.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens y compris le coût du constat d'huissier réalisé en vertu de l'ordonnance du 28 octobre 2013.

En réponse, la société 3G Courtage forme les demandes suivantes :

1) S'agissant de sa responsabilité contractuelle au titre de l'exécution du contrat de mandat conclu avec la société Assurwest,

In limine litis, constater le caractère irrecevable des demandes nouvelles formées par la société Assurwest au titre de la responsabilité contractuelle qu'elle aurait engagé ;

A titre simplement subsidiaire, constater l'absence de clause de non-concurrence et/ou d'exclusivité stipulée au sein du contrat de mandat la contraignant à n'exercer aucune activité d'assurance pour son compte ;

Constater que la société Assurwest était informée et avait encouragé l'activité d'intermédiaire en assurance exercée par elle à compter du 17 mai 2013 ;

Constater que la société Assurwest ne rapporte aucunement la preuve de documents lui appartenant qui seraient restés en sa possession ;

Débouter la société Assurwest de l'ensemble des demandes formées à son encontre au titre de sa responsabilité contractuelle ;

2) S'agissant de la responsabilité délictuelle de la société 3 G COURTAGE, de Mme G. et de M. G. au titre de prétendus faits de détournement de clientèle :

Constater que la société Assurwest n'établit aucunement la propriété de tout ou partie de la clientèle qu'elle invoque ;

Constater que la société Assurwest ne rapporte aucunement l'existence des faits de concurrence déloyale et de détournement de clientèle qu'elle invoque à leur encontre ;

Constater la mise en avant spontanée et volontaire de la société 3 G Courtage par la société Assurwest auprès de ses clients et prospects dans un contexte de cession future de son portefeuille de clientèle ;

Constater que la société Assurwest ne rapporte aucunement l'existence des fautes personnelles commises par Mme G. ou par M. G. ;

Réformer en conséquence le jugement rendu par le tribunal de commerce de Nantes en ce qu'il a constaté le principe de faits de détournement de clientèle commis par la société 3 G Courtage ;

Constater les prétendus préjudices invoqués par la société Assurwest non fondés dans leur principe et dans leur montant ;

Débouter la société Assurwest de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

3) S'agissant de la responsabilité contractuelle de la société Assurwest au titre de l'exécution du contrat de mandat :

Constater le non-paiement par la société Assurwest de commissions dues à la société 3 G COURTAGE depuis le mois de mai 2012 pour un montant, sauf à parfaire, de 39.842,29 euros ;

Constater le non-paiement, par la société Assurwest d'aides au développement dues à la société 3 G Courtage depuis le mois de mars 2013 pour un montant total de 30.500 euros ;

Confirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Nantes en ce qu'il a condamné la société Assurwest au paiement de la somme de 30.500 euro au titre des aides au développement ;

Réformer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Nantes en ce qu'il a débouté la société 3 G Courtage pour le surplus de ses demandes tendant au paiement des commissions et constater qu'elle est créancière d'une somme de 39.842,29 euros à l'encontre de la société Assurwest au titre des dites commissions ;

Condamner la société Assurwest au paiement d'une somme de 39.842,29 euro (à parfaire) ;

Condamner la société Assurwest à communiquer à la société 3 G Courtage l'ensemble des relevés de commissions dues en application du contrat de mandat susvisé, sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter de la signification de la décision à intervenir.

4) S'agissant de la demande de communication de pièces et de désignation d'un huissier :

Constater que la société Assurwest ne rapporte aucunement l'existence des fautes contractuelles qu'elle invoque à l'encontre de la société 3 G Courtage ;

Constater que la société Assurwest ne rapporte aucunement l'existence des faits de concurrence déloyale et de détournement de clientèle qu'elle invoque à l'encontre de la société 3 G Courtage ;

Constater le chiffrage, par la société Assurwest dans ses écritures d'appel, du préjudice qu'elle prétend avoir subi ;

Constater que la demande de communication formée par la société Assurwest porte atteinte au secret des affaires et vise en réalité à prendre connaissance de la totalité de la clientèle détenue par la société 3 G Courtage ;

Constater les fautes commises par la société Assurwest dans le cadre de l'exécution du contrat de mandat conclu le 15 mai 2012 et l'absence de communication des bordereaux de commissions qu'elle devait remettre mensuellement à la société 3 G Courtage ;

Constater que la proposition de commission d'un huissier formée à titre subsidiaire par la société Assurwest porte atteinte au secret des affaires et vise en réalité à prendre connaissance de la totalité de la clientèle détenue par la société 3 G Courtage ;

Débouter en conséquence la société Assurwest de sa demande de communication de pièces sous astreinte et de commission d'un huissier ;

En tout état de cause, condamner la société Assurwest au paiement, au profit de la société 3 G COURTAGE, d'une somme de 15.000 euros au titre des frais irrépétibles (article 700 du Code de Procédure Civile), outre les entiers dépens.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure ainsi que des prétentions et moyens des parties, la Cour se réfère aux énonciations de la décision attaquée ainsi qu'aux dernières conclusions déposées pour les consorts G. le 22 janvier 2015, pour la SARL Assurwest le 17 octobre 2016 et pour les intimés le 28 octobre 2016.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Sur la demande des consorts G.

A titre préalable, il sera relevé que les intimés ne reprennent pas dans le dispositif de leurs écritures, seul saisissant la Cour, leur moyen tiré de l'irrecevabilité de la demande formée à titre personnel par les consorts G..

Le 31 décembre 2013, les consorts G. ont cédé l'intégralité de leurs parts à la SARL FL Holding pour le prix d'un euro sur la base des comptes annuels arrêtés au 31 décembre 2012 faisant apparaître un actif net comptable de 45 076 euros pour un total de dettes de 463 929 euros.

Il s'en déduit, d'une part, que la transaction a été effectuée en considération de la situation comptable antérieure aux actes de concurrence déloyale reprochés aux époux G. et à la société 3G Courtage et qu'elle n'a donc pas été affectée par ces actes.

Il s'en infère, d'autre part, que si la cession du portefeuille avait été réalisée au profit de la société 3 G Courtage au prix convenu le 12 juin 2013 de 320 000 euros, les associés n'auraient pu obtenir, après le règlement des dettes sociales, un boni de liquidation puisque ce prix n'aurait pas permis le règlement intégral du passif.

Dès lors les consorts G. ne justifient pas avoir subi un préjudice personnel justifiant les dommages-intérêts réclamés de sorte que le jugement critiqué sera confirmé de ce chef.

Sur la recevabilité des demandes de la société Assurwest

La société 3G Courtage soutient que les demandes formées par la société Assurwest sur le fondement de la responsabilité contractuelle seraient irrecevables comme nouvelles.

Mais aux termes de l'article 565 du code de procédure civile, les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge même si leur fondement juridique est différent.

Or devant les premiers juges, la société Assurwest sollicitait déjà la condamnation de la société 3 G Courtage au paiement de diverses sommes à titre de comptabilité mandat et de reprise de commission, sommes qui entraient dans le cadre de l'indemnisation de l'exécution présentée comme défectueuse du mandat.

De surcroît, la procédure a été initiée par la société 3G Courtage sur le fondement du mandat litigieux. Or en application de l'article 567 du code de procédure civile, les demandes reconventionnelles sont recevables en appel dès lors qu'elles sont rattachées à la demande initiale par un lien suffisant, ce qui est le cas en l'espèce puisqu'elles sont fondées sur les conditions d'exécution du contrat invoqué comme fondement de la demande principale.

La fin de non-recevoir soulevée sera en conséquence rejetée.

Sur la demande de restitution de pièces sous astreinte et de condamnation à indemnité conventionnelle pour défaut de restitution

Il incombe à celui qui réclame l'exécution d'une obligation ou l'indemnisation des conséquences de sa violation de démontrer son existence et son étendue.

En l'occurrence, la société Assurwest se borne à produire une unique pièce sommaire qu'elle s'est constituée à elle-même à une date non précisée, pièce qui n'a pas été contresignée par son cocontractant. Ce document intitulé " Liste provisoire des documents remis à 3G Courtage par Assurwest dans le cadre du contrat de mandat conclu le 15 mai 2012 " contient l'énumération suivante :

Tous dossiers mis à la disposition de 3G Courtage par Assurwest dans le cadre de contrat de mandat en date du 15 mai 2012 ;

Tous documents commerciaux mis à la disposition de 3G Courtage par Assurwest dans le cadre de contrat de mandat en date du 15 mai 2012 ;

Tous fichiers clients mis à la disposition de 3G Courtage par Assurwest dans le cadre de contrat de mandat en date du 15 mai 2012.

Cette pièce établie unilatéralement est beaucoup trop vague et générale pour démontrer la remise, à charge de restitution, au mandataire de documents déterminés et identifiables. Elle ne peut en aucun cas fonder une condamnation à restitution, a fortiori sous astreinte, dès lors que le contenu d'une telle injonction serait indéterminable et que son exécution serait dès lors impossible à contrôler.

Au demeurant, le contrat litigieux indiquait seulement que le mandant pourrait être amené à confier au mandataire des matériels divers, fichiers, tarifs, dépliants... en dépôt ou pour en faire un usage déterminé, ceci n'étant qu'une simple éventualité dont la réalisation n'est pas établie.

Il appartenait au mandant de réaliser un inventaire précis, détaillé et contradictoire des pièces qu'il confiait à son mandataire à charge de restitution à l'issue du contrat. Faute de s'être ménagée une telle preuve, la société Assurwest ne justifie ni de la remise, ni a fortiori de l'appropriation par la société 3G Courtage de documents et fichiers qui n'auraient été laissés à sa disposition qu'à charge de restitution, étant fait remarquer que le mandataire exerçait son activité dans les locaux du mandant où les documents en cause auraient donc dû se trouver et que rien n'établit que la société 3G Courtage les ait emportés lorsqu'elle a quitté les lieux le 26 septembre 2013 sous le contrôle de son cocontractant.

La demande de paiement d'une indemnité en application de l'article 5 du contrat de mandat et la demande de restitution de pièces seront en conséquence rejetées.

Sur la demande de remboursement des frais exposés et des commissions versées par la société Assurwest entre le 15 mai 2012 et le 17 mai 2013

Avant le mois de mai 2013, rien ne démontre que le mandat n'ait pas été exécuté conformément aux prévisions de la société Assurwest qui a volontairement mis à la disposition de son mandataire, sans contrepartie, des moyens matériels non prévus au contrat. Elle demande pourtant le paiement d'une somme de 40 024,36 euros correspondant au remboursement des frais générés par son établissement secondaire de Saint Père en Retz, composés essentiellement des frais de téléphone, de courrier, d'entretien du matériel informatique, d'achat d'un portable ainsi que le remboursement des salaires versés à Mme G.. Mais la société Assurwest a volontairement, en connaissance de cause, payé ces factures adressées directement à son établissement principal à Nantes, lesquelles correspondaient à des contrats qu'elle avait conclus. Elle n'est donc pas fondée à en demander le remboursement à son mandataire qui n'avait contracté aucune obligation de ce chef.

La société Assurwest sollicite également le remboursement de la somme de 54 500 euros correspondant aux prestations versées à la société 3G Courtage en exécution du contrat de mandat du 15 mai 2012. Mais ces prestations étaient dues par elle au moins jusqu'au mois de mai 2013, le contrat ayant été correctement exécuté jusqu'à cette date. Cette demande ne peut dès lors qu'être également rejetée.

Sur les demandes formées par la société 3 G Courtage sur le fondement du contrat de mandat

La société 3G Courtage reconnaît avoir conclu et exécuté des conventions de partenariat avec les sociétés d'assurance et exercé une activité concurrente de celle de la société Assurwest à compter du 17 mai 2013. Elle a ainsi perçu directement des commissions des sociétés d'assurance à compter du mois de juin 2013 (pièce 36-1, 36-2, 36-3, 36-4...).

Elle prétend que faute par le mandant d'avoir stipulé à son profit une clause d'exclusivité et de non-concurrence, rien ne l'empêchait d'exercer à titre personnel l'activité qui lui était confiée à titre de mandataire sans pour autant renoncer au bénéfice de son mandat. Elle conteste à cet égard la qualification de contrat d'agent commercial donnée au contrat du 15 mai 2012, prétendant avoir eu le droit d'exercer pour son propre compte l'activité de courtier en assurance.

Elle se prévaut à ce titre de son inscription au registre des intermédiaires en assurance. Mais ce moyen est inopérant, l'activité pour laquelle l'immatriculation était obtenue pouvant être exercée soit pour son propre compte, soit en qualité de mandataire d'un tiers. En l'occurrence, l'extrait K bis de la société 3G Courtage précisait qu'elle exerçait l'activité de courtier mandataire en opération d'assurances.

Surtout le contrat conclu le 15 mars 2012 stipulait en son article 10, intitulé 'Loi applicable', qu'il était consenti sous l'application des dispositions du décret du 23 décembre 1958 modifié par le décret du 22 août 1968 et le décret du 10 juin 1992 et également consenti sous l'application de la loi du 25 juin 1991. Il s'en déduit qu'il était régi par le Décret n°58-1345 du 23 décembre 1958 relatif aux agents commerciaux, modifié par le décret n°68-765 du 22 août 1968 et le Décret n°92-506 du 10 juin 1992, ainsi que par la loi n° 91-593 du 25 juin 1991 relative aux rapports entre les agents commerciaux et leurs mandants codifiée par l'Ordonnance n° 2000-912 du 18 septembre 2000 sous les articles L.134-1 et suivants et R.134-1 et suivants du code de commerce. Les dispositions du contrat étaient d'ailleurs en tous points conformes à cette réglementation, y compris en ses dispositions d'ordre public.

Le contrat litigieux s'analyse dès lors en un contrat d'agent commercial régi notamment par l'article L. 134-3 et L. 134-4 du Code de commerce. En conséquence, même en l'absence de clause de non-concurrence, l'obligation de loyauté pesant sur la société 3G Courtage lui interdisait d'exercer, pour son propre compte, une activité de courtier en assurance directement concurrente de celle de son mandant, cette activité étant au demeurant incompatible avec l'exécution du mandat, ce qui explique qu'à compter du mois de mai 2013 la production de la société 3 G Courtage au profit du mandant a été, selon ses propres documents récapitulatifs, quasi inexistante.

C'est à tort que la société 3G Courtage soutient que la société Assurwest a donné, par son contreseing de la lettre du 19 avril 2013, son accord de principe à l'exercice par elle d'une activité de courtage en assurance pour son propre compte. En effet, la démarche effectuée auprès des compagnies d'assurance aux fins de lui faire attribuer des codes de courtage était expressément présentée comme constituant un acte préparatoire à la cession du portefeuille d'assurance qu'elle était destinée à faciliter en évitant toute solution de continuité. En revanche, tant que cette cession n'était pas intervenue et qu'il n'était pas mis fin au mandat, l'attribution des codes de courtage n'autorisait pas le mandataire à exercer à titre personnel l'activité objet du mandat.

Ainsi en s'arrogeant le droit d'exercer à titre personnel à compter du mois de mai 2013, date de son affiliation par les compagnies d'assurance AFPS, Swisslife et MMA, l'activité même faisant l'objet du mandat, la société 3G Courtage a cessé d'exécuter les obligations qu'elle avait souscrites. Elle ne pouvait dès lors plus en exiger la contrepartie, la société Assurwest lui opposant à juste titre l'exception d'inexécution.

Une somme de 54 500 euro ayant été versée par la société Assurwest pour la période comprise entre le 15 mai 2012, début du mandat, et le 17 mai 2013, date à laquelle le mandataire a cessé d'exécuter le mandat, sur un total exigible pendant cette période de 60 000 euro, la somme restant due à ce titre s'élève à 5 500 euros. Le jugement sera en conséquence réformé de ce chef.

Le contrat de mandat, qui entrait en vigueur dès sa signature le 15 mai 2012, prévoyait en son article 6 que le mandataire percevait une commission sur les affaires réalisées personnellement dans les conditions définies en annexe 1, soit 100 % de la commission de première année sur les affaires menées à bonne fin, la société Assurwest conservant les commissions récurrentes. Cet article stipulait que le contrat avait également pour but de maintenir et développer la clientèle existante du mandant, moyennant une aide au développement mensuelle. De cette clause et de l'article 2 précisant que le mandataire avait parallèlement pour mission d'assurer le suivi des dossiers auprès de la clientèle actuelle du mandant et de lui proposer des produits complémentaires, il s'infère que la commission n'était due que sur les contrats conclus avec des personnes ne faisant pas déjà parties de la clientèle de la société Assurwest.

La société 3G Courtage réclame le paiement de commissions versées par les sociétés d'assurance pour les nouveaux contrats dont elle aurait obtenu la souscription par l'intermédiaire de la société Assurwest à concurrence de la somme de 39.842,29 euros selon un relevé produit en pièce 39, étant fait remarquer que ce montant n'est pas cohérent avec celui avancé par M. G. dans son courriel du 25 avril 2013 évaluant les commissions dues à cette date - qui correspond quasiment à la fin de l'exécution du mandat - a seulement 'plus de 25 000 euros'.

C'est à tort que la société 3 G Courtage soutient que dans ses conclusions de première instance, la société Assurwest aurait reconnu le bien-fondé de sa réclamation pour la somme de 28 166,17 euros, celle-ci s'affirmant au contraire créancière d'une somme de 26 333,83 euros, sans admettre le bien-fondé des commissions réclamées.

A défaut de stipulation contraire, les commissions ne sont pas dues pour les contrats conclus avant l'entrée en vigueur du mandat (mois de mars et avril 2012) ni à compter du mois de juin 2013, période pendant laquelle la société 3G Courtage exerçait son activité pour son propre compte et non pour le compte de son mandant, de sorte que l'exception d'inexécution lui est opposée à juste titre.

Par ailleurs, seuls les contrats conclus personnellement par la société 3 G Courtage lui ouvraient droit à commission, ce qui n'est pas le cas des contrats négociés, fût-ce partiellement par CPB (Christine B. P.) salariée de la société Assurwest, le dénommé Luigi W. (LW) ou Lysiane G.. Enfin, les mêmes noms de clients apparaissant sur le relevé à des dates différentes (Bonfils en juin 2012 puis en juillet 2013, Argouach en février 2013 puis en juin 2013, Gicquel en janvier puis en février 2013, etc...), le droit à commission n'est pas démontré pour les opérations autres que la première les concernant.

En revanche, la société Assurwest à qui il appartenait de vérifier le relevé qui lui était opposé, ne conteste pas être toujours titulaire des contrats recensés en pièce 39 et ne remet en cause ni le fait qu'il s'agissait (sous la réserve sus-émise) de nouveaux clients, ni le montant de la commission qu'elle devait rétrocéder à son agent commercial en exécution du mandat. Elle se borne en effet à invoquer l'exception d'inexécution sans donner aucun élément de nature à démontrer qu'avant le 17 mai 2013, la société 3 G Courtage n'aurait pas correctement exécuté ses obligations, étant fait remarquer que les nouveaux assurés recensés en pièce 39 ne font pas partie de ceux qu'elle présente comme ayant été détournés par la suite.

La demande de la société 3 G Courtage sera donc admise, après déduction effectuée conformément aux observations ci-dessus, pour un montant de 23 915,97 euros.

La société 3 G Courtage demande la condamnation de la société Assurwest à lui communiquer l'ensemble des relevés de commissions dues en application du contrat de mandat susvisé, sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter de la signification de la décision à intervenir. Mais cette demande n'est pas fondée, la société 3 G Courtage n'ayant droit qu'à la commission initiale sur les nouveaux contrats qu'elle a conclus au profit de la société Assurwest, contrats dont elle connaît parfaitement l'existence et qu'elle a d'ailleurs récapitulé en pièce 39.

Sur l'existence d'actes de concurrence déloyale

La société Assurwest a établi par les pièces versées aux débats que 45 de ses clients, dont elle communique la liste, ont été détournés par la société 3 G Courtage alors que celle-ci occupait toujours ses locaux qu'elle n'a quitté que le 26 septembre 2013 ou dans un temps voisin de ce départ (pièce 33-2). La société 3 G Courtage ne conteste pas le fait que les clients ainsi recensés font désormais partie de sa clientèle. Néanmoins, elle conteste ce détournement en faisant valoir, d'une part, qu'elle avait le droit d'exercer l'activité en son nom propre, moyen auquel il a déjà été répondu, et, d'autre part, que certains de ces clients auraient été contactés par Mme Carole P. avec laquelle elle avait conclu un contrat de prestations de services le 10 janvier 2013. Mais, elle n'avait souscrit ce contrat qu'en vue de la bonne exécution de son mandat de sorte que l'argument est inopérant.

Il a été établi, par le constat d'huissier, que de nombreux contrats ont été conclus sous son numéro de code courtage grâce aux moyens matériels et humains mis à sa disposition par la société Assurwest dans le but de développer sa propre clientèle.

Ainsi le constat d'huissier réalisé le 25 septembre 2013 démontre que la société 3 G Courtage avait détourné les moyens de production, et notamment le travail des deux salariés de la société Assurwest, à son profit. Par exemple sur sept affaires présentées comme réalisées par Mme B. P. au mois de juin 2013, une seule apparaissait encore au mois de septembre suivant, les sondages réalisés sous le contrôle de l'huissier révélant que les autres contrats avaient été enregistrés sous le code de courtier de la société 3G Courtage. A ce sujet, Mme G., salariée d'Assurwest, a reconnu, devant l'huissier, avoir fait souscrire les contrats par l'intermédiaire du code courtage 3 G Courtage alors qu'il s'agissait de clients ou de prospects d'Assurwest dont le contrat avait été négocié par une salariée de cette société.

Ainsi encore les contrats conclus avec les consorts P. ont été négociés avec l'aide de Mme G., salariée de Assurwest, à partir des locaux de cette société au mois d'août 2013 (pièce 15 document 27).

De même, le 26 juillet 2013, M. G. donnait pour instruction à Mme G., qu'il présentait indûment comme 'son assistante', d'enregistrer les contrats complémentaires santés qu'elle pourrait recevoir d'un tiers sous le code 3 G. Ce tiers la remerciait le 9 septembre de la perception d'une commission. Il en ressort que non seulement, la société 3 G Courtage n'exécutait plus le mandat mais qu'elle détournait les moyens matériels et humains mis à sa disposition par son mandant pour exercer la même activité à titre personnel.

Les pièces produites démontrent encore que la société 3 G Courtage a entrepris d'obtenir, toujours avec l'aide de Mme G., la résiliation par les clients de la société Assurwest des contrats d'assurance en cours pour souscrire de nouveaux contrats par son intermédiaire. C'est ainsi que Mme G. transmettait le 17 septembre 2013 à Mme G. trois modèles de lettre de résiliation avec le commentaire suivant : " Comme convenu, quelques modèles à imprimer et à utiliser pour les contrats SWISS. NE PLUS ECRIRE A LA MAIN j'en ai déjà assez. N'attirons pas l'attention. "

Ceci est notamment confirmé par la pièce 26 constituée par un courrier de résiliation établi au nom de Mme C. Isabelle à l'attention de l'AFPS alors que cette cliente avait, selon le courriel joint, sollicité de son courtier Assurwest une modification de son contrat.

Ceci est encore démontré par le fait que M. P. a signé un contrat par l'intermédiaire de la société Assurwest au mois d'avril 2013 mais a ensuite été détourné par la société 3G Courtage au mois de septembre suivant, cette société ayant reçu des commissions directement de ASAF-AFPS.

Au demeurant, les attestations mêmes produites par la société 3 G Courtage en pièce 32 révèlent que les clients de la société Assurwest s'adressaient spontanément aux représentants de la société 3 G Courtage, en leur qualité de conseiller de leur courtier Assurwest, pour revoir ou compléter leurs contrats d'assurance et qu'à cette occasion ils étaient détournés vers la société 3 G Courtage. Il importe peu que ces clients aient été ou non conscients du changement de courtier qui leur était ainsi imposé et l'aient accepté dès lors que cette manœuvre était opérée de manière déloyale en abusant des moyens mis à la disposition du mandataire pour la seule exécution du contrat d'agent commercial.

L'existence d'actes de concurrence déloyale pour la période comprise entre le 17 mai 2013 et la date de résiliation du mandat le 26 septembre 2013 est dès lors établie. En revanche, pour la période postérieure, faute de clause de non-concurrence, la société 3G Courtage avait la liberté d'exercer l'activité pour son propre compte, sauf à ne pas détourner les clients pour lesquels elle avait finalisé une opération d'assurance par l'intermédiaire de la société Assurwest et obtenu le droit à ce titre à la commission initiale en laissant en contrepartie les commissions récurrentes au mandant.

La société Assurwest avait la possibilité d'établir, sans recourir à des investigations dans la comptabilité de son adversaire, la liste des clients perdus par elle et des contrats résiliés entre le 17 mai 2013 et le mois d'octobre suivant et de justifier de la perte de son chiffre d'affaires de l'exercice 2013 par rapport à celui de l'année antérieure.

Faute de l'avoir fait, il sera retenu que son préjudice réside dans la perte d'une part de ces 45 clients outre un nombre équivalent de prospects qui s'étant adressés à elle avaient toute chance d'intégrer sa clientèle en l'absence des manœuvres frauduleuses dénoncées. Au regard de l'évaluation non sérieusement discutée de ce préjudice calculé sur une assiette correspondant à une perte de contrats représentant environ le double de celle démontrée, la cour dispose des éléments d'appréciation suffisants pour fixer l'indemnité réparant exactement et totalement son préjudice à la somme de 60 000 euros sans que des mesures d'investigations complémentaires ne soient nécessaires.

Il n'y a pas lieu en revanche d'ordonner le transfert des contrats en cause, ce qui supposerait d'ailleurs l'accord des clients, puisque l'indemnisation du préjudice subi du fait de la perte des commissions initiales et récurrentes est comprise dans la somme allouée.

De même, la publication de la décision n'est pas utile à la réparation du préjudice, s'agissant de faits anciens et limités dans le temps.

Sur la demande d'indemnisation d'un préjudice d'image

La société Assurwest demande la condamnation de la société 3G Courtage à lui payer la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice d'image. Mais d'un commun accord entre les sociétés concernées, la collaboration entre elles s'est manifestée par une association de leurs signes distinctifs sur les documents commerciaux de la société Assurwest de sorte que celle-ci ne peut se prévaloir d'aucun préjudice indemnisable de ce chef.

Sur la demande de condamnation personnelle des époux G.

Il est reproché à Mme G. d'avoir :

- utilisé alternativement de deux adresses électroniques, créant volontairement une confusion entre 3G Courtage et Assurwest à l'égard du client et/ou des compagnies d'assurances ;

- d'avoir entretenu la croyance des dirigeants de la société Assurwest quant à l'acquisition du portefeuille d'assurance sans rechercher activement des financements à cet effet ;

- d'avoir participé aux manœuvres frauduleuses tendant à détourner la clientèle d'Assurwest.

Il est reproché à M. G. de s'être présenté comme directeur commercial de la société Assurwest, d'avoir utilisé une carte de visite comportant le logo des deux sociétés, d'avoir présenté Mme G. comme sa collaboratrice, de s'être prévalu d'une promesse d'embauche signé par cette dernière, d'avoir lui aussi entretenu la croyance des dirigeants de la société Assurwest quant à l'acquisition du portefeuille d'assurance sans rechercher activement des financements à cet effet et plus généralement d'avoir participé aux manœuvres frauduleuses tendant à détourner la clientèle d'Assurwest.

Mais l'association des signes distinctifs des deux sociétés avait été effectuée avec l'accord de la société Assurwest qui ne pouvait ignorer le risque de confusion qu'elle générait. En outre, cette société a fait preuve d'imprudence en tenant pour acquis le fait que la société 3 G Courtage obtiendrait le financement bancaire nécessaire à l'opération de cession du portefeuille d'assurances alors que les époux G. ne disposaient d'aucun apport personnel de sorte que le refus des banques était prévisible ainsi que l'avait pressenti le nouveau gérant de la société. Aucune manœuvre n'est en tout cas démontrée de ce chef.

Par ailleurs les actes de concurrence déloyale réalisés au nom et au profit de la société 3 G Courtage, y compris l'utilisation de deux adresses électroniques, ne constituaient pas des actes étrangers aux fonctions de gérant ou de salarié de la société 3 G Courtage engageant la responsabilité personnelle des époux G.. La demande de condamnation personnelle des époux G. sera en conséquence rejetée.

Sur les frais irrépétibles et les dépens

Les consorts G. qui succombent conserveront la charge de leurs frais et dépens.

La société 3 G Courtage a pris l'initiative de la procédure alors qu'elle ne pouvait ignorer que sa dette était bien plus importante que la créance dont elle se prévalait, générant ainsi un contentieux lourd qui aurait pu être évité. Elle supportera dès lors le surplus des dépens et les frais exposés par la société Assurwest conformément au dispositif de la présente décision.

PAR CES MOTIFS, LA COUR : Confirme le jugement rendu par le Tribunal de commerce de Nantes le 10 juillet 2014 en ce qu'il a : - dit que la société 3 G Courtage avait agi avec déloyauté envers son cocontractant ; - dit que le contrat de mandat signé en mai 2012 avait été résilié à bon droit par la société Assurwest ; - débouté les consorts G. de leurs demandes ; Le réformant pour le surplus et statuant à nouveau, Condamne la société Assurwest à payer à la société 3 G Courtage : la somme de 5 500 euros au titre du reliquat de l'aide au développement exigible ; la somme de 23 915,97 euros à titre de commissions ; Condamne la société 3 G Courtage à payer à la société Assurwest la somme de 60 000 euros en réparation du préjudice découlant des actes de concurrence déloyale ; Condamne la société 3 G Courtage à payer à la société Assurwest la somme de 10 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ; Ordonne la compensation à due concurrence entre ces créances réciproques ; Rejette toute autre demande plus ample ou contraire ; Dit que les consorts G. conserveront la charge de leurs frais et dépens ; Condamne la société 3 G Courtage à supporter le surplus des dépens qui comprendront les frais de constat d'huissier réalisé par Me B. en vertu de l'ordonnance prononcée le 28 octobre 2013 par le président du Tribunal de commerce de Nantes et dit qu'ils seront recouvrés conformément à l'article 699 du Code de procédure civile.