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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 4, 18 octobre 2017, n° 15-23250

PARIS

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Levy (ès qual.), Selgy (SARL)

Défendeur :

Cdiscount (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Luc

Conseillers :

Mmes Mouthon Vidilles, Comte

Avocats :

Mes Boccon Gibod, Brami, Serra, Nerguararian

T. com. Bordeaux, du 18 sept. 2015

18 septembre 2015

Faits et procédure

La SARL Selgy commercialisait en gros des appareils électroménagers.

La SA Cdiscount vend à distance sur catalogue général au travers d'un site internet et de plusieurs établissements situés en France.

En 2006, la société Selgy devient l'un des fournisseurs de la société Cdiscount. Leurs relations commerciales se matérialisent par la conclusion de différents contrats-cadres prévoyant plusieurs types de ristournes ainsi que les conditions de facturation des services de coopération commerciale fournis par la société Cdiscount au profit de la société Selgy.

À compter de l'année 2009, pour faciliter la gestion de sa trésorerie, la SARL Selgy décide d'affacturer ses créances à l'égard de la société Cdiscount auprès de la société HSBC Factoring France, qui détient ainsi certaines créances à l'égard de la société Cdiscount, qui lui avaient été cédées par la société Selgy.

Le 7 février 2011, les sociétés Selgy et Cdiscount concluent un contrat " SAV Mixte " afin de définir les conditions et modalités dans lesquelles la société Cdiscount et la société Selgy se répartissent la prise en charge et le coût du service après-vente des produits fournis à la société Cdiscount par la société Selgy.

Des désaccords ont opposé au cours de l'année 2012 les sociétés Selgy et Cdiscount.

Le 1er août 2013, la société Selgy a déclaré son état de cessation de paiement.

Par jugement en date du 22 août 2013, le Tribunal de commerce de Paris a ouvert une procédure de liquidation judiciaire à l'égard de la société Selgy, désignant la Selafa MJA en qualité de liquidateur.

Par courrier du 14 novembre 2013, la société Cdiscount a régularisé une déclaration de créances au passif de la société Selgy à hauteur de la somme totale de 444 971,34 euros.

La Selafa MJA, agissant en qualité de liquidateur de la SARL Selgy, a assigné la SA Cdiscount devant le Tribunal de commerce de Bordeaux par acte délivré le 21 mai 2014 en réparation du préjudice subi résultant de l'annulation brutale et injustifiée des commandes et de la rupture des relations commerciales.

Le 8 juin 2015, la société Cdiscount a conclu avec la société HSBC Factoring France un protocole d'accord transactionnel.

Le Tribunal de commerce de Bordeaux, par jugement du 18 septembre 2015, a :

- condamné la SA Cdiscount à verser à la Selafa MJA, agissant en qualité de liquidateur de la SARL Selgy, la somme de 380 700,33 euros, en règlement des factures restées impayées de 2012 à 2013, assortie des intérêts au taux légal à compter du 21 mai 2014,

- ordonné l'exécution provisoire de cette condamnation,

- donné acte à la SA Cdiscount qu'elle reconnaît que sa créance déclarée à la liquidation de la SARL Selgy doit être minorée de 36 282,80 euros,

- condamné la SA Cdiscount à verser à la Selafa MJA, agissant en qualité de liquidateur de la SARL Selgy, la somme de 725 730 euros à titre d'indemnité pour absence de préavis lié à la rupture brutale des relations commerciales,

- condamné la SA Cdiscount à verser à la Selafa MJA, agissant en qualité de liquidateur de la SARL Selgy, la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

- condamné la SA Cdiscount aux dépens d'instance.

Par arrêt de la Cour d'appel de Paris du 17 novembre 2016, la créance de la société HSBC Factoring France au passif de la société Selgy est fixée à la somme de 1 507 514 euros.

La Selafa MJA, agissant en qualité de liquidateur de la SARL Selgy, a relevé appel de ce jugement par déclaration remise au greffe le 18 novembre 2015.

La procédure devant la cour a été clôturée le 12 septembre 2017.

LA COUR

Vu les conclusions du 19 juin 2017 par lesquelles la Selafa MJA, agissant en qualité de liquidateur de la SARL Selgy, appelante, invite la cour, au visa des articles 131 et suivants, 1134, 1147 et suivants, 1291 et suivants, 1153 et suivants, 1315 du Code civil, L. 624-1 et suivants, D. 442-3, L. 442-6 du Code de commerce, 515, 564 et 700 du Code de procédure civile, à :

in limine litis,

- se déclarer compétente, et,

- débouter la société Cdiscount de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions, et l'y dire mal fondée,

- confirmer le jugement rendu par le Tribunal de commerce de Bordeaux le 18 septembre 2015 en ce

qu'il a :

* condamné la société Cdiscount à verser à la société MJA, ès qualité de mandataire liquidateur de la société Selgy, la somme en principal de 380 700,33 euros TTC au total en règlement des livraisons de marchandises effectuées et non encore réglées, majorée du taux d'intérêt légal à compter du 21 mai 2014, en application des articles 1134 et 1153 du Code civil,

* constaté la rupture brutale des relations commerciales, aux torts exclusifs de la société Cdiscount, et ce, à compter du 1er janvier 2013,

- infirmer ledit jugement pour le surplus et,

statuant à nouveau,

- rejeter purement et simplement dans sa totalité la créance déclarée par Cdiscount au passif de la société Selgy,

- condamner la société Cdiscount à lui verser la somme en principal de 1 359 558 euros TTC au titre des notes de débit, indûment déduites des règlements effectués par Cdiscount auprès de HSBC Factoring, majorée du taux d'intérêt légal à compter de la signification de l'assignation, en application des articles 1134 et 1153 du Code civil,

- condamner la société Cdiscount à lui verser la somme en principal de 2 070 882 euros à titre de dommages et intérêts résultant du préjudice né de l'annulation brutale et injustifiée de commandes, à compter de la signification de l'assignation, en application des articles 1134, 1146, 1147 et 1153 du Code civil,

- constater la rupture brutale des relations commerciales, aux torts exclusifs de la société Cdiscount, et ce, à compter du 1er janvier 2013 et condamner la société Cdiscount à lui verser la somme totale de 1 451 000 euros HT, au titre du préjudice résultant de la rupture des relations commerciales aux torts exclusifs de la société Cdiscount, en application des dispositions de l'article L. 442-6 I 4° et 5° du Code de commerce,

- condamner la société Cdiscount à lui verser la somme de 15 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, outre les entiers dépens, qui seront recouvrés par le Cabinet Lexavoué Paris Versailles, pris en la personne de Me Boccon-Gibod, avocat au barreau de Paris, dans les conditions de l'article 699 du Code de procédure civile ;

Elle fait valoir que :

- au cours de la période du 1er janvier 2012 au 30 juin 2013, elle a émis des factures à la suite de la marchandise dûment livrées, demeurées impayées à hauteur de 380 700,33 euros TTC,

- elle conteste la déclaration de créance au passif de la société Selgy d'un montant total de 444 971,34 euros TTC,

- la révélation, par l'intimé lui-même, en cause d'appel, de l'existence d'un protocole transactionnel conclu le 8 juin 2015 entre la société Cdiscount et HSBC France établit la survenance ou la révélation d'un fait justifiant la recevabilité de la demande du mandataire liquidateur de la société Selgy tendant au rejet et/ou au remboursement des notes de débit injustifié dans la mesure où la société Cdiscount a probablement invoqué, dans le protocole tenu secret, des compensations avec de prétendues " notes de débit " pour s'exonérer du paiement des factures cédées à la société HSBC Factoring France,

- les ristournes de fin d'année (RFA), dont la société Cdiscount s'estime créancière, ne sont contractuellement pas dues et doivent être rejetées,

- les notes de débit au titre de retours de marchandises à la société Selgy (93 715,23 euros TTC) sont contestées dans le principe dans la mesure où la marchandise a été commandée, livrée, puis retournée sans juste motif à la société Selgy, ces notes de débit devant pour le moins être diminuées de la perte de marge occasionnée,

- la note de débit au titre de la coopération commerciale et de la facturation de service après-vente de Cdiscount (58 221,28 euros) est contestée au motif que les commandes afférentes ont été annulées par la société Cdiscount et que cette dernière ne démontre pas avoir respecté ses engagements d'effectuer la mise en avant des produits de la société Selgy, et qu'elles ne sont justifiées par aucun document contractuel, certaines d'entre elles ayant été émises après la mise en liquidation judiciaire de la société Selgy,

- le remboursement de produits affectés d'un dysfonctionnement (51 590,27 euros TTC) n'est pas justifié, dès lors que la société Cdiscount n'apporte pas la preuve des réparations payées pour le compte de la société Selgy,

- la somme de 23 537,28 euros TTC correspondant aux notes de débit émises par la société Cdiscount au titre des factures payées par erreur à la société Selgy a été payée par erreur par Cdiscount à la société HSBC Factoring, auprès de qui la société Cdiscount doit réclamer cette somme,

- la somme de 18 246,41 euros TTC réclamée au titre des erreurs de facturation par rapport au tarif n'est pas due dans la mesure où les prix de vente ont été négociés et convenus entre les parties à l'occasion de chacune des commandes passées et qu'en tout état de cause, la société Cdiscount a déjà obtenu paiement de ces sommes en procédant par voie de " déduction " chez HSBC Factoring,

- la société Cdiscount doit être condamnée à lui payer les " déductions " non expliquées et non justifiées pour la somme de 1 359 558 euros,

- la société Cdiscount à, en 2011 et 2012, brutalement annulé des commandes sans juste motif, engageant ainsi sa responsabilité contractuelle,

- compte tenu du comportement de la société Cdiscount consistant à annuler de manière brutale et unilatérale des commandes, en s'abstenant de régler certaines factures, en émettant des notes de débits injustifiées, et ne passant plus aucune commande à compter du mois de juin 2013, celle-ci s'est rendue coupable à compter du 1er janvier 2013 d'une rupture brutale des relations commerciales établies avec la société Selgy depuis 2006,

- au regard de l'ancienneté de la relation commerciale et de l'état de dépendance économique dans lequel elle se trouvait, un préavis d'une année aurait dû être respecté,

- au regard d'un chiffre d'affaires moyen de 2 846 000 euros HT avec la société Cdiscount entre 2009 et 2012 pour un taux de marge brute moyen sur la même période de 51 %, la société Selgy sollicite la condamnation de la société Cdiscount au paiement d'une somme de 1 451 000 euros ;

Vu les conclusions du 27 juin 2017 par lesquelles la SA Cdiscount, intimée ayant formé appel incident, demande à la cour, au visa des articles 1134, 1146, 1147, 1153 et 1153-1 du Code civil, L. 442-6, I, 5°, D. 442-3 et L. 624-1 et suivants du Code de commerce, 564 du Code de procédure civile, 256 I du Code général des impôts, de :

in limine litis,

- se déclarer compétente pour statuer sur l'entier litige,

- constater que la demande de condamnation à son encontre à payer à la société MJA, prise en la personne de maître Frédérique Levy, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Selgy la somme de 1 359 558 euros TTC au titre des notes de débit " indûment déduites " est une demande nouvelle en cause d'appel,

en conséquence,

- déclarer la société MJA, prise en la personne de maître Frédérique Levy, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Selgy irrecevable en sa demande de condamnation à son encontre à payer à la société MJA, prise en la personne de maître Frédérique Levy, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Selgy la somme de 1 359 558 euros TTC au titre des notes de débit " indûment déduites ", sur le fond,

- concernant le règlement des factures prétendument impayées :

* infirmer le jugement rendu par le Tribunal de commerce de Bordeaux le 18 septembre 2015, et statuant à nouveau,

* débouter la société MJA, prise en la personne de maître Frédérique Levy, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Selgy, de sa demande de condamnation à son encontre à lui verser la somme en principal de 380 700,33 euros au titre des demandes de règlement de factures impayées,

en conséquence,

* condamner la société MJA, prise en la personne de maître Frédérique Levy, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Selgy à lui payer la somme de 380 700,33 euros correspondant à la somme réglée le 23 décembre 2015 au titre de l'exécution provisoire prononcée par le jugement du Tribunal de commerce de Bordeaux en date du 18 septembre 2015,

- concernant sa déclaration de créance :

- débouter la société MJA, prise en la personne de maître Frédérique Levy, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Selgy, de ses demandes de rejet de la déclaration de créances régularisée par elle,

- lui donner acte qu'elle reconnaît que sa créance déclarée à la liquidation judiciaire de la société Selgy doit être minorée de la somme de 42 334,51 euros,

en conséquence,

- fixer sa créance au passif de la société Selgy à la somme de 416 516,27 euros,

- dire que la somme de 36 282,80 euros au titre d'annulations de diverses notes de débit se compense à due concurrence avec la créance déclarée,

- concernant les demandes de dommages et intérêts au titre de l'annulation de commandes,

A titre principal,

* confirmer le jugement rendu par le Tribunal de commerce de Bordeaux le 18 septembre 2015, en ce qu'il a jugé que la société MJA, prise en la personne de maître Frédérique Levy, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Selgy n'apporte pas la preuve que le préjudice qu'il réclame au titre de l'annulation des commandes est distinct du préjudice réclamé pour rupture des relations commerciales, et en conséquence, et en ce qu'il a débouté la société MJA, prise en la personne de maître Frédérique Levy, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Selgy de sa demande de dommages et intérêts résultant du préjudice né de l'annulation de commandes,

A titre subsidiaire,

* débouter la société MJA, prise en la personne de maître Frédérique Levy, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Selgy de sa demande de condamnation à son encontre d'une somme de 2 070 882 euros à titre de dommages et intérêts,

- concernant les demandes de dommages-intérêts au titre de la rupture brutale des relations commerciales établies alléguée,

A titre principal,

* infirmer le jugement rendu par le Tribunal de commerce de Bordeaux le 18 septembre 2015, et statuant à nouveau,

* débouter la société MJA, prise en la personne de maître Frédérique Levy, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Selgy, de sa demande de condamnation à son encontre à lui verser la somme totale de 1 451 000 euros HT, au titre du préjudice résultant de la rupture des relations commerciales aux torts exclusifs de la société Cdiscount,

A titre subsidiaire,

* débouter la société MJA, prise en la personne de maître Frédérique Levy, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Selgy, de ses demandes,

En toute hypothèse,

* dire que les demandes de dommages-intérêts ne sauraient être soumises à la TVA conformément à l'article 256 I du Code général des impôts,

* condamner la société MJA, prise en la personne de maître Frédérique Levy, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Selgy, au paiement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens, dont le recouvrement sera poursuivi selon les dispositions de l'article 699 du même code ;

Elle explique que :

- le liquidateur de la société Selgy n'est pas fondé à lui demander le règlement des factures, dès lors que les créances de la société Selgy ont été affacturées au profit de la société HSBC Factoring, devenu dès lors l'unique créancier de la société Cdiscount,

- par accord transactionnel du 8 juin 2015, la société HSBC a été intégralement remplie de ses droits au titre des créances qu'elle détenait à son égard,

- le mandataire liquidateur de la société Selgy contestant pour la première fois, en cause d'appel, le montant de la créance déclarée par la société Cdiscount au passif de la société Selgy, se heurte au principe posé par l'article 564 du Code de procédure civile, lequel prohibe les prétentions nouvelles en cause d'appel, en l'absence de survenance ou de révélation d'un fait justifiant la recevabilité de cette demande,

- au titre de l'année 2011, son chiffre d'affaires avec la société Selgy a été confirmé par l'attestation des commissaires aux comptes, que les RFA réclamées au titre de l'année 2012 ne concernent que les RFA pour référencement de produits éligibles à la livraison gratuites,

- elle a effectivement proposé la livraison gratuite des produits à ses clients sur son site internet, ce qui a largement contribué à augmenter le nombre des ventes produits et permis ainsi à la société Cdiscount de bénéficier de ces RFA au titre de l'année 2012 mais également au titre de l'année 2013,

- la société Selgy ne saurait contester les prestations de coopération commerciale a posteriori dans la mesure où chaque prestation de service réalisée par elle faisait préalablement l'objet d'un devis accepté et signé par la société Selgy, ces prestations ayant d'ailleurs toutes été exécutées,

- la gestion du service SAV est prévu dans le contrat SAV ; signé entre les parties, qui indiquait notamment que le SAV pouvait être pris en charge par elle (ou l'un de ses prestataires), à charge pour la société Selgy de la rembourser,

- elles ont opté pour un remboursement forfaitaire de 40 euros par produits pris en charge par elle,

- pour chaque produit pris en charge par elle, une facture de 40 euros a été établie, celles émises postérieurement à l'ouverture de la procédure collective à l'encontre de la société Selgy correspondant à la période au cours de laquelle la prestation SAV a été réalisée, soit antérieurement au jugement d'ouverture de liquidation judiciaire du 22 août 2013,

- il est contractuellement prévu que la société Selgy, et non elle, serait chargée de réparer les produits défectueux en cause, conformément aux termes du contrat SAV, de sorte qu'elle n'a pas à rapporter la preuve de réparation qui ne lui incombait pas, les notes de débit correspondant simplement à des notes émises suite à un défaut de réparation de produits défectueux par la société ou lorsqu'un produit n'était pas réparable,

- il suffit de comparer lesdites notes de débit et les avoirs pour constater qu'il s'agit des mêmes montants, des mêmes produits et des mêmes quantités, les erreurs de référence sur les avoirs émis par la société Selgy ne pouvant lui permettre de se soustraire à ses propres obligations,

- elle renonce à toute demande au titre des factures payées par erreur,

- elle émet des notes de débit lorsque des écarts de prix sont constatés entre les montants facturés par la société Selgy et les montants figurant sur ses commandes, ce afin de faire correspondre la facturation au prix commandé,

- elle reconnaît devoir la somme de 36 282,03 euros au titre de l'annulation de diverses notes de débit,

- elle conteste être redevable de la somme totale de 1 359 558,25 euros au motif que la preuve de sa créance n'est pas rapportée par le liquidateur, un simple courrier adressé par la société HSBC Factoring France à la société Selgy, sans communiquer la moindre facture ni le moindre bon de livraison, ne pouvant suffire,

- la créance de la société HSC Factoring France admise au passif de la société Selgy ne correspond pas aux déductions invoquées sans aucune preuve,

- les annulations de commande ont toutes été justifiées en 2011,

- une importante partie des annulations de commande de 2012 étaient justifiées par de graves dysfonctionnements de la part de la société Selgy ou était liée à l'organisation habituelle des relations entre les parties,

- le liquidateur ne démontre pas que l'annulation des autres commandes lui serait imputable,

- sous couvert d'un préjudice qu'elle aurait subi du fait de l'annulation des commandes, les demandes de la société Selgy visent à réparer le même préjudice que celui allégué au titre de la prétendue rupture brutale des relations commerciales établies,

- il n'est pas possible de cumuler des actions pour rupture brutale des relations commerciales établies sur le fondement d'une part de l'article L. 442-6 I 5° du Code de commerce et d'autre part des articles 1134 et 1153 anciens du Code civil,

- les montants demandés en réparation des annulations brutales des commandes sont excessifs et injustifié au regard de la situation réelle de la société Selgy au jour de l'ouverture de la procédure de liquidation judiciaire,

- la fin de la relation commerciale incombe exclusivement à la société Selgy qui ne respectait plus ses obligations contractuelles de livraison,

- en toute hypothèse, de telles inexécutions auraient parfaitement justifié la rupture des relations commerciales de sa part,

- les montants demandés par la société Selgy en réparation des prétendus préjudice subis sont excessifs, dans la mesure où il n'existait aucune situation de dépendance économique qui pourrait lui être reproché,

- le délai de préavis ne saurait excéder 3 mois, compte tenu des relations conflictuelles entre les parties en 2012, la société Selgy pouvant ainsi légitimement anticiper la fin des relations commerciales,

- elle conteste également le taux de marge de 51 % utilisé par la société Selgy pour le calcul de son préjudice ;

- le préavis de 6 mois sollicité est excessif au regard de la dégradation des relations commerciales entre elles intervenue dès l'année 2012,

- le délai de préavis ne saurait être fixé à un délai supérieur à 3 mois,

- le taux marge de 51 % n'est pas justifié.

SUR CE

LA COUR se réfère, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens échangés et des prétentions des parties, à la décision déférée et aux dernières conclusions échangées en appel.

En application de l'article 954 alinéa 2 du Code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions.

La compétence de la Cour d'appel de Paris n'est pas contestée entre les parties. Il n'y a donc pas lieu de se déclarer compétent pour trancher un litige fondé sur les dispositions de l'article L. 442-6 I 5° du Code de commerce.

Sur la recevabilité des demandes nouvelles

La société Cdiscount oppose à la société Selgy, représentée par son mandataire liquidateur, l'irrecevabilité de la demande nouvelle formée en appel par elle, à savoir sa condamnation à lui verser la somme de 1 359 558 euros TTC au titre des notes de débit indûment déduites des règlements et facturées par Cdiscount auprès de HSBC Factoring, majorée du taux d'intérêt légal à compter de la signification de l'assignation, en application des articles 1134 et 1153 du Code civil. Elle explique que cette demande ne correspond à aucune des prétentions de première instance du liquidateur de la société Selgy et que ce n'est pas la révélation du protocole d'accord avec HSBC qui est à l'origine de cette demande reconventionnelle en cause d'appel, celle-ci ayant été formée préalablement dans les premières conclusions d'appel.

La société Selgy, représentée par son mandataire liquidateur, soutient que cette créance correspond à des factures établies par elle, pour des livraisons de marchandises vendues à la société Cdiscount, mobilisées par elle auprès de la société HSBC Factoring France et impayées à l'échéance par la société Cdiscount. Elle relève que cette somme correspond à la créance de la société HSBC Factoring France fixée à son passif, par arrêt du 17 novembre 2016.

Aux termes de l'article 564 du Code de procédure civile, " à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer la compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait ".

En l'espèce, la demande formée pour la première fois en cause d'appel par la société Selgy, représentée par son mandataire liquidateur, concerne le paiement des notes de débit déduites des règlements et facturées par la société Cdiscount auprès de la société HSBC Factoring.

Il apparaît toutefois que ces notes de débit fondent le litige opposant la société Selgy, représentée par son mandataire liquidateur, et la société HSBC Factoring France tranché par arrêt de la cour d'appel de Paris du 17 novembre 2016, sur la base d'une déclaration de créance datant du 2 septembre 2013 réalisée par la société HSBC Factoring France. Ces notes de débit et cette somme demandée par la société HSBC Factoring France sont donc connues par la société Selgy, représentée par son mandataire liquidateur, depuis le 2 septembre 2013. Ce n'est pas la date de l'arrêt de la cour d'appel fixant la créance qui peut constituer le fait nouveau entre les parties.

En outre, cette demande est formulée pour la première fois par la société Selgy, représentée par son mandataire liquidateur, dans ses conclusions du 12 février 2016 devant la cour d'appel, alors que la révélation de l'accord transactionnel signé entre la société Cdiscount et la société HSBC Factoring date du 15 avril 2016.

La société Selgy, représentée par son mandataire liquidateur, ne démontre ainsi aucun fait nouveau pouvant justifier la recevabilité en cause d'appel de cette demande.

Dans ces conditions, cette demande constitue une demande nouvelle qui doit être déclarée irrecevable.

Sur les comptes entre les parties

Sur la demande de la Selafa MJA, agissant en qualité de liquidateur de la SARL Selgy, en paiement des factures impayées par la société Cdiscount

La Selafa MJA, agissant en qualité de liquidateur de la SARL Selgy, reproche à la société Cdiscount de ne pas lui avoir payé l'intégralité des factures émises en 2012 et 2013, pour un montant total de 380 700,33 euros TTC.

La société Cdiscount conteste être créancière de la société Selgy au titre de ces factures, au motif qu'en raison de la factorisation de ces factures auprès de la société HSBC Factoring France, elle ne lui est pas redevable de ces montants, ce d'autant qu'en vertu du protocole transactionnel du 8 juin 2015 conclu avec cette dernière, la société HSBC Factoring France a reconnu avoir été payée par la société Cdiscount des sommes dues.

L'article L. 313-24 du Code monétaire et financier prévoit qu'en vertu de la cession, et dès la date apposée sur le bordereau, le cessionnaire acquiert la propriété de la ou des créances cédées. Il en devient le titulaire exclusif. Ainsi, dans la mesure où le cédant n'est plus propriétaire de la créance, il ne peut pas modifier l'étendue des droits attachés aux créances représentées par ce bordereau.

Il n'est pas contesté que la société Selgy a conclu avec la société HSBC Factoring France le 2 février 2009 un contrat d'affacturage, ayant pour objet de permettre à la société Selgy de mobiliser auprès de la société HSBC Factoring France la facturation notamment sur la société Cdiscount.

La Selafa MJA, agissant en qualité de liquidateur de la SARL Selgy, soutient que des factures émises par elle, datant des années 2012 et 2013, n'ont pas été acquittées par la société Cdiscount.

Or, ces factures mentionnent toutes (pièce 14 de la Selafa MJA) qu'elles doivent être acquittées auprès de la société HSBC Factoring France pour être libératoires. Ces factures ont été cédées par la société Selgy à la société HSBC Factoring France, qui en est désormais seule propriétaire. La société Selgy a donc perdu tous droits sur ces créances à l'égard de la société Cdiscount et ne peut donc en conséquence en demander le paiement.

Dès lors, il y a lieu d'infirmer le jugement en ce qu'il a condamné la SA Cdiscount à verser à la Selafa MJA, agissant en qualité de liquidateur de la SARL Selgy, la somme de 380 700,33 euros, en règlement des factures restées impayées de 2012 à 2013, assortie des intérêts au taux légal à compter du 21 mai 2014.

Statuant à nouveau, il y a lieu de débouter la Selafa MJA, agissant en qualité de liquidateur de la SARL Selgy, de sa demande de ce chef.

Il convient de rappeler que le présent arrêt infirmatif emporte restitution des sommes réglées au titre de l'exécution provisoire du jugement dont appel, assorties des intérêts au taux légal à compter de la signification de la présente décision.

Il n'y a donc pas lieu de condamner la Selafa MJA, agissant en qualité de liquidateur de la SARL Selgy, à restituer la somme allouée en première instance et versée par la société Cdiscount au titre de l'exécution provisoire, la décision des premiers juges étant infirmée sur ce point.

Sur les notes de débits émises par la société Cdiscount et sa déclaration de créance

La société Cdiscount demande à ce que sa créance au passif de la société Selgy soit fixée à la somme de 416 516,27 euros TTC, correspondant à des remises de fin d'année, des retours de marchandises, la coopération commerciale et de la facturation de son service après-vente, au remboursement de produits affectés d'un dysfonctionnement, de pièces non livrées ou livrées défectueuses par la société Selgy ou de pièces non commandées par elle, des factures payées par erreur et à des erreurs de facturation.

La Selafa MJA, agissant en qualité de liquidateur de la SARL Selgy, conteste cette demande.

Aux termes de l'ancien article 1134 du Code Civil, applicable aux conventions dont il est question, " les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise. Elles doivent être exécutées de bonne foi. "

L'article 9 du Code de procédure civile dispose qu'" il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention. "

Les remises de fin d'année pour un montant de 168 155,70 euros TTC

En application de l'accord-cadre signé entre les parties pour l'année 2011, il apparaît que le pourcentage de remise de fin d'année a été fixé à 2 % du chiffre d'affaires net facturé.

Les parties s'opposent sur le montant du chiffre d'affaires à retenir. La Selafa MJA soutient que le chiffre d'affaires de la société Selgy avec la société Cdiscount sur l'année 2011 s'est élevé à la somme de 3 444 000 euros, alors que la société Cdiscount indique que le chiffre d'affaires net facturé s'élève au minimum à la somme de 4 272 223 euros HT. Or, l'extrait du grand livre de compte de la société Selgy, pour l'année 2011 indique que son chiffre d'affaires avec la société Cdiscount est de 4 118 965,45 euros. En outre, dans une attestation, le commissaire aux comptes de la société Cdiscount relève que le chiffre d'affaires de la société Selgy avec la société Cdiscount sur l'année 2011 s'est élevé à la somme de 4 310 976,10 euros.

La société Cdiscount reconnaissant un chiffre d'affaires de 4 272 223 euros HT, il y a lieu de retenir ce chiffre pour l'année 2011, au regard des éléments précités. Il y a donc lieu de retenir le montant hors taxes et de calculer le montant de la remise de fin d'année due par la société Selgy à la société Cdiscount pour l'année 2011 en exécution du contrat les liant sur la base des 2 % déterminés. La remise de fin d'année 2011 s'élève donc à la somme de 85 444,46 euros.

La Selafa MJA explique également qu'elle considère avoir alloué suffisamment de remises de fin d'année à la société Cdiscount. A défaut de démontrer avoir versé au titre de l'année 2011 tout ou partie de la somme due contractuellement, il y a lieu de retenir la somme de 85 444,46 euros HT soit la somme de 102 191,57 euros TTC, au titre de la remise de fin d'année due par la société Selgy à la société Cdiscount.

S'agissant des remises de fin d'année au titre des exercices 2012 et 2013, la Selafa MJA conteste les sommes réclamées au motif qu'elles ne sont pas dues contractuellement, le chiffre d'affaires ayant baissé en 2012 par rapport à l'exercice 2011.

L'accord cadre liant les parties pour l'année 2012 prévoit une ristourne pour " livraison gratuite ", correspondant à 2 % du chiffre d'affaires HT net facturé pour le référencement de produits éligibles à la livraison gratuite. Cette ristourne ne conditionne pas sa mise en jeu par des exigences de croissance de chiffre d'affaires.

La Selafa MJA ne contestant pas les chiffres des produits éligibles à la livraison gratuite et donc à la mise en jeu de la ristourne contractuelle de 2 %, il y a lieu de retenir les montants sollicités par la société Cdiscount, qui tient compte de la somme de 20 556 euros déjà versée à ce titre par la société Selgy en 2012.

Le solde restant dû au titre des remises de fin d'année pour l'exercice 2012 par la société Selgy à la société Cdiscount s'élève à la somme de 52 119,81 euros TTC.

La Selafa MJA conteste le principe de la clause de ristourne pour avoir référencé les produits éligibles à la livraison gratuite au cours de l'exercice 2013, au motif qu'il s'agit d'une stipulation pour autrui profitant au client final. Or, cette clause permet de rendre attractifs les produits vendus par la société Selgy, passé un certain seuil. En outre, les conditions de la mise en place du référencement des produits éligibles à la livraison gratuite ne s'oppose à la fixation d'un seuil minimum de commandes et ne caractérise pas la violation par la société Cdiscount de ses obligations contractuelles de référencement. Ces éléments ne remettent pas en cause l'application de la clause de ristourne et le référencement de certains de ses produits éligibles à la livraison gratuite, la société Selgy ayant bénéficié de l'attractivité donnée à ses produits.

Ainsi, la somme due par la société Selgy à la société Cdiscount s'élève à la somme de 13 844,32 euros TTC au titre des remises de fin d'année pour l'exercice 2013.

Il y a donc lieu de fixer la créance de la société Cdiscount au passif de la société Selgy, au titre des remises de fin d'année, à la somme totale de 168 155,70 euros TTC.

Les retours de marchandises à Selgy pour un montant de 93 715,23 euros TTC

La Selafa MJA conteste le principe de cette facturation, au motif que les retours ne seraient pas justifiés.

Il convient de relever avec la société Cdiscount que l'ensemble des demandes de retour de la société Cdiscount a été accepté par la société Selgy, celles-ci étant signées par elle.

Elle ne peut donc contester ces retours et leur facturation d'un montant total de 93 715,23 euros TTC.

Il y a donc lieu de fixer la créance de la société Cdiscount au passif de la société Selgy, au titre des retours de marchandises, à la somme totale de 93 715,23 euros TTC.

La coopération commerciale et de la facturation du service après-vente pour un montant de 58 221,28 euros TTC

La Selafa MJA soutient que le paiement des factures suite à des devis au titre de la coopération commerciale n'est pas dû au motif que les prestations ont été annulées par la société Cdiscount et n'ont pas été exécutées.

La société Cdiscount explique que les factures émises au titre de la coopération commerciale ne sont pas corrélées aux commandes de produits passées auprès de la société Selgy et non livrées, mais au seul chiffre d'affaires effectivement réalisé avec la société Selgy, conformément aux dispositions contractuelles, et ne sauraient donc être affectées par d'éventuelles annulations de commandes.

Les factures invoquées par la société Cdiscount portent sur des prestations " hors contrat " ou sur des " devis contractuels ". Elle ne peut donc pas soutenir que ces sommes correspondent au chiffre d'affaires de la période, la référence expresse de ces factures étant les devis communiqués et les prestations complémentaires vendues, dont il n'est pas contesté qu'elles ont été annulées.

Il y a donc lieu de rejeter la demande de ce chef.

S'agissant des factures relatives au service après-vente, la société Cdiscount invoque les dispositions de l'article 5 du contrat SAV souscrit entre les parties et que la période considérée dans les factures est antérieure au jugement de liquidation judiciaire.

La Selafa MJA en conteste le bien-fondé contractuel et soulève qu'elles ont été émises pour certaines après la mise en liquidation de la société Selgy.

Le contrat SAV du 7 février 2011 régit les rapports entre la société Cdiscount et la société Selgy dans la gestion du service après-vente des produits vendus par la société Selgy. Il en ressort que les parties ont convenu du paiement par la société Selgy de la somme forfaitaire de 40 euros à la société Cdiscount à chaque retour d'un produit au service après-vente de la société Cdiscount.

Les factures émises correspondent à la facturation trimestrielle de la gestion du service après-vente par la société Cdiscount. Le nombre de produits concernés n'est pas contesté par la Selafa MJA. Enfin, il apparaît que les périodes concernées sont antérieures à la décision de liquidation judiciaire du 22 août 2013, le critère de référence étant la date à laquelle est née la créance. La date d'émission de la facture étant indifférente sur ce point.

La somme totale due par la société Selgy au titre des factures SAV s'élève donc 16 361,30 euros.

Il y a donc lieu de fixer la créance de la société Cdiscount au passif de la société Selgy, au titre de la facturation pour gestion du service après-vente, à la somme totale de 16 361,30 euros.

Le remboursement de produits affectés d'un dysfonctionnement pour un montant total de 46 672,48 euros TTC

La société Cdiscount soutient que conformément aux dispositions de l'article 4 du contrat SAV elle a engagé des frais pour l'absence de réparation ou de remplacement par la société Selgy des équipements vendus par elle et défaillants.

La Selafa MJA soutient que ces sommes ne sont pas dues au motif que la preuve par la société Cdiscount qu'elle a pris en charge la réparation n'est pas rapportée.

Il ressort des pièces communiquées, à savoir des échanges courriels avec les clients et des factures, que la société Cdiscount procédait à une nouvelle commande de produits en remplacement ou allouait un bon d'achat au client auprès d'elle. Ces seuls éléments ne permettent pas d'établir le montant demandé ni les sommes réellement engagées par la société Cdiscount.

Il y a donc lieu de rejeter la demande à ce titre.

La facturation par Selgy de pièces non livrées ou livrées défectueuses par Selgy ou de pièces non commandées par Cdiscount pour un montant de 31 505,17 euros TTC

La société Cdiscount soutient avoir acquitté des factures pour des marchandises qui n'ont pas été livrées ou livrées défectueuses ou encore qu'elle n'a pas commandées.

La Selafa MJA relève que les avoirs émis par la société Selgy au titre des pièces non livrées ou livrées défectueuses par Selgy ou de pièces non commandées par Cdiscount ne correspondent pas aux factures de la société Cdiscount établissant sa demande. Elle indique que la société Cdiscount ne justifie pas sa demande.

Il convient de relever que la société Cdiscount communique des factures émises à l'égard de la société Selgy d'un montant total de 5 171,88 euros TTC. Chaque facture est corroborée par le bons d'enlèvement, la lettre envoyée à la société Selgy, et non contestée, indiquant le nombre de pièces manquantes ou défectueuses, ainsi que le bon de livraison.

La somme totale due par la société Selgy au titre des pièces non livrées ou livrées défectueuses par Selgy ou de pièces non commandées par Cdiscount s'élève donc à 5 171,88 euros TTC et il y a lieu de rejeter le surplus de la demande de la société Cdiscount, à défaut d'être justifiées.

Il y a donc lieu de fixer la créance de la société Cdiscount au passif de la société Selgy, au titre des pièces non livrées ou livrées défectueuses par Selgy ou de pièces non commandées par Cdiscount, à la somme totale de 5 171,88 euros.

Les erreurs de facturation commises par la société Selgy en 2012 et 2013 par rapport au tarif convenu entre et reporté dans les bons de commande de Cdiscount pour un montant de 18 246,41 euros TTC

La société Cdiscount indique que les notes de débit ont été émises lorsque des écarts de prix sont constatés entre les montants facturés par la société Selgy et les montants figurant sur les commandes de la société Cdiscount, ce afin de faire correspondre la facturation au prix commandé.

La Selafa MJA conteste la demande de la société Cdiscount et indique, au surplus, que les créances ayant été cédées il n'était pas possible de réaliser des compensations.

En l'espèce, la société Cdiscount ne produit aucune facture de la société Selgy pour justifier l'écart de prix entre la commande et la facture. Par ailleurs, pour justifier de tarifs pour des commandes toutes antérieures au 11 mars 2013, elle communique un courriel entre les parties du 13 mars 2013, dans lequel des prix étaient convenus. Ce courriel ne peut donc être invoqué pour justifier des écarts de prix pour des commandes antérieures.

Il y a donc lieu de rejeter la demande de la société Cdiscount de ce chef.

L'annulation de diverses notes de débit, pour un montant de 36 282,03 euros, reconnue par la société Cdiscount, est prise en compte dans le montant total fixé.

En conséquence, il y a lieu de fixer la créance de la société Cdiscount au passif de la société Selgy à la somme totale de 283 404,11 euros.

Sur l'annulation des commandes par la société Cdiscount

La Selafa MJA reproche à la société Cdiscount d'avoir annulé des commandes, en 2011 pour un montant total de 473 177,45 euros TTC et en 2012 pour un montant total de 4 383 245,27 euros TTC. Elle estime donc son préjudice à hauteur de la perte de marge en raison de l'annulation des commandes, correspondant à la somme de 2 070 882 euros, invoquant l'inexécution contractuelle de la société Cdiscount.

La société Cdiscount indique que certaines commandes ont finalement été reportées et non pas annulées, et que les commandes ont été annulées en raison des retards de livraison de la société Selgy, de la nécessaire flexibilité du marché, et qu'en tout état de cause, il n'est pas démontré que l'annulation lui est imputable. Elle relève également que les demandes ne sont pas justifiées.

Aux termes de l'article 1315 ancien du Code civil, applicable en l'espèce, " celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré, doit justifier le payement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation. "

En application de l'article 1134 ancien du Code civil précité, applicable en l'espèce, une commande acceptée par un fournisseur engage celui qui a commandé les produits. En conséquence, sauf à justifier de motifs légitimes, le client est tenu d'acquitter le prix convenu.

La société Cdiscount invoque un fonctionnement habituel entre les parties afin de lui assurer une certaine flexibilité. Toutefois, il n'appartient pas aux fournisseurs de supporter les évolutions du marché entre la date de la commande et la date de la livraison, alors qu'il a engagé des frais pour procéder à la commande et stocker les produits commandés. La société Cdiscount ne peut revenir unilatéralement sur ses engagements contractuels, au seul motif que ses stocks ou le marché ne justifient plus la commande réalisée. En outre, il n'appartient pas à la société Selgy d'établir que l'annulation n'est pas de son fait. Au contraire, c'est à la société Cdiscount de démontrer que son obligation est éteinte.

La Selafa MJA communique au soutien de sa demande :

- les bons de commandes de la société Cdiscount,

- les courriels d'annulation.

Il est donc établi la réalité des commandes litigieuses par la Selafa MJA.

La société Cdiscount conteste les annulations de 6 commandes en 2011. Toutefois, elle ne communique pas les factures qui y sont afférentes.

En conséquence, l'annulation des commandes pour l'année 2011 est établie pour un montant de 473 177,45 euros TTC.

S'agissant des annulations de commandes au cours de l'année 2012, il apparaît que le volume des annulations est sans commune mesure avec celui de l'année 2011. Cette pratique conduit nécessairement à des difficultés d'organisation et de trésorerie du fournisseur. En outre, il apparaît que dans les courriels d'annulation des commandes, les motifs invoqués ne sont pas les retards dans les livraisons ou toute autre faute imputable à la société Selgy, à l'exception d'une commande au mois de janvier 2012.

Par ailleurs, la société Cdiscount ne démontre pas que les 8 commandes, dont elle soutient qu'elles ont été annulées en raison d'un retard de livraison, n'ont pas été livrées dans les délais annoncés lors de la commande. De même, la société Cdiscount ne justifie pas que parmi les commandes litigieuses, certaines ont été annulées partiellement en raison de commandes incomplètes livrées à la date convenue.

Le courrier du 31 août 2012 envoyé par la société Cdiscount à la société Selgy pour lui faire part des difficultés de fonctionnement ne peut justifier les annulations de commande, en ce qu'aucun lien n'est fait entre les problèmes relevés et les annulations de commande auxquelles la société Cdiscount aurait été contrainte de procéder en raison de ces dysfonctionnements.

La société Cdiscount ne pouvait donc procéder aux annulations de commandes, ces annulations constituant des inexécutions contractuelles.

En conséquence, l'annulation des commandes pour l'année 2012 est établie pour un montant de 4 383 245,27 euros TTC.

La Selafa MJA, en qualité de mandataire liquidateur de la société Selgy, soutient que son préjudice est constitué par la perte de marge, consécutive à ces annulations de commande, fixant sa marge avec la société Cdiscount à 51 %.

La société Cdiscount conteste le principe de l'indemnisation au motif que le préjudice invoqué est le même que celui au titre duquel elle forme une demande sur le fondement de la rupture brutale des relations commerciales.

Il apparaît que la Selafa MJA forme sa demande d'indemnisation au titre des annulations de commande sur les années 2011 et 2012, alors qu'elle indique que les relations commerciales ont été brutalement partiellement rompues à compter du 1er janvier 2013. Les deux chefs de demandes sont donc distincts : la Selafa MJA ne cumule donc pas les actions pour réparer le même préjudice sur le fondement du droit commun de la responsabilité contractuelle et de la rupture brutale des relations commerciales, s'agissant de périodes distinctes.

Il ressort des éléments du dossier, du secteur d'activité, et en l'absence de tout autre élément contraire, que le taux de marge de la société Selgy avec la société Cdiscount doit être fixé 51 %.

La société Selgy a perdu la marge qu'elle aurait pu percevoir si les commandes n'avaient pas été annulées par la société Cdiscount en 2011 et 2012.

Il y a donc lieu de calculer le préjudice subi sur la base des montants des bons de commandes HT. Le préjudice total s'élève donc à la somme de 2 070 882 euros.

Il y a lieu d'infirmer le jugement en ce qu'il a rejeté la demande formulée en réparation du préjudice subi des annulations de commandes en 2011 et 2012.

Statuant à nouveau, il y a lieu de condamner la société Cdiscount à verser à la Selafa MJA, en qualité de mandataire liquidateur de la société Selgy, la somme de 2 070 882 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi des annulations de commandes en 2011 et 2012.

Sur la rupture des relations commerciales établies par la société Cdiscount avec la société Selgy

La Selafa MJA, en qualité de mandataire liquidateur de la société Selgy, reproche à la société Cdiscount d'avoir annulé des commandes au cours des années 2011 et 2012, de ne pas avoir acquitté certaines factures, et remplacé en 2013 ses produits par ceux de marques qu'elle avait acquises. Elle en conclut, qu'étant en situation de dépendance économique, la société Cdiscount a rompu brutalement les relations commerciales à compter du 1er janvier 2013.

La société Cdiscount conteste toute rupture brutale, expliquant qu'elle continuait à passer des commandes à la société Selgy jusqu'à la date de l'ouverture de la procédure de liquidation judiciaire, ayant un encours de commandes non livrées au mois d'août 2013 d'un montant total de 309 322,47 euros avec la société Selgy. Elle relève que le décalage de ses commandes était dû aux inexécutions contractuelles de la société Selgy et qu'en tout état de cause, au regard des fautes commises par la société Selgy dans l'exécution de leur contrat, la rupture était justifiée.

Aux termes de l'article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce :

" Engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers (...) de rompre unilatéralement, même partiellement, une relation commerciale établie, sans préavis écrit tenant compte de la durée de la relation commerciale et respectant la durée minimale de préavis déterminée, en référence aux usages du commerce, par des accords interprofessionnels. "

Le principe des relations commerciales établies entre les sociétés Cdiscount et Selgy n'est pas contesté. Les parties s'opposent sur la responsabilité de la rupture des relations commerciales, la date de la rupture des relations commerciales et sur les fautes commises par la société Selgy dans l'exécution du contrat.

En l'espèce, il ressort des pièces communiquées que de nombreuses commandes étaient encore adressées par la société Cdiscount entre les mois de janvier et juin 2013 à la société Selgy. Il n'est pas contesté que la société Cdiscount a commandé à la société Selgy entre le 1er janvier et le 16 juillet 2013 pour 526 556,56 euros TTC de produits, correspondant à 47 commandes.

Les griefs invoqués par la société Selgy pour justifier la réalité de la rupture brutale des relations commerciales portent sur les relations commerciales des années 2011 et 2012 évoquées ci-dessus, à savoir les annulations unilatérales des commandes, l'absence de paiement de certaines factures, l'émission de notes de débits injustifiées, et l'absence de commandes à compter du mois de juin 2013, ne peuvent caractériser une rupture brutale des relations commerciales établies à compter du 1er janvier 2013 par la société Cdiscount.

Par ailleurs, il est établi que la société Cdiscount continuait à s'adresser à la société Selgy, l'encours de commandes non livrées au mois d'août 2013, date de la décision de placement de celle-ci en liquidation judiciaire, s'élevant à la somme de 309 322,47 euros, montant non contesté.

Il ressort des éléments du dossier que les relations contractuelles ont perduré après le 1er janvier 2013 et que la rupture des relations commerciales est intervenue à la date de la décision de placement de la société Selgy en liquidation judiciaire.

La Selafa MJA, en qualité de mandataire liquidateur de la société Selgy, ne démontre donc pas que la rupture des relations commerciales avec la société Cdiscount a été brutale au 1er janvier 2013.

Il y a donc lieu d'infirmer le jugement en ce qu'il a condamné la SA Cdiscount à verser à la Selafa MJA, agissant en qualité de liquidateur de la SARL Selgy, la somme de 725 730 euros à titre d'indemnité pour absence de préavis lié à la rupture brutale des relations commerciales.

Statuant à nouveau, il y a lieu de débouter la Selafa MJA, agissant en qualité de liquidateur de la SARL Selgy, de sa demande de réparation de son préjudice pour rupture brutale des relations commerciales.

Sur les dépens et l'application de l'article 700 du Code de procédure civile

Le sens du présent arrêt conduit à confirmer le jugement sur les dépens et l'application qui y a été équitablement faite des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.

La société Cdiscount doit être condamnée aux dépens d'appel, qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile, ainsi qu'à payer à la Selafa MJA, agissant en qualité de liquidateur de la SARL Selgy, la somme supplémentaire de 8 000 euros par application de l'article 700 du Code de procédure civile en cause d'appel.

Le sens du présent arrêt conduit à rejeter la demande par application de l'article 700 du Code de procédure civile formulée par la société Cdiscount.

Par ces motifs, LA COUR, Déclare irrecevable la demande de la Selafa MJA, agissant en qualité de liquidateur de la SARL Selgy, en condamnation de la société Cdiscount à lui verser la somme de 1 359 558 euros TTC au titre des notes de débit indûment déduites des règlements et facturées par la société Cdiscount auprès de la société HSBC Factoring, majorée du taux d'intérêt légal à compter de la signification de l'assignation, en application des articles 1134 et 1153 du Code civil, Infirme le jugement en ce qu'il a : - condamné la SA Cdiscount à verser à la Selafa MJA, agissant en qualité de liquidateur de la SARL Selgy, la somme de 380 700,33 euros, en règlement des factures restées impayées de 2012 à 2013, assortie des intérêts au taux légal à compter du 21 mai 2014, - donné acte à la SA Cdiscount qu'elle reconnaît que sa créance déclarée à la liquidation de la SARL Selgy doit être minorée de 36 282,03 euros, - rejeté la demande formulée en réparation du préjudice subis des annulations de commandes en 2011 et 2012, - condamné la SA Cdiscount à verser à la Selafa MJA, agissant en qualité de liquidateur de la SARL Selgy, la somme de 725 730 euros à titre d'indemnité pour absence de préavis lié à la rupture brutale des relations commerciales, Le Confirme pour le surplus, Statuant à nouveau, Déboute la Selafa MJA, agissant en qualité de liquidateur de la SARL Selgy, de sa demande en paiement de la somme de 380 700,33 euros, au titre des factures restées impayées de 2012 à 2013, assortie des intérêts au taux légal à compter du 21 mai 2014, Fixe la créance de la société Cdiscount au passif de la société Selgy à la somme totale de 283 404,11 euros, Condamne la société Cdiscount à verser à la Selafa MJA, en qualité de mandataire liquidateur de la société Selgy, la somme de 2 070 882 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subis des annulations de commandes en 2011 et 2012. Déboute la Selafa MJA, agissant en qualité de liquidateur de la SARL Selgy, de sa demande de réparation de son préjudice pour rupture brutale des relations commerciales, Y ajoutant, Condamne la société Cdiscount aux dépens d'appel, qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile, ainsi qu'à payer à la Selafa MJA, agissant en qualité de liquidateur de la SARL Selgy, la somme supplémentaire de 8 000 euros par application de l'article 700 du Code de procédure civile en cause d'appel, Rejette toute autre demande.