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Décisions

ADLC, 10 octobre 2017, n° 17-DCC-165

AUTORITÉ DE LA CONCURRENCE

Décision

relative à la prise de contrôle exclusif de la société STVA par le Groupe CAT

ADLC n° 17-DCC-165

10 octobre 2017

L'Autorité de la concurrence,

Vu le dossier de notification adressé complet au service des concentrations le 5 septembre 2017, relatif à la prise de contrôle exclusif de la société STVA par le groupe CAT, formalisée par un contrat d'acquisition d'actions en date du 15 juin 2017 ; Vu le livre IV du Code de commerce relatif à la liberté des prix et de la concurrence, et notamment ses articles L. 430-1 à L. 430-7 ; Vu les éléments complémentaires transmis par les parties au cours de l'instruction ; Adopte la décision suivante:

I. Les entreprises concernées et l'opération

1. La société Global Automobile Logistics (GAL) est la société mère d'un ensemble de filiales formant le groupe Compagnie d'Affrètement et de Transport (ci-après : " Groupe CAT "). Elle est détenue à 100 % par la société Two Continents Logistics (TLC), société de droit espagnol, et ultimement par une personne physique, M. Manuel Antelo. Le Groupe CAT est actif dans le secteur de la logistique pour véhicules automobiles neufs, dite de " logistique automobile ", activité qui regroupe l'ensemble des opérations nécessaires pour stocker, préparer et acheminer des véhicules automobiles de leur lieu de production jusqu'au destinataire final. Il dispose de filiales implantées dans 26 pays, réparties essentiellement en Europe, ainsi qu'en Amérique du Sud et en Afrique du Nord, et offre ses services dans plus de 80 pays, par l'intermédiaire de ses 65 centres logistiques dont 8 sont situés en France.

2. La Société de Véhicules Automobiles (ci-après " STVA ") est active dans le secteur de la logistique automobile. Elle est ultimement contrôlée par le Groupe SNCF Mobilités. Elle dispose de 16 centres logistiques en France.

3. Le 15 juin 2017 les parties ont conclu un contrat d'acquisition d'actions aux termes duquel le Groupe CAT s'engage à acquérir l'intégralité du capital et des droits de vote de la société STVA. En ce qu'elle se traduit par la prise de contrôle exclusif de STVA par CAT, l'opération

2 notifiée constitue une opération de concentration au sens de l'article L. 430-1 du Code de commerce.

4. Les entreprises concernées réalisent ensemble un chiffre d'affaires total sur le plan mondial de plus de 150 millions d'euros (Manuel Antelo: [...] d'euros au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2016, STVA : [...] d'euros pour le même exercice). Chacune réalise en France un chiffre d'affaires supérieur à 50 millions d'euros (Manuel Antelo: [...] d'euros au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2016 ; STVA : [...] d'euros pour le même exercice). Compte tenu de ces chiffres d'affaires, l'opération ne revêt pas une dimension communautaire. En revanche, les seuils de contrôle mentionnés au point I de l'article L. 430-2 du Code de commerce sont franchis. La présente opération est donc soumise aux dispositions des articles L. 430-3 et suivants du Code de commerce relatifs à la concentration économique.

II. Délimitation des marchés pertinents

5. Les parties sont simultanément actives dans les secteurs des services de logistique contractuelle générale et des services de logistique pour véhicules automobiles neufs ainsi que sur le marché des prestations de transport

1. MARCHÉS DE SERVICES

a) Marchés des services de logistique

6. La pratique décisionnelle a identifié un marché des services de logistique générale ou " contractuelle " consistant à associer les différents maillons d'une chaîne d'approvisionnement de marchandises entre un point d'origine et un point d'arrivée, et ce afin de gérer de manière optimale le flux et le stockage desdites marchandises. Cette activité peut s'assimiler à une offre globale, dans la mesure où elle combine un ensemble de services tels que, notamment, le stockage, l'inventaire des stocks, la prise de commande et le transport de marchandises en un temps et un lieu définis par le client1.

7. La Commission européenne a envisagé l'existence d'un marché de services de logistique propres aux véhicules automobiles, distinct des services de logistique générale.

Les services de logistique " automobile " regroupent généralement un ensemble d'opérations nécessaires pour stocker, préparer (peinture, pose d'accessoires etc.), organiser et gérer l'acheminement des véhicules de leur lieu de production ou de déchargement jusqu'au client final.

La Commission a ainsi relevé que ces services répondent aux besoins particuliers de certains clients, tels que les constructeurs automobiles, loueurs automobiles, gestionnaires de flottes automobiles d'entreprises, etc., pour lesquels ces services ne sont pas substituables avec d'autres services de logistique générale.

Elle a souligné également qu'ils requièrent de la part des offreurs un savoir-faire particulier, des moyens matériels et humains spécifiques, comprenant notamment des plateformes spécialisées et des parcs de stockage de plusieurs hectares.

La partie notifiante ainsi que la majorité des répondants au test de marché réalisé pour les besoins de l'instruction de la présente opération considèrent que les services de logistique automobile, eu égard à leur spécificité, constituent un marché distinct du marché général des services de logistique et non un simple segment de ce dernier. En tout état de cause, cette question peut être laissée ouverte dans la mesure où elle est sans incidence sur les résultats de l'analyse concurrentielle.

8. Au sein de ce marché, la Commission a envisagé, tout en laissant la question ouverte, de distinguer entre les services de logistique dédiés aux véhicules particuliers et aux véhicules utilitaires légers, d'une part, et ceux destinés aux camions et autres véhicules industriels lourds, d'autre part. La partie notifiante estime cependant que cette distinction n'est pas pertinente dans la mesure où une part importante des acteurs est présente sur les deux segments et où tous les acteurs de la logistique automobile ont la possibilité d'offrir, rapidement et sans investissement significatif, des prestations relatives aux véhicules lourds par le recours à la sous-traitance.

Toutefois, une large majorité des répondants au test de marché considère qu'il convient de distinguer selon ces catégories de véhicules qui ne nécessitent pas les mêmes matériels de transport et pour lesquelles les exigences des clients diffèrent.

9. La Commission a également envisagé une segmentation par type de service proposé. En effet, les services de logistique automobile incluent trois types de prestations, qui sont en principe offertes de manière groupée mais peuvent l'être aussi séparément : (i) le transport amont, de l'usine au centre de stockage, dit " transport d'approche ", (ii) le stockage et la préparation des véhicules (réalisation d'opérations esthétiques et de transformation sur les véhicules présents dans les parcs de stockage) et (iii) la livraison aval des véhicules depuis le centre de stockage jusqu'au client final (concessionnaires, loueurs, gestionnaires de flotte de véhicules).

L'Autorité de la concurrence a envisagé une segmentation voisine entre (i) le stockage des véhicules (conservation temporaire des véhicules sur des plateformes dédiées), (ii) la préparation des véhicules avant leur livraison au client final et (iii) le transport des véhicules depuis l'usine jusqu'au client final.

10. Les parties ne souscrivent pas à cette segmentation et font valoir que les clients des prestataires de services de logistique automobile ont des besoins de transport, de préparation et de stockage qui s'inscrivent dans l'acquisition d'une offre de service globale relevant d'un processus d'achat unique. Ils indiquent en outre que la plupart des acteurs du secteur offre des prestations globales et que la vente de prestations séparées n'intervient que de façon marginale.

Toutefois, la majorité des répondants au test de marché considère que si les prestations composant l'activité de logistique automobile sont le plus souvent vendues de façon globale, il existe des marchés distincts correspondant à chacune d'entre elles, dans la mesure où ces prestations peuvent être proposées isolement en fonction des besoins propres du client ou encore être confiées en sous-traitance à un concurrent ou à un acteur spécialisé dans une seule de ces activités. En tout état de cause, cette question peut être laissée ouverte dans la mesure où elle est sans incidence sur les résultats de l'analyse concurrentielle.

11. Enfin, la pratique décisionnelle a envisagé de segmenter les services de logistique automobile en fonction du mode de transport employé pour le transport des véhicules (mer, route ou rail), tout en reconnaissant une substituabilité partielle entre ces différents modes.

La majorité des répondants au test de marché considère que cette segmentation est pertinente au regard de l'absence de substituabilité entre les différents modes de transport du point de vue de l'offre.

Au cas d'espèce, la question de la délimitation précise de ces différents marchés peut cependant être laissée ouverte dans la mesure où, quelle que soit la segmentation retenue, les conclusions de l'analyse concurrentielle demeurent inchangées.

b) Marché du transport de véhicules automobiles

12. La Commission européenne a envisagé un marché spécifique du transport de véhicules automobiles, verticalement intégré avec celui des services de logistiques automobile3. Ce marché couvre l'activité de transport effectif de véhicules automobiles sur lequel sont actifs des spécialistes du transport de véhicules comme des logisticiens automobiles. En effet, pour la réalisation de l'activité transport, composante de la prestation de logistique, les logisticiens automobiles peuvent soit utiliser leur propre flotte de véhicules, soit faire appel à des sous-traitants.

Par ailleurs, la pratique décisionnelle a envisagé une segmentation du marché du transport de marchandises selon le mode de transport (aérien ; maritime ; ferroviaire ; par route ; par voies navigables)4. La majorité des répondants au test de marché considère qu'il y a lieu de distinguer un marché des services de transport de véhicules neufs segmenté en fonction du mode de transport utilisé.

13. Au cas d'espèce, les parties sont simultanément actives sur le marché du transport terrestre de véhicules automobiles.

14. La question de la délimitation précise de ces différents marchés peut cependant être laissée ouverte dans la mesure où, quelle que soit la segmentation retenue, les conclusions de l'analyse concurrentielle demeurent inchangées.

B. MARCHÉS GÉOGRAPHIQUES

a) Marchés des services de logistique

15. Les marchés des services de logistique générale ont été définis par la pratique décisionnelle comme étant de dimension nationale5.

16. La pratique décisionnelle considère que les marchés de la logistique automobile sont de dimension nationale voire européenne, tout en laissant la question ouverte.

La majorité des répondants au test de marché estime que les marchés des services de la logistique automobile revêtent une double dimension : (i) européenne, dans la mesure où les acteurs du marché sont actifs dans plusieurs États membres et répondent à une demande des constructeurs au niveau européen et (ii) nationale, dès lors que certains contrats sont passés pour le territoire d'un seul État et que la mise en œuvre de prestations logistiques vers les clients finals situés dans un État nécessite de disposer mobiliser certains actifs (flotte, centre de stockages etc.) dans ce même État.

La majorité des répondants (concurrents et clients) considère que le marché n'est pas infranational.

17. La Commission, tout en laissant la question ouverte, a envisagé que l'éventuel segment de l'activité de stockage et de transport aval puisse revêtir une dimension infranationale. Au cas d'espèce, la moitié des concurrents interrogés estime que les activités de stockage et de 3 Décision n°COM/M.2411 précitée.

5 transport aval sont de dimension locale correspondant à des zones d'un rayon de 100 à 500 km autour des plateformes de stockage. En tout état de cause, cette question peut être laissée ouverte dans la mesure où elle est sans incidence sur les résultats de l'analyse concurrentielle.

18. Au cas d'espèce, l'analyse est menée aux niveaux européen, français et, s'agissant de l'éventuel segment du stockage et du transport aval, dans huit zones locales d'un rayon d'environ 100 à 500 kilomètres dans lesquelles sont concentrés les différents centres de logistique automobile en France (Nord; Normandie ; Nantes/Saint Nazaire ; Sud-ouest ; Île de France ; Est ; région lyonnaise ; Sud-Est).

b) Marché du transport de véhicules automobiles

19. La pratique décisionnelle considère que les marchés du transport routier de marchandises et leurs éventuels segments revêtent généralement une dimension nationale malgré une tendance à l'européanisation7.

III. Analyse concurrentielle

A. EFFETS HORIZONTAUX

1. M ARCHÉ DES SERVICES DE LOGISTIQUE GÉNÉRALE

20. Sur le marché des services de logistique générale, la nouvelle entité détiendra, selon les estimations de la partie notifiante, une part de marché inférieure à [0-5] % aux niveaux européen et français.

2. MARCHÉ DES SERVICES DE LOGISTIQUE AUTOMOBILE

21. Sur le marché européen des services de logistique automobile, la part de marché de la nouvelle entité demeurera inférieure à [10-20] %, quel que soit le segment, à l'exception du segment du transport d'approche par rail où elle sera de [20-30] % en volume. Sur ces marchés, la nouvelle entité continuera de faire face à la concurrence d'opérateurs tels que Gefco, Groupe Charles André (ci-après " GCA "), Mosolf, Deutsche Bahn, Tradisa, BLG, ARS Altmann, Koopman ou Frankenbach.

22. Sur le marché français des services de logistique automobile, la part de marché de la nouvelle entité n'excédera pas, selon les parties notifiantes, [30-40] % en valeur8, et [20-30] % en volume9 avec un incrément de part de marché de [5-10] points. CAT restera confronté à la concurrence d'opérateurs important tels que Gefco ou GCA qui détiennent respectivement 25 à 30% et 10 à 15 % de part de marché. Dans l'hypothèse d'un marché limité aux véhicules particuliers et utilitaires légers, sur lequel l'activité des parties se chevauche, la part de marché de la partie notifiante n'excèdera pas [30-40] % en valeur et [20-30] % en volume, avec un incrément de part de marché respectivement de [5-10] et de [5-10] points. Elle continuera d'être exposée à la concurrence de plusieurs acteurs notamment de Gefco (25 à 30 %) et GCA (10 à 15 %) ainsi qu'à la concurrence potentielle d'acteurs européens, tels que Mosolf ou Tradisa, susceptibles d'intégrer le marché français.

23. Selon la segmentation par service, la part de marché de la nouvelle entité n'excédera pas [20-30] %, quelle que soit l'activité considérée, avec un incrément compris entre [0-5] et [5- 10]points.

24. Sur d'éventuels marchés locaux du stockage et de la distribution à l'aval au sein du marché français, l'activité des parties se chevauche dans trois zones : l'Est de la France, la région lyonnaise et le Sud-Est de la France.

25. En ce qui concerne les zones Est et région lyonnaise, la nouvelle entité disposera d'une part de marché respectivement de [20-30] % et [30-40] % en volume10, avec un incrément de [5-10] et [10-20] points.

26. En ce qui concerne la zone Sud Est, correspondant à la zone dans laquelle sont distribués [70-80] % des véhicules stockés dans le centre de logistique STVA de Miramas (13 140) et comprenant les départements des Bouches-du-Rhône, du Gard, du Vaucluse, des Alpes de Haute Provence, du Var, de l'Hérault et des Alpes Maritime, la nouvelle entité détiendra [50-60] % des capacités de stockage, avec un incrément de [20-30] points.

27. En premier lieu, la partie notifiante fait toutefois valoir que les besoins des constructeurs sont détachés d'éventuelles contraintes liées à la proximité des destinataires finals des véhicules ou à la distance maximalequi pourrait être parcourue pour le transport d'un véhicule dans la mesure où le choix d'un logisticien par le client est déterminé uniquement par rapport à la capacité du logisticien à réaliser le transport d'un point d'origine à un point de livraison, indépendamment des modalités techniques internes d'organisation de la prestation.

28. En deuxième lieu, l'instruction a montré que le fait de disposer d'un centre de stockage à proximité de la zone de distribution au client final n'est aucunement indispensable pour la réalisation d'une prestation de logistique automobile. En effet, il résulte de l'instruction que certains acteurs du marché desservent l'ensemble du territoire français à partir d'un seul centre, parfois situé en dehors du territoire national. En outre, l'analyse de la zone de distribution de plusieurs centres de STVA montre que si l'essentiel de la zone de distribution de ces centres correspond généralement aux départements limitrophes de celui d'implantation, des véhicules sont toutefois distribués dans l'ensemble des départements français à partir de ces mêmes centres. En outre, certains centres ne disposent pas d'une zone de distribution isométrique et constituent le point de départ de la livraison de véhicules dans quatre à cinq zones géographiques discontinues réparties dans l'ensemble du territoire national. Enfin, certains constructeurs automobiles possèdent leurs propres facilités de stockage qu'ils mettent à disposition de leur prestataire de logistique automobile.

29. En troisième lieu, il ressort de l'instruction que l'activité de prestataire de services de logistique automobile, dans chacune de ses composantes, n'est soumise à aucune contrainte réglementaire particulière. Si cette activité à forte intensité capitalistique nécessite des investissements initiaux (flotte de camions, wagons, etc.), les logisticiens ont recours à la sous-traitance pour une ou plusieurs branches de la prestation globale de logistique délivrée à leurs clients, de sorte qu'ils ne sont pas obligés d'être en mesure de réaliser eux-mêmes l'intégralité de la prestation délivrée.

En outre, l'acquisition de surface de stockage n'est soumise à aucune contrainte autre que la disponibilité de terrains.

30. En quatrième lieu, ainsi que l'indique l'Autorité dans ses lignes directrices "le pouvoir de marché d'une entreprise peut être efficacement limité par la puissance d'achat ou contre-pouvoir des acheteurs."11. Au cas d'espèce, la majorité des concurrents interrogés estime, à l'instar de la partie notifiante, que le pouvoir de négociation dont disposent les acteurs de la logistique automobile face aux constructeurs automobiles est faible. En outre, la majorité des clients interrogés indique qu'ils pourraient facilement s'adresser à un autre prestataire en cas de hausse des prix pratiqués par la nouvelle entité.

31. En cinquième lieu, le marché des services de logistique automobile fonctionne assezlargementpar appels d'offres, dont l'instruction a montré qu'ils étaient passés aux niveaux européen ou national pour des contrats d'une durée comprise en 1 et 3 ans. Comme l'observe l'Autorité dans ses lignes directrices relatives au contrôle des concentrations, dans un tel environnement concurrentiel " un opérateur qui n'a pas été sélectionné lors d'une procédure mais qui demeure capable de présenter une candidature crédible continue d'exercer une pression concurrentielle sur le vainqueur. L'analyse du positionnement de chaque offreur doit donc tenir compte de cette dynamique, puisque l'opérateur perdant aujourd'hui est le concurrent de demain. Or, les parts de marché des offreurs ne permettent pas de mesurer correctement cet aspect du fonctionnement concurrentiel : même si la part de marché d'un opérateur perdant à l'issue d'une procédure d'appel d'offres demeure modeste, celui-ci reste susceptible d'exercer une pression concurrentielle significative sur le titulaire du contrat lors de son renouvellement ".

32. Si la majorité des répondants au test de marché considère que les parties sont de proches concurrents en termes d'offre, de capacités de stockage des véhicules et de prix des prestations, les données recueillies au cours de l'instruction ont montré que les parties candidataient rarement aux mêmes appels d'offres et que ceux qu'elles avaient perdus étaient remportés par leurs principaux concurrents tels que Gefco, GCA ou Mosolf.

À l'issue de l'opération, les concurrents de la nouvelle entité pourront continuer de candidater aux mêmes appels d'offres qui remettent en cause régulièrement la concurrence sur ces marchés.

33. Sur un éventuel avantage conféré par la détention de centres de logistique raccordés au réseau ferroviaire dans une même zone locale, l'instruction a montré que, pour les acteurs utilisant le rail comme mode de transport d'approche, l'utilisation de centres de stockages disposant d'un raccordement au réseau ferroviaire pouvait paraître nécessaire pour continuer de desservir certaines zones de distribution sans modifier l'économie générale de leur schéma logistique.

34. L'Autorité a ainsi vérifié si la réunion dans une même entité de plusieurs centres de logistiques dotés d'un raccordement au réseau ferroviaire était susceptible, en supprimant une alternative, de verrouiller l'accès des concurrents à un intrant et de conduire ainsi à un renchérissement du coût de la prestation pour le client final par un effet de nature conglomérale.

35. Ainsi, dans la zone du Sud-Est de la France, correspondant à la zone de distribution du centre de logistique STVA de Miramas, seule zone locale potentiellement problématique, STVA exploite deux centres logistiques raccordés au réseau ferroviaire, l'un à Miramas d'une surface de [confidentiel] m² et l'autre à Mougins (06250) d'une surface de [confidentiel] m². Le groupe CAT exploite quant à lui un centre à Rognac (13340) d'une surface de 180 000 m² et dispose d'une surface autre de 2 000 m² à Marseille (13000). GCA dispose d'une surface de [confidentiel] m² dans le port de Fos-sur-Mer (13270). Enfin, un conçurent local, Nicolas Frères, dispose d'un surface de 60 000 m² à Fos-sur-Mer et de 30 000 m² à Marseille. En revanche, Gefco, selon les réponses qu'il a communiquées dans le cadre du test de marché, n'exploite aucun centre de stockage dans la zone. Selon les éléments recueillis dans le cadre de l'instruction, Gefco entretient des relations contractuelles avec STVA qui assure, en qualité de sous-traitant, la distribution aval des véhicules acheminés par Gefco par voie ferroviaire dans les centres STVA de la zone. Les véhicules concernés dont Gefco assure la logistique occupent, selon la partie notifiante, [10-20] % de la surface du centre de Mougins et [20-30] % de celui de Miramas, soit une surface totale de [confidentiel] m². L'opération entraîne la réunion dans la même entité de [40-50] % de la surface de stockage raccordée au réseau ferroviaire dans la zone Sud-Est, avec un incrément de [10-20] points imputable essentiellement à l'acquisition du centre CAT de Rognac. Toutefois, le taux d'occupation du centre de Rognac est de [90-100] % selon la partie notifiante. Par suite, le centre de Rognac, compte tenu de sa capacité limitée et de sa saturation ne constituait pas, avant l'opération, une alternative crédible aux centres STVA pour un concurrent tel que Gefco. Ainsi, l'opération est neutre de ce point de vue. En outre, l'instruction a montré que le nombre de centres disposant d'un raccordement au réseau ferroviaire n'est pas une donnée immuable et que tout logisticien qui éprouve le besoin de posséder en propre un centre de logistique bénéficiant d'un raccordement au réseau ferroviaire peut présenter un projet de construction d'une " installation terminale embranchée " auprès de la société SNCF Réseau. La construction d'une telle installation peut prendre de plusieurs mois à plusieurs années en fonction de la complexité du projet.

Au surplus, dans la mesure où STVA réalise, selon la partie notifiante, [10-20] % de son chiffre d'affaires avec Gefco qui constitue l'un de ses principaux clients, une stratégie de verrouillage de l'accès aux centres de stockage de la nouvelle entité, qui serait susceptible de faire perdre à la nouvelle entité un client important pour la sous-traitance du transport aval, n'est pas crédible. Enfin, ainsi qu'il a été dit, les constructeurs automobiles sont en capacité de s'adresser à un concurrent en cas de hausse des prix de leur prestataire de services de logistique automobile.

36. Par suite, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur le rôle de la détention de centres logistiques raccordés au réseau ferroviaire dans l'appréciation du pouvoir de marché des acteurs de la logistique automobile, l'opération n'est, en tout état de cause, pas de nature à porter atteinte à la concurrence par le biais d'un avantage conféré par la détention de centres de logistique raccordés au réseau ferroviaire dans une même zone locale.

37. Compte tenu de ce qui précède, l'opération n'est pas de nature à porter atteinte à la concurrence par le biais d'effets horizontaux sur les marchés des services de logistique automobile.

3. MARCHÉ DU TRANSPORT DE VÉHICULES AUTOMOBILES

38. Sur les marchés européen et français du transport de véhicules automobiles, la part de marché de la nouvelle entité n'excèdera pas [10-20] %, quelle que soit la segmentation envisagée, avec un incrément compris entre [0-5] et [5-10] points.

39. Par suite, l'opération n'est pas de nature à porter atteinte à la concurrence par le biais d'effets horizontaux sur les marchés du transport de véhicules automobiles.

B. EFFETS VERTICAUX

40. L'opération entraîne un renforcement vertical de la nouvelle entité dans la mesure où les parties sont actives sur les marchés national et européen de la logistique automobile ainsi que sur les marchés national et européen du transport de véhicules automobiles. Il convient toutefois de rappeler que la pratique décisionnelle des autorités de la concurrence considère généralement qu'un risque d'effet vertical peut être écarté dès lors que la part de l'entreprise issue de l'opération sur les marchés concernés ne dépasse pas 30 %.

41. En l'espèce, selon les estimations de la partie notifiante, la part de marché de la nouvelle entité est inférieure à 30 % tant sur le marché des services de logistique automobile

12 que sur celui du transport de véhicules automobiles, quelle que soit la segmentation envisagée. La nouvelle entité continuera en outre de subir la pression concurrentielle de nombreux acteurs, transporteurs ou logisticiens.

42. L'opération n'est pas donc pas susceptible de porter atteinte à la concurrence par le biais d'effets verticaux.

43. Il découle de l'ensemble de ces éléments que l'opération notifiée n'est pas de nature à porter atteinte à la concurrence sur l'ensemble des marchés concernés.

DÉCIDE

Article unique: L'opération notifiée sous le numéro 17-125 est autorisée.

NOTES :

1Voir notamment la décision de la Commission n°COMP/M.4786 du 18 mars 2008 Deutsche Bahn/Transfesa et les décisions de l'Autorité de la concurrence 10-DCC-48 du 2 juin 2010 relative à la prise de contrôle exclusif de la société Amonite SAS par la société Manuloc SA, 11-DCC-79 du 16 mai 2011 relative à la prise de contrôle conjoint de Transcosatal Finances par les sociétés Satar, Chabas et STEF-TFE Transport et n° 11-DCC-206 du 27 décembre 2011 relative à la prise de contrôle exclusif d'actifs du groupe Mory par la société Caravelle.

2 Voir notamment les décisions n°COM/M.2411 du 27 juin 2001 Autologic/TNT/Wallenius/Wilhelmsen / CAT JV du 25/02/2002 et n° COMP/M.4786 Deutsche Bahn/Transfesa du 18/03/2008 ainsi que la décision de l'Autorité de la concurrence n° 13-DCC-24 du 1er mars 2013 relative à la prise de contrôle exclusif de la société Anvil Finance par le Groupe Charles André.

4 Voir notamment la décision de la Commission COMP/M.4746 Deutshe Bahn/EWS du 6 novembre 2007 et la décision de l'Autorité de la concurrence n°13-DCC-132 du 23 septembre 2013 relative à la prise de contrôle exclusif de a société Ebrex France par le groupe STEF.

5 Voir notamment la décision n°COMP/M.2411 précitée et la décision

6 Voir les décisions n° COMP/M.2722 et COMP/M.4786 précitées.

7 Voir notamment les décisions de l'Autorité de la concurrence 11 -DCC-79 du 16 mai 2011 relative à la prise de contrôle conjoint de Transcosatal Finances par les sociétés Satar, Chabas et STEF-TFE Transport, 09 -DCC-13 du 16 juin 2009, relative à la prise de contrôle exclusif des sociétés Giraud CEE et Giraud Sidérurgie par la société Geodis, 13 -DCC-132 du 23 septembre 2013 relative à la prise de contrôle exclusif de la société Ebrex France par le groupe STEF et de la Commission COMP/M.2411 précitée.

8 Cette part de marché ne concerne que les véhicules particuliers et utilitaires légers, faute de données disponibles en valeur sur la base du marché général.

9 En nombre de véhicules.

10 Exprimées en capacités de stockage en m².

11 Lignes directrices de l'Autorité de la concurrence relatives au contrôle des concentrations, §428 ets.

12 À l'exception du marché français des services de logistique automobile des véhicules particuliers et utilitaires légers où elle est susceptible d'atteindre jusqu'à [30-40]% en volume (voir paragraphe 22 de la présente décision. Ce dépassement limité, sur un segment peu important, ne remet pas en cause l'analyse. Par ailleurs, ce dépassement doit être relativisé, dans la mesure où il correspond à l'hypothèse la plus conservatrice des estimations de la partie notifiante sur une base de marché ne comprenant pas les véhicules lourds