LA COUR : - Joint les pourvois nos 15-23.345, 16-17.827 et 16-13.339, qui attaquent le même arrêt ; - Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 8 juin 2015), que les négociateurs pour compte propre (les NCP) exerçaient, en exécution d'une convention signée avec l'entreprise de marché, la société MONEP, aux droits de laquelle vient la société Euronext Paris, une activité de négociation sur le marché des contrats à terme sur des indices en utilisant le système NSC-VO jusqu'au 12 mars 1999 puis le système NSC Version futures (le système NSC-VF) ; que le 14 avril 2003, la société Euronext Paris a remplacé le système NCF-VF par le système " LIFFE Connect ", plate-forme de négociation électronique pour toute la gamme de contrats à terme et d'options ; qu'estimant que la société Euronext Paris avait manqué à ses obligations, cinquante-quatre NCP ont assigné la société Euronext en paiement de dommages-intérêts ;
Sur la déchéance partielle du pourvoi n° 15-23.345 : - Attendu que les sociétés AB futures, 7 Actifs, anciennement Surf finance, Alaguillaume avenir, BSN 721, BTM futures, By arbitrage, BG futures, représentée par son liquidateur judiciaire M. Delaere, Edinvest, représentée par son liquidateur M. Guillemot, Eurofinance associés, Finance création, Gomax futures, Johnjohn finance, Navello finance Matif, RCP futures, Ricdan finance, TNM finances et Veka finance et M. Vincent n'ont ni remis au greffe de la Cour de cassation, ni signifié au défendeur un mémoire contenant les moyens de droit invoqués contre la décision attaquée dans le délai fixé à l'article 978 du Code de procédure civile ;
Qu'il s'ensuit que la déchéance du pourvoi est encourue à leur égard ;
Sur les deuxièmes moyens des pourvois, pris en leurs première, deuxième, troisième et quatrième branches, rédigés en termes identiques, réunis : - Attendu que les demandeurs aux pourvois font grief à l'arrêt de rejeter leurs demandes alors, selon le moyen : 1°) que, dans les contrats synallagmatiques, la cause de l'obligation de chacune des parties est l'engagement pris par son cocontractant ; qu'il résulte des constatations de la cour d'appel que l'engagement pris par la société Euronext consistait à permettre aux NCP d'exercer leur activité, grâce à des services informatiques nommément désignés, et moyennant un tarif précisé en annexe ; qu'en réduisant la cause de la convention pour les NCP à l'accès à la plate-forme de négociation, sans prendre en compte les moyens techniques pour ce faire et le tarif préférentiel correspondant, la cour d'appel a violé l'article 1131 du Code civil ; 2°) que, dans les contrats à exécution successive, le fait qu'une partie n'exécute plus ses obligations fait disparaître la cause de la convention ; que la cour d'appel a constaté que le nouveau système mis en place par la société Euronext pour accéder au marché avait bouleversé les conditions d'exercice des NCP, sinon supprimé leur raison d'être ; qu'il s'en déduit que la société Euronext n'exécutait plus la prestation promise aux NCP ; qu'en estimant néanmoins que la cause de l'engagement n'avait pas disparu, pour la raison inopérante que la connexion au marché restait possible, la cour d'appel a violé l'article 1131 du Code civil ; 3°) qu'engage la responsabilité de son auteur le fait de rompre brutalement, même partiellement, une relation commerciale établie, sans préavis écrit tenant compte de la durée de cette relation ou des usages ; que les modifications apportées au système de négociation ont bouleversé les conditions d'exercice des NCP, sinon supprimé leur raison d'être et ont donc constitué la rupture d'une relation commerciale établie, puisque les NCP ne pouvaient plus continuer leur activité, même si leur accès au marché était préservé ; qu'en se bornant à constater qu'à plusieurs reprises la société Euronext avait annoncé le changement de système, sans pour autant constater qu'elle avait prévenu les NCP des conséquences de ce changement qui en pratique mettait fin à leur activité, et leur avait laissé un préavis pour se préparer, la cour d'appel a violé l'article L. 442-6 5° I du Code de commerce ; 4°) que les juges du fond doivent se prononcer sur toutes les pièces régulièrement versées aux débats ; que les demandeurs produisaient une lettre de la société Euronext du 18 juin 2002, annonçant aux NCP la suppression de la commission d'activité minimum (MAC), et ce, pour favoriser l'activité de ceux qui débutent dans cette fonction et l'arrivée de nouveaux entrants, et en déduisaient avoir été trompés par la société Euronext, qui, en totale contradiction avec cette information publique laissant croire à la pérennité de leur fonction, fermait quelques semaines plus tard et sans annonce l'accès au statut de NCP aux nouveaux entrants ; qu'en ne se prononçant pas sur cette lettre susceptible de montrer que la société Euronext avait manqué à la bonne foi contractuelle, la cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;
Mais attendu, en premier lieu, qu'il ne résulte ni de l'arrêt ni des écritures des parties que les NCP aient fait valoir devant la cour d'appel que les moyens techniques pour accéder à la plate-forme et le tarif préférentiel correspondant étaient des éléments constitutifs de la cause de l'obligation ; que les griefs des première et deuxième branches sont donc nouveaux et mélangés de fait et de droit ;
Attendu, en second lieu, que la cour d'appel ayant, par des motifs non critiqués, retenu qu'aucune résiliation ou interruption de la relation contractuelle n'était intervenue à l'initiative de la société Euronext et qu'il n'y avait pas eu rupture des relations commerciales établies, le grief de la troisième branche, en ce qu'il lui reproche un défaut de recherche quant au préavis qui aurait dû être accordé aux NCP, est inopérant ;
Et attendu, en troisième lieu, que la cour d'appel n'était pas tenue de s'expliquer sur les éléments qu'elle décidait d'écarter ; d'où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;
Et sur les troisièmes moyens des pourvois, rédigés en termes identiques, réunis : - Attendu que les demandeurs aux pourvois font grief à l'arrêt de rejeter leurs demandes alors, selon le moyen : 1°) que l'article 6.1.7 du contrat liant la société Euronext aux NCP stipule : " dans l'éventualité où la responsabilité de Monep SA serait retenue, les parties conviennent expressément que, toutes sommes confondues, l'indemnité de réparation sera limitée à deux fois le montant annuel de la commission minimale d'activité acquittée par le membre du marché, dans le cadre de la présente convention, au titre de l'année en cours " ; qu'en estimant cette stipulation licite car elle permettait de calculer une indemnité fondée sur la commission que le NCP aurait payée s'il n'avait pas accompli un minimum de transactions, quand la clause ne visait que l'indemnité acquittée, la cour d'appel l'a dénaturée, en violation de l'article 1134 du Code civil ; 2°) qu'est réputée non écrite la clause limitative de réparation qui contredit la portée de l'obligation essentielle souscrite par le débiteur ; qu'en ne recherchant pas, comme elle y était invitée, s'il n'était pas exact qu'aucun NCP n'avait jamais payé la commission minimum d'activité, et si celle-ci n'avait pas été supprimée en 2002, de sorte que la clause limitative de responsabilité permettait à la société Euronext de ne jamais payer la moindre indemnité, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du Code civil ;
Mais attendu que la cour d'appel n'ayant retenu aucune faute imputable à la société Euronext Paris, les motifs de l'arrêt relatifs à la clause limitative de responsabilité sont surabondants ; que le moyen est inopérant ;
Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur les premiers moyens ni sur les deuxièmes moyens des pourvois, pris en leurs cinquième branche, qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Par ces motifs : constate la déchéance du pourvoi n° 15-23.345, en tant que formé par les sociétés AB futures, 7 Actifs, anciennement Surf finance, Alaguillaume avenir, BSN 721, BTM futures, By arbitrage, BG futures, représentée par son liquidateur judiciaire M. Delaere, Edinvest, représentée par son liquidateur M. Guillemot, Eurofinance associés, Finance création, Gomax futures, Johnjohn finance, Navello finance Matif, RCP futures, Ricdan finance, TNM finances et Veka finance et M. Vincent ; rejette le pourvoi n° 15-23.345, en tant que formé par les sociétés Nan finances et futurs, Hiram futures, Brennus finance, Common Futures, EVN 729, JPLC finances, Lionel Drouot finance, Roger's Finance, Valériane Invest, Common Finances and Business, Direction future, GSI Trading, Providence finance, SGC finances et SSP finances, et les pourvois n° 16-17.827 et 16-13.339.