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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 4, 8 novembre 2017, n° 15-19976

PARIS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Anne Carole (SARL), Anne Carole Immobilier (SAS)

Défendeur :

Pupin, AC Plus (Sasu), GHF Immobilier (SARL) , Selarl Gauthier-Sohm (ès qual.), Pellegrini (ès qual.)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Luc

Conseillers :

Mmes Mouthon Vidilles, Comte

Avocats :

Mes Guizard, Mopars, Bensoussan, Carrière Jourdain

T. com. Paris, du 17 sept. 2015

17 septembre 2015

Faits et procédure

La société Anne Carole Immobilier, dirigée par Monsieur Richard Joseph, exploite un réseau de franchise d'agences immobilières situées dans le Val de Marne, en Seine Saint Denis et à Paris. La société Anne Carole est une société franchisée dudit réseau, dirigée également par Monsieur Richard Joseph.

En mars 2011, Monsieur Patrick Pupin, Monsieur Richard Joseph, Monsieur Thibault Joseph, Madame Annick Joseph, Monsieur Jean-Luc Belloni et la société Anne Carole ont décidé de s'associer pour constituer une société AC Plus ayant pour objet de développer une nouvelle activité de syndic de copropriété, sous l'enseigne Anne Carole, dans le cadre de contrats d'apport d'affaires conclus avec les franchisés dudit réseau qui le souhaitent. Le 14 avril 2011, cette société AC Plus a été créée, son siège social étant provisoirement fixé jusqu'au 14 mars 2012 dans les locaux de l'agence Anne Carole à Fontenay sous-Bois. Lors de l'assemblée générale de la société AC Plus du 25 octobre 2011 des désaccords sont apparus entre Monsieur Pupin et les autres actionnaires sur la rémunération de ce dernier et sur le projet d'acquisition par Monsieur Pupin du cabinet GHF Immobilier exerçant son activité à Vincennes, de sorte que le 30 décembre 2011, Monsieur Pupin a racheté la totalité des parts de la société AC Plus. La société AC Plus, n'ayant pas souhaité s'engager par un contrat de franchise, a signé à cette même date du 30 décembre 2011 avec la société Anne Carole Immobilier un contrat de licence d'enseigne d'une durée de 5 ans, lui permettant d'utiliser la marque et l'enseigne Anne Carole pour l'exercice principal de ses activités de syndic de copropriété.

De même, la société AC Plus et la société Anne Carole ont signé un accord d'apports d'affaires pour développer l'activité de syndic de copropriété dans le cadre d'une relation d'apporteur d'affaires réciproque.

Le 14 mars 2012, Monsieur Pupin a informé la société Anne Carole Immobilier de l'acquisition de la société GHF Immobilier et a sollicité l'autorisation de domicilier la société AC Plus dans les bureaux de la société GHF à Vincennes. Le 2 avril 2012, la société Préférence Plus Immobilier, franchisée de la société Anne Carole Immobilier à Vincennes, s'est opposée à cette implantation.

Par courrier du 7 mai 2012, la société Anne Carole Immobilier a résilié le contrat de licence avec effet immédiat et a mis en demeure la société AC Plus de lui verser certaines sommes.

Par acte d'huissier du 21 novembre 2012, la société Anne Carole Immobilier et la société Anne Carole ont fait assigner la société AC Plus, puis le 21 mai 2013 ont assigné en intervention forcée la société GHF Immobilier ainsi que Monsieur Pupin le 5 juin 2013 devant le Tribunal de commerce de Paris, lequel par jugement du 17 septembre 2015 a, sous le bénéfice de l'exécution provisoire :

- débouté la société AC Plus et Monsieur Pupin de leur demande en nullité du contrat de licence d'enseigne pour dol,

- prononcé la résiliation du contrat de licence d'enseigne signé le 30 décembre 2011 entre la société AC Plus et la société Anne Carole Immobilier à compter du 7 mai 2012 aux torts partagés des parties et débouté ces dernières tant de leur demande d'indemnité de résiliation anticipée du contrat que de leur demande de dommages et intérêts fondée sur cette résiliation,

- constaté la fin de l'accord d'apport d'affaire conclu entre la société AC Plus et la société Anne Carole le 7 mai 2012,

- condamné la société AC Plus à payer à la société Anne Carole Immobilier la somme de 2 356,12 euros TTC au titre de redevances et d'une parution impayées avec intérêts de retard au taux contractuel égal à trois fois le taux légal,

- condamné la société AC Plus à verser à la société Anne Carole la somme de 598 euros TTC représentant des loyers impayés avec intérêts au taux légal à compter du 9 mai 2012,

- débouté les parties de leur demandes fondées sur la concurrence déloyale,

- débouté la société Anne Carole de sa demande en dommages et intérêts pour perte de chance,

- débouté la Société Anne Carole Immobilier et la société Anne Carole de leur demande en condamnation solidaire de Monsieur Pupin à titre personnel et de la société GHF Immobilier,

- condamné in solidum la société Anne Carole Immobilier et la société Anne Carole à régler à Monsieur Pupin à titre personnel et à la société GHF Immobilier chacun la somme de 2 500 euros en vertu de l'article 700 du Code de procédure civile.

Selon dernières conclusions du 8 janvier 2016, les sociétés Anne Carole Immobilier et Anne Carole, appelantes, sollicitent :

- la confirmation du jugement querellé en ce qu'il a :

* débouté la société AC Plus et Monsieur Pupin de leurs demandes en annulation du contrat de licence d'enseigne pour dol et de dommages et intérêts pour concurrence déloyale,

* constaté la fin de l'accord d'apports d'affaires passé entre les sociétés AC Plus et Anne Carole en date du 7 mai 2012,

* condamné la société AC Plus à payer à la société Anne Carole Immobilier la somme de 2 356,12 euros TTC à titre de redevances contractuelles et de frais de parution et à la société Anne Carole la somme de 598 euros TTC représentant un loyer impayé,

- l'infirmation dudit jugement en ce qu'il a :

* prononcé la résiliation du contrat de licence d'enseigne Anne Carole aux torts partagés des sociétés Anne Carole Immobilier et AC Plus,

* débouté respectivement les sociétés Anne Carole Immobilier et Anne Carole, la première de sa demande d'indemnité de résiliation anticipée du contrat de licence d'enseigne, la seconde de ses demandes de dommages et intérêts pour concurrence déloyale et perte de chance, ainsi que de condamnation solidaire de Monsieur Pupin à titre personnel et de la société GHF Immobilier,

* condamné in solidum les sociétés Anne Carole Immobilier et Anne Carole nà payer à Monsieur Pupin à titre personnel et à la société GHF Immobilier la somme de 2 500 euros chacun en vertu de l'article 700 du Code de procédure civile,

- statuant à nouveau,

* la constatation et au besoin la résiliation du contrat de licence d'enseigne passé entre la société Anne Carole Immobilier, la société AC Plus et M. Pupin aux torts exclusifs de ces derniers avec effet au 9 mai 2012,

* en conséquence, la condamnation in solidum de la société AC Plus et Monsieur Pupin à verser à cette dernière la somme de 57 700 euros à titre de dommages et intérêts,

* la constatation que la société AC Plus, en collusion avec la société GHF Immobilier et avec le concours fautif de M. Pupin, dirigeant de ces deux sociétés, ont ensemble commis à l'égard des sociétés Anne Carole Immobilier et Anne Carole des actes de concurrence déloyale en se prévalant faussement auprès de la clientèle d'une appartenance au réseau Anne Carole et en opérant une confusion sur l'identité du prestataire exerçant l'activité de syndic de copropriété,

* en conséquence, la condamnation in solidum des sociétés AC Plus, GHF Immobilier et Monsieur Pupin à payer aux sociétés Anne Carole Immobilier et Anne Carole la somme de 15 000 à titre de dommage et intérêts à concurrence de 7 500 euros chacune,

* la constatation que le comportement de Monsieur Pupin, dirigeant des sociétés AC Plus et GHF Immobilier, a privé la société Anne Carole d'une chance de conclure la vente d'un bien Immobilier appartenant à Madame Caron,

* en conséquence, la condamnation in solidum de Monsieur Pupin et des sociétés AC Plus et GHF Immobilier à verser à la société Anne Carole la somme de 15 000 euros à titre de dommages et intérêts,

* la condamnation de la société GHF Immobilier et Monsieur Pupin à restituer aux sociétés Anne Carole Immobilier et Anne Carole les frais irrépétibles de première instance,

* la condamnation in solidum des sociétés AC Plus, GHF Immobilier et Monsieur Pupin à régler respectivement sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile aux sociétés Anne Carole Immobilier et Anne Carole les sommes de 5 000 euros et 3 000 euros. Les 29 juin et 26 juillet 2016, les sociétés GHF Immobilier et AC Plus ont respectivement fait l'objet d'un jugement de liquidation judiciaire ; Maître Gilles Pellegrini en qualité de liquidateur de la société AC Plus et la Selarl Gauthier-Sohm en qualité de liquidateur de la société GHF Immobilier sont intervenus volontairement à la procédure par conclusions signifiées le 4 octobre 2016.

Selon ordonnance du 10 janvier 2017, le conseiller de la mise en état du pôle 5-4 a déclaré irrecevables les conclusions des sociétés AC Plus, GHF Immobilier et Monsieur Pupin signifiées le 25 mars 2016 comme étant tardives pour non-respect des dispositions de l'article 909 du Code de procédure civile, en observant que les conclusions des liquidateurs judiciaires des sociétés AC Plus et GHF Immobilier du 4 octobre 2016 sont postérieures à l'expiration du délai imparti par l'article susmentionné.

Motifs de la décision

Les sociétés Anne Carole Immobilier et Anne Carole sollicitent la confirmation du jugement querellé en ce qu'il a :

- débouté la société AC Plus et Monsieur Pupin de leurs demandes en nullité du contrat de licence d'enseigne sur le fondement de l'article 1116 du Code civil et en concurrence déloyale,

- constaté la fin de l'accord d'apports d'affaires passé entre les sociétés AC Plus et Anne Carole en date du 7 mai 2012, en vertu de l'article 9 de l'accord d'apport d'affaires.

- condamné la société AC Plus à payer à la société Anne Carole Immobilier la somme de 2 356,12 euros TTC assortie des intérêts au taux contractuel au titre de redevances et de frais de parution et à la société Anne Carole celle de 598 euros TTC majorée des intérêts au taux légal à compter du 9 mai 2012 représentant des loyers impayés.

En l'absence de toute contestation des intimés et au vu des pièces produites par les appelantes (pièces 21 et 22), les dispositions du jugement sus énoncées sont justifiées et seront confirmées, hormis, compte tenu du prononcé de la liquidation judiciaire de la société AC Plus par le Tribunal de commerce de Créteil le 26 juillet 2016, le principe des condamnations précitées qui sera remplacé par la constatation des créances susmentionnées et la fixation de leur montant au passif de la liquidation judiciaire de la société AC Plus.

En revanche, les sociétés Anne Carole Immobilier et Anne Carole critiquent la décision des premiers juges, en premier lieu, en ce qu'ils ont prononcé la résiliation du contrat de licence d'enseigne aux torts partagés des parties, en raison de la disparition de l'affectio societatis entre elles, alors que selon les appelantes, la société AC Plus et Monsieur Pupin ont commis des fautes graves en ne respectant pas les obligations souscrites aux termes dudit contrat, à savoir l'interdiction pour le partenaire de s'implanter sur le territoire dévolu à un membre du réseau Anne Carole Immobilier sans l'accord exprès de ce dernier et du franchiseur (article 3.1) et l'interdiction pour le partenaire d'exercer une activité de transaction immobilière ou de syndic de copropriété en dehors du cadre du contrat de licence d'enseigne Anne Carole (article 9.2). Elles estiment que le contrat de licence d'enseigne était incompatible avec l'acquisition de la société GHF Immobilier, que la société AC Plus et Monsieur Pupin n'ont pas obtenu préalablement l'autorisation d'installer leurs locaux à Vincennes, que la violation de l'obligation de fidélité et de non installation sur le territoire d'une autre membre du réseau caractérise une totale déloyauté qui dispensait en tout état de cause la société Anne Carole Immobilier d'une mise en demeure préalable ; elles se prévalent à cet effet d'une lettre du 3 avril 2012 justifiant d'une interpellation suffisante. Elles considèrent que les premiers juges ne pouvaient retenir ultra petita une prétendue disparation de l'affectio societatis dans la mesure où la société Anne Carole Immobilier n'a jamais été l'associée de la société AC Plus.

A bon droit, les appelantes se prévalent du non-respect par la société AC Plus dirigée par Monsieur Pupin des obligations énoncées au contrat de licence d'enseigne du 30 décembre 2011 en son article 3.1 selon lequel " la société AC Plus s'interdit de s'implanter sur le territoire d'un franchisé du réseau Anne Carole sans l'accord préalable du franchisé concerné et de la société Anne Carole Immobilier " et en son article 9.2 ainsi libellé : " Pendant toute la durée du contrat, la société AC Plus et le partenaire ne pourront exercer une activité de transaction immobilière et de syndic de copropriété en dehors du cadre du présent contrat ".

En effet, il ressort de la lettre du 14 mars 2012 de Monsieur Pupin d'une part, que celui-ci a informé la société Anne Carole de ce que la société AC Plus s'est portée acquéreur de la société GHF Immobilier occupant des locaux situés 75 rue de Strasbourg à Vincennes dans le Val de Marne et d'autre part, que si, ce dernier a sollicité dans cette correspondance l'autorisation de la société Anne Carole de domicilier la société AC Plus dans les locaux de la société GHF Immobilier, il ne l'a pas obtenue, et, a, au contraire, reçu le 2 avril 2012 un courrier recommandé de l'avocat de la société Préférence Plus Immobilier (franchisé de la société Anne Carole Immobilier) exprimant un refus catégorique de donner cette autorisation, les locaux visés se trouvant dans le secteur géographique dévolu à ce franchisé et le mettant en demeure de cesser de tels agissements.

Monsieur Pupin a également reçu le 3 avril 2012 une lettre recommandée de la société Anne Carole l'avertissant qu'elle s'opposait, à l'instar de la société Préférence Plus Immobilier, à l'installation des locaux de la société AC Plus à Vincennes et lui demandait de cesser de contrevenir à l'article 9.2 du contrat de licence en ce qu'il exerce une activité de syndic de copropriété par l'intermédiaire de l'agence GHF Immobilier en dehors de ce contrat.

Monsieur Pupin ne pourrait sérieusement prétendre qu'il ignorait les obligations figurant au contrat qu'il a lui-même signé, et ce, d'autant plus que dès le 1er mars 2012 lorsqu'il a résilié le bail précaire consenti par la société Anne Carole pour les locaux situés à Fontenay, cette dernière lui a rappelé qu'en aucun cas il ne pourrait s'installer sur le territoire d'un franchisé Anne Carole sans avoir obtenu au préalable l'accord de ce franchisé et celui du franchiseur.

Il a ainsi gravement contrevenu, en toute connaissance de cause, à ses obligations contractuelles en domiciliant la société AC Plus au 75 rue de Strasbourg à Vincennes, ainsi qu'il ressort de sa lettre du 12 avril 2012 (pièce 40 des appelantes) sans avoir obtenu l'accord préalable à son installation tant du franchisé que du franchiseur et en exerçant au travers de l'acquisition d'une société tierce (dont la société AC Plus est l'associée unique après l'acquisition de l'intégralité des parts sociales de la société GHF Immobilier dès le 12 février 2012 et dont Monsieur Pupin est le gérant) une activité de syndic de copropriété en dehors du cadre contractuel. Il ne peut donc être fait grief à la société Anne Carole de n'avoir pas répondu à cette lettre du 12 avril 2012 de Monsieur Pupin sollicitant la désignation d'un autre territoire d'implantation, puisque ce dernier s'était en réalité déjà installé dans les locaux de Vincennes.

Les fautes graves de la société AC Plus, du fait de l'inexécution délibérée par elle de ces deux obligations essentielles, justifient pleinement la résiliation immédiate et de plein droit du contrat de licence d'enseigne conformément à son article 12, aux torts exclusifs de la société AC Plus, sans qu'il soit utile d'invoquer une absence d'affectio societatis, qui ne pourrait suffire à entraîner la dissolution de la société créée.

La décision des premiers juges sera en conséquence infirmée du chef de la résiliation du contrat aux torts partagés des parties.

La société Anne Carole Immobilier sollicite également la condamnation in solidum de la société AC Plus et de Monsieur Pupin à lui verser la somme de 57 700 euros à titre de dommages et intérêts, en application des articles 12 et 7.1 du contrat du 30 décembre 2011 qui stipulent que " la partie aux torts de laquelle la résiliation aura été prononcée devra verser à son cocontractant une indemnité égale au double du montant estimatif des redevances qui auraient été payées à la Société Anne Carole Immobilier jusqu'au terme normal du contrat ".

Cette clause, par laquelle les parties ont évalué forfaitairement et d'avance l'indemnité à laquelle donnera lieu l'inexécution des obligations contractuelles, dans l'hypothèse d'une résiliation anticipée du contrat, est constitutive d'une clause pénale, et comme telle, soumise aux dispositions de l'article 1152 du Code civil.

Dans le cas d'espèce, la disproportion manifeste de la clause pénale doit s'apprécier en comparant le montant de la peine conventionnellement fixé et celui du préjudice effectivement subi. La perte subie par le franchiseur est constituée par les redevances qu'elle aurait pu percevoir jusqu'à la fin du contrat ; le contrat a été résilié le 9 mai 2012 alors que son terme était prévu au 1er janvier 2017, de sorte que le montant des redevances perdues s'établit à la somme totale de 28 850 euros. Le doublement de cette somme apparaît en conséquence manifestement excessif et l'indemnité doit être limitée à 10 % de cette somme, conformément à l'article précité ; en définitive, le préjudice de la société Anne Carole Immobilier doit être estimé à la somme de 31 735 euros.

Monsieur Pupin a constamment et exclusivement agi en qualité de gérant de la société AC Plus ; aucune faute personnelle n'est alléguée ou caractérisée à son encontre, de sorte que sa responsabilité personnelle ne saurait être engagée. En conséquence la responsabilité in solidum de Monsieur Pupin avec la société AC Plus à l'égard des sociétés appelantes ne saurait être retenue.

En raison de la procédure collective dont la société AC Plus fait l'objet, seule une fixation de la créance de 31 735 euros peut être prononcée au passif de la liquidation judiciaire de celle-ci

En deuxième lieu, les appelantes critiquent la décision des premiers juges en qu'ils n'ont pas retenu les actes de concurrence déloyale commis à leur encontre par les sociétés AC Plus et GHF Immobilier avec le concours fautif de Monsieur Pupin. Elles estiment qu'en gardant une domiciliation illicite à Fontenay sous-Bois à partir du 14 mars 2012 et en ne procédant pas à la modification de l'adresse de son siège social jusqu'au 27 mars 2013, la société AC Plus a trompé la clientèle en maintenant une confusion préjudiciable sur son appartenance au réseau Anne Carole. Elles considèrent également que les sociétés AC Plus et GHF Immobilier ont entretenu une confusion auprès de la clientèle pour l'exercice de l'activité de syndic de copropriété et se sont prévalues frauduleusement de leur appartenance au réseau Carole Immobilier jusqu'à fin mars 2013. Elles demandent en conséquence réparation de leur préjudice à hauteur de la somme globale de 15 000 euros, dès lors que le transfert de l'activité de syndic de la société AC Plus à la société GHF Immobilier a privé la société Anne Carole de la rétribution contractuellement prévue. Enfin, elles imputent à Monsieur Pupin la faute personnelle d'avoir organisé le transfert de l'activité de la société AC Plus à la société GHF Immobilier en se prévalant faussement auprès de la clientèle de son appartenance au réseau Anne Carole.

Mais le seul préjudice invoqué par les appelantes en lien de causalité avec la faute reprochée à la société AC Plus consiste en un préjudice d'image tiré d'un courrier de Madame Caron du 26 mars 2013 aux termes duquel cette dernière décide de ne pas utiliser les services de l'agence Anne Carole pour la vente de son appartement, ayant été choquée par les propos tenus par Monsieur Pupin à son égard. Ce seul grief ne peut constituer un préjudice d'image, d'autant plus que la réalité de la situation ayant opposé Madame Caron à Monsieur Pupin n'est pas connue.

Par ailleurs, la faute commise par Monsieur Pupin en sa qualité de gérant des sociétés AC Plus et GHF Immobilier d'avoir sciemment laissé croire à la clientèle pendant environ une année que ces sociétés appartenaient au réseau Anne Carole, ainsi qu'il ressort des bordereaux d'appel de fonds, de la convocation à une assemblée générale, du procès-verbal d'assemblée générale, d'une affichette (pièce 31) adressés à divers copropriétaires, ne saurait entraîner un dommage pour les appelantes dans la mesure où elles considèrent elles-mêmes qu'ainsi les intimées ont pu se procurer un gage de sérieux à l'égard des copropriétaires qui avaient eu recours aux services des agences immobilières Anne Carole.

Le seul préjudice allégué par les appelantes résiderait dans la privation pour la société Anne Carole de la rétrocession d'honoraires prévue dans le cadre de l'accord d'apports d'affaires du 30 décembre 2011 en raison du transfert d'activité de syndic de copropriété par la société AC Plus à la société GHF Immobilier. Toutefois, les appelantes ne versent aucun élément financier sur cette éventuelle perte.

Dans ces conditions, faute de preuve concrète de la réalité du préjudice subi, la demande des appelantes visant une concurrence déloyale ne saurait être accueillie ; la décision des premiers juges sera donc confirmée de ce chef.

En troisième lieu, la société Anne Carole réclame la condamnation in solidum des sociétés AC Plus, GHF Immobilier et de Monsieur Pupin à lui payer la somme de 15.000 euros à titre de dommages et intérêts pour la perte de chance de conclure un mandat de vente avec Madame Caron et de toucher la rémunération prévue.

Mais les appelantes ne versent aux débats qu'une fiche technique de l'appartement mis en vente par Madame Caron et non un mandat de vente fixant contradictoirement la rémunération de l'agent Immobilier ; il n'est pas davantage justifié des diligences déjà accomplies par ce dernier au moment de l'envoi du courrier du 26 mars 2013, de l'état d'avancement de cette opération permettant d'apprécier une réelle perte de chance de conclure cette vente.

Dans ces conditions, la demande des appelantes ne saurait prospérer ; le jugement du 17 septembre 2015 sera en conséquence confirmé de ce chef.

La décision des premiers juges relative à la condamnation des appelantes sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile sera infirmée ; il n'y a pas lieu de condamner la société GHF Immobilier et Monsieur Pupin à restituer aux appelantes les frais irrépétibles de première instance, le présent arrêt infirmatif de ce chef constituant le titre ouvrant droit à cette restitution des sommes versées en exécution du jugement.

L'intimée succombant, la créance de 3 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile sera fixée à son passif en faveur de chacune des sociétés appelantes.

Par ces motifs, LA COUR, confirme la décision rendue le 17 septembre 2015 par le Tribunal de commerce de Paris, hormis pour la résiliation du contrat de licence d'enseigne aux torts partagés des parties, l'indemnité de résiliation anticipée dudit contrat, le principe d'une condamnation en raison de la liquidation judiciaire des sociétés AC Plus et GHF Immobilier, les condamnations en vertu de l'article 700 du Code de procédure civile, Statuant à nouveau de ces seuls chefs, constate la résiliation du contrat de licence d'enseigne en date du 30 décembre 2011 aux torts exclusifs de la société AC Plus avec effet au 9 mai 2012, fixe au passif de la société AC Plus l'indemnité de résiliation à payer à la société Anne Carole Immobilier d'un montant de 31 735 euros à titre de clause pénale, constate les créances de la société Anne Carole Immobilier et fixe au passif de la liquidation de la société AC Plus les sommes de 2 356,12 euros au titre de redevances et frais de parution et de 598 euros au titre de loyers impayés, Y ajoutant fixe au passif de la liquidation de la société AC Plus la somme de 3 000 euros pour chacune des sociétés appelante, sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi que les dépens d'appel.