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Décisions

CA Bourges, ch. civ., 9 novembre 2017, n° 16-01288

BOURGES

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

De La Bagatelle (SCEA) , Ceralliance (SAS) , Alliance Negoce (SAS)

Défendeur :

Sermix (SAS) , Société Française de Premix et Spécialités (SAS) , Axereal Elevage (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Foulquier

Conseillers :

M. Guiraud, Perinetti

TGI, Châteauroux, du 29 juill. 2016

29 juillet 2016

Exposé :

L'EARL L. et la SCEA de la Bagatelle, dont Éric L. est le gérant, ont courant 2006 et jusqu'à septembre 2008 utilisé un système d'alimentation de rations sèches Kempen pour leur élevage et acquis des aliments secs auprès de la SAS Ceralliance, leur négociant habituel, qui s'approvisionnait auprès de la SAS Thivat Nutrition Animale exerçant sous l'enseigne Tellus, laquelle se fournissait auprès de la société Trouw Nutrition France jusqu'au 2 janvier 2007 puis auprès de la société Nouvelle de Premix et Spécialités jusqu'en 2008 puis auprès de la société Française de Premix et Spécialités.

Le 11 mars 2009, la SAS Ceralliance a indiqué à l'EARL L. et à la société Bagatelle qu'elles étaient débitrices respectivement des sommes de 43 760, 29 € et 199 533, 57 € au titre de factures impayées.

Le 28 mai suivant, l'EARL L. a rappelé qu'elle avait fait une offre de paiement de la somme de 199 533,57 € sur 10 ans.

Le 15 juillet 2010, la SAS Ceralliance a fait assigner la SCEA de la Bagatelle et l'EARL L. en paiement des factures devant le tribunal de grande instance de Châteauroux.

Une procédure de redressement judiciaire a été ouverte à l'égard de la SCEA de la Bagatelle et l'EARL L. par jugement du 8 novembre 2010 - Me P. étant désigné en qualité de mandataire judiciaire.

Un plan de redressement a été adopté par le tribunal statuant en matière de procédures collectives dans un jugement du 3 septembre 2012.

La SCEA de la Bagatelle et l'EARL L. ayant demandé à titre reconventionnel des dommages-intérêts à la SAS Ceralliance en alléguant que leur état de cessation des paiements serait lié au caractère inadapté du système d'alimentation Kempen à l'origine d'une dégradation de l'état sanitaire du cheptel, cette dernière a appelé en garantie la SAS Thivat Nutrition Animale.

Cette dernière a appelé à son tour en garantie la société Française de Premix et Spécialités.

Le 31 décembre 2015, la SAS Ceralliance a été absorbée par la SAS Alliance Négoce 36.

Par jugement rendu le 29 juillet 2016, le tribunal de grande instance de Châteauroux a :

- Débouté les sociétés Bagatelle et L. de leurs demandes,

- Fixé la créance de la société Alliance Négoce 36 à l'encontre de la société Bagatelle au passif du redressement judiciaire des sociétés Bagatelle et L. et d'Éric L. à la somme de 36 198,54 € avec intérêts au taux légal du 1er juillet 2009 au 8 novembre 2010,

- Fixé la créance de la société Alliance Négoce 36 à l'encontre de la société L. au passif du redressement judiciaire des sociétés Bagatelle et L. et d'Éric L. à la somme de 195 069,51 € avec intérêts au taux légal du 1er octobre 2009 au 8 novembre 2010,

- Condamné la société Alliance Négoce 36 aux dépens afférents à la mise en cause de la société Thivat Nutrition Animale

- Condamné la société Thivat Nutrition Animale aux dépens afférents à la mise en cause de la société Française de Premix et Spécialités

- Condamné les sociétés Bagatelle et L. au surplus des dépens,

- Condamné les sociétés Bagatelle et L. à payer à la société Alliance Négoce 36 la somme de 2 000 € au titre des frais irrépétibles,

- Condamné la société Alliance Négoce 36 à payer à la société Thivat Nutrition Animale la somme de 2 000 € au titre des frais irrépétibles

- Condamné la société Thivat Nutrition Animale à payer à la société Française de Premix et Spécialités une somme identique en application de l'article 700 du Code de procédure civile,

- Débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

Le tribunal a en effet principalement considéré que :

- L'usage en matière agricole autorisant les parties à conclure verbalement des ventes d'aliments pour le bétail constitue une impossibilité morale de se procurer une preuve littérale au sens de l'article 1348 du Code civil de sorte que l'absence de bons de commande signés ne fait pas obstacle, en soi, à la demande en paiement,

- la société Alliance Négoce 36 rapporte la preuve des ventes invoquées - qui n'avait d'ailleurs pas été contestée avant l'introduction de l'instance - en produisant une attestation et des bons de livraison signés,

- le vendeur professionnel est tenu d'une obligation de renseignements et de conseil envers son acquéreur de sorte qu'il incombe à la société Ceralliance de rapporter la preuve que cette obligation a été exécutée s'agissant du système d'alimentation Kempen qui présentait un caractère novateur,

- il convient donc de se référer à l'audit réalisé par Monsieur M. et aux visites de suivi postérieures au cours desquelles les sociétés Bagatelle et L. ne démontrent pas avoir formulé une quelconque réclamation,

- ces dernières ne démontrent pas que le système Kempen aurait été inadapté à tout élevage de vaches laitières,

- il convient donc de considérer qu'il a été satisfait à l'obligation de renseignements et de conseil par le vendeur,

- à titre superfétatoire, l'existence d'un lien de causalité entre un tel manquement et l'état de cessation des paiements des sociétés ne serait pas établi.

L'EARL L., la SCEA de la Bagatelle et la SCP P. ont interjeté appel de cette décision par déclaration du 20 septembre 2016.

Sollicitant la réformation du jugement entrepris en toutes ses dispositions, ils demandent à la cour de :

- Dire que le quantum des créances dont se prévaut la société Ceralliance est injustifié et la débouter en conséquence de sa demande en paiement,

- À titre reconventionnel, la condamner à leur verser la somme de 200 000 € à titre de dommages-intérêts pour le préjudice subi,

- Dire que les sommes allouées à ce titre seront le cas échéant compensées avec les sommes éventuellement dues,

- Leur donner acte de ce qu'elles s'en rapportent sur les appels en garantie de la société Ceralliance à l'encontre de la société TNA et de cette dernière à l'encontre de la société SFPS,

- Condamner la société Ceralliance à leur verser, en tant que de besoin solidairement avec les sociétés TNA et SFPS, la somme de 5 000 € en application de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Les appelants font principalement valoir que le système d'alimentation de rations sèches Kempen mis au point par la société Ceralliance s'est avéré inefficace et à l'origine d'importants problèmes sanitaires les ayant conduits à abandonner l'activité laitière et à déclarer leur état de cessation des paiements.

Ils soutiennent que la société Ceralliance ne rapporte pas la preuve de l'existence de leur obligation à paiement en l'absence notamment d'un quelconque usage en matière agricole autorisant la conclusion verbale de vente d'aliments pour le bétail.

Ils rappellent que le système Kempen - consistant à alimenter les troupeaux de vaches laitières avec 75 % d'aliments secs et 25 % de foin - a été utilisé pour la première fois en 2004 en France et que la société Ceralliance ne rapporte pas la preuve qu'elle aurait respecté son obligation contractuelle de renseignements et de conseil de son client en particulier en n'accompagnant pas celui-ci dans la mise en œuvre du système, en s'abstenant de s'assurer du bon déroulement du système dans l'exploitation et de proposer des solutions aux difficultés rencontrées.

Ils estiment, au vu d'un rapport du docteur D., le préjudice subi s'élève à la somme de 174 991,97 € et se trouve en lien direct avec les manquements de la société Ceralliance, précisant par ailleurs que de nombreuses exploitations agricoles ont été confrontées aux mêmes difficultés.

La société Alliance Négoce, intimée, conclut pour sa part à la confirmation du jugement entrepris et demande, à titre subsidiaire, que la société THIVAT soit condamnée à la garantir sur le fondement de l'article 1147 du Code civil de toute condamnation qui serait prononcée à son encontre.

Sollicitant par ailleurs l'octroi d'une indemnité de 3 000 € au titre des frais irrépétibles, la société Alliance Négoce soutient en premier lieu que sa créance présente un caractère incontestable, précisant que les usages de la profession veulent que les commandes soient passées verbalement ou téléphoniquement.

Elle conteste tout manquement au devoir de conseil - qui ne serait pas en lien en tout état de cause avec le préjudice allégué - alors même que des audits ont bien été réalisés avant la mise en place du système Kempen, que des visites de suivi ont été effectuées postérieurement et que les sociétés Bagatelle et L. n'ont jamais fait part d'une quelconque réclamation.

Rappelant qu'il est constant que la société Ceralliance se fournissait auprès de la société TNA, laquelle se fournissait auprès de la société SFPS, elle estime être bien fondée à solliciter en tout état de cause d'être garantie par celle-ci de toute condamnation.

La société Axereal Elevage, anciennement dénommée Thivat Nutrition Animale, demande à la cour de confirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris, de constater en tout état de cause le caractère mal fondé de la demande en garantie formée à son encontre par la société Alliance Négoce et, à titre subsidiaire, de condamner la société SFPS à la garantir de l'ensemble des condamnations pouvant être mis à sa charge.

Sollicitant en outre une indemnité de 5 000 € au titre des frais irrépétibles, la société Axereal Elevage estime que la preuve de la matérialité des commandes d'aliments de la SCEA Bagatelle et de l'EARL L. est rapportée en l'espèce.

Elle conteste tout manquement de la société Ceralliance à son devoir de renseignements et de conseil, faisant état d'une visite d'un technicien le 10 mai 2006 - et non pas le 5 octobre suivant - pour une présentation du système Kempen de sorte que l'on ne peut lui reprocher d'avoir omis une étude économique préalable, rappelant que les livraisons d'aliments étaient directement effectuées par ses soins auprès des exploitants agricoles.

Elle rappelle que les appelantes n'ont émis aucune réclamation entre 2006 et 2008 alors même que les rapports de visite démontraient que le nouveau système leur donnait entière satisfaction et estime que le rapport du docteur D., vétérinaire désigné par la compagnie d'assurances des appelants, ne présente pas un gage suffisant d'impartialité, ajoutant qu'il n'a pas répondu aux observations sérieuses qui lui étaient opposées et qu'il a uniquement procédé à une expertise sur pièces.

Enfin, elle s'oppose à la demande subsidiaire en garantie formée par la société Alliance Négoce à son égard, indiquant que si elle a de façon ponctuelle assuré un appui technique à cette société dans le cadre de la mise en œuvre du système Kempen, aucun manquement ni aucune faute dans le cadre de ce suivi n'est démontrée.

La société Française de Premix et Spécialités, intimée, demande pour sa part à la cour de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, de déclarer sans objet tout appel en garantie de la part de la société TNA, de prononcer sa mise hors de cause et de lui allouer une indemnité de 3 000 € en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.

Elle fait observer en premier lieu que ni des éleveurs ni la société TNA ne rapportent la preuve de la matérialité d'une inexécution défectueuse de sa prestation et d'un lien causal avec les préjudices invoqués en présence d'une incohérence entre les affirmations des autres parties quant à la date de la mise en place du système Kempen et d'une absence totale de traçabilité quant à la destination finale de l'aliment qui a été livré à la seule société TNA, et non pas aux éleveurs.

Elle estime que le premier juge a pertinemment rejeté le grief fondé sur le manquement du devoir de conseil de la société Ceralliance puisqu'il est établi que des audits de l'exploitation avaient été réalisés avant l'introduction de ce nouveau système et que les techniciens d'élevage se rendaient sur site régulièrement, sans que les éleveurs n'aient fait part d'aucune difficulté.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 29 août 2017.

Sur quoi :

I) Sur la preuve des contrats de vente allégués :

Attendu que les appelants soutiennent que la société Ceralliance ne rapporte pas la preuve de l'existence des contrats de vente d'aliments pour le bétail au titre desquels elle sollicite le paiement du solde dû ;

Que cette dernière verse aux débats (pièces numéros 1 et 2 de son dossier) l'ensemble des relevés de compte de chacune des sociétés appelantes avec les factures correspondantes ;

Qu'en raison de l'usage existant en matière agricole autorisant les parties à conclure verbalement, pour des raisons de commodité, des ventes d'aliments pour le bétail sans avoir recours à un document écrit, le premier juge a estimé à bon droit que la société Ceralliance se trouvait dans l'impossibilité morale de rapporter une preuve littérale des ventes invoquées ;

Que la cour remarque que certaines factures produites sont accompagnées de bons de livraison qui ont été signés, d'autres comportent des bons de livraison qui ne l'ont pas été ; que Monsieur C. a indiqué, dans un courrier du 26 octobre 2012 avoir livré "pour la période du 30 juin 2006 au 31 août 2008 pour le compte de l'EARL L. et la SCEA Bagatelle tous les produits nécessaires à la mise en culture (')" ; qu'il doit être ajouté que l'EARL L. n'avait jamais contesté son obligation à paiement avant l'introduction de l'instance puisque son gérant avait même indiqué, dans un courrier du 28 mai 2009 : "au rendez-vous du 8 avril 2009 à mon domicile avec mon comptable Michel D., nous vous avions fait la proposition d'étaler la dette d'un montant de 199 537 € sur 10 ans, l'annuité s'élevant alors à 25 000 €, afin de laisser un peu de trésorerie à l'exploitation (')" ;

Qu'en tout état de cause, les appelants ne peuvent tout à la fois contester la réalité des ventes d'aliments et exciper d'un manquement du vendeur à ses devoirs de renseignement et de conseil, en produisant au soutien de cette prétention un rapport d'expertise réalisé par le docteur D., vétérinaire, chiffrant le surcoût en achat d'aliments en comparant la facturation avant l'utilisation du système "Kempen" et après celle-ci et en faisant référence aux fournitures de la société Ceralliance ;

Qu'au vu de ces éléments, c'est à bon droit que le premier juge a considéré que la société Alliance Négoce 36 rapportait bien la preuve de l'existence des contrats de ventes invoqués ; que la décision devra donc être confirmée en ce qu'elle a fixé la créance de la société Alliance Négoce 36 à l'encontre de la SCEA Bagatelle au passif du redressement judiciaire des sociétés Bagatelle et L. et d'Éric L. à la somme de 36 198,54 € avec intérêts au taux légal du 1er juillet 2009 au 8 novembre 2010 et la créance de la société Alliance Négoce 36 à l'encontre de l'EARL L. au passif du redressement judiciaire des sociétés Bagatelle et L. et d'Éric L. à la somme de 195 069,51 € avec intérêts au taux légal du 1er octobre 2009 au 8 novembre 2010 ;

II) Sur les manquements de la société Ceralliance à ses devoirs de renseignement et de conseil :

Attendu que les sociétés appelantes reprochent à la société Ceralliance d'avoir manqué à son obligation de renseignements et de conseil en n'accompagnant pas les éleveurs lors de la mise en place du système Kempen, en s'abstenant de s'assurer du bon déroulement de ce système dans les exploitations et de proposer des solutions aux difficultés rencontrées lors de la mise en place de celui-ci ;

Attendu qu'en application de l'article 1615 du Code civil, l'obligation de délivrer la chose comprend ses accessoires et tout ce qui a été destiné à son usage perpétuel ; qu'en particulier, il appartient au professionnel qui vend à une exploitation agricole des aliments pour le bétail d'informer son cocontractant sur les caractéristiques du produit livré et de le conseiller utilement pour déterminer si le mode d'alimentation proposé apparaît adapté aux spécificités de l'élevage, en particulier lorsqu'il s'agit, comme en l'espèce, d'un type d'alimentation nouvellement utilisé et composé pour 25 % de foin et pour 75 % d'aliments secs ;

Qu'il appartient à la société Alliance Négoce - venant aux droits de la société Ceralliance - de rapporter la preuve que cette dernière a bien satisfait à de telles obligations, en particulier en procédant à une étude préalable à la livraison de l'aliment Kempen en vue de vérifier l'adéquation de celui-ci à l'exploitation agricole des appelantes, en organisant des visites de suivi régulières et en répondant utilement à toutes les demandes et récriminations de ses clients ;

Attendu qu'il résulte des déclarations mêmes des sociétés appelantes auprès du docteur D., expert amiable, que la mise en place du système Kempen dans leur exploitation a eu lieu le 15 juin 2006 ;

Que la cour constate à cet égard (pièce numéro 1 du dossier des appelants) qu'une visite commerciale s'est déroulée le 13 avril 2006 portant comme nom d'élevage "L. Éric", indiquant : "visites avec Daniel M., présentation système Kempen, résultats 2 élevages France" ; que ce document prévoit par ailleurs la réalisation d'un audit à venir en mentionnant les termes suivants : "audit Kempen : mercredi 10/05/06 après-midi 15 heures avec Daniel" ;

Qu'il apparaît que le même Daniel M. a réalisé deux audits intitulés respectivement "INITIAL" et "INITIAL + 6 mois" et précisant qu'ils constituent "une étude économique préalable" tout en "encourageant les éleveurs intéressés par la démarche à confirmer cet audit par une étude comptable précise" ; que ces deux documents comprennent deux colonnes distinctes mentionnant, d'une part, les données du système actuel et, d'autre part, leur évolution en cas d'adoption du système Kempen ; que si ces documents comportent la date "05/10/06", c'est-à-dire le 5 octobre 2006, une telle mention provient manifestement d'une simple erreur de plume par interversion du 05 et du 10, puisqu'il avait été expressément prévu, dans la feuille de visite commerciale précitée, qu'un "audit Kempen" serait réalisé le "mercredi 10/05/06 après-midi avec Daniel", c'est-à-dire le même Daniel M. ; que le premier juge en a dès lors pertinemment déduit que les audits litigieux avaient été réalisés à la date du 10 mai 2006, c'est-à-dire antérieurement à la mise en place système Kempen le 15 juin suivant ; que les appelantes ne peuvent dès lors utilement soutenir qu'aucun audit préalable n'aurait été réalisé antérieurement à la mise en place du nouveau système d'alimentation de leur bétail ;

Attendu par ailleurs que les appelantes ont eux-mêmes indiqué au docteur D. (page numéro 5 du rapport d'expertise amiable) que "le technicien passait au départ 2 à 3 fois par semaine et téléphonait souvent" ; qu'il résulte des pièces 3, 4 et 5 du dossier de la société Axereal Elevage que des visites de suivi ont été réalisées sur les lieux de l'exploitation les 25 juin, 3 octobre et 14 novembre 2008 ; que l'examen des comptes-rendus de visite fait apparaître qu'aucun reproche n'a été formulé par les sociétés appelantes qui aurait pu être consécutif à l'utilisation du système Kempen, le compte-rendu de visite du 25 juin 2008 mentionnant au contraire "RAS bon résultats", celui du 3 octobre 2008 "projet d'installation du fils en rations sèches Kempen" et celui du 14 novembre 2008 "RAS" ;

Qu'en tout état de cause, l'EARL L. et la SCEA de Bagatelle ne justifient aucunement avoir informé la société Ceralliance des difficultés rencontrées suite à l'utilisation du système Kempen alors même qu'elles invoquent lors de l'instance des conséquences néfastes très importantes sur leur exploitation qui n'ont pu leur échapper (non réalisation du quota laitier, dépenses en produits vétérinaires très importantes pour traiter les mammites, leucocytes très importants avec avertissement de la laiterie de ne plus collecter le lait,

retenues financières, perte de lait en raison de traitements antibiotiques, surconsommation d'aliments par rapport au projet d'environ 100 tonnes) ; qu'il paraît donc particulièrement étonnant que face à une telle situation mettant en péril à court terme l'activité laitière de l'exploitation, les appelantes n'aient pas porté de tels éléments d'information à la connaissance de leur cocontractant ;

Que les appelantes ne peuvent utilement faire état des courriers établis par trois agriculteurs (pièces numéros 11 à 13 de leur dossier) résidant dans des régions éloignées de la leur et comportant des récriminations à l'encontre du système Kempen pour rapporter la preuve d'un quelconque manquement de la société Ceralliance à son obligation de conseil ;

Que, dans ces conditions, c'est à bon droit que le premier juge a débouté les sociétés Bagatelle et L. de leurs demandes reconventionnelles, de sorte que la décision déférée devra être confirmée en l'intégralité de ses dispositions ;

III) Sur les appels en garantie :

Attendu que la cour confirmant la décision du premier juge ayant écarté les prétentions reconventionnelles de la SCEA Bagatelle et de l'EARL L., les demandes formées respectivement par la société Alliance Négoce en vue d'être garantie par la société Axereal Elevage et par cette dernière aux fins d'être garantie par la société Française de Premix et Spécialités apparaissent sans objet ;

IV) Sur les autres demandes :

Attendu que les prétentions formées par la SCEA Bagatelle et l'EARL L., qui succombent en leur appel, au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile devront être rejetées ;

Que l'équité commandera de les condamner, sur le fondement du même article, à verser à la société Alliance Négoce, la société Axereal Elevage et la société Française de Premix et Spécialités la somme, chacune, de 1 500 € ;

Par ces motifs : LA COUR, - Confirme, en toutes ses dispositions, le jugement entrepris, Y ajoutant, - Condamne la SCEA Bagatelle et l'EARL L. à verser à la société Alliance Négoce, la société Axereal Elevage et la société Française de Premix et Spécialités la somme, chacune, de 1500 € en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, - Condamne la SCEA Bagatelle et l'EARL L. aux entiers dépens d'appel et dit qu'il pourra être fait application des dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.