Cass. crim., 18 juillet 2017, n° 15-86.153
COUR DE CASSATION
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Seurin
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Guérin
Rapporteur :
Mme Pichon
Avocat général :
M. Mondon
Avocats :
SCP Garreau, Bauer-Violas, Feschotte-Desbois, SCP Foussard, Froger
LA COUR : - Statuant sur le pourvoi formé par Mme X, contre l'arrêt de la Cour d'appel de Bordeaux, chambre correctionnelle, en date du 15 septembre 2015, qui, pour infractions à la législation sur les contributions indirectes, l'a condamnée à des amendes et pénalités fiscales et au paiement des droits fraudés ; - Vu les mémoires produits en demande, en défense et les observations complémentaires produits ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que, le 22 septembre 2009, la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) s'est rendue dans une salle appartenant à la société civile immobilière (SCI) Promotion animation gérée par Mme X où se déroulait une loterie et, à l'issue de ses investigations, considérant que celle-ci se livrait depuis plusieurs années à une activité professionnelle d'organisation de lotos sous couvert associatif en violation des dispositions de la loi du 21 mai 1836 portant prohibition des loteries, dorénavant transposées dans le Code de la sécurité intérieure, a rédigé, le 1er février 2010, un procès-verbal ; que, dans l'exercice de son droit de communication et sur la base des éléments transmis par la DGCCRF et le procureur de la République compétent, la direction générale des douanes et droits indirects a établi, le 4 octobre 2010, à l'encontre de Mme X, un procès-verbal de notification d'infractions fiscales à la législation sur les maisons de jeux commises sur la période du 25 septembre 2006 au 24 septembre 2009 pour un montant d'impôt fraudé de 1 166 635 euros ; que, par jugement du 25 mars 2014, le Tribunal correctionnel de Libourne, saisi sur convocation par officier de police judiciaire agissant sur instructions du ministère public des chefs d'organisation de loterie prohibée et ouverture sans déclaration d'une maison de jeux de hasard ainsi que d'une citation par l'administration des douanes du chef d'ouverture sans déclaration d'une maison de jeux de hasard, a joint les procédures, rejeté les exceptions de nullité soulevées en défense, constaté la prescription de l'action publique, relaxé Mme X des infractions pénales reprochées, déclaré celle-ci coupable du seul délit fiscal avant de la condamner au paiement de 500 euros d'amende, des sommes fraudées et d'une pénalité proportionnelle de 388 878 euros ; que Mme X a interjeté appel ;
En cet état : - Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'Homme, L. 450-1, L. 450-2, L. 450-3, L. 450-4 du Code de commerce, préliminaire, 802, 591 et 593 du Code de procédure pénale, ensemble les principes des droits de la défense et de loyauté dans la recherche des preuves, violation de la loi ;
"en ce que l'arrêt confirmatif attaqué a rejeté l'ensemble des exceptions de nullité soulevées par Mme X ;
"aux motifs propres que sur les nullités de procédure : c'est à bon droit et par des motifs que la cour fait siens que les premiers juges ont rappelé que la DGCCRF n'avait pas à solliciter l'autorisation préalable du juge des libertés et de la détention en sorte qu'aucune nullité n'entache son procès-verbal pas plus que le procès-verbal de notification d'infraction du 4 octobre 2010 ; que ni l'article 6 ni l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'Homme n'ont été violés dès lors que l'administration n'a fait aucun obstacle aux droits de la défense et que la procédure ne concerne qu'une enquête dite légère ainsi que le rappelle le tribunal, et aux motifs adoptés que sur les nullités de la procédure, la DGCCRF est intervenue à compter du mois de septembre 2009 dans le cadre des dispositions des articles L. 450-1, 2, 3 et 8 du Code de commerce ; qu'elle est donc intervenue dans le cadre de l'enquête dite légère : que l'article 450-3 reconnaît aux enquêteurs le droit de procéder eux-mêmes et sans autorisation judiciaire à certaines opérations de contrôle non coercitives ; que Mme X fait valoir que le procès-verbal du 1er février 2010 de la DGCCRF est nul sur le fondement de l'article 38 du Livre des procédures fiscales qui prévoit l'autorisation du juge des libertés et de la détention au motif que la "descente sur les lieux" de la DGCCRF aurait dû être autorisée préalablement ; mais que l'article 450-4 effectivement applicable aux agents de la DGCCRF concerne uniquement les enquêtes dites lourdes et les opérations notamment de visites domiciliaires, perquisitions et saisie ; qu'or en l'espèce, la DGCCRF n'est pas intervenue dans le cadre des dispositions de l'article 450-4 mais 3 et que le 22 septembre 2009 elle n'a fait qu'accéder au local où se déroulait le loto et recueillir des renseignements auprès de Mme X, M. Y et les participants ; qu'elle a par ailleurs informé Mme X et M. Jerome de l'objet de l'enquête et qu'elle n'avait aucune obligation d'informer les joueurs présents de cet objet dès lors qu'il ne s'agissait pas des personnes concernées par l'enquête ; qu'elle a par ailleurs entendu les dirigeants d'associations, contrairement à ce que Mme X, fait valoir après avoir indiqué l'objet de l'enquête comme en font foi les procès-verbaux établis, qu'elle n'a pas procédé à l'audition de Mme X le 22 septembre 2009, à qui elle a proposé un rendez-vous deux jours plus tard, le 24, et n'a procédé à aucune saisie de documents, se contenant de demander à Mme X de lui apporter copie de divers documents professionnels pour ce rendez-vous ; que Mme X s'est rendue à ce rendez-vous accompagnée non pas d'un avocat, ce qu'il était dans ses possibilités de faire, mais de M. Jerome et a apporté les documents qu'elle a voulu ; qu'aucune obligation légale n'imposait à la DGCCRF de notifier à Mme X son droit d'être assistée d'un avocat ni dans le cadre de cette visite ni dans le cadre de son audition et pas plus, la direction générale des douanes et droits indirects n'avait l'obligation de le faire ; qu'il en ressort que les conditions dans lesquelles les investigations ont été menées par les enquêteurs établissant que ce sont bien les pouvoirs tirés de l'article 450-3 qui ont été mis en œuvre et en conséquence, la DGCCRF n'avait pas à solliciter l'autorisation préalable du juge des libertés et de la détention et aucune nullité n'entache son procès-verbal et pas plus le procès-verbal de notification d'infractions du 4 octobre 2010 ;
"1°) alors que dans le cadre des pouvoirs attribués par l'article L. 450-3 du Code de commerce, les enquêteurs, autorisés à recueillir des renseignements, peuvent entendre toute personne membre de l'entreprise objet de l'enquête mais en aucune façon les tiers à l'entreprise présents dans les locaux de celle-ci ; qu'à supposer même que les pouvoirs coercitifs attribués aux enquêteurs par l'article L. 450-4 du Code de commerce puissent permettre à ceux-ci d'entendre des tiers à l'entreprise, l'exercice de ce pouvoir requerrait l'autorisation préalable du juge des libertés et de la détention en application de la procédure prévue par cet article ; que le droit à un procès équitable exclut que les déclarations recueillies illégalement par des enquêteurs de la DGCCRF, en méconnaissance des limites de leurs pouvoirs d'investigation, puissent fonder la déclaration de culpabilité d'un prévenu ; qu'en constatant que les agents de la DGGCRF avaient entendu 93 joueurs participant au loto du 22 septembre 2009 dans le cadre de l'enquête prévue par l'article L. 450-3 du Code de commerce, lorsque, comme l'a fait valoir l'exposante au soutien de son moyen de nullité, ce dernier texte n'habilite pas les enquêteurs à entendre un tiers à l'entreprise, que l'article L. 450-4, à supposer qu'il autorisât les enquêteurs à procéder à l'audition de tiers, requérait pour sa mise en œuvre l'autorisation du juge des libertés et de la détention et enfin, que les réponses aux questions posées aux joueurs relatives à la régularité de leur participation aux jeux, au montant de leurs mises régulières moyennes et à leur connaissance du nom de l'association organisatrice du loto ont permis aux enquêteurs de recueillir des éléments de preuve essentiels en lien direct avec les infractions d'organisation de loterie prohibée et d'ouverture d'une maison de jeux de hasard sans déclaration ayant d'ailleurs fondé la déclaration de culpabilité de l'exposante, la cour d'appel a violé les articles L. 450-3, L. 450-4 du Code de commerce et 6 de la Convention européenne des droits de l'Homme ;
"2°) alors qu'en vertu du principe de loyauté dans la recherche des preuves, toute personne entendue par les agents dans le cadre de l'article L. 450-3 du Code de commerce doit être informée de l'objet de l'enquête, cette information devant être mentionnée expressément au procès-verbal ; que la demanderesse a fait valoir devant la cour d'appel qu'à supposer que les enquêteurs aient pu procéder à l'audition des joueurs dans le cadre de l'article L. 450-3 du Code de commerce, il ne ressortait d'aucune mention du procès-verbal de la DGCCRF que ces personnes entendues aient été préalablement informées de l'objet de l'enquête ; qu'en affirmant que la DGCCRF n'avait aucune obligation d'informer les joueurs de l'objet de l'enquête lorsqu'il ressort des constatations du procès-verbal de la DGCCRF que les joueurs ont été interrogés sur la régularité de leur participation aux jeux, leurs mises régulières moyennes et leur connaissance du nom de l'association organisatrice du loto, éléments fondamentaux de nature à déterminer l'existence ou non de lotos traditionnels autorisés par l'article 6 de la loi de 1836 et que l'absence d'information de ceux-ci sur l'objet de l'enquête a méconnu le principe de loyauté dans la recherche de la preuve, la cour d'appel a violé les principes et textes susvisés ;
"3°) alors que la contradiction de motifs équivaut à un défaut de motifs ; qu'en considérant, pour rejeter l'exception de nullité tirée de la méconnaissance du principe de loyauté dans la recherche de la preuve, d'une part, que les joueurs n'avaient pas à être informés de l'objet de l'enquête, aux motifs qu'il ne s'agissait pas des personnes concernées par celle-ci, ce dont il se déduit que pour les juges du fond la seule personne concernée par l'enquête était Mme X, tout en faisant siens, d'autre part, les motifs des premiers juges aux termes desquels les dirigeants d'associations avaient été entendus après s'être vu indiquer l'objet de l'enquête cependant que ces dirigeants d'associations n'étaient pas plus que les joueurs la personne concernée par l'enquête, la cour d'appel qui a statué par motifs contradictoires pour rejeter l'exception de nullité soulevée, n'a pas justifié légalement sa décision ;
"4°) alors que le droit à l'assistance d'un avocat doit être respecté dès le stade de l'enquête préalable prévue par l'article L. 450-3 du Code de commerce; dans la mesure où les droits de la défense sont susceptibles d'être irrémédiablement compromis dans le cadre de cette procédure d'enquête dont les vérifications peuvent avoir un caractère déterminant pour l'établissement de preuves d'une infraction pénale ; qu'en retenant, pour rejeter le moyen de nullité de l'exposante tiré de ce qu'elle n'a pas été avisée et a été privée du droit de faire appel au conseil de son choix lors de l'enquête de la DGCCRF, qu'aucune obligation légale n'imposait à la DGCCRF de notifier à l'exposante son droit d'être assistée d'un avocat dans le cadre de cette visite ni dans le cadre de son audition et pas plus, la direction générale des douanes et droits indirects n'avait l'obligation de le faire, la cour d'appel a méconnu le principe des droits de la défense et les textes susvisés" ;
Sur le moyen pris, en sa première branche ; - Attendu qu'il ne résulte ni du jugement ni des conclusions déposées que la demanderesse, qui a comparu devant le tribunal correctionnel, ait soulevé devant cette juridiction, avant toute défense au fond, l'exception de nullité de la procédure d'enquête suivie par la DGCCRF fondée sur la réalisation d'auditions, par ses agents, des joueurs, tiers à l'entreprise, en violation des dispositions de l'article L. 450-3 du Code de commerce ; que le grief est irrecevable par application de l'article 385 du Code de procédure pénale ;
Sur le moyen pris, en ses autres branches ; - Attendu que, pour confirmer le rejet des exceptions de nullité soulevées par la demanderesse et prises d'irrégularités de la procédure d'enquête suivie par la DGCCRF dans le cadre des articles 7-1 de la loi du 21 mai 1836 portant prohibition des loteries, alors applicable, et L. 450-3 du Code de commerce, prises, d'une part, de l'absence d'information des joueurs auditionnés sur l'objet de l'enquête, d'autre part, de l'absence de notification à Mme X de son droit à être assistée d'un avocat, la cour d'appel prononce par les motifs propres et adoptés repris au moyen ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, dont il résulte que les agents de l'administration, qui ont informé les personnes visées par l'enquête de l'objet de celle-ci, n'ont employé aucun procédé déloyal pouvant compromettre les droits de la défense, et dès lors qu'aucun texte ne prévoit que les intéressés, qui peuvent être effectivement assistés d'un avocat, soient avisés de ce droit, la cour d'appel a, sans contradiction, justifié sa décision ; d'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 6, 7 de la Convention européenne des droits de l'Homme, 1er du Protocole additionnel n° 1 à la Convention européenne des droits de l'Homme, 111-3, 121-3 du Code pénal, 1, 2, 3 et 6 de la loi du 21 mai 1836, 1559 à 1565, 1791, 1797, 1800, 1804 B du Code général des impôts, 124, 126, 146 à 154 de l'annexe IV du Code général des impôts, préliminaire, 591 et 593 du Code de procédure pénale, ensemble le principe de nécessité des peines ;
"en ce que l'arrêt confirmatif attaqué a déclaré la demanderesse coupable d'ouverture d'un établissement de spectacle, jeux ou divertissements sans déclaration préalable, l'a condamnée au paiement d'une amende de 500 euros, a ordonné à son encontre le paiement de la somme de 1 166 635 euros au titre des sommes fraudées ainsi que le paiement de la somme de 388 878 euros au titre de la pénalité proportionnelle ;
"aux motifs propres que sur le fond : c'est à bon droit par des motifs que la cour fait siens que le tribunal pour asseoir sa condamnation s'est appuyé sur des constatations des agents de la DGCCRF faite par procès-verbal faisant foi jusqu'à preuve contraire et que les agents des douanes ont pris en considération pour dresser leur propre procès-verbal ; qu'il sera seulement rappelé que sur la période de prévention Mme X a organisé 450 lotos pour le compte de différentes associations et ce à raison de trois lotos pat semaine ; que les lotos étaient organisés dans un local appartenant à une société civile immobilière dont Mme X est la gérante et que loin de se borner à fournir la salle, la prévenue a préparé tous les lotos, l'achat des lots et la prise en charge du jeu ; que les séances de lotos ainsi organisées ont touché une clientèle allant bien au-delà du cercle restreint d'une association ; qu'il s'ensuit que Mme X a bien contrevenu à la loi portant prohibition des loteries pour la période allant du 25 septembre 2006 au 24 septembre 2009 et qu'elle a ainsi fait sciemment fonctionner une maison de jeu illégale car non déclarée ; que la pérennité de l'organisation de lotos établit que la prévenue a agi de manière intentionnelle ; qu'en conséquence la cour confirme la décision sur la culpabilité et sur le montant de l'amende qui a été justement appréciée par les premiers juges ; que sur le montant de l'impôt fraudé : c'est à bon droit par des motifs que la cour fait siens que le tribunal a détermine le montant de l'impôt fraudé et de la pénalité proportionnelle ; que la cour confirme donc également sur ce point le jugement ;
"et aux motifs adoptés que sur le fond, la loi du 21 mai 1836 portant prohibition des loteries dispose que les loteries de toute espèce sont prohibées et que sont réputées loteries prohibées les ventes de meubles ou de marchandises effectuées par la voie du sort, ou auxquelles auraient été réunies des primes ou autres bénéfices dus, même partiellement au hasard et généralement toutes opérations offertes au publie, sous quelque dénomination que ce soit, pour faire naître l'espérance d'un gain qui serait acquis par la voie du sort ; que l'article 6 dispose cependant que les articles 1 et 2 de la loi ne sont pas applicables aux lotos traditionnels organisés dans un cercle restreint et uniquement dans un but social, culturel, scientifique, éducatif, sportif ou d'animation sociale et se caractérisant par des mises de faible valeur, inférieures à 20 euros, les lots ne peuvent en aucun cas consister en sommes d'argent ni être remboursés ; qu'ils peuvent néanmoins consister dans la remise de bons d'achat non remboursables ; et qu'il résulte du procès-verbal établi le 1er février 2010 par la DGCCRF que Mme X s'est livrée depuis 1996 à une véritable activité professionnelle régulière d'organisation de loteries sous couvert associatif, dans un but uniquement lucratif ; qu'en effet, en échange d'une somme d'argent quasi forfaitaire (entre 402 et 553 euros), censée représenter le bénéfice de 3 jours de lotos, Mme X rentabilise sa propre salle acquise par l'intermédiaire d'une SCI, et détourne à son profit, faute de contrôle possible, la majeure partie des sommes dépensées en espèces par les joueurs, qui en outre misent tous plus de 20 euros (23 euros au jour du contrôle) ; que l'analyse des documents comptables a ainsi établi que l'organisation des lotos a généré à son profit des bénéfices sans rapport avec les gains reversés aux associations ; que la notion de cercle restreint et de but social, culturel, scientifique, éducatif, sportif ou d'animation sociale, est incompatible en l'espèce avec la capacité d'accueil importante de la salle de Mme X (388 personnes), salle exclusivement réservée à cet usage, dont l'entrée est libre ainsi qu'avec le caractère répété et la fréquence des lotos (trois fois par semaine et cinquante semaines par an), qu'il ressort par ailleurs de ce procès-verbal, contrairement à ce que plaide son conseil, que Mme X n'a pas été déléguée par les associations dans de simples tâches matérielles mais qu'au contraire, elle assume seule la direction complète des lotos sans même en tenir informées les associations pour le compte desquelles elle est censée organiser le loto ; que contrairement à ce qu'elle soutient encore, ce ne sont pas les associations qui organisent les publicités mais Mme X elle-même, du moins au début, dès lors que sa " renommée " est devenue très vite telle qu'elle n'a plus eu besoin de recourir à la publicité ; qu'au demeurant, M. Jerome a reconnu devant les gendarmes que le couple ne faisait pas de publicité car il savait parfaitement que " c'est interdit pour les lotos répétitifs " ; qu'encore, ce ne sont pas les associations qui convient leurs membres aux lotos et d'ailleurs, le 22 septembre 2009, la DGCCRF a parfaitement constaté 1°) que M. Jerome n'a même pas annoncé le nom de l'association pour laquelle les joueurs étaient censés jouer, 2°) que les participants au loto n'étaient pas des membres de l'association mais des joueurs réguliers qui ne savaient même pas pour quelle association le loto était organisé or la notion de cercle restreint vise nécessairement un public susceptible d'être intéressé par une manifestation organisée par une association donnée, à savoir ses adhérents, sympathisants ou proches ; qu'à cet égard d'ailleurs Mme X n'a pas caché aux gendarmes que selon elle " les gens se foutent de savoir pour quelle association le loto a lieu ", ce qui est révélateur de son état d'esprit et du but uniquement lucratif de son activité ; que la participation des associations se limitait donc à donner à Mme X leur souhait quant au nombre de lotos à organiser dans l'année et Mme X planifiait elle-même les lotos et prenait la maîtrise totale de ces opérations sur lesquelles les associations n'avaient plus aucun regard jusqu'à la remise du " bénéfice " le dimanche du dernier loto ; que d'autre part, contrairement à ce que soutient Mme X, ce ne sont pas les associations qui " donnent les budgets et fixent les lots " mais Mme X au contraire qui " préfixe " le bénéfice qu'elle versera aux associations et qui reste le même quel que soit le loto organisé ; qu'enfin, Mme X achète elle- même les lots et les associations ne sont pas en mesure de contrôler ces achats pas plus d'ailleurs que les recettes des lotos ; qu'enfin, si un contrat est bien signé avec les associations, il ressort des auditions des dirigeants des associations que ces contrats sont signés rétroactivement, après que les lotos soient terminés ; qu'il en résulte que Mme X a bien contrevenu à la loi portant prohibition des loteries sur la période du 25 septembre 2006 au 24 septembre 2009 et qu'elle a ainsi fait sciemment fonctionner une maison de jeux illégale car non déclarée ; que dans ces conditions, Mme X doit être déclarée coupable, statuant sur l'action douanière, de défaut de déclaration d'ouverture de maison de jeux pour cette même période dès lors que Mme X n'a pas déclaré d'ouverture de maison de jeux, n'a pas tenu la comptabilité spéciale prévue par la réglementation et n'a pas effectué de déclaration de recettes ni payé l'impôts sur les spectacles ; qu'elle a ainsi agi dans une seule logique de profit afin de rentabiliser sa salle et d'obtenir des revenus personnels et qu'elle ne peut sérieusement soutenir qu'elle ne connaissait pas la législation applicable dès lors qu'il lui appartenait de se renseigner sur la législation applicable en matière de loteries et de maisons de jeux ; que par ailleurs que le simple fait qu'il existerait dans le département ou en France d'autres personnes qui se livrent à la même activité que Mme X n'implique pas ipso facto que cette activité soit d'une part régulière d'autre part tolérée par l'administration des douanes ; qu'il convient dans ces conditions de condamner Mme X, dont le casier judiciaire ne porte mention d'aucune condamnation, à une amende de 500 euros en réparation du délit douanier ; que sur le montant de l'impôt fraudé, en page 4 de son procès-verbal, la DGCCRF indique qu'elle a établi le tableau qui suit en page 5 sur la base "des documents remis par Mme X en cotes 10-1 à 35" ; qu'ainsi et pour exemple, Mme X a remis aux enquêteurs une pièce manuscrite concernant le loto des 30 décembre 2008, 2 et 4 janvier 2009 sur laquelle elle a indiqué les recettes de vente des carnets (4817 euros), le montant total des achats facturés (3217 euros 46), le montant de la location de la salle (1 148 euros 67) et la somme versée à l'association (450 euros 87) ; qu'elle n'a jamais contesté que ces documents 10-1 à 35 avaient bien été établis par elle et étaient conformes à la réalité des lotos ; que la DGCCRF a donc repris les recettes déclarées par Mme X du 30 décembre 2008 au 20 septembre 2009 qui sont à peu près équivalentes pour chaque loto, entre 3 375 euros pour la plus basse (recette du 9 et 11/01/2009) et 5 296 pour la plus haute (recette des (4, 7 et 9 août 2009), puis en a fait une moyenne pour parvenir à une recette moyenne de 4 632 euros qui est donc la recette brute par loto ; que l'article 1563 du Code général des impôts stipule que l'impôt sur les spectacles est calculé sur les recettes brutes ; que Mme X ne produit aucun document propre à combattre ce calcul de la recette brute par loto qui sert de base au calcul des recettes, et par là à celui de l'impôt sur le spectacle, alors que ce calcul est fondée sur ses propres documents ; que la direction générale des douanes et droits indirects a donc établi un calcul année par année en retenant comme base 450 lotos pour la période du 25 septembre 2006 au 24 septembre 2009, et sur le fondement de l'article 1560 du Code général des impôts, pour parvenir à un impôt fraudé de 1 166 635 euros ; qu'elle demande donc, conformément aux textes, la condamnation de Mme X au paiement d'une pénalité proportionnelle de 1 166 635 euros à 3 499 905 euros et le paiement des droits fraudés de 1166 635 euros ; mais qu'en application de l'article 1800 du Code général des impôts, le Tribunal peut modérer le montant des amendes et pénalités jusqu'au tiers de la somme servant de base au calcul de la pénalité proportionnelle ; que Mme X n'ayant jamais été condamnée et ayant mis un terme à son activité, elle sera condamnée au versement d'une pénalité proportionnelle de 388 878 euros ; qu'en revanche, elle doit nécessairement être condamnée au paiement des sommes fraudées en application de l'article 1804 B du même Code soit la somme de 1 166 635 euros ;
"1°) alors que la présomption d'innocence impose à l'accusation de rapporter la preuve des éléments constitutifs de l'infraction ; que l'infraction fiscale d'ouverture sans déclaration d'une maison de jeux de hasard suppose préalablement que soit établie l'organisation régulière de loteries prohibées ne satisfaisant pas aux conditions posées par l'article 6 de la loi de 1836 ; que les poursuites de ce chef ne peuvent être fondées sur les constatations relatives à une seule loterie ; qu'en retenant, pour déclarer l'exposante coupable des faits reprochés entre le 25 septembre 2006 et le 24 septembre 2009, qu'elle aurait détourné une grande partie des bénéfices des lotos qui auraient été sans rapport avec les gains reversés aux associations, en se fondant sur les seules constatations de la recette réalisée le 22 septembre 2009 pour un unique loto et en comparant la recette théorique de trois lotos par semaine reconstituée à partir de la recette d'un loto avec le montant des recettes remises aux associations dûment justifié par l'exposante en comptabilité, la cour d'appel, qui aurait dû retenir comme insuffisante à établir la preuve de l'infraction les extrapolations de l'administration, a violé la présomption d'innocence et les textes susvisés,
"2°) alors que l'article 6 de la loi du 21 mai 1836 autorise, par dérogation au principe de prohibition des loteries affirmé aux articles 1er et 2 de la même loi, les lotos traditionnels, lorsqu'ils sont organisés dans un cercle restreint et uniquement dans un but social, culturel, scientifique, éducatif, sportif et d'animation sociale et se caractérisent par des mises de faible valeur inférieure à 20 euros ; que la loi ne précisant pas le cadre contractuel applicable à l'organisation de tels lotos, celle-ci s'établit librement dès lors que les critères de l'article 6 relatifs au cercle restreint, au but social ou culturel et à la faible valeur des mises sont réunis ; qu'il ressortait des rapports contractuels instaurés entre les associations et l'exposante, tels qu'établis par les contrats signés, les déclarations de l'exposante et celles de responsables d'associations, que les associations, organisatrices des lotos afin d'assurer leur financement, confiaient à l'exposante la réalisation de tâches matérielles, dont elles ne souhaitaient pas se charger elles-mêmes, liées à la location de la salle et du matériel, l'accès à la buvette, l'achat des lots et des cartons et l'assistance épisodique d'un crieur sans toutefois lui attribuer la mission de contrôler que le public présent était constitué des seuls membres, sympathisants ou proches de l'association organisatrice, que l'exposante exécutait ces tâches puis à l'issue du dernier loto de la semaine, après signature du contrat relatif aux lotos de la semaine, remettait le produit de la vente des tickets en chèques et en espèces au responsable de l'association en contrepartie du règlement de la location de la salle et des achats de lots dont elle produisait les justificatifs ; qu'en dénaturant ces accords contractuels et en tirant le rôle d'organisatrice régulière de lotos prohibés de l'exposante d'éléments tenant à une prétendue " préfixation " par l'exposante du bénéfice des associations, procédant d'extrapolations de l'administration à partir de la recette constatée pour un unique loto, et à l'absence de contrôle de l'activité par les responsables d'associations qui ont pourtant reconnu la production par l'exposante de justificatifs d'achats des lots, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision ;
"3°) alors que l'infraction d'ouverture d'un établissement de spectacle, jeux ou divertissements sans déclaration préalable est intentionnelle ; qu'en se bornant à retenir que Mme X ne pouvait sérieusement soutenir qu'elle ne connaissait pas la législation applicable, pour considérer que l'élément intentionnel de l'infraction poursuivie était caractérisé, sans rechercher si les modalités de l'accord contractuel existant entre chaque association et l'exposante n'avait pas pu faire croire à celle-ci qu'étaient autorisés les lotos organisés par les associations, dont seule la préparation matérielle était déléguée à Mme X, loueuse de la salle, contre paiement de la location de celle-ci et des frais de préparation, et auxquels participaient des joueurs, dont la qualité d'adhérents, sympathisants ou proches de l'association n'avait pas à être contrôlée par l'exposante en vertu de l'accord conclu entre elle et l'association et qui réalisaient des mises de faible valeur, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision ;
"4°) alors que l'infraction d'ouverture d'un établissement de spectacle, jeux ou divertissements sans déclaration préalable est intentionnelle ; qu'en retenant que " la pérennité de l'organisation de lotos établit que la prévenue a agi de manière intentionnelle " lorsque l'article 6 de la loi de 1836 n'exclut en aucune façon que les lotos traditionnels autorisés puissent être organisés de façon pérenne, la cour d'appel a ajouté une condition non prévue par la loi et a violé l'article 6 de la loi du 21 mai 1836, ensemble les articles 121-3 du Code pénal, 1559 à 1565, 1791, 1797, 1800, 1804 B du Code général des impôts, 124, 126, 146 à 154 de l'annexe IV du Code général des impôts ;
"5°) alors que la pénalité prévue à l'article 1791 du Code général des impôts, assimilable à une peine à raison de sa gravité, comme la condamnation aux impôts fraudés prévue par l'article 1804 B du même Code, qui peuvent être prononcées par les juges du fond, doivent être proportionnées à la situation financière de la personne condamnée et ne sauraient lui imposer une charge intolérable ; qu'en condamnant la demanderesse au paiement de la somme de 1 166 635 euros au titre des sommes fraudées ainsi que le paiement de la somme de 388 878 euros au titre de la pénalité proportionnelle, la cour d'appel, qui a imposé à l'exposante une charge intolérable, totalement disproportionnée par rapport à sa situation financière personnelle, a violé les articles 6, 7 de la Convention européenne des droits de l'Homme et 1er du Protocole additionnel n° 1 à la Convention" ;
Attendu que, pour confirmer la culpabilité de la prévenue du chef d'infractions à la législation sur les contributions indirectes relatives aux maisons de jeux, l'arrêt prononce par les motifs repris au moyen ; Attendu qu'en l'état de ces énonciations, qui établissent que la prévenue a exploité, sur la période du 25 septembre 2006 au 24 septembre 2009, une activité commerciale de jeux de hasard qui n'entrait pas dans la classe des lotos traditionnels mentionnés à l'article 6 de la loi du 21 mai 1836 désormais transposé à l'article L. 322-4 du Code de la sécurité intérieure et était, à ce titre, tenue de s'acquitter des obligations fiscales y afférentes, et dès lors qu'en matière de contributions indirectes, la violation, en connaissance de cause, a fortiori réitérée, d'une prescription légale ou réglementaire implique, de la part de son auteur, l'intention coupable, la cour d'appel a justifié sa décision sans porter atteinte à la présomption d'innocence ; d'où il suit que le moyen, irrecevable en sa cinquième branche comme nouveau et mélangé de fait, ne saurait être admis ;
Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'Homme, 1791, 1800 du Code général des impôts, 132-1 et 132-20 du Code pénal, 485, 512, 591 et 593 du Code de procédure pénale, insuffisance de motifs ;
"en ce que l'arrêt confirmatif attaqué a condamné Mme X au paiement d'une amende de 500 euros ;
"aux motifs propres que en conséquence la cour confirme la décision sur la culpabilité et sur le montant de l'amende qui a été justement apprécié par les premiers juges ;
"et aux motifs adoptes qu'il convient dans ces conditions de condamner Mme X, dont le casier judiciaire ne porte mention d'aucune condamnation, à une amende de 500 euros en réparation du délit douanier ;
"alors qu'en matière correctionnelle, le juge qui prononce une amende doit motiver sa décision au regard des circonstances de l'infraction, de la personnalité et de la situation personnelle de son auteur, en tenant compte des ressources et de ses charges ; qu'en condamnant Mme X à une amende 500 euros sans motiver sa décision au regard des circonstances de l'infraction, de la personnalité et de la situation personnelle de son auteur et sans tenir compte de ses ressources et de ses charges, la cour d'appel n'a pas justifié celle-ci" ;
Attendu que, pour confirmer la condamnation de Mme X à une amende fiscale de 500 euros, l'arrêt prononce par les motifs repris au moyen ;
Attendu qu'en statuant ainsi, et dès lors que le prononcé, par le juge correctionnel, de l'amende fiscale prévue à l'article 1791 du Code général des impôts en répression des infractions à la législation sur les contributions indirectes est soumis aux dispositions spécifiques de l'article 1800 du même Code et échappe par conséquent aux prescriptions des articles 132-1 et 132-20, alinéa 2, du Code pénal, la cour d'appel a justifié sa décision ; d'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
Rejette le pourvoi.