CA Paris, Pôle 5 ch. 5, 28 septembre 2017, n° 15-20299
PARIS
Arrêt
Infirmation partielle
PARTIES
Demandeur :
Préiso (SARL)
Défendeur :
JGN Distribution (SAS) , Netika (SARL)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Schaller
Conseillers :
Mmes du Besset, Castermans
Avocats :
Mes Le Rolle, Lacroix, Fourgoux, Lilti
Faits et procédure :
La société Netika a pour activité principale la conception et le développement de logiciels de biologie médicale.
Par contrat d'agent commercial du 7 novembre 2007, elle a confié à la société Nekita Distribution (devenue JGN Distribution, ci-après dénommée JGN), sa filiale créée à cette fin, le mandat exclusif de commercialisation de ses produits et de formation de ses clients.
Par contrat du 1er décembre 2008 dit " de prestations de formation informatique et de partenariat ", la société JGN a confié à la société Préiso la formation des utilisateurs de deux logiciels Netika dénommés Kalilab et Kalisil, ainsi que des prestations de formation, audit et conseil dans le domaine de la gestion de la qualité (FACQ) liées aux logiciels Netika. Pour sa part, la société JGN devait promouvoir les conseils en gestion de qualité de la société Préiso.
Selon son article 6, ce contrat était d'une durée d'un an, reconductible tacitement pour de nouvelles périodes d'un an, sauf dénonciation par l'une ou l'autre des parties par lettre recommandée avec avis de réception au moins trois mois avant l'arrivée du terme, délai de préavis augmenté d'un mois à compter de la troisième année d'exécution du contrat.
En outre, les articles 7 et 9.3 mettaient à la charge de la société Préiso des obligations de confidentialité (pendant la durée du contrat et 10 ans après sa cessation) et de non-concurrence (pendant un an après le terme du contrat).
Désireuses de se rapprocher, les sociétés JGN et Préiso ont créé, le 22 juillet 2011, la société E-So Concept, immatriculée à Castres, qui était destinée à devenir leur holding commune, projet qui sera abandonné courant 2012, la société étant dissoute et radiée en 2014.
Selon courriel du 5 janvier 2012, la société Netika a fait part à la société JGN de son insatisfaction quant à l'organisation actuelle de leur travail et du fait qu'elle pensait nécessaire que Netika ait " la maîtrise complète du processus (édition logiciel, distribution, formation et installation) ", invitant JGN à réfléchir en ce sens, après avoir émis plusieurs pistes de réflexion (comme le fait que Netika devienne actionnaire majoritaire de E-So, ou encore la rupture du contrat d'agent commercial. etc).
Par courrier recommandé AR en date du 14 novembre 2012, la société Netika a notifié à la société JGN la résiliation du contrat d'agent commercial pour faute grave, sans préavis ni indemnité, lui reprochant des manquements à ses obligations de loyauté, confidentialité et non-concurrence, en ayant notamment annulé la commande pour 415 269,14 euros d'un client au profit d'un éditeur de logiciels concurrent ; il était en outre fait injonction à JGN de s'abstenir immédiatement de toutes commercialisation des logiciels Netika et de toutes prestation annexe, notamment de formation.
Par courriel du 15 novembre 2012, la société JGN a informé la société Préiso et l'ensemble de ses partenaires de la suspension à titre conservatoire de ses activités, en raison de la rupture brutale et injustifiée par Netika du contrat d'agent commercial qui les liait depuis 2007.
Selon lettre recommandée avec avis de réception du 26 novembre 2012, la société JGN a notifié à la société Préiso la résiliation à ses torts exclusifs avec effet immédiat du contrat de prestation de formation informatique du 1er décembre 2008, au motif notamment qu'elle avait détourné sa clientèle avec le concert frauduleux de la société Netika en vue de l'évincer.
Le 24 janvier 2013, la société Préiso a obtenu du président du Tribunal de commerce de Castres une ordonnance portant injonction de payer diverses sommes au titre de factures impayées à l'encontre de la société JGN, qui a formé opposition à son encontre le 14 février 2013.
Le 7 avril 2014, le Tribunal de commerce de Castres s'est déclaré incompétent au profit de celui de Bordeaux, au visa de l'article 442-6-I-5° du Code de commerce sur lequel la société Préiso fondait une de ses demandes.
Par jugement du 24 avril 2015, assorti de l'exécution provisoire, le Tribunal de commerce de Bordeaux a :
condamné la société JGN Distribution à payer à la société Préiso la somme de 181 411,67 euros TTC ;
condamné la société Préiso à payer à la société JGN Distribution la somme de 63 047,14 euros TTC;
ordonné la compensation de ces deux sommes;
" dit qu'après compensation la société JGN Distribution devra payer la somme de 118 364,53 euros TTC avec intérêts de droit à compter du 22 novembre 2012 ";
" débouté la société Préiso de ses demandes à caractère indemnitaire ";
" débouté la société JGN Distribution de ses demandes à caractère indemnitaire ";
condamné la société JGN Distribution à payer à la société Préiso la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, outre les dépens.
Vu la déclaration d'appel du 15 octobre 2015 de la société Préiso ;
Vu l'assignation du 24 janvier 2017 par laquelle la société Préiso a appelé en la cause la société Netika ;
Vu les dernières conclusions signifiées le 31 mai 2017 par la société Préiso, par lesquelles il est demandé à la cour de :
A titre liminaire, sur la recevabilité de l'assignation en intervention forcée délivrée à la société Netika
Vu les articles 331 et 555 du Code de procédure civile,
Vu l'article 1382 du Code civil dans sa version applicable aux faits de l'espèce,
Vu le contrat d'agent commercial en date du 7 novembre 2007,
Vu le contrat de prestations de formation informatique et de partenariat en date du 1er décembre 2008,
- dire et juger que, conformément aux dispositions de l'article 555 du Code de procédure civile, l'évolution du litige justifie, en l'espèce, la mise en cause de la société Netika dans la procédure pendante devant la Cour de céans et enrôlée sous le numéro RG 15/20299;
- déclarer la société Préiso recevable et bien fondée en sa demande d'intervention forcée de la société Netika dans la procédure actuellement pendante devant la Cour d'appel de Paris et enrôlée sous le numéro RG 15/20299, entre la société Préiso et la société JGN Distribution suite à l'appel interjeté par la société Préiso contre le jugement du Tribunal de commerce de Bordeaux en date du 24 avril 2015;
S'agissant des factures impayées de la société Préiso:
Vu les articles 1134 et 1147 du Code civil,
- infirmer le jugement déféré en ce qu'il a limité le montant de la condamnation de la société JGN Distribution au titre des factures impayées de la société Préiso à la somme de 181 411,67 euros ;
Statuant à nouveau,
- condamner la société JGN Distribution à payer à la société Préiso la somme de 185 808,27 euros au titre de ses factures impayées, avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure que la concluante lui a adressée le 22 novembre 2012;
- ordonner la capitalisation des intérêts des sommes dues, dès lors qu'ils le sont depuis plus d'une année entière, par application de l'article 1154 du Code civil;
S'agissant de la facture n° 12-12-191 de la société JGN Distribution :
A titre principal,
Vu les articles 1315, 1134 et 1147 du Code civil,
- infirmer le jugement déféré en ce qu'il a condamne la société Préiso à payer à la société JGN Distribution la somme de 63 047,14 euros TTC;
- constater que la société JGN Distribution ne justifie pas le montant de la facture dont elle sollicite le paiement ;
Par conséquent,
- débouter la société JGN Distribution de sa demande en paiement de la facture n° 12-12-191 en date du 21 décembre 2012;
A titre subsidiaire,
Vu les articles 1134 et 1147 du Code civil,
Vu l'article 1315 du Code civil,
Vu l'article 1131 du Code civil,
- dire et juger nulle la clause prévue à l'article 4 pour défaut de cause au sens de l'article 1131 du Code civil si l'on devait retenir, comme l'a soutenu la société JGN Distribution, que la rémunération prévue à cet article est due, y compris pour des clients avec lesquels la société Préiso était en relation d'affaires avant que la société Nekita Distribution ne leur vende un logiciel Netika;
- constater que la société JGN Distribution ne rapporte pas la preuve pour chacun des clients visés dans sa facture n° 12-12-191 en date du 21 décembre 2012 qu'il s'agit de clients qui étaient les siens avant d'être ceux de la société Préiso;
- dire et juger qu'aucune rémunération ne peut être due pour les laboratoires G2Bio et Bio Est qui sont situés en dehors du territoire pour lequel s'applique la clause de rémunération prévue à l'article 4 du contrat de prestations de formation informatique et de partenariat en date du 1er décembre 2008;
- dire et juger qu'aucune rémunération ne pourra être due pour les prestations réalisées 18 mois après la signature du contrat Préiso initial, conformément à l'article 4.2 du contrat de prestations de formation informatique et de partenariat en date du 1er décembre 2008;
S'agissant des demandes à caractère indemnitaire formées par la société JGN Distribution :
Vu les articles 1134 et 1147 du Code civil,
Vu l'article 9 du Code de procédure civile,
- confirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté la société JGN Distribution de sa demande au titre de la clause pénale prévue au contrat de prestations de formation informatique et de partenariat en date du 1er décembre 2008;
S'agissant des demandes à caractère indemnitaire formées par la société Préiso :
A titre principal,
Vu les articles 1134 et 1147 du Code civil,
Vu le contrat de prestations de formation informatique et de partenariat en date du 1er décembre 2008,
- infirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté la société Préiso de ses demandes à caractère indemnitaire;
Statuant à nouveau,
- condamner la société JGN Distribution à payer à la société Préiso la somme de 505 369,80 euros au titre de la clause pénale prévue au contrat de prestations de formation informatique et de partenariat en date du 1er décembre 2008;
- condamner la société JGN Distribution à payer à la société Préiso la somme de 244 712,34 euros au titre de la perte de marge brute sur les 12 mois de contrat restant à exécuter jusqu'au 30 novembre 2013;
- condamner la société JGN Distribution à payer à la société Préiso la somme de 100 000 euros en réparation du préjudice qu'elle subit du fait de l'atteinte à son image;
- condamner la société JGN Distribution à payer à la société Préiso la somme de 250 000 euros en réparation du préjudice subi par la société Préiso en raison de la situation financière très difficile dans laquelle elle s'est retrouvée du fait à la fois de l'absence de paiement de ses factures pour un montant de 188 408,27 euros et de la perte brutale et injustifiée de près de 40 % de son chiffre d'affaires entraînant directement la dégradation de son résultat d'exploitation;
A titre subsidiaire,
Vu l'article L. 442-6 I 5° du Code de commerce,
- infirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté la société Préiso de ses demandes à caractère indemnitaire.
Statuant à nouveau,
- constater la rupture brutale des relations commerciales établies entre la société Préiso et la société JGN Distribution;
- condamner la société JGN Distribution à payer à la société Préiso la somme de 244 712,34 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis;
- condamner la société JGN Distribution à payer à la société Préiso la somme de 100 000 euros en réparation du préjudice qu'elle subit du fait de l'atteinte à son image;
- condamner la société JGN Distribution à payer à la société Préiso la somme de 250 000 euros en réparation du préjudice subi par la société Préiso en raison de la situation financière très difficile dans laquelle elle s'est retrouvée du fait à la fois de l'absence de paiement de ses factures pour un montant de 188 408,27 euros et de la perte brutale et injustifiée de près de 40 % de son chiffre d'affaires entraînant directement la dégradation de son résultat d'exploitation;
A titre très subsidiaire,
Vu l'article 1382 du Code civil dans sa version applicable aux faits de l'espèce,
Vu le contrat d'agent commercial en date du 7 novembre 2007,
Vu le contrat de prestations de formation informatique et de partenariat en date du 1er décembre 2008,
- condamner la société Netika à payer à la société Préiso la somme de 244 712,34 euros au titre de la perte de marge brute sur les 12 mois de contrat restant à exécuter jusqu'au 30 novembre 2013;
- condamner la société Netika à payer à la société Préiso la somme de 100 000 euros en réparation du préjudice qu'elle subit du fait de l'atteinte à son image;
- condamner la société Netika à payer à la société Préiso la somme de 250 000 euros en réparation du préjudice subi par la société Préiso en raison de la situation financière très difficile dans laquelle elle s'est retrouvée du fait à la fois de l'absence de paiement de ses factures pour un montant de 188 408,27 euros et de la perte brutale et injustifiée de près de 40 % de son chiffre d'affaires entraînant directement la dégradation de son résultat d'exploitation;
En toute hypothèse :
- condamner la société JGN Distribution ou la société Netika à payer à la société Préiso la somme de 30 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de l'article 696 du même Code, dont distraction au profit de Maître Mathieu Le Rolle, avocat aux offres de droit, par application des dispositions de l'article 699 du Code de Procédure Civile.
Vu les dernières conclusions signifiées le 29 mars 2016 par la société JGN Distribution, par lesquelles il est demandé à la cour de :
Vu les dispositions des articles 1134, 1315, 1147 et 1290 du Code civil,
Vu les dispositions de l''article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce,
- constater que la créance de la société Préiso au titre des factures est limitée à la somme de 163 106,89 euros;
- confirmer la décision du tribunal de commerce de Bordeaux en ce qu'elle a condamné la société Préiso à verser à la société JGN Distribution la somme de 63 047,14 euros TTC au titre de la facture 12-12-191 du 21 décembre 2012;
- condamner la société Préiso à verser à la société JGN Distribution la somme de 1 010 709,60 euros TTC en application de la clause pénale liant les parties;
- ordonner la compensation de l'ensemble des sommes;
- condamner la société Préiso à verser à la société JGN Distribution la somme de 30 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du CPC outre les entiers dépens dont distraction au profit de la SCP Monferran.
Vu les dernières conclusions d'irrecevabilité signifiées le 14 avril 2017 par la société Netika, par lesquelles il est demandé au conseiller de la mise en état :
Vu les articles 554 et 555 du Code de procédure civile et l'absence de faits nouveaux,
- déclarer irrecevable la société Préiso en son assignation en intervention forcée délivrée à la société Netika le 24 janvier 2017 ;
- la débouter de toutes ses demandes, fins et prétentions ;
- condamner la société Préiso au paiement de la somme de 10 000 euros, en application de l'article 700 du Code de procédure civile et aux entiers dépens.
Vu les dernières conclusions signifiées le 14 avril 2017 par la société Netika, par lesquelles il est demandé à la cour de :
- déclarer recevable et bien fondée la société Netika en ses conclusions ;
En conséquence,
A titre principal,
- donner acte à la société Netika de ce qu'elle a saisi le Conseiller de la mise en état par conclusions signifiées le 14 avril 2017 aux fins de voir déclarer irrecevable l'assignation en intervention forcée qui lui a été délivrée le 24 janvier 2017, au visa des articles 554 et 555 du Code de procédure civile ;
- donner acte à la société Netika de ce que le Conseiller de la mise en état n'a pas encore statué sur cette demande ;
A titre subsidiaire,
- confirmer le jugement rendu le 24 avril 2015 par le Tribunal de commerce de Bordeaux ;
- débouter la société Préiso de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions ;
A titre infiniment subsidiaire :
- condamner la société JGN Distribution à garantir la société Netika de toute condamnation qui pourrait être prononcée au profit de la société Préiso ;
En tout état de cause,
- condamner la société Préiso à payer à la société Netika la somme de 10 000 euros par application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile et aux entiers dépens.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 8 juin 2017.
La cour renvoie, pour un plus ample exposé des faits et des prétentions et moyens des parties, à la décision déférée et aux écritures susvisées, en application des dispositions de l'article 455 du Code de procédure civile.
MOTIFS :
Sur la recevabilité de la mise en cause de la société Netika :
Vu les articles 554 et 555 du Code de procédure civile,
Il est de principe que l'évolution du litige impliquant la mise en cause d'un tiers devant la cour d'appel, n'est caractérisée que par la révélation d'une circonstance de fait ou de droit, née du jugement ou postérieure à celui-ci, modifiant les données juridiques du litige. L'intervention forcée d'un tiers n'est pas destinée à réparer une négligence ou une mauvaise appréciation de ses droits par le demandeur à l'intervention.
En l'espèce, la société Netika soulève à bon droit l'irrecevabilité de son appel en la cause par la société Préiso pour la première fois devant la présente cour, l'évolution du litige ne le justifiant pas.
En effet, contrairement à ce que la société Préiso prétend, ne constituent pas des éléments nouveaux caractérisant une évolution du litige au sens de l'article 555 :
- le fait que les premiers juges aient retenu que la résiliation par la société Netika du contrat d'agent commercial de la société JGN constituait pour cette dernière un cas de force majeure l'exonérant de sa responsabilité résultant de la brutalité avec laquelle elle avait pour sa part rompu son contrat de prestations avec la société Préiso, l'existence ou non d'un cas de force majeure ayant été débattue entre les parties en première instance, ce moyen étant donc alors connu de la société Préiso ;
- la découverte après le jugement de l'existence d'un accord transactionnel signé fin 2014 entre les sociétés Netika et JGN, mettant fin au litige les opposant quant à l'imputabilité de la rupture du contrat d'agent commercial les liant, dès lors que la postériorité alléguée n'est pas démontrée et qu'en toutes hypothèses, il était connu dès avant le jugement dont appel du 24 avril 2015 par la société Préiso que le dit litige opposant les sociétés Netika et JGN était pendant devant le tribunal de grande instance de Strasbourg et qu'il appartenait donc à la société Préiso de demander le sursis à statuer jusqu'à son issue définitive, peu important qu'elle soit judiciaire ou transactionnelle, si elle estimait que cette issue était nécessaire à la solution de son propre contentieux ;
- la découverte alléguée après le jugement dans les statuts mis à jour le 31 décembre 2014 de la société JGN que celle-ci était désormais détenue par un associé unique, la société NKKD, dont le gérant, Monsieur Daniel Klumpp, est le même que celui de la société Netika, la postériorité alléguée n'étant pas démontrée et faute en toutes hypothèses pour la société Préiso de démontrer en quoi il serait nécessaire à la solution du présent litige d'entendre les explications de la société Netika sur cet élément de fait qui porte sur une communauté de dirigeant entre une société et la holding de l'autre, élément qui peut d'ailleurs être discuté et débattu par les parties au litige sans mise en cause du tiers concerné.
En conclusion, il s'avère que la société Préiso avait connaissance dès la première instance de tous les éléments à même de justifier l'intervention forcée de la société Netika si elle l'estimait nécessaire, de sorte que la dite intervention en cause d'appel s'avère tardive.
En conséquence, la mise en cause de la société Netika par la société Préiso sera déclarée irrecevable et les dépens afférents seront mis à la charge de cette dernière. Par équité, la demande formée par Netika sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile sera accueillie à hauteur de 1 500 euros.
Sur le fond :
Sur l'imputabilité de la rupture du contrat du 1er décembre 2008 et ses conséquences indemnitaires :
Il est rappelé que selon lettre recommandée AR du 26 novembre 2012, la société JGN a notifié à la société Préiso la résiliation à ses torts exclusifs avec effet immédiat du contrat de prestation de formation informatique du 1er décembre 2008, au motif notamment qu'elle avait détourné sa clientèle avec le concert frauduleux de la société Netika en vue de l'évincer.
La société JGN maintient ici cette position, faisant valoir que la société Préiso a ainsi violé les articles 2, 5, 7 et 9 du contrat, ce qui est constitutif d'une faute grave privative de préavis et lui donne droit au paiement de la clause pénale ; ainsi, elle ne prétend nullement, comme les premiers juges l'ont estimé, qu'elle a été contrainte de résilier le contrat en raison du cas de force majeure qu'aurait constitué pour elle le fait que son mandant, la société Netika, ait résilié son contrat d'agent commercial par courrier du 14 décembre 2012.
Pour sa part, la société Préiso conteste toutes fautes graves à sa charge, faisant valoir que celles-ci ne sont qu'un prétexte à la résiliation par la société JGN du contrat de prestations, dont la véritable raison serait la résiliation de son contrat d'agent commercial par la société Netika et qui ne constituerait nullement un cas de force majeure. Elle demande donc à être indemnisée sur le fondement à titre principal contractuel (article 1134 et 1147 du Code civil) et à titre subsidiaire délictuel (article L. 442-6-I-5° du Code de commerce).
Il est rappelé, s'agissant du contexte, que selon courriel du 5 janvier 2012, la société Netika a informé la société JGN de son insatisfaction quant à l'organisation actuelle de leur travail et de son intention de reprendre " la maîtrise complète du processus (édition logiciel, distribution, formation et installation) ", autrement dit de se passer des services de son agent commercial, la société Préiso ne contestant pas avoir eu connaissance de ce projet de réorganisation, arguant avoir été associée au début aux discussions qui ont suivi à ce propos entre les sociétés Netika et JGN, mais exclue à compter de février 2012.
Dans un mail du 6 avril 2012, la société Préiso (sous la plume de son gérant, Monsieur Sébastien Ruiz) écrit à la société JGN (représentée par son gérant, Monsieur Jérôme Ménage) que compte tenu des dites discussions alors en cours, elle se heurte à un problème de visibilité concernant ses activités de formation et d'installation du logiciel Kalisil et qu'elle sollicite donc une réunion tripartite (Netika-JGN-Préiso) afin de pouvoir se positionner clairement.
Il en résulte que les parties (JGN et Préiso) étaient informées dès le début de l'année 2012 que leur organisation de travail risquait d'évoluer, même si le contrat d'agent commercial de la société JGN a finalement été rompu par la société Netika non pas en raison de ce changement d'organisation, mais en raison de la faute grave alléguée de la société JGN.
Concernant cette faute grave prétendue de la société JGN, il est avéré qu'elle a été contestée par la société JGN qui a en effet assigné la société Netika devant le Tribunal de grande instance de Strasbourg en paiement notamment d'indemnités de préavis et de cessation de contrat, et que fin 2014, ces parties ont mis fin à leur litige par un accord transactionnel se traduisant sur le plan comptable pour la société Netika dans ses rapports avec la société JGN par un produit exceptionnel de 911 K et une charge exceptionnelle de 562 K. L'accord transactionnel n'étant pas produit aux présents débats, la cour ignore quelles ont été les concessions réciproques des parties et ainsi si la faute grave de la société JGN initialement dénoncée par la société Netika est considérée comme avérée ou pas ; en toutes hypothèses, cette dernière ne se prévaut pas de ce que la rupture de son propre contrat d'agent commercial, quelle qu'en soit in fine la cause, constituait un cas de force majeure pour elle justifiant qu'à son tour, elle ait dû résilier le contrat de prestations la liant à la société Préiso, de sorte que les motifs des premiers juges ne sauraient être adoptés. En toutes hypothèses, ainsi que l'objecte avec raison la société Préiso, la force majeure n'était nullement caractérisée, faute à tout le moins soit d'extériorité, si la rupture du contrat d'agent commercial était imputable à celui-ci, soit d'imprévisibilité, dans le cas inverse d'imputabilité, puisque la société Netika avait annoncé son souhait de se dispenser de son agent commercial dès le mois de janvier 2012.
Selon la société JGN, la tentative d'éviction fromentée par la société Préiso à son encontre, dont elle a la charge de la preuve, se caractériserait par les éléments suivants :
- l'embauche d'un assistant commercial par la société Netika en juillet 2012 ; or, ce fait n'est en rien imputable à la société Préiso ;
- la participation sur le stand Netika de Préiso au salon des Journées internationales de biologie (JIB) qui s'est tenu du 7 au 9 novembre 2012, aux lieu et place de JGN ; or, force est de rappeler que c'est la société Netika qui avait demandé à la société JGN de ne pas participer à ce salon ; pour autant, le grief est avéré, l'activité promotionnelle des produits Netika par la société Préiso se déduisant des photos et témoignages dûment fournis, même si la preuve de la signature de contrats n'est pas formellement rapportée ;
- la société Préiso a assuré "en direct" des prestations de formation à l'égard de l'Assistance Publique des Hôpitaux de Paris (APHP) (formations des 17 et 19 décembre 2012 et 22 et 23 janvier 2013), ce grief, non véritablement contesté, étant établi ; en revanche, ce même manquement n'est pas établi concernant le CHU de Tours, même si la société Préiso en avait eu le projet, son salarié, Monsieur Rondineau, en étant le chef, faute de toutes suites démontrées à ce projet ;
- l'utilisation fin 2012 et début 2013 des supports de formation de la société JGN par la société Préiso, via une dropbox informatique, en violation de son obligation de confidentialité ; or ce grief n'est pas établi, dès lors qu'il est observé qu'au 18 janvier 2013, date du constat d'huissier supposé attester de cette utilisation (procès-verbal dont la déloyauté de l'établissement n'est pas prouvée, les codes d'accès utilisés par l'huissier étant alors toujours ouverts à la société JGN, conformément à la pratique initiale des parties qui a perduré), le créateur de cette dropbox, Monsieur Guillaume Pontieux, formateur Kalisil anciennement salarié de la société Préiso, avait démissionné de celle-ci depuis le 23 novembre 2012 et travaillait pour la société Netika, étant observé que cette personne disposait outre de son savoir-faire propre, de celui de la société Netika, et que concernant d'autres utilisateurs provenant de Préiso, la preuve de signatures consécutives de commandes de formations ne serait pas rapportée.
Par suite, les quelques manquements de la société Préiso à ses obligations contractuelles, soit en définitive son activité de promotion lors des JIB 2012 et ses formations très ponctuelles assurées auprès de l'APHP, au surplus intervenus dans un contexte connu de réflexion sur la répartition du rôle de chacun dans la relation tripartite en cause, ne s'avèrent revêtir en aucun cas un caractère de gravité tel qu'ils justifient une résiliation du contrat par la société JGN sans respecter le délai de préavis prévu à l'article 6 du contrat.
En conséquence, le contrat ayant normalement dû se prolonger jusqu'au 30 novembre 2013, la demande de la société Préiso tendant à se voir indemniser de l'absence de préavis à hauteur de la somme de 505 369,80 euros sera accueillie, conformément à la clause pénale prévue à l'article 10 du contrat en cas de rupture anticipée indue, ainsi qu'à ses calculs non contestés dans leur quantum. Le jugement sera donc infirmé sur ce point.
En revanche, la société Préiso ne justifie pas des préjudices consécutifs supplémentaires allégués, à savoir, la perte de marge brute qui est dores et déjà indirectement incluse dans le chiffre d'affaires moyen manqué indemnisé via la clause pénale, et l'atteinte à son image qui n'est étayée par aucune pièce justificative, de même que sa " situation financière catastrophique " (sic), la société JGN excipant d'ailleurs sans être démentie d'une année 2013 florissante pour la société Préiso. Le jugement sera donc confirmé quant à ce débouté.
Sur les factures dues à Préiso :
La société Préiso demande le paiement de la somme de 185 808,27 euros TTC, avec intérêts au taux légal à compter du 22 novembre 2012, date de la mise en demeure, et capitalisation annuelle des intérêts conformément à l'article 1154 du Code civil, au titre de ses factures impayées, cette dette n'étant pas contestée par la société JGN à hauteur de 163 106,89 euros.
Or, c'est à bon droit que la société Préiso soutient que les erreurs ponctuelles sur le nombre d'heures de formation ont pu être rectifiées, que ce soit en faveur de l'une ou l'autre des parties et le cas échéant par compensation, que la fourniture systématique d'une feuille d'émargement n'était exigée ni expressément par le contrat, ni par la pratique antérieure des parties, et qu'il n'est pas justifié de ce que la société Préiso aurait travaillé directement pour la société Netika concernant BioRhin, les feuilles d'émargement étant à entête de la société JBN. De même, la facture de 4 664,40 euros TTC relative aux prestations réalisées en Nouvelle Calédonie après la résiliation du contrat en date du 26 novembre 2012, seule date mettant un terme aux relations des parties, est due en ce qu'elle correspond à une commande antérieure.
En conséquence, le jugement sera infirmé en ce que la condamnation au paiement de la société JGN au titre des factures impayées de la société Préiso sera accueillie en totalité.
Sur la facture due à JGN :
La société JGN demande le paiement d'une facture n°12-12-191 du 21 décembre 2012 de 63 047,14 euros TTC correspondant à sa commission de 17% prévue à l'article 4 du contrat en contrepartie de son activité courant 2012 de promotion des prestations de conseils en gestion de la qualité de la société Préiso auprès de ses clients, commission calculée sur le chiffre d'affaires facturé par la société Préiso aux 22 clients de la société JGN qui y sont listés, facture qui est contestée dans son principe et dans son quantum par la société Préiso.
L'article 4.1 paragraphe 2 du contrat stipule en effet que la société JGN " s'engage à présenter à ses clients situés sur le territoire défini à l'annexe I [soit la France métropolitaine, moins 12 départements] et à promouvoir, les services proposés par le prestataire de conseil en gestion de la qualité ".
S'agissant de l'assiette de cette commission, l'article 4.2 du contrat stipule qu'elle comprend le contrat initial portant sur les prestations de conseil en gestion de la qualité exécutées par le prestataire, ainsi que les éventuelles extensions de prestations sous forme de contrats distincts et les renouvellements du contrat initial intervenant dans les 18 mois du contrat initial. Il précise également qu'afin d'établir cette rémunération, le prestataire transmettra en outre tous les semestres la liste des laboratoires d'analyses biologiques et médicales, clients de la société JGN, auprès desquels il aura rendu des prestations.
Or, il résulte du mail d'accompagnement de la facture émanant de la société JGN que cette facture a été établie avec les données dont elle disposait, faute pour la société Préiso de lui avoir fourni " les informations nécessaires ", soit selon le contrat le relevé semestriel des clients auxquels elle aura dispensé ses conseils en gestion de la qualité, grâce à l'activité promotionnelle de ses services par la société JGN. Par suite, la société Préiso du fait de sa carence ne peut reprocher à la société JGN d'avoir établi la facture avec les moyens mis à sa disposition, notamment par recours à la dropbox à laquelle elle avait encore accès, ce, sauf pour la société Préiso à démontrer point par point l'inexactitude de la facture. De même, c'est vainement que la société Préiso soutient que le champ d'application dans l'espace du droit à commission était limité au territoire défini à l'annexe I, cette restriction ne visant que la présentation, mais non la promotion de ses activités en matière de qualité, d'après les stipulations expresses précitées du contrat, ainsi d'ailleurs que son esprit.
En revanche, la société Préiso fait valoir à bon droit que selon la lettre et l'esprit du contrat, le droit à commission de la société JGN :
- d'une part, ne portait que sur l'activité de présentation et de promotion réalisée à l'égard des clients de la société JGN, et non sur ceux qui était déjà ceux de la société Préiso, à l'égard de qui une présentation ou une promotion de celle-ci serait effectivement inutile, étant précisé que chaque partie a, la concernant, la charge de la preuve de la date du début du lien commercial avec le client,
- d'autre part, était bien limité dans le temps en ce qu'il s'appliquait au chiffre d'affaires généré par le contrat initial et, soit par les contrats distincts portant sur des extensions de prestations, soit par les renouvellements du contrat initial intervenant dans les 18 mois suivant ce contrat, ce qui est logique puisque le renouvellement est supposé dû à la satisfaction du client de la prestation fournie. Sur ce point, puisque il appartenait à la société Préiso de fournir chaque semestre la liste des laboratoires concernés par la commission, c'est sur elle que pèse la charge de la preuve de la date exacte de la commande.
Par suite, compte tenu de ces principes et au vu des pièces fournies de part et d'autre et notamment de l'analyse détaillée de la facture effectuée par Préiso laboratoire par laboratoire, il s'avère que la dite facture n'est effectivement pas due dans sa totalité en raison soit de l'ancienneté de plus de 18 mois du lien commercial avec le client, soit du défaut de preuve par la société JGN de l'antériorité de son lien avec le client par rapport à celui, avéré, de Préiso, et ce, concernant les laboratoires suivants Saint Julien, G2bio Agen, Laforest, Bottier, Mathieu, Labomaine, Morier, Hospitalor et Pasteau. En outre, s'agissant du centre hospitalier de Belfort, la société Préiso prétend sans être utilement démentie que cet établissement n'est pas son client. En conséquence, la facture de la société JGN est due à la seule hauteur de 35 330 euros HT, soit 42 254,68 euros TTC.
Le jugement sera donc infirmé en ce sens.
La compensation des créances réciproques des parties sera confirmée, sans qu'il y ait lieu toutefois de liquider cette compensation.
La société JGN qui succombe supportera les dépens d'appel (excepté ceux afférents à la mise en cause de la société Netika). L'équité commande d'allouer la somme de 5 000 euros à la société Préiso, en application de l'article 700 du Code de procédure civile.
Par ces motifs, LA COUR, Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort, déclare irrecevable la mise en cause de la société Netika par la société Préiso ; condamne la société Préiso à payer les dépens afférents à cette mise en cause, et à la société Netika la somme de 1 500 euros, en application de l'article 700 du Code de procédure civile ; infirme le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la société JGN Distribution à payer à la société Préiso la somme de 181 411,67 euros TTC, condamné la société Préiso à payer à la société JGN Distribution la somme de 63 047,14 euros TTC, dit qu'après compensation la société JGN Distribution devrait payer la somme de 118 364,53 euros TTC avec intérêts et débouté la société Préiso de sa demande de paiement de la clause pénale ; confirme pour le surplus ; Statuant de nouveau sur les points réformés, condamne la société JGN Distribution à payer à la société Préiso les sommes de : - 185 808,27 euros TTC, avec intérêts au taux légal à compter du 22 novembre 2012, au titre des factures restant impayées, - 505 369,80 euros, au titre de la clause pénale ; ordonne la capitalisation annuelle des intérêts conformément à l'article 1154 du Code civil ; condamne la société Préiso à payer à la société JGN Distribution la somme de 42 254,68 euros TTC, au titre de la facture n°12-12-191 du 21 décembre 2012 ; Y ajoutant, condamne la société JGN Distribution à payer à la société Préiso la somme de 5 000 euros, en application de l'article 700 du Code de procédure civile ; rejette toutes autres demandes ; condamne la société JGN Distribution aux dépens, dont distraction au profit de Maître Le Rolle, avocat, en application de l'article 699 du Code de procédure civile.