CA Paris, Pôle 5 ch. 5, 27 avril 2017, n° 15-15903
PARIS
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Commend France (SAS)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Dabosville
Conseillers :
M. Loos, Mme Schaller
Faits et procédure
M. X est agent commercial.
La société Commend France, filiale de la société autrichienne Commend International GmbH, exerce une activité de distribution d'équipements électroniques d'intercommunications, notamment dans les milieux hospitalier et pénitentiaire.
Une collaboration entre les parties a débuté à compter du 1er novembre 1999 et été formalisée par un contrat "d'agent commercial" le 15 mai 2000.
Aux termes du préambule de ce contrat, il est rappelé que X est un agent commercial multicartes qui " évolue dans le domaine des communications, radiocommunications sur site, sonorisation et appel malades ".
Son article 1 stipule :
" A dater du 1er novembre 1999, le mandant confie à l'agent, qui l'accepte, le mandat de négocier la vente en son nom et pour son compte des produits fabriqués ou diffusés par le mandant.
Le secteur géographique dans lequel l'agent est chargé du mandat (sans exclusivité) comprend les départements suivants :
01-07-26-38-42-69-71-73-71 dénommés " Rhône-Alpes ",
03-15-43-58-63 dénommés " Auvergne ",
21-25-39 dénommés " Bourgogne Franche-Comté ".
Sur ces départements, l'agent bénéficie de l'exclusivité de la représentation du mandant pour tous les clients dont il est à l'origine.
Il pourra également intervenir sur d'autres secteurs, selon les opportunités de ses prospections. "
Selon avenant du 6 septembre 2007, était mis à la disposition de M. X par Commend France le logiciel " Vente Partner ".
Par courriel du 5 juillet 2011, M. X a reproché à M. Y, directeur de Commend France, de lui avoir supprimé depuis un an tous les supports lui permettant de représenter Commend France, précisant " en fait, je considère qu'il s'agit d'une rupture de contrat d'agent ". Par mail de réponse du même jour, M. Y a contesté ce grief, formulé à son tour des reproches à l'encontre de M. X et précisé qu'il ne souhaitait nullement mettre un terme à leur collaboration.
Lors d'un échange de correspondances en juillet 2012, M. X a de nouveau adressé différents reproches à Commend France, précisant en conclusion le 12 juillet : " Je constate que le contrat qui nous lie n'est plus respecté par Commend. Aussi, je vais prendre des dispositions ".
Selon lettre recommandée avec avis de réception de son avocat du 25 juillet 2012, il a de nouveau indiqué que le contrat d'agent commercial n'était pas respecté par Commend France et sollicité la position de celle-ci sur une indemnité d'éviction. Selon courrier du 31 juillet 2012, la société Commend France lui répondait qu'elle exigeait la poursuite du contrat d'agent commercial et mettait en demeure M. X de respecter ses obligations contractuelles.
C'est dans ces conditions que, le 20 juin 2013, M. X a fait assigner la société Commend France pour constater l'inexécution fautive et les graves carences de celle-ci dans le cadre de l'exécution du contrat d'agent commercial les liant justifiant sa résiliation judiciaire à ses torts.
Par jugement du 26 juin 2015, le Tribunal de grande instance de Bobigny a :
- rejeté la fin de non-recevoir soulevée par la société Commend France et déclaré recevables les demandes de M. X ;
- prononcé aux torts de la société Commend France la résiliation du contrat d'agence le liant à M. X depuis le 15 mai 2000 ;
- dit que M. X a droit aux sommes afférentes à l'exécution de ce contrat et à sa rupture fautive, soit, d'une part, aux commissions restant dues de l'année 2009 à ce jour, et d'autre part, aux incidences financières d'une rupture fautive ;
- avant dire droit sur la liquidation de ces sommes, ordonné une expertise confiée à M. F, <coordonnées>, avec mission de :
se faire communiquer l'ensemble des pièces détenues par les parties utiles à ses investigations sans que puisse lui être reproché le secret professionnel, bancaire ou fiscal, et fait injonction aux parties d'y procéder sur simple demande de l'expert ;
prendre connaissance du dossier et convoquer les parties et leurs conseils, les entendre ;
détailler le domaine d'exclusivité de M. X au titre de l'article 1 du contrat d'agent commercial en date du 15 mai 2000 ;
vérifier si ce secteur a été modifié depuis cette date et singulièrement entre 2010 et 2015 par voie d'avenant ;
établir pour cette période et relativement à son secteur géographique déterminé, la liste détaillée des opérations qu'il a conclues en distinguant celles entrant selon lui dans son champ d'exclusivité, celles qui ne s'y rapportent pas mais qu'il a directement amenées et acceptées par la société Commend France, celles qui tout en entrant dans son secteur ont été traitées par la société Commend France ;
en fonction de cet inventaire, proposer, pour chaque dossier une liquidation de la commission due en application de l'article 3 du contrat d'agence,
faire un état des commissions effectivement versées parla société Commend France pour la même période ;
proposer, après imputation des sommes dues et des sommes versées par la société Commend France à M. X un état liquidatif de leurs comptes en faisant apparaître le solde susceptible de revenir à M. X ;
fournir au tribunal tous les éléments lui permettant d'apprécier le préjudice subi par M. X en raison de la rupture du contrat, notamment en termes de pertes de toutes les rémunérations acquises lors de l'activité développée dans l'intérêt commun des parties sans qu'il y ait lieu de distinguer selon leur nature mais incluant tous les éléments de la rémunération de l'agent pendant l'exécution du contrat ;
proposer sur cette base et selon les usages de la profession un montant d'indemnisation ;
donner toutes autres précisions utiles ;
procéder selon la méthode du pré-rapport afin de provoquer les dires écrits des parties dans tel délai de rigueur déterminé de manière raisonnable et y répondre avec précision ;
- rappelé que l'expert procéderait à ses opérations en présence des parties ou celles-ci dûment convoquées par lettres recommandés avec accusés de réception et leurs conseils avisés ;
- autorisé en tant que de besoin l'expert à recueillir l'avis d'un autre technicien dans une spécialité distincte de la sienne à charge pour lui, de joindre son avis au rapport ;
- dit que la société Commend France et à défaut la partie la plus diligente verserait par chèque libellé à l'ordre de la régie une consignation de 4 000 euros à valoir sur la rémunération de l'expert, avant le 31/08/2015, date limite de la consignation (le chèque sera adressé avec le nom des parties et le numéro de répertoire général du dossier au greffe de la septième chambre du Tribunal de grande instance de Bobigny) ;
- dit qu'à défaut du versement de la consignation dans les délais impartis, la désignation de l'expert deviendrait caduque ;
- dit que l'expert devrait déposer son rapport dans le délai de six mois après sa saisine sauf prorogation et mentionner dans son rapport l'ensemble des destinataires à qui il l'aura adressé ;
- commis le juge de la mise en état de la 7e chambre section 1 pour contrôler l'expertise ;
- invité M. X à qualifier précisément ses demandes indemnitaires au regard des articles L. 134-12 du Code de commerce et des articles 1134, 1147 et 1184 du Code civil ;
- renvoyé l'affaire à la mise en état pour vérification du versement de la consignation, dit n'y avoir lieu à exécution provisoire et réservé le surplus des demandes et les dépens.
Vu l'appel interjeté le 22 juillet 2015 par la société Commend France contre cette décision ;
Vu les dernières conclusions signifiées par la société Commend France le 16 février 2016 dans lesquelles il est demandé à la cour de :
A titre principal,
infirmer en toutes ses dispositions le jugement ;
Statuant à nouveau
dire prescrite l'action de M. X et en conséquence rejeter l'ensemble de ses demandes ;
annuler le procès-verbal d'huissier de justice établi le 8 décembre 2015 par Me C. ou subsidiairement le dire dépourvu de toute valeur probatoire.
A titre subsidiaire,
- infirmer ledit jugement en ce qu'il a confié pour mission à l'expert de :
" (...) détailler le domaine d'exclusivité de M. X au titre de l'article 1 du contrat d'agent commercial en date de 15 mai 2000 ;
vérifier si ce secteur a été modifié depuis cette date et singulièrement entre 2010 et 2015 par voie d'avenant ;
d'établir pour cette période et relativement à son secteur géographique déterminé, la liste détaillée des opérations qu'il a conclues en distinguant celles entrant selon lui dans son champ d'exclusivité, celles qui ne s'y rapportent pas mais qu'il a directement amenées et acceptées ou exécutées par la société Commend France, celles qui tout en entrant dans son secteur ont été traitées par la société Commend France ;
proposer, en fonction de cet inventaire, pour chaque dossier une liquidation de la commission due en application de l'article 3 du contrat d'agence (...) ".
- rejeter les demandes de résiliation judiciaire et d'indemnisation présentées par M. X tant au titre de la rupture de son contrat que de la prétendue exécution " déloyale " de celui-ci ;
- rejeter les demandes de rappel de commissions présentées par M. X ;
- rejeter les demandes de communication de pièces de M. X ;
A titre infiniment subsidiaire,
- dire quérable l'obligation de communication des justificatifs de commission et donner acte à Commend France qu'elle tient, dans ses locaux, à la disposition de M. X les documents comptables justifiant le calcul de ses commissions ;
- dire que l'expert désigné aura pour mission de :
se faire communiquer l'ensemble des pièces détenues par les parties utiles à ses investigations sans que puisse lui être opposé le secret professionnel, bancaire ou fiscal, et fait injonction aux parties d'y procéder sur simple demande de l'expert ;
prendre connaissance du dossier et convoquer les parties et leurs conseils les entendre ;
se faire communiquer par M. X la liste des clients dont il estime être à l'origine pour les départements listés à l'article 1er du contrat du 15 mai 2000, en distinguant les clients dont l'origine est selon M. X antérieure au 1er novembre 1999 ;
se faire communiquer par chacune des deux parties au litige et pour chaque client nommé par M. X les éléments justifiant selon elle que M. X soit considéré comme à l'origine du client ou soit exclu de cette qualification ;
élaborer un rapport de synthèse distinguant parmi les clients précités ceux dont M. X n'est pas contesté être à l'origine et faisant apparaitre pour les autres les justificatifs et arguments opposés par les parties ;
faire un état des commissions effectivement versées par la société Commend France pour la même période ;
proposer, après imputation des sommes dues et des sommes versées par la société Commend France à M. X, un état liquidatif de leur comptes en faisant apparaître le solde susceptible de revenir à M. X ;
fournir au tribunal tous éléments lui permettant d'apprécier le préjudice subi par M. X en raison de la rupture du contrat, notamment en termes de pertes de toutes les rémunérations acquises lors de l'activité développée dans l'intérêt commun des parties sans qu'il y ait lieu de distinguer selon leur nature mais incluant tous les éléments de la rémunération de l'agent pendant l'exécution du contrat ;
proposer sur cette base et selon les usages de la profession un montant d'indemnisation ;
rappeler que la définition du périmètre de l'exclusivité limitée reconnue à M. X par l'article 1er du contrat du 15 mai 2000 et la qualification de " client dont M. X est à l'origine " au sens de ce même article relève du pouvoir exclusif des tribunaux.
Reconventionnellement,
évoquer l'ensemble des points non jugés en première instance, par application de l'article 568 du Code de procédure civile ;
réviser le taux des commissions dues à M. X et dire que le taux de commission dû à M. X pour les affaires qu'il a initiées sera égal au quart du taux prévu à l'article 3 du contrat du 15 mai 2000 ;
préciser en outre que cette révision prendra effet à compter du 5 juillet 2011, date à laquelle M. X a estimé une première fois son contrat rompu et à laquelle il confiait déjà ses chiffrages à la société Commend France, et, subsidiairement, du 13 juillet 2012, date à laquelle M. X indique n'avoir plus d'appel alors que son rôle n'est pas d'attendre les appels mais de prendre lui-même l'initiative d'appeler, et, plus subsidiairement, du 13 novembre 2013, date à laquelle M. X demande encore une fois à la société Commend France de faire un devis à sa place ;
condamner M. X à verser à la société Commend France une indemnité de 30 000 euros.
En tout état de cause, condamner M. X à payer à la société Commend France la somme de 20 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.
Vu les dernières conclusions signifiées par M. X le 18 décembre 2015 dans lesquelles il est demandé à la cour de :
- confirmer dans toutes ses dispositions le jugement ;
- rejeter l'intégralité des demandes de la société Commend France ;
Statuant à nouveau,
- condamner la société Commend France au paiement de commissions sur les ventes réalisées par Monsieur B. avec les sociétés E3S et SDA Energy ;
- condamner la société Commend France au paiement de la somme de 6 131,56 euros à titre de rappel de commission supplémentaire ;
- condamner la société Commend France au paiement d'une indemnité de 10 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;
- condamner la société Commend France aux entiers dépens, dont distraction au profit de Maître Audrey K., avocat au Barreau de Paris, sur son affirmation de droit.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 19 janvier 2017.
Motifs
Sur la recevabilité des demandes de M. X au regard de la prescription :
L'article L. 134-12 du Code de commerce dispose qu'en cas de cessation de ses relations avec le mandant, l'agent commercial a droit à une indemnité compensatrice en réparation du préjudice subi ; qu'il perd toutefois le droit à réparation s'il n'a pas notifié au mandant, dans un délai d'un an à compter de la cessation du contrat, qu'il entend faire valoir ses droits.
En l'espèce, le jugement dont appel sera confirmé en ce qu'il a exactement déclaré recevable au regard de ces dispositions la demande de paiement d'une indemnité formée par M. X par acte introductif du 20 juin 2013, compte tenu de ce que les pièces du dossier révèlent sans conteste que le contrat était toujours en cours à tout le moins jusqu'à l'échange de correspondances des parties intervenu en juillet 2012. La cour observe d'ailleurs que Commend France ne fait état dans ses conclusions (en page 24) que d'une rupture partielle et non totale du contrat, de sorte que si on la suivait, le délai annal de prescription n'aurait jamais commencé à courir.
Sur la nullité du procès-verbal d'huissier de justice du 8 décembre 2015 :
Commend France sera déboutée de sa demande de prononcé de la nullité du procès-verbal d'huissier de justice du 8 décembre 2015, faute de justifier, concernant cet acte, d'une cause de nullité au sens du fondement invoqué de l'article 117 du Code de procédure civile, étant rappelé en outre qu'il appartiendra dans tous les cas à la cour d'apprécier au fond la force probante de l'acte.
Sur le fond :
Sur les demandes de M. X :
L'article L. 134-4 du Code de commerce dispose que les contrats intervenus entre les agents commerciaux et leurs mandants sont conclus dans l'intérêt commun des parties (alinéa 1) ; que les rapports entre l'agent commercial et le mandant sont régis par une obligation de loyauté et un devoir réciproque d'information (alinéa 2) ; que l'agent commercial doit exécuter son mandat en bon professionnel ; et que le mandant doit mettre l'agent commercial en mesure d'exécuter son mandat (alinéa 3).
L'article L. 134-6 de ce Code dispose que pour toute opération commerciale conclue pendant la durée du contrat d'agence, l'agent commercial a droit à la commission définie à l'article L. 134-5 lorsqu'elle a été conclue grâce à son intervention ou lorsque l'opération a été conclue avec un tiers dont il a obtenu antérieurement la clientèle pour des opérations du même genre ; que lorsqu'il est chargé d'un secteur géographique ou d'un groupe de personnes déterminé, l'agent commercial a également droit à la commission pour toute opération conclue pendant la durée du contrat d'agence avec une personne appartenant à ce secteur ou à ce groupe.
L'article R. 134-3 du même Code précise que le mandant remet à l'agent commercial un relevé des commissions dues, au plus tard le dernier jour du mois suivant le trimestre au cours duquel elles sont acquises ; que ce relevé mentionne tous les éléments sur la base desquels le montant des commissions a été calculé ; et que l'agent commercial a le droit d'exiger de son mandant qu'il lui fournisse toutes les informations, en particulier un extrait des documents comptables nécessaires pour vérifier le montant des commissions qui lui sont dues.
Enfin, l'article L. 134-12 du même Code, dont les dispositions sont d'ordre public, indique qu'en cas de cessation de ses relations avec le mandant, l'agent commercial a droit à une indemnité compensatrice en réparation du préjudice subi ; qu'il perd toutefois le droit à réparation s'il n'a pas notifié au mandant, dans un délai d'un an à compter de la cessation du contrat, qu'il entend faire valoir ses droits ; et que ses ayants droit bénéficient également du droit à réparation lorsque la cessation du contrat est due au décès de l'agent.
L'article L. 134-13 précise toutefois que la réparation prévue à l'article L. 134-12 n'est pas due dans les cas suivants :
1° La cessation du contrat est provoquée par la faute grave de l'agent commercial ;
2° La cessation du contrat résulte de l'initiative de l'agent à moins que cette cessation ne soit justifiée par des circonstances imputables au mandant ou dues à l'âge, l'infirmité ou la maladie de l'agent commercial, par suite desquels la poursuite de son activité ne peut plus être raisonnablement exigée ;
3° Selon un accord avec le mandant, l'agent commercial cède à un tiers les droits et obligations qu'il détient en vertu du contrat d'agence.
Il est rappelé qu'en l'espèce, devant les premiers juges, aux termes de ses dernières conclusions du 7 octobre 2014 (ici produites sous le n° 24 par l'appelante), M. X demandait :
- le prononcé de la résiliation du contrat en raison des manquements de Commend France,
- la condamnation de Commend France au paiement de 100 000 euros à titre de dommages intérêts et de 10 000 euros pour exécution déloyale du contrat,
- la condamnation sous astreinte de Commend France à lui fournir tous justificatifs des opérations conclues sur son secteur contractuel depuis le 1er janvier 2009,
- la condamnation de Commend France au paiement des commissions " (cf mémoire) ",
- la fixation des commissions dues à la somme forfaitaire de 25 000 euros, à défaut de transmission des éléments comptables,
- la condamnation de Commend France au paiement de la somme de 6 131,56 euros à titre de rappel de commissions supplémentaires sur l'année 2010.
Dans le jugement du 26 juin 2015 entrepris, le Tribunal de grande instance de Bobigny a dit que M. X avait droit aux sommes afférentes à l'exécution du contrat et à sa rupture fautive, soit, d'une part, aux commissions restant dues de l'année 2009 à ce jour, et d'autre part, aux incidences financières d'une rupture fautive, ordonnant une expertise avant dire droit sur la liquidation de ces sommes - laquelle expertise n'a pas eu lieu du fait de l'appel - et invité M. X à qualifier précisément ses demandes indemnitaires au regard des articles L. 134-12 du Code de commerce et des articles 1134, 1147 et 1184 du Code civil, ce qu'il n'a pas fait à ce jour.
Au surplus, M. X sollicite non sans contradiction tout à la fois la confirmation totale du jugement entrepris, le rejet des prétentions adverses et qu'il soit statué à nouveau et, ainsi, que Commend France soit condamnée à lui payer les commissions sur les ventes réalisées avec les sociétés E3S et SDA Energy et la somme de 6 131,56 euros à titre de rappel de commission supplémentaire.
Ces demandes de rejet des prétentions adverses et de " statuer à nouveau ", sauf à être privées de sens, doivent s'entendre comme une demande de réformation du jugement sur les points en cause.
Par ailleurs, la cour observe qu'il résulte du dossier que les parties ont continué à exécuter le contrat y compris après l'assignation en date du 20 juin 2013, ainsi qu'en atteste en particulier leur échange de mails en novembre 2013 où elles s'adressent des reproches réciproques sur le fond du contrat, et même après le prononcé du jugement critiqué du 26 juin 2015, ainsi qu'il ressort du procès-verbal d'huissier du 8 décembre 2015 par lequel M. X a voulu faire constater qu'il n'avait plus accès au réseau de Commend France sur son ordinateur personnel, sans que celle-ci n'objecte qu'à cette date, cela était normal car le contrat avait pris fin.
D'ailleurs, aux termes de ses dernières écritures devant la cour, Commend France est favorable au maintien du contrat, puisque elle demande le débouté de la demande adverse de résiliation sans former de demande reconventionnelle de résiliation aux torts de l'agent, ni a fortiori exciper de sa faute grave.
Ce préalable ayant été dit, il convient d'apprécier la réalité des griefs que M. X fait à Commend France, à savoir :
- d'avoir cessé à compter de juin 2010, date du départ à la retraite du directeur commercial et d'un changement consécutif de politique commerciale, de le convoquer aux réunions commerciales (1er grief),
- de lui avoir retiré à compter du 4 mars 2013 l'accès réseau du logiciel de chiffrage Vente Partner et ainsi de l'avoir privé de l'accès aux tarifs de Commend France (2e grief),
- la violation de sa clause d'exclusivité et les agissements parasitaires des commerciaux de Commend France, concernant les clients suivants : Relec, Bouygues Energy Services, Ineo, E3S, Soteb, Calasys, Spie et Roiret (3e grief).
Le 1er grief est établi par l'attestation de Mme Céline G., ancienne commerciale de Commend France, pour la période de juin 2010 à fin janvier 2012 (date à laquelle elle a quitté l'entreprise), qui est corroborée par les mails de reproches de M. X de juillet 2011 et juillet 2012.
Le 2e grief se trouve également démontré, puisque il n'est pas contesté par Commend France que l'accès réseau du logiciel de chiffrage Vente Partner a été coupé à M. X à tout le moins pendant deux ans. Par ailleurs, cet accès au réseau facilitant la commercialisation des produits, même s'il n'était certes pas le seul moyen pour M. X d'accéder aux tarifs, sa suppression était préjudiciable à ce dernier, étant observé que Commend France ne justifie pas que la dite suppression était motivée par le fait que l'agent profitait de l'accès au réseau pour ne plus effectuer de chiffrage des devis et se reposer sur le travail des commerciaux, ses reproches à cet égard étant insuffisamment étayés. Il est observé à cet égard que Commend France n'a jamais entendu mettre fin au contrat d'agent commercial à raison des fautes de ce dernier, ni dans le cadre de l'instance, ni auparavant.
Etant précisé que contrairement à ce que soutient Commend France, la clause d'exclusivité prévue à l'article 1 du contrat s'applique, concernant le secteur géographique défini, pour tous les clients " dont [M. X] est à l'origine ", à savoir non seulement pour ceux qu'il avait déjà avant le contrat et qu'il a donc apportés lors de la signature du contrat, mais également à ceux qu'il a prospectés pendant l'exécution du contrat et qui devaient donc continuer à être suivis par lui-même, le 3e grief est pour sa part établi en particulier pour les clients suivants : Relec, Ineo-CH Roanne (traité par M. A, commercial, même si répercuté in extremis sur M. X), E3S, Calasys (intervention de Mme B, commerciale) et Spie (intervention de Mme C, commerciale), mais non pour ces clients : Bouygues Energies et Services (qui n'est pas sur le tableau de commissionnement de 2009), Soteb (la pièce n° 31 de l'intimé étant illisible du fait de sa très mauvaise qualité) et Roiret (les pièces visées ne correspondant pas).
Le parasitage de l'activité de M. X et sa mise à l'écart sont en outre confirmés par la présentation sur le site Internet de Commend France de son nouveau commercial en région Rhône-Alpes (M. D) comme "l'interlocuteur privilégié" du secteur, pourtant inclus dans celui dévolu à l'agent commercial pour ses propres clients.
Par suite, ainsi que l'ont exactement estimé les premiers juges par motifs pertinents que la cour fait siens, ces différents manquements justifient le prononcé de la résiliation du contrat d'agent commercial aux torts du mandant, ce, au jour du prononcé du jugement (soit le 26 juin 2015) faute de critique des parties sur cette date.
Le jugement sera également confirmé sur le principe du droit à commissions et à indemnité de rupture de M. X, ainsi que sur l'expertise dont la mission est toutefois modifiée comme suit :
- est retranché de la mission de l'expert le fait de " détailler le domaine d'exclusivité de M. X au titre de l'article 1 du contrat d'agent commercial en date du 15 mai 2000 " et de " vérifier si ce secteur a été modifié depuis cette date et singulièrement entre 2010 et 2015 par voie d'avenant " qui relève de l'appréciation juridique et auquel la cour a d'ailleurs répondu ci-dessus,
- est ajoutée à la mission de l'expert, celle de tenter de concilier les parties.
En outre, il ne peut être fait droit en l'état aux demandes de M. X tendant à se voir payer les commissions sur les ventes réalisées avec les sociétés E3S et SDA Energy et la somme de 6 131,56 euros à titre de rappel de commission supplémentaire pour l'année 2010 qui sont incluses dans la mission de l'expert.
Sur les demandes de Commend France :
Commend France demande la révision à son quart du taux de commission prévu à l'article 3 du contrat, ce, à compter du 5 juillet 2011, à défaut, du 13 juillet 2012 et à défaut du 13 novembre 2013, ainsi que la somme de 30 000 euros à titre de dommages intérêts en réparation de son préjudice d'image, faisant valoir que M. X n'effectuait qu'une infime partie de son travail d'agent commercial, maîtrisant mal la technicité des produits et ne chiffrant pas le prix de ses offres, ce qui a porté atteinte à son image en particulier auprès de clients mécontents.
Or, compte tenu de l'expertise ordonnée et notamment de la mission de conciliation de l'expert, le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a réservé ces demandes.
Ce jugement est également confirmé en ce qu'il a réservé les dépens et les demandes des parties relatives à leurs frais irrépétibles.
Les dépens d'appel seront mis à la charge de Commend France qui, par équité, devra payer la somme de 3 000 euros à M. X sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.
Par ces motifs : Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort, Confirme le jugement entrepris, sauf concernant la mission de l'expert ; Statuant de nouveau sur le point réformé, Modifie la mission de l'expert comme suit : - retranche de la mission de l'expert le fait de "détailler le domaine d'exclusivité de M. X. au titre de l'article 1 du contrat d'agent commercial en date du 15 mai 2000" et de "vérifier si ce secteur a été modifié depuis cette date et singulièrement entre 2010 et 2015 par voie d'avenant", - ajoute à la mission de l'expert, celle de tenter de concilier les parties ; Ajoutant au jugement déféré, DÉBOUTE la société Commend France de sa demande de nullité du procès-verbal d'huissier du 8 décembre 2015 ; Condamne la société Commend France à payer à M. X la somme de 3.000 euros, en application de l'article 700 du Code de procédure civile ; Rejette le surplus des demandes ; Condamne la société Commend France aux dépens d'appel dont distraction au profit de Me K., avocat, en application de l'article 699 du Code de procédure civile.