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Décisions

CA Pau, 2e ch. sect. 1, 10 janvier 2017, n° 15-02771

PAU

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Siemens Lease Services (SAS)

Défendeur :

Sylene (SA), ASP France (SARL) , AM Trust (SARL) , ASP 64 (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Morillon

Conseillers :

Mmes Diximier, Janson

T. com. Bayonne, du 17 novembre 2014

17 novembre 2014

Faits et procédure

Vu l'appel formé par la SAS Siemens Lease Services du jugement prononcé le 17 novembre 2014 par le Tribunal de commerce de Bayonne,

Vu la signification de la déclaration d'appel, des conclusions et de l'assignation par acte d'huissier du 30 mars 2015 délivrée à la requête de la SAS Siemens Lease Services à Maître Jean Pierre A. et Maître G., agissant respectivement es qualités de mandataire ad hoc et es qualités de mandataire liquidateur de la SA ASP 64,

Vu l'assignation en intervention forcée délivrée le 27 juillet 2015 à la requête de la SAS Siemens Lease Services à la société ASP France,

Vu les dernières conclusions de la SAS Siemens Lease Services en date du 12 octobre 2015,

Vu les dernières conclusions de la SA Sylene en date du 30 avril 2015,

Vu les dernières conclusions de la société ASP France en date du 26 août 2015,

Vu les dernières conclusions de la SARL AM Trust en date du 26 octobre 2015,

Vu l'ordonnance de clôture du 6 juillet 2016 et la fixation de l'affaire à l'audience du 17 octobre 2016,

Le 18 janvier 2011, la SA société Sylene, spécialisée en ingénierie électrique et automatique industrielle a souscrit auprès de la société ASP 64 un contrat d'abonnement de sauvegarde externalisée comprenant une sauvegarde allant jusqu'à 180 Giga octets, quarante antivirus, quarante antispams et un pare - feu, moyennant les sommes de 2 500 euro HT pour le forfait d'installation et de 538,20 euro TTC mensuels pour la location.

Dans le même temps, un contrat de location financière a été souscrit avec la société

BNP Paribas Lease Group pour une durée de 39 mois (3 ans et 1 trimestre), à raison de 13 loyers trimestriels de 1 350 euro HT, le dernier intervenant le ler avril 2014.

Le 28 septembre 2012, la société Sylene a signé un second contrat avec la société ASP 64 portant sur une extension, moyennant le paiement de trimestrialités d'un montant de 538,20 euro chacune.

Le même jour, un second contrat de location financière a été souscrit avec la société

Siemens Lease Services.

Par acte d'huissier en date des 29 juillet et 1er août 2013, la société Sylene a fait assigner la société Siemens et la société ASP 64 devant le Tribunal de commerce de Bayonne afin de voir à titre principal prononcer la nullité du contrat de location financière conclu avec la société Siemens Lease Services le 28 septembre 2012, sur le fondement du dol et, subsidiairement, sur celui de l'erreur sur la substance.

Le 9 septembre 2013, la société ASP 64 a été placée en liquidation judiciaire et Maître G. a été désigné comme liquidateur.

Par jugement du 4 novembre 2013, la société AM Trust a été désignée comme cessionnaire total de la société ASP 64.

Par acte d'huissier en date des 24 et 27 janvier 2014, Maître G. es qualités de mandataire liquidateur et la société AM Trust ont été appelés dans l'instance en nullité de contrat pour vice de consentement engagée le 1er août 2013.

Le 3 mars 2014, les deux instances ont été jointes.

Par jugement en date du 17 novembre 2014, le tribunal de commerce de Bayonne a :

vu l'article 1116 du Code Civil, reçu les parties en leurs demandes, fins et conclusions, dit et jugé que la société ASP 64 a eu un comportement dolosif pour obtenir le consentement de la société Sylene pour signer les contrats de location n° 06230 et 5154 et le contrat de financement afférent, dit et jugé que les contrats de location n° 06230 et 5154 conclus entre les sociétés Sylene et ASP 64 sont nuls, dit et jugé que le contrat de financement conclu avec la société Siemens Lease Services, est nul, condamné la société Sylene à restituer à la société Siemens Lease Services le système de sauvegarde, sous astreinte de 100 euro par jour de retard à compter d'un mois après la signification du jugement à intervenir, débouté la société Siemens Lease Services de ses demandes d'indemnités de jouissance, de résiliation, de préjudice et de majoration contractuelle, condamné la société Siemens Lease Services à rembourser à la société Sylene la somme de 14.211,86 euro TTC, fixé la créance de la société Siemens Lease Services à l'égard de la société ASP 64 à la somme de 22.652,62 euro HT, débouté la société Siemens Lease Services de sa demande dirigée à l'encontre de la société AM Trust, fixé la créance de la société Sylene auprès de Maitre G. es qualité liquidateur judiciaire de la société ASP 64 à 2.000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, condamné la société Siemens Lease Services à payer à la société Sylene la somme de 3.000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, ordonné l'exécution provisoire du présent jugement nonobstant appel et sans caution, rejeté comme inutiles et non fondées toutes autres demandes, fins et conclusions contraires des parties, condamné la société ASP64 aux entiers dépens, dont les frais de greffe.

Par déclaration en date du 8 décembre 2014, la société Siemens Lease Services a interjeté appel de cette décision.

Par acte d'huissier en date du 27 juillet 2015, la SAS Siemens Lease Services a fait assigner en intervention forcée la société ASP France venant aux droits de la société ASP 64 devant le tribunal de commerce de Bayonne aux fins d'entendre :

ordonner la jonction de la présente assignation avec la procédure actuellement pendante devant la 2e Chambre Section 1 de la cour d'appel de PAU, enrôlée sous le n°14/04354.

au visa notamment des dispositions des articles 1147 ou subsidiairement 1382 du Code civil, dans l'hypothèse où serait confirmé le jugement dont appel en ce qu'il a prononcé l'annulation du contrat de location financière conclu entre la société Siemens Lease Services et la société Sylene :

condamner la société ASP France à lui payer - solidairement avec les sociétés Sylene et AM Trust - à titre de dommages et intérêts les sommes de :

22 652,62 euro avec intérêts au taux légal à compter du 9 novembre 2012, date de règlement du prix au titre de la dépense exposée par la société Siemens Lease Services pour devenir propriétaire du matériel qui faisait l'objet du contrat de location litigieux ;

4934,34 euro au titre du gain que manquerait la société Siemens Lease Services en cas d'annulation du contrat de location ;

dans l'hypothèse où le jugement de première instance serait réformé et/ou le contrat de location serait résilié ou déclaré caduc :

fixer la date de rupture de la convention locative,

condamner la société ASP France à lui payer à titre de dommages et intérêts - solidairement avec les sociétés Sylene et AM Trust - la somme trimestrielle de 1.350 euro HT à compter de la date de résiliation ou de caducité du contrat de location jusqu'au 1er janvier 2018.

en toute hypothèse :

condamner la société ASP France à lui payer à la somme de 5.000 euro sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

Les deux affaires ont été jointes par ordonnance du 6 novembre 2015.

MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES :

Par conclusions dernières en date du 12 octobre 2015, la SAS Siemens Lease Services demande à la Cour de :

débouter les sociétés Sylene, AM Trust et ASP France de l'ensemble de leurs prétentions en tant que ces dernières lui font grief et dans le dernier état de la procédure, la recevant en son appel et l'en disant bien fondée, au visa notamment des articles 1338, 1134, 1147 et 1382 du Code civil, infirmer le jugement dont appel et, statuant à nouveau :

débouter la société Sylene de l'ensemble de ses prétentions en tant que ces dernières lui font grief.

En conséquence, condamner la société Sylene, sur le fondement de l'article 1184 du Code civil, à exécuter en tous ses termes et jusqu'à son terme le contrat de location financière n°20120902431 régularisé par la société Sylene le 28 septembre 2012, condamner par suite la société Sylene à lui rembourser les sommes par elle réglées sous le bénéfice de l'exécution provisoire dont était assorti le jugement de première instance et, notamment, à rembourser la somme de 14 211,86 euro, correspondant aux échéances de loyers trimestrielles qui avaient été payées par la société Sylene du 25 octobre 2012, date d'entrée en vigueur du contrat, jusqu'au 1er octobre 2014 inclus, condamner, au surplus, la société Sylene à lui payer la totalité des loyers restant à échoir, savoir la somme trimestrielle de 1522,80 euro TTC, à compter du 1er janvier 2015 jusqu'au 1er janvier 2018 inclus, et ce avec intérêts au taux conventionnel (article 4.5 des conditions générales du contrat), à compter de chaque échéance trimestrielle impayée.

à titre subsidiaire et dans l'hypothèse où, par extraordinaire, le jugement de première instance serait confirmé en ce qu'il a prononcé l'annulation du contrat de location financière :

à titre principal et sur les fondements des articles 1147 et 1382 du Code civil, en fonction des personnes morales concernées :

condamner solidairement les sociétés Sylene, AM Trust et ASP France " ces deux dernières venant aux droits de la société ASP 64 " à lui payer à titre de dommages et intérêts les sommes de :

22 652,62 euro HT avec intérêts au taux légal à compter du 9 novembre 2012, date de règlement du prix, au titre de la dépense qu'elle a exposée,

4934,34 euro HT au titre du gain qu'elle manquerait en cas d'annulation du contrat,

à titre encore plus subsidiaire et dans l'hypothèse où la Cour réformerait le jugement dont appel et prononcerait la résiliation ou la caducité du contrat de location financière :

à titre principal et au visa notamment de l'article 9.2 des conditions générales du contrat de location :

condamner la société Sylene à lui payer, à titre d'indemnité contractuelle de résiliation, une somme égale à la totalité des loyers trimestriels restant à échoir au jour où la Cour pourrait fixer la date de résiliation du contrat de location, majorée de 10 % conformément à l'article précité, rappeler que les échéances de loyers trimestrielles exigibles jusqu'au 1er janvier 2018 inclus s'élèvent à 1350 euro HT, majorés de la TVA en vigueur, condamner, dans cette hypothèse, la société Sylene à lui rembourser, éventuellement au prorata, les sommes par elle réglées sous le bénéfice de l'exécution provisoire, à titre de remboursement de loyers à titre subsidiaire et dans l'hypothèse où la Cour, quoique prononçant la résiliation ou la caducité du contrat de location financière, refuserait de faire application de l'article 9.2 précité de ses conditions générales :

condamner solidairement les sociétés Sylene, AM Trust et ASP France à lui payer, à titre de dommages et intérêts, une somme correspondant à la totalité des échéances de loyers hors taxes restant à échoir à la date de résiliation qui pourrait être déterminée par la Cour, rappeler également, dans ce contexte, que chaque échéance trimestrielle de loyer dû jusqu'au 1er janvier 2018 s'élevait à la somme de 1350 euro HT chacune, condamner la société Sylene à lui payer tout ou partie des échéances de loyers qu'elle a remboursées sous le bénéfice de l'exécution provisoire dont était assorti le jugement dont appel, à titre infiniment subsidiaire et dans l'hypothèse où la Cour confirmerait le jugement dont appel en ce qu'il a prononcé l'annulation du contrat de location et également en ce qu'il a condamné la société Sylene à rembourser les loyers par elle réglés :

condamner la société Sylene à lui restituer les matériels, objets du contrat de location résilié, restitution qui devra être opérée entre les mains de la société STOCKAGE DU VAL D'OISE sise ZI du Vert Galant, [...], condamner, toujours dans cette hypothèse, la société Sylene à lui payer, à titre d'indemnité trimestrielle d'utilisation, la somme de 1350 euro HT, majorée de la TVA en vigueur, à compter rétroactivement du 25 octobre 2012, date d'entrée en vigueur du contrat, jusqu'à la date de restitution effective des matériels qui en faisaient l'objet, en toute hypothèse :

ordonner la capitalisation des intérêts en application de l'article 1154 du Code civil, condamner solidairement les sociétés Sylene, AM Trust et ASP France ou celle des trois qui le mieux le devra à lui payer la somme de 5.000 euro sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens, autoriser la SELARL d'avocats LEXAVOUE PAU-TOULOUSE à procéder au recouvrement direct de ceux d'appel conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

A l'appui de ses prétentions, elle fait valoir en substance que la société Sylene aurait exécutée le contrat dont elle demande l'annulation et aurait ainsi confirmée l'acte litigieux.

Elle ajoute qu'en tout état de cause, le dol ou l'erreur sur les qualités substantielles ne sont pas caractérisés.

Elle réclame, à titre principal, l'exécution forcée du contrat qui entraîne nécessairement la condamnation de la société Sylene à procéder à divers versements à son égard au titre des sommes qu'elle a réglées et des loyers restant à lui verser.

A titre subsidiaire, si la cour confirme le jugement, elle soutient que la société Sylene ne saurait en aucune manière être exonérée de toute responsabilité à son égard dans la mesure où c'est en toute connaissance de cause, qu'elle s'est engagée dans les liens du contrat de location avec elle, sans l'aviser au préalable qu'elle était partie à un autre contrat de location conclu avec la BNP Paribas, que sa responsabilité devrait être retenue sur le fondement de l'article 1147 du Code civil et que de ce fait, elle devrait l'indemniser du préjudice subi.

A titre encore infiniment plus subsidiaire, dans l'hypothèse où la cour prononcerait la résiliation du contrat de location financière, elle fait valoir qu'elle serait fondée à solliciter le règlement des sommes qui lui sont dues sur le fondement de l'article 9.2 des conditions générales de la convention et dans l'hypothèse où il ne serait pas fait application dudit article, elle a réclamé le règlement du montant total des loyers restant à échoir au jour de la résiliation du contrat à titre de dommages intérêts.

A titre encore plus subsidiaire, dans l'hypothèse où par extraordinaire, la cour confirmerait le jugement, elle fait valoir que le fait que la société Sylene ait joui et continue à jouir du matériel devait être pris en considération compte-tenu de la nature du contrat à exécution successive et devait conduire à son indemnisation.

Elle maintient que la société AM Trust est venue aux droits de la société ASP 64 et qu'au nombre des contrats transférés figurait indubitablement celui conclu à l'époque entre ASP 64 et Sylene.

Elle précise que ASP France a succédé à AM Trust et vient ainsi aux droits de ASP 64.

Par dernières conclusions en date du 30 avril 2015, la société Sylene demande à la Cour de :

vu les articles 1109 et suivants du Code civil,

vu les articles 1134 et 1 14 7 du Code civil,

vu les articles 1382 et suivants du Code civil,

vu l'article L. 442 6 du Code de commerce

vu la jurisprudence citée,

à titre principal, constatant que son consentement a été vicié par dol ou erreur lors de la conclusion des contrats principaux de sauvegarde informatique datés du 28 septembre 2012,

confirmer le jugement attaqué en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a débouté la société Sylene de sa demande de dommages intérêts,

à titre subsidiaire,

si la nullité des contrats principaux était confirmée mais que la nullité du contrat de location financière n'était pas prononcée,

condamner in solidum les sociétés ASP 64 représentée par Me G. es qualité et Siemens à lui payer la somme de 8 550 euro correspondant aux échéances BNP Paribas qu'elle a réglées à compter de la mise en [...] et fixer à ce montant sa créance au passif de la société ASP 64 en liquidation judiciaire,

débouter la société Siemens de sa demande au titre de l'indemnité de résiliation et, à défaut, la réduire significativement à de plus justes proportions,

débouter la société Siemens de sa demande au titre de la responsabilité contractuelle,

débouter la société Siemens de sa demande au titre de l'indemnité trimestrielle de jouissance,

en tout état de cause,

condamner in solidum les sociétés ASP 64 représentée par Me G. es qualité et Siemens à lui payer la somme de 5 000 euro en réparation du préjudice subi et fixer à ce montant la créance de la société Sylene au passif de la société ASP 64 en liquidation judiciaire,

débouter plus généralement la société Siemens de l'intégralité de ses prétentions,

rendre commun et opposable à la société AM Trust l'arrêt à intervenir,

condamner in solidum les sociétés ASP 64 représentée par Me G. es qualités et Siemens à lui payer la somme de 5 000 euro sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

condamner les mêmes aux entiers dépens de l'instance avec distraction au profit de la SCP DE B. E. et application à son profit des dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

A l'appui de ses prétentions, elle fait valoir que la réalité des manœuvres dolosives est corroborée par divers éléments matériels.

Elle indique que la société ASP 64 avait mis en place un véritable stratagème tendant à obtenir frauduleusement le consentement de ses clients à la souscription de nouveaux contrats tout à fait inutiles, que d'autres sociétés en ont été victimes et qu'une instruction pénale a été ouverte pour escroqueries en bande organisée.

Elle précise que les pratiques de la société ASP 64 n'ont été possibles que par l'existence de la société de leasing qui finance tout nouveau contrat et que le bailleur est tout aussi responsable que la société ASP 64 du dol ayant vicié son consentement.

Elle indique qu'à défaut, le contrat principal doit être annulé pour erreur sur les qualités substantielles et que le contrat de location doit être annulé parce qu'il est indivisible du contrat principal.

Elle relève qu'à ce dernier titre, l'article 1338 du Code civil n'est pas applicable à l'annulation du contrat de location financière et qu'en tout état de cause, la confirmation d'un acte litigieux ne peut pas être opposée à une partie qui ignorait le vice qui l'affectait.

Elle maintient qu'à la suite de la nullité du contrat de location financière, le bailleur doit rembourser au locataire l'ensemble des loyers déjà versés.

Par conclusions en date du 4 mai 2015, la société AM Trust demande à la Cour de :

confirmer le jugement en ce qu'il l'a mise hors de cause,

débouter les parties de l'ensemble de leurs demandes à son encontre,

la mettre hors de cause,

de condamner toute partie succombante à lui verser la somme de 3 000 euro en application de l'article 700 du Code de procédure civile.

A l'appui de ses prétentions, elle fait valoir que la cession d'entreprise qui a été ordonnée à son profit n'a jamais inclus dans son périmètre la reprise du passif de la société ASP 64 concernant les contrats clients.

A l'appui de ses prétentions, elle fait valoir que les contrats du 28 septembre 2012 sont nuls pour dol ou subsidiairement pour erreur.

Elle se défend d'avoir confirmé l'acte nul dans la mesure où le contrat la liant à Siemens est annulé non pas pour vice du consentement mais parce qu'il est indivisible du contrat principal.

Par conclusions en date du 26 août 2015, la société ASP France demande à la Cour de :

dire irrecevable, mal dirigée, et en toute hypothèse infondée l'assignation en intervention forcée qui lui a été délivrée,

condamner la société Siemens à lui verser la somme de 3 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

A l'appui de ses prétentions, elle fait valoir que son appel en intervention forcée est irrecevable en raison de l'absence de tout élément nouveau.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 6 juillet 2016.

Au-delà de ce qui sera repris pour les besoins de la discussion et faisant application en l'espèce des dispositions de l'article 455 du Code de procédure civile, la cour entend se référer pour l'exposé plus ample des moyens et prétentions des parties aux dernières de leurs écritures visées ci-dessus.

SUR CE

I - SUR LES DEMANDES PRINCIPALES :

A - Sur la validité des contrats du 28 septembre 2012 :

1 - Sur le dol :

En application de l'article 1116 ancien du Code civil, applicable en l'espèce, "Le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les manœuvres pratiquées par l'une des parties sont telles, qu'il est évident que, sans ces manœuvres, l'autre partie n'aurait pas contracté. Il ne se présume pas et doit être prouvé. "

En l'espèce, pour se défaire des engagements qu'elle a souscrits le 28 septembre 2012 et réclamer l'annulation du contrat de financement dont la SAS Siemens Lease Services lui réclame le remboursement, la société Sylene soulève la nullité du contrat principal pour dol, en indiquant que lorsqu'en septembre 2012, le commercial de la société ASP 64 est revenu vers elle pour faire le point sur la capacité du matériel acquis dans le cadre du contrat précédent souscrit le 18 janvier 2011 et pour lui proposer une augmentation de 20 Go, elle a cru que le nouveau contrat qu'elle signait ce jour-là, annulait et remplaçait le contrat initial, ayant entendu l'argument de vente selon lequel " plus de capacité de sauvegarde pour le même prix. "

Cependant, il convient de relever que :

les " conditions particulières n° 561 " du contrat d'abonnement signé le 18 janvier 2011 " pour une durée de trente - neuf mois portent sur une sauvegarde externalisée : un pack Classic, 18 Cgo, quarante antivirus, quarante antispam et un firewall, moyennant un forfait d'installation et d'administration de 2 990 euro TTC ( 2 500 euro HT et 490 euro TVA) et des mensualités d'un montant de 538,20 euro TTC ( 450 euro HT et 88,20 euro TVA ) à régler par l'abonné / locataire, " sont signées par les deux parties et sont revêtues du cachet de l'entreprise Sylène, les " conditions particulières n° 6230 " du premier contrat d'abonnement signé le 28 septembre 2012 " pour une durée de 21 trimestres portent sur une extension 20 Go moyennant des trimestrialités de 538,20 euro TTC ( 450 euro HT et 88,20 euro TVA ), à régler par l'abonné / locataire, " sont signées par les deux parties, les " conditions particulières n° 5154 " du second contrat signé le 28 septembre 2012 "pour une durée de 21 trimestres portent sur une extension 20 Go moyennant des trimestrialités de 1 614,60 euro ( 1 350 euro HT et 264,60 euro TVA ), à régler par l'abonné / locataire, " sont signées par les deux parties et sont revêtues du cachet de l'entreprise Sylène.

Au delà du fait que la mention " lu et approuvé " n'est manuscrite sur aucun des deux exemplaires des conditions particulières des contrats du 28 septembre 2012 et que la raison sociale du souscripteur Sylène n'apparaît pas en-tête, il n'en demeure pas moins qu' il n'existe aucun élément permettant d'établir que les deux derniers contrats litigieux se seraient substitués en réalité au premier signé en janvier 2011.

En effet, aucune mention, aucune phrase, aucun mot pouvant évoquer l'existence du premier contrat ne figure dans les deux contrats de septembre 2012.

La durée de ces derniers - exprimés pour le premier en mois ( 39 ) et pour le second en trimestrialités ( 21 ) sont d'ailleurs totalement différentes et ne peuvent pas prêter à confusion.

Leur simple lecture permet de comprendre qu'ils s'ajoutent les uns aux autres et non qu'ils se substituent les uns aux autres.

Les allégations développées sur les propos tenus par le commercial de la société ASP 64 ne sont étayées par aucun élément.

Il appartenait seulement au responsable de la société Sylène, signataire des contrats litigieux, de prendre le temps de les lire et de demander éventuellement à l'ASP 64 des précisions s'il trouvait que les indications qui lui étaient fournies étaient ambiguës.

Ce simple rappel ne vise pas à lui imposer des contraintes supplémentaires mais à lui rappeler la mise en œuvre d'une précaution élémentaire qui doit être nécessairement connue dans une société, d'une taille certaine , employant plus de 20 salariés, réalisant un chiffre d'affaires de plus de 7 300 000 euro pour un résultat net de 119 300 euro et habituée - de part le volume d'affaires qu'elle réalise et son ancienneté - à la passation de contrats de ce type.

Le fait que le tribunal de commerce de Bayonne ait déjà retenu l'existence de manœuvres dolosives et ait annulé en conséquence des contrats de ce chef dans une autre instance opposant la société ASP 64 à une entreprise tierce ou encore qu'une instruction soit ouverte contre X pour escroqueries en bandes organisées, faux et usage de faux est totalement inopérant pour confirmer l'existence de manœuvres dolosives dans la présente affaire dans la mesure où chaque affaire étant particulière, la solution retenue pour l'une ne doit pas être automatiquement appliquée à l'autre et où l'instruction visée n'est pas ouverte nommément contre l'ASP 64 pour les faits de la présente espèce.

En conséquence, le jugement attaqué sera réformé de ce chef.

2 - Sur l'erreur :

En application de l'ancien article 1110 du Code civil applicable en l'espèce, " L'erreur n'est une cause de nullité de la convention que lorsqu'elle tombe sur la substance même de la chose qui en est l'objet. "

Il est constant que l'erreur sur un motif du contrat extérieur à l'objet de celui-ci n'est pas une cause de nullité de la convention, quand bien même ce motif aurait été déterminant, à moins qu'une stipulation expresse ne l'ait fait entrer dans le champ contractuel en l'érigeant en condition du contrat.

En l'espèce, la société Sylene soutient qu'une erreur sur les qualités substantielles est caractérisée dans la mesure où en signant le contrat le 28 septembre 2012, elle était convaincue qu'elle signait un avenant au contrat du 18 janvier 2011 qui venait remplacer ce dernier.

Elle prétend qu'elle pouvait légitimement penser qu'elle signait un avenant au contrat initial dans la mesure où l'objet du deuxième contrat, réalisant une extension du dispositif principal pour une durée plus longue que le contrat initial était totalement inutile et qu'il était impossible de penser que l'extension de la capacité de sauvegarde continuait d'être opérationnelle alors que la capacité de sauvegarde initiale de 180 Go ne le serait plus.

Cependant, il convient de relever que la société Sylene en faisant valoir que les contrats litigieux du 28 septembre 2012 ne répondaient pas en fait aux besoins de son activité dans la mesure où leur exécution allait se poursuivre inutilement au-delà de la durée d'une prestation résultant d'un contrat antérieur n'invoque aucune erreur sur les qualités substantielles du matériel, objet des contrats du 28 septembre 2012, mais se borne à constater son inadéquation à son activité.

Ainsi, il en résulte que l'erreur qu'elle invoque porte en réalité non sur les qualités substantielles du matériel litigieux, mais sur les motifs de son acquisition.

A défaut de démontrer que la substitution du contrat du 28 septembre 2012 à celui du 18 janvier 2011 était entrée dans le champ contractuel, la preuve de l'erreur sur les qualités substantielles n'est donc pas rapportée.

En conséquence, la Société Sylene doit être déboutée de ses demandes formées de ce chef.

B - Sur les conséquences de la validité des contrats du 28 septembre 2012 :

En application de l'article 1184 ancien du Code civil applicable en l'espèce " La condition résolutoire est toujours sous-entendue dans les contrats synallagmatiques, pour le cas où l'une des deux parties ne satisfera point à son engagement. Dans ce cas, le contrat n'est point résolu de plein droit. La partie envers laquelle l'engagement n'a point été exécuté, a le choix ou de forcer l'autre à l'exécution de la convention lorsqu'elle est possible, ou d'en demander la résolution avec dommages et intérêts ".

En l'espèce, le rejet des prétentions de la société Sylene tant sur le fondement du dol que sur celui de l'erreur conduit à la condamner à exécuter jusqu'à son terme le contrat de location financière n° 20120902431 régularisé le 28 septembre 2012.

En conséquence, elle est condamnée à verser à la société SAS Siemens Lease Services :

la somme de 17 211, 86euro (se décomposant comme suit : 14 211,86 euro TTC au titre des échéances de loyers réglées du 25 octobre 2012 date d'entrée en vigueur du contrat au 1er octobre 2014 outre divers frais) qu'elle lui a payées sous le bénéfice de l'exécution provisoire,

les loyers restant à échoir, à savoir les échéances trimestrielles des 1er janvier 2015 au 1er janvier 2018 inclus, lesquels s'élèvent chacun à la somme de 1 522,80 euro TTC ( 1 268 euro HT avec TVA à 20 % ) en application de l'article 4.5 des conditions générales du contrat.

II - SUR LES DEMANDES ACCESSOIRES :

Compte-tenu du rejet des prétentions de la société Sylene, il n'y a pas lieu de statuer sur les demandes formées contre les sociétés AM Trust et ASP France et les moyens de défense que ces dernières développent.

Les dépens de la première instance et de la procédure d'appel seront supportés par la société Sylene avec distraction au profit de la SELARL d'avocats LEXAVOUE PAU-TOULOUSE.

Il n'apparaît pas inéquitable de débouter les parties de leur demande respective formée en application de l'article 700 alinéa 1 du Code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour statuant publiquement, par décision réputée contradictoirement et en dernier ressort,

Infirme dans toutes ses dispositions le jugement prononcé le 17 novembre 2014 par le tribunal de commerce de Bayonne,

Statuant à nouveau,

Déboute la SA Sylene de l'intégralité de ses demandes,

Condamne la SA Sylene à exécuter jusqu'à son terme le contrat de location financière n°20120902431 régularisé le 28 septembre 2012,

En conséquence,

Condamne la SA Sylene à rembourser à la SAS Siemens Lease Services la somme de 17 211,86 euro versée en exécution du jugement du 17 novembre 2014, assorti de l'exécution provisoire,

Condamne la SA Sylene à payer à la SAS Siemens Lease Services la totalité des loyers restant à échoir, à savoir la somme trimestrielle de 1522,80 euro TTC, à compter du 1er janvier 2015 jusqu'au 1er janvier 2018 inclus, et ce avec intérêts au taux conventionnel à compter de chaque échéance trimestrielle impayée,

Y ajoutant,

Déboute la SA Sylene de ses demandes formées sur le fondement de l'erreur sur les qualités substantielles,

Dit sans objet les demandes formées contre la SARL ASP France et la SARL AM Trust,

Déboute la SAS Siemens Lease Services, la SA Sylene, la SARL AM Trust, et la SARL ASP France de leur demande respective formée en application de l'article 700 du Code de procédure civile,

Condamne la SA Sylene aux dépens de première instance et d'appel,

Autorise la SELARL d'avocats LEXAVOUE PAU-TOULOUSE qui en a fait la demande à recouvrer directement ceux des dépens d'appel dont elle a fait l'avance sans avoir reçu provision,

Arrêt signé par Madame MORILLON, Conseiller faisant fonction de Président, et par Madame Catherine SAYOUS, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.