CA Paris, Pôle 5 ch. 4, 15 novembre 2017, n° 15-22542
PARIS
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Osiris Surveillance (SARL)
Défendeur :
Keolis Rennes (SA)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Luc
Conseillers :
Mmes Mouthon Vidilles, Comte
Avocats :
Mes Lisimachio, Brouillet, Grapotte-Benetreau
FAITS ET PROCÉDURE
La société Keolis Rennes, filiale du groupe Keolis, a une activité de transport public de voyageurs. Elle est notamment titulaire d'une délégation de service public relative à la gestion et l'exploitation du métro et de l'ensemble des transports publics de l'agglomération de Rennes.
La société Osiris Surveillance exerce une activité de gardiennage et de surveillance.
Les sociétés Keolis Rennes et Osiris Surveillance ont conclu successivement les contrats suivants :
- le 3 mai 2005, un contrat d'une durée d'un an, portant sur la surveillance de 4 parkings relais du métro de Rennes,
- le 24 février 2006, un contrat portant sur la même prestation que le premier qui a fait l'objet d'un avenant au mois de février 2009, portant l'échéance au 31 décembre 2009,
- le 15 juin 2007, un contrat pour une durée d'un an, ayant pour objet une prestation de " sécurité des stations, rames et environnement du métro de Rennes ", qui a fait l'objet d'un avenant au cours de l'année 2008, portant son échéance au 31 décembre 2009,
- le 27 novembre 2009, un contrat ayant pour objet la surveillance du site de la plaine de Baud (dépôt des bus), la surveillance des parcs relais, la sécurisation de la ligne A du métro, l'accompagnement des bus STAR de nuit, et l'accompagnement Vacances et Week-end, pour une durée de 36 mois à compter du 1er janvier 2010, avec une tranche ferme estimative de 12 mois et 2 tranches conditionnelles estimatives de 12 mois,
- le 18 décembre 2012, avant le terme du quatrième contrat, un cinquième contrat portant sur la surveillance des parcs relais et la surveillance du métro, d'une durée de 12 mois, renouvelable par période identique après accord des deux parties 2 mois au moins avant l'échéance, qui a fait l'objet de trois avenants, l'un du 29 avril 2013 par lequel la société Keolis Rennes a accordé à la société Osiris des conditions de règlement dérogatoires, les autres des 30 décembre 2013 et 27 février 2014, prolongeant la durée du contrat, d'abord jusqu'au 31 mars 2014, puis jusqu'au 31 décembre 2014.
Le 27 février 2014, la société Keolis Rennes a signifié à la société Osiris Surveillance son intention de procéder à un nouvel appel d'offres pour l'attribution de la prestation de gardiennage de deux parcs relais.
Le 14 novembre 2014, la société Keolis Rennes a informé la société Osiris Surveillance de ce que sa candidature n'avait pas été retenue pour la prestation de gardiennage des parcs de relais, suite à la consultation menée, mais que la surveillance du métro et l'accompagnement de la fermeture d'un parc relais enterré et d'un parc relais aérien ainsi que les " Horex " restaient dans son périmètre d'activité pour l'année 2015.
Par acte du 6 février 2015, la société Osiris Surveillance a assigné la société Keolis Rennes devant le Tribunal commerce de Rennes, pour manquement contractuel et rupture brutale des relations commerciales établies.
Par jugement du 10 septembre 2015, le Tribunal de commerce de Rennes a :
- jugé que la relation commerciale était établie et d'une durée de 9 ans et 4 mois et une semaine,
- jugé que le préavis donné est bien le courrier du 27 février 2014, que ce préavis est donc d'une durée d'au moins 10 mois,
- jugé que la rupture de la relation commerciale entre les sociétés Osiris Surveillance et Keolis Rennes n'est pas brutale,
- débouté la société Osiris Surveillance de toutes ses demandes,
- condamné la société Osiris Surveillance à verser la somme de 4 000 euros à la société Keolis Rennes en application de l'article 700 du Code de procédure civile et débouté la société Keolis Rennes du surplus de sa demande,
- condamné la société Osiris Surveillance aux entiers dépens,
- liquidé les frais de greffe à la somme de 70,20 euros tels que prévu aux articles 695 et 701 du Code de procédure civile.
La société Osiris Surveillance a relevé appel de ce jugement par déclaration remise au greffe le 9 novembre 2015.
Le 30 mars 2016, le Tribunal de commerce de Rennes a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l'encontre de la société Osiris Surveillance.
La SCP Isabelle Goïc, prise en la personne de Me Isabelle Goïc, désignée en qualité de mandataire judiciaire, est intervenue volontairement à l'instance.
Par jugement du 29 mars 2017, le Tribunal de commerce de Rennes a homologué le plan de redressement judiciaire proposé par la société Osiris Surveillance.
La procédure devant la cour a été clôturée le 10 octobre 2017.
LA COUR
Vu les conclusions du 14 septembre 2017 par lesquelles la société Osiris Surveillance, appelante, invite la cour, au visa des articles L. 442-6, I, 5°, L. 622-24 du Code de commerce, 1147 et 1184 du Code civil, à :
- infirmer le jugement entrepris,
Statuant à nouveau,
- constater l'intervention volontaire de la SCP Goïc mandataire judiciaire à la présente instance, tout d'abord en sa qualité de mandataire judiciaire suite à la signification de conclusions récapitulatives n° 2 du 1er juin 2016, puis en sa qualité de commissaire à l'exécution du plan,
- condamner la société Keolis à lui verser les sommes de :
* 255 892 euros, à titre de perte de marge brute minimum en raison de la rupture brutale de leur relation contractuelle,
* 50 000 euros au vu du manque à gagner résultant des inexécutions fautives,
* 10 000 euros au titre des frais irrépétibles et aux entiers dépens de première instance et d'appel,
- déclarer irrecevable toute demande de fixation de créance faute de déclaration de créance de la société Keolis à son passif,
- débouter la société Keolis de l'intégralité de ses demandes reconventionnelles, fins et conclusions ;
Elle fait valoir que :
- la société Keolis Rennes a rompu brutalement la relation contractuelle commerciale établie avec elle,
- elle n'a été informée de la résiliation partielle du contrat du 18 décembre 2012 que par courrier du 14 novembre 2014 avec un terme fixé au 31 décembre 2014,
- un préavis compris entre 12 et 18 mois aurait dû lui être octroyé au regard de l'ancienneté des relations commerciales, et de sa dépendance économique, résultant notamment de l'importance de son chiffre d'affaires réalisé avec la société Keolis Rennes et de l'impossibilité pour elle de développer davantage sa clientèle, en raison des conditions contractuelles nécessitant une mobilisation quasi intégrale de ses moyens techniques et humains,
- elle conteste le point de départ du délai de préavis retenu par le tribunal, à savoir le 27 février 2014, date à laquelle la société Keolis Rennes l'a informée de son intention de procéder à un appel d'offres, dans la mesure où, compte tenu d'une relation contractuelle qui a perduré dans le temps et des renouvellements successifs, elle pouvait légitimement espérer que la société Keolis Rennes prolongerait leur relation économique à l'issue de l'appel d'offre en cause,
- il ne saurait être soutenu que la lettre du 27 février 2014 pourrait valoir préavis également au motif qu'elle mentionne l'existence d'une possible mise en concurrence sans précision de la date à laquelle cette consultation est supposée avoir lieu,
- la société Keolis Rennes a également rompu abusivement ses relations contractuelles avec elle, s'étant rendue coupable d'inexécutions fautives,
- la société Keolis Rennes n'a pas respecté ses obligations contractuelles et notamment les clauses contractuelles 9-2 et 17-4, en ce que le renouvellement du contrat ne pouvait s'effectuer que pour une année au moins, et qu'en cas de non renouvellement, il était nécessaire de prévoir des dispositions particulières pour les prestations que la société Keolis Rennes entendait néanmoins lui confier,
- la société Keolis s'est affranchie du respect des délais issus de la convention collective 3196 des entreprises de prévention et de sécurité qui impose au client d'informer la société entrante et la société sortante par lettre recommandée, en respectant un délai de préavis de 60 jours,
- la société Keolis France n'a pas réalisé la refonte du cahier des charges prévue par le contrat du 18 décembre 2012, à son article 9-2, celle-ci devant intervenir avant le mois de juin 2013 ;
Vu les conclusions du 18 septembre 2017 par lesquelles la société Keolis Rennes, intimée ayant formé appel incident, demande à la cour, au visa des articles L. 442-6 du Code de commerce, 1134 et 1147 du Code civil, de :
- confirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté la société Osiris Surveillance de l'ensemble de ses demandes,
- réformer le jugement rendu par le Tribunal de commerce de Rennes le 10 septembre 2015, en ce qu'il a débouté la société Keolis Rennes de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive,
En conséquence,
- inscrire au passif de la société Osiris Surveillance la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,
Subsidiairement,
- débouter Osiris Surveillance de l'ensemble de ses demandes,
En tout état de cause,
- inscrire au passif de la société Osiris Surveillance la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile au titre de la présente procédure d'appel,
- condamner la société Osiris Surveillance aux entiers dépens d'appel lesquels seront directement recouvrés par la SCP Grapotte-Benetreau dans les conditions de l'article 699 du Code de procédure civile ;
Elle explique que :
- la notification de son intention de recourir à un appel d'offres, doit être considérée comme le point de départ du délai de préavis donné à la société Osiris Surveillance,
- la société Osiris Surveillance a bénéficié d'un préavis de plus de 10 mois pour se préparer à la fin de la relation contractuelle, préavis suffisant au regard de la durée des relations commerciales, étant rappelé que le préavis concernait uniquement une partie des prestations confiées,
- l'absence de précision dans le courrier du 27 février 2014 quant aux modalités d'organisation de l'appel d'offres n'affecte en rien la validité du préavis donné et ne saurait répondre à aucune exigence légale ou jurisprudentielle,
- sa relation commerciale avec la société Osiris Surveillance était précaire, puisque sa propre relation avec la collectivité territoriale Rennes Métropole est, par nature même, précaire,
- elle n'a rien mis en œuvre pour favoriser ou développer la dépendance économique de la société Osiris Surveillance à son égard, seule résultante des choix stratégiques et de gestion de celle-ci,
- quand bien même une dépendance économique serait caractérisée à son égard de la société Osiris Surveillance, cette situation doit nécessairement être appréciée à l'aune de la rupture seulement partielle de la relation entre les parties, qui lui a permis de maintenir l'essentiel de son chiffre d'affaires,
- elle a respecté les obligations prévues audit article, dès lors qu'elle a toujours été à l'écoute des difficultés qui lui étaient signalées par la société Osiris Surveillance sur le plan organisationnel, qu'elle n'a jamais refusé les changements de plannings sollicités et qu'elle a mis en place une planification anticipée permettant à la société Osiris Surveillance de regrouper ses agents sur certains parcs relais, notamment en fin de semaine,
- la société Osiris Surveillance ne peut se prévaloir de la clause de divisibilité de l'article 17-4 du contrat, le contrat du 18 décembre 2012 ayant pris fin le 31 décembre 2014,
- la conclusion des deux avenants de prolongation successifs prévoyant des durées plus courtes a été décidée d'un commun accord entre les parties, qui ont accepté de renoncer à l'application de cette disposition,
- la convention collective 3196 est abrogée et n'a jamais été applicable à des tiers non soumis aux dispositions de cette convention,
- la société Osiris Surveillance n'a subi aucun préjudice de quelque sorte que ce soit ;
SUR CE
LA COUR se réfère, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens échangés et des prétentions des parties, à la décision déférée et aux dernières conclusions échangées en appel.
En application de l'article 954 alinéa 2 du Code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions.
Sur la rupture brutale des relations commerciales établies entre les sociétés Osiris Surveillance et Keolis Rennes
Les parties s'accordent sur la durée des relations commerciales établies entre elles, à savoir plus de 9 années, entre 2005 et 2014, en vertu de contrats successifs. Elles s'opposent sur la brutalité de la rupture et sur la date de notification de la rupture, la durée du préavis, la société Osiris Surveillance contestant que le courrier du 27 février 2014 constitue le courrier de notification de la rupture, alors que la société Kéolis Rennes soutient que ce courrier propose une prolongation du contrat au 31 décembre 2014 afin que sa consultation relative au gardiennage des parcs relais soit menée à son terme et que le candidat retenu soit désigné et qu'en tout état de cause, cette rupture n'est que partielle.
Aux termes de l'article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce :
" Engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers (...) de rompre unilatéralement, même partiellement, une relation commerciale établie, sans préavis écrit tenant compte de la durée de la relation commerciale et respectant la durée minimale de préavis déterminée, en référence aux usages du commerce, par des accords interprofessionnels.
Les dispositions qui précèdent ne font pas obstacle à la faculté de résiliation sans préavis, en cas d'inexécution par l'autre partie de ses obligations ou en cas de force majeure ".
Il ressort des éléments non contestés du dossier que seules les prestations de gardiennage des parcs relais enterrés ont finalement cessé au 31 décembre 2014 ; les autres prestations, concernant la surveillance du métro et l'accompagnement de la fermeture d'un parc relais enterré et d'un parc relais aérien et les " Horex ", ont d'ailleurs été confiées à la société Osiris Surveillance jusqu'au 1er décembre 2016.
Il convient donc de déterminer la date du courrier de notification de la rupture et la durée nécessaire du préavis.
Sur la date du courrier de notification de la rupture
La société Kéolis Rennes soutient que le courrier du 27 février 2014 constitue le point de départ du préavis, laissant ainsi 10 mois à la société Osiris Surveillance pour se réorganiser.
Le courrier du 27 février 2014 envoyé par la société Kéolis Rennes à la société Osiris Surveillance est notamment rédigé comme suit :
" Comme indiqué dans notre avenant de prorogation, Keolis Rennes a amorcé une refonte complète du cahier des charges de Gardiennage.
Dans ce contexte, nous vous informons que nous avons décidé de lancer une consultation, au cours de l'année 2014, à laquelle vous pourrez participer et nous présenter votre offre correspondant au nouveau cahier des charges.
Notre contrat arrivant à échéance au 31 mars 2014, nous vous proposons de proroger notre relation jusqu'à la fin de la consultation et l'annonce du candidat retenu prévue courant décembre 2014.
Dans l'hypothèse où vous accepteriez de conclure avec nous un nouvel avenant, nous vous informons d'ores et déjà que le terme de notre contrat ne pourra, en aucun cas, intervenir au-delà du 31 décembre 2014.
En effet, les prestations qui font l'objet du futur cahier des charges, nécessiteront la mise en place d'un nouveau contrat qui sera conclu avec le candidat retenu ".
Le contrat porte sur 2 lots : la surveillance des parcs relais et la surveillance du métro.
Il convient de relever que déjà au cours de la réunion entre les parties du 25 juin 2012, la société Kéolis Rennes a rappelé notamment que la société Osiris Surveillance doit se préparer à la fin du contrat avec elle, compte-tenu notamment de la délégation de service public à durée déterminée dont elle bénéficie de la collectivité territoriale Rennes Métropole.
En outre, la société Osiris Surveillance ne démontre pas avoir reçu préalablement à chaque renouvellement de contrat ce type de courrier, pouvant lui laisser penser que son contrat serait nécessairement renouvelé et que donc ce courrier du 27 février 2014 est de pure forme.
Au contraire, ce courrier annonce sans ambiguïté la fin des relations commerciales confiées à la société Osiris Surveillance concernant le gardiennage des parcs relais et du métro de Rennes, à savoir les deux lots. Il n'était pas nécessaire que le calendrier de la consultation y soit précisé, ce d'autant qu'il ressort des pièces du dossier que la société Osiris Surveillance a été avertie, en temps utile, des dates de la consultation, et qu'elle a pu valablement candidater.
Le courrier du 27 février 2014 porte sur l'ensemble du contrat liant les parties. Il n'y a pas lieu de considérer que la rupture est partielle, même si par courrier du 14 novembre 2014, la société Kéolis Rennes informe la société Osiris Surveillance de la poursuite des prestations sur une partie de celles qui étaient visées dans la notification de la rupture, seuls le courrier de rupture et son contenu devant être pris en compte pour apprécier la rupture.
Ainsi, ce courrier, qui fait état de la fin annoncée du contrat au 31 décembre 2014 et de l'ensemble des prestations confiées à la société Osiris Surveillance, sans qu'aucun nouvel avenant ne puisse être signé, en raison de la refonte du cahier des charges et de la nouvelle consultation, constitue la notification de la rupture des relations commerciales concernant l'activité de gardiennage des parcs relais et du métro de Rennes à effet au 31 décembre 2014, soit avec un préavis de 10 mois.
Sur la durée de préavis :
L'adéquation du préavis suffisant s'apprécie en tenant compte de la durée de la relation commerciale et des autres circonstances, tels l'état de dépendance économique, le secteur d'activité, au moment de la notification de la rupture.
Le préavis laissé par la société Kéolis Rennes à la société Osiris Surveillance est donc de 10 mois. Il n'est pas contesté que ce préavis a été effectif.
Il a déjà été relevé ci-dessus que la durée des relations contractuelles établies entre les parties est de 9 ans à la date d'envoi du courrier de notification de la rupture.
La société Osiris Surveillance invoque un état de dépendance économique à l'égard de la société Kéolis Rennes, au motif qu'elle réalise plus de 90 % de son chiffre d'affaires avec cette dernière. Cette situation n'est pas contestée et était connue de la société Kéolis Rennes, qui dès le mois de juin 2012 alertait la société Osiris Surveillance du risque qu'elle encourait et de la nécessité de diversifier ses activités.
Il n'y a pas lieu de tenir compte du courrier du 14 novembre 2014, par lequel la société Kéolis Rennes a informé la société Osiris Surveillance de ce que sa candidature n'avait pas été acceptée dans le cadre de la consultation relative au gardiennage des parcs relais enterrés, mais que les prestations se poursuivaient concernant la surveillance du métro et l'accompagnement de la fermeture d'un parc relais enterré et d'un parc relais aérien et les " Horex ", en ce que ces circonstances sont intervenues postérieurement à la date d'envoi du courrier de rupture et que la brutalité de la rupture s'apprécie au moment de sa notification.
En outre, si la société Osiris Surveillance invoque des usages précédents pour déterminer la durée de préavis à laquelle elle peut prétendre, il convient de relever que les courriers dont elle fait état ne constituent pas des lettre de notification de rupture, mais uniquement des courriers de rappel par la société Kéolis Rennes des dates de fin des précédents contrats.
Au regard de l'ensemble de ces éléments, il apparaît que le délai de préavis de 10 mois laissé par la société Kéolis Rennes à la société Osiris Surveillance est suffisant et que la rupture n'est pas brutale.
La demande de la société Osiris Surveillance pour rupture brutale des relations commerciales établie doit donc être rejetée.
Il y a dès lors lieu de confirmer le jugement sur ce point.
Sur la responsabilité contractuelle de la société Kéolis Rennes
La société Osiris Surveillance reproche à la société Kéolis Rennes d'avoir commis des fautes contractuelles engageant sa responsabilité à son égard. Elle soutient que la société Kéolis Rennes a violé les articles 17-4 et 9-2 du contrat du 18 décembre 2012, qu'elle ne lui a pas fait signer d'avenant d'une année et qu'elle n'a pas respecté le délai issu de la convention collective 3196.
La société Kéolis Rennes conteste avoir commis les fautes alléguées, au motif que le contrat a perduré sur les autres périmètres aux mêmes conditions qu'antérieurement, que son obligation d'ajustement du cahier des charges n'était qu'une obligation de moyens, que les dispositions invoquées de la convention collective 3196 sont abrogées et qu'elles ne lui sont pas applicables en tout état de cause.
Il a été relevé ci-dessus que le courrier de rupture portait sur les prestations de gardiennage des parcs relais et du métro de Rennes, correspondant aux 2 lots attribués à la société Osiris Surveillance dans le contrat du 1er janvier 2013.
Par courrier du 14 novembre 2014, la société Kéolis Rennes a informé la société Osiris Surveillance du prolongement partiel des prestations jusqu'à la fin de l'année 2015. Il était proposé à la société Osiris Surveillance la signature d'un avenant pour encadrer la poursuite des activités.
Il n'est pas contesté que la société Osiris Surveillance n'a pas signé l'avenant proposé mais a poursuivi l'exécution de ses prestations relatives à la surveillance du métro, l'accompagnement de la fermeture d'un parc relais enterré et d'un parc relais aérien ainsi que les " Horex ".
Elle ne peut donc invoquer les termes du contrat du 1er janvier 2013 qui n'a pas été renouvelé au 31 décembre 2014, le préavis du 27 février 2014 évoquant la fin du contrat pour l'ensemble des lots.
La clause relative à l'indivisibilité du contrat, dont elle savait qu'il était arrivé à échéance, ne peut dès lors utilement être invoquée. Ainsi, la poursuite d'une partie de ses prestations en dehors de la signature d'un avenant ne peut établir l'applicabilité des clauses dudit contrat postérieurement au 1er janvier 2015 et donc caractériser la violation de l'article 17-4 dudit contrat.
En outre, la signature au cours de l'année 2014 par elle des avenants d'abord de 3 mois puis de 9 mois démontre son accord à ne pas signer d'avenant d'une durée de 12 mois, comme convenu initialement.
Par ailleurs, la clause d'ajustement de l'article 9-2 qui dispose que " pour permettre à la société Osiris une meilleure planification de la charge d'activité que lui confie Keolis Rennes dans le gardiennage des parcs relais de la ligne A du métro, Keolis Rennes s'engage à étudier une meilleure répartition des vacations sur les parcs relais pour confier à la société Osiris la gestion complète des 2 parcs relais. Cette nouvelle répartition interviendrait avant le mois de juin 2013 ". Cette clause constitue une obligation de moyens à la charge de la société Kéolis Rennes. Il n'est d'ailleurs pas précisé dans quelle mesure cette meilleure répartition doit être mise en place. L'engagement de la société Kéolis Rennes porte sur l'étude et non la mise en place effective de la meilleure répartition des vacations. La société Kéolis Rennes ne démontre pas avoir proposé une meilleure répartition des vacations. Toutefois, la société Osiris Surveillance ne démontre aucun préjudice découlant de cette absence.
Enfin, la convention collective des entreprises de la prévention et de la sécurité ne s'applique pas à la société Kéolis Rennes, soumise à la convention collective nationale des réseaux de transports publics urbains de voyageurs.
La demande de la société Osiris Surveillance au titre de la responsabilité contractuelle doit donc être rejetée.
Il y a dès lors lieu de confirmer le jugement sur ce point.
Sur la demande de dommages-intérêts pour procédure abusive formée par la société Kéolis Rennes
La société Osiris Surveillance soulève l'irrecevabilité de la demande pour ne pas avoir été déclarée au passif dans le cadre de la procédure de redressement judiciaire ouverte à son égard, avant le 12 juin 2016.
La société Kéolis Rennes ne conteste pas ne pas avoir procédé à la déclaration de créances au titre du préjudice allégué de ce chef.
En application des dispositions de l'article L. 622-24 du Code de commerce, la société Kéolis Rennes devait procéder à la déclaration de créances au passif de la société Osiris Surveillance, s'agissant d'une créance née antérieurement à l'ouverture de la procédure collective, la société Kéolis Rennes reprochant à la société Osiris Surveillance d'avoir engagé en 2015 une procédure à jour fixe à son encontre.
En conséquence, il y a lieu de déclarer irrecevable la demande à ce titre.
Sur les dépens et l'application de l'article 700 du Code de procédure civile
Le sens du présent arrêt conduit à confirmer le jugement sur les dépens et l'application qui y a été faite des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.
La société Osiris Surveillance, partie perdante, doit être condamnée aux dépens d'appel, qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile, ainsi qu'à payer à la société Kéolis Rennes la somme supplémentaire de 10 000 par application de l'article 700 du Code de procédure civile en cause d'appel.
Le sens du présent arrêt conduit à rejeter la demande par application de l'article 700 du Code de procédure civile formulée par la société Osiris Surveillance.
Par ces motifs : LA COUR, Confirme le jugement, Y ajoutant, Déclare irrecevable la demande de dommages-intérêts pour procédure abusive formée par la société Kéolis Rennes, Condamne la société Osiris Surveillance aux dépens d'appel, qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile, ainsi qu'à payer à la société Kéolis Rennes la somme supplémentaire de 10 000 par application de l'article 700 du Code de procédure civile en cause d'appel, Rejette toute autre demande.