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Décisions

Cass. com., 26 avril 2017, n° 15-28.964

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

PARTIES

Demandeur :

Solar Electric Investissements (Sté)

Défendeur :

Global PVQ I L SE (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Riffault-Silk

Rapporteur :

Mme Tréard

Avocat général :

Mme Pénichon

Avocats :

SCP Fabiani, Luc-Thaler, Pinatel, SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle, Hannotin

Cass. com. n° 15-28.964

26 avril 2017

LA COUR : - Sur le moyen unique : - Attendu, selon l'arrêt attaqué (Fort-de-France, 3 novembre 2015), rendu sur contredit, que la société Solar électric investissements, établie en France (la société Solar), a assigné la société Global PVQ I L SE, anciennement Q-Cells SE (la société Global) société de droit allemand ayant son siège en Allemagne, devant le Tribunal mixte de commerce de Fort-de-France, lui reprochant des actes de concurrence déloyale tenant à la fabrication et à la commercialisation de modules photovoltaïques reproduisant ceux qu'elle fabrique et commercialise en Martinique, et a demandé la désignation d'un expert afin d'évaluer son préjudice ; que la société Global faisant l'objet d'une procédure d'insolvabilité en Allemagne, a soulevé avec son administrateur provisoire, M. Schorisch, une exception d'incompétence au profit des juridictions allemandes, laquelle a été accueillie par le tribunal ;

Attendu que la société Solar fait grief à l'arrêt de rejeter son contredit alors, selon le moyen : 1°) que le lieu où le fait dommageable s'est produit s'entend à la fois du lieu où le dommage est survenu et du lieu de l'événement causal ; que lorsque ces lieux ne sont pas identiques, le défendeur peut indifféremment être attrait, au choix du demandeur, devant le tribunal de l'un de ces lieux ; qu'en se bornant à retenir qu'il n'est pas établi que le lieu de la contrefaçon dommageable se trouve situé sur le territoire français, sans rechercher, comme elle y était invitée, si le préjudice subi par la société Solar, du fait de cette contrefaçon, n'était pas, au moins partiellement, survenu sur le territoire français, ce qui aurait suffi à justifier la compétence des juridictions françaises pour connaître de l'action en réparation des dommages subis sur le territoire national, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 5, point 3, du règlement (CE) n° 44/2001 du 22 octobre 2000 ; 2°) qu'en retenant que les factures produites ne contiennent aucune référence à la société Q-Cells devenue Global PVQ, quand la facture n° FSD10595 du 14 décembre 2011 indiquait expressément porter sur l'achat de " panneaux photovoltaïques Q-Cells Q Base " en provenance d'Allemagne, la cour d'appel a, malgré l'interdiction qui lui est faite, dénaturé ce document ; 3°) qu'en relevant que la société Solar n'aurait pas produit devant elle les factures établies par la société Solaire dépôt, sans inviter les parties à s'expliquer sur l'absence au dossier de ces pièces dont la communication n'avait pas été contestée, la cour d'appel a méconnu le principe de la contradiction et violé l'article 16 du Code de procédure civile ; 4°) que le secrétariat de la juridiction qui a rendu la décision frappée de contredit doit transmettre au greffier en chef de la cour d'appel l'ensemble du dossier de l'affaire avec le contredit et une copie du jugement ; qu'en reprochant à la société Solar de ne pas avoir produit les deux factures sur lesquelles elle appuyait ses prétentions, quand il appartenait au secrétariat du Tribunal mixte de commerce de Fort-de-France de lui faire parvenir l'ensemble du dossier de l'affaire, en ce compris les pièces communiquées en première instance, la cour d'appel a violé l'article 83 du Code de procédure civile ;

Mais attendu, en premier lieu, que l'obligation de transmission prévue par l'article 83 du Code de procédure civile ne s'étendant pas aux pièces communiquées au cours de l'instance ayant donné lieu à la décision attaquée, il incombe au demandeur au contredit de les produire s'il entend s'en prévaloir dans le cadre de son recours ;

Attendu, en deuxième lieu, qu'il résulte de la production effectuée devant la Cour de cassation que la facture litigieuse, qui porte sur l'achat de panneaux photovoltaïques " QCELLS Q base ", dont l'origine allemande est seule précisée, a été établie par la société Solaire dépôt, domiciliée à Paris, mentionnée comme en étant le fournisseur ; que cette facture, qui mentionne une livraison aux Pays-Bas, désigne la société Solar comme cliente ; qu'en cet état, la cour d'appel a pu retenir, sans dénaturation, par motifs propres et adoptés, qu'en l'absence de référence explicite à la société Q-CELLS, rien n'indiquait que le fournisseur les ait acquis auprès de cette entreprise allemande, qui n'était pas partie à l'acte ;

Et attendu, en dernier lieu, qu'après avoir rappelé que selon l'article 2 du règlement (CE) n° 44/2001 du 22 décembre 2000, les personnes domiciliées sur le territoire d'un Etat membre sont, en principe, attraites, quelle que soit leur nationalité, devant les juridictions de cet Etat et qu'en application des articles 3 et 5 de ce règlement, ces personnes peuvent toutefois être attraites, en matière délictuelle ou quasi délictuelle, devant le tribunal de l'Etat membre où le fait dommageable s'est produit ou risque de se produire, l'arrêt relève que la société Solar doit établir que le fait dommageable qu'elle reproche à la société Global s'est produit sur le territoire français et plus particulièrement dans le ressort du tribunal de commerce de Fort-de-France qu'elle a saisi du litige ; qu'il retient que le fait dommageable invoqué est un fait de contrefaçon, qui est réputé avoir été réalisé au siège social de la société Global en Allemagne, en l'absence d'élément établissant qu'un acte de fabrication, d'offre, de mise dans le commerce ou d'importation de panneaux photovoltaïques contrefaisant les panneaux dont la société Solar se prétend concepteur et fabricant, a été accompli, par la société Global, sur le territoire français ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations, et dès lors que le dommage invoqué par la société Solar, qui résultait d'une livraison de marchandises aux Pays-Bas, n'était pas de nature à justifier l'application de l'option de compétence précitée en faveur du tribunal de Fort-de-France, la cour d'appel, qui n'était pas tenue d'inviter les parties à s'expliquer sur l'absence de pièces qui ne figuraient pas sur le bordereau annexé au contredit, a pu retenir qu'il n'était pas établi que le fait dommageable se soit produit ou risque de se produire sur le territoire français, et a ainsi légalement justifié sa décision ; d'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

Par ces motifs : rejette le pourvoi.