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Décisions

ADLC, 20 octobre 2017, n° 17-DCC-169

AUTORITÉ DE LA CONCURRENCE

Décision

relative à la prise de contrôle exclusif de l'activité charcuterie salaison de la société Financière Turenne Lafayette par la société Cooperl Arc Atlantique

ADLC n° 17-DCC-169

20 octobre 2017

L'Autorité de la concurrence,

Vu le dossier de notification adressé au service des concentrations le 4 mai 2017, déclaré complet le 7 septembre 2017, relatif à la prise de contrôle exclusif de l'activité charcuterie salaison de la société Financière Turenne Lafayette par la société Cooperl Arc Atlantique, formalisée par une offre de reprise en date du 22 avril 2017 et des jugements du Tribunal de commerce de Paris en date du 15 juin 2017 ; Vu le livre IV du Code de commerce relatif à la liberté des prix et de la concurrence, et notamment ses articles L. 430-1 à L. 430-7 ; Vu les éléments complémentaires transmis par la partie notifiante au cours de l'instruction ; Adopte la décision suivante :

I. Les entreprises concernées et l'opération

1. Cooperl Arc Atlantique est une société coopérative agricole à la tête du groupe Cooperl Arc Atlantique (ci-après, "Cooperl"), lequel est actif dans la production, la collecte, l'abattage, la transformation, la conservation et la vente d'animaux d'espèces porcines et avicoles. Il est également actif dans le secteur des céréales, protéagineux, oléagineux provenant exclusivement des exploitations de ses associés coopérateurs. Cooperl fabrique également des produits de charcuterie-salaison et détient la marque Brocéliande.

2. L'activité de charcuterie salaison de la société Financière Turenne Lafayette (ci-après, " FTL ") est constituée par les sociétés Paul Prédault, Madrange, La Lampaulaise des Salaisons, Montagne Noire, ainsi que des éléments corporels et incorporels nécessaires à leur activité (ci-après ensemble, " les sociétés cibles "). Ces sociétés sont actives dans la fabrication de produits de charcuterie-salaison.

3. L'opération s'inscrit dans le cadre des procédures de redressements judiciaires ouvertes par le Tribunal de commerce de Paris le 2 mai 2017 au bénéfice de l'activité de charcuterie salaisondu groupe FTL. Par lettre en date du 24 mai 2017, l'Autorité de la concurrence a accordé une dérogation à l'effet suspensif du contrôle des concentrations à Cooperl, en application de l'article L. 430-4 du Code de commerce. Par jugements rendus le 15 juin 2017, le Tribunal de commerce de Paris a désigné Cooperl comme le repreneur des sociétés cibles.

4. L'opération notifiée consiste en l'acquisition par Cooperl (i) de la totalité du capitaldes sociétés Paul Prédault, La Lampaulaise des Salaisons, Madrange et Montagne Noire, (ii) de la totalité des marques et autres droits de propriétés intellectuelles liés à l'exploitation des activités de charcuterie salaison et (iii) de certains actifs immobiliers se rattachant à l'activité charcuterie salaison.

5. En ce qu'elle se traduit par la prise de contrôle exclusif de l'activité charcuterie salaison du groupe FTL par Cooperl, l'opération notifiée constitue une opération de concentration au sens de l'article L. 430-1 du Code de commerce.

6. Les entreprises concernées réalisent ensemble un chiffre d'affaires hors taxes total sur le plan mondial de plus de 150 millions d'euros (Cooperl : [...] d'euros pour l'exercice clos le 31 décembre 2016 ; actifs cibles : [...] d'euros pour l'exercice clos le 31 décembre 2015). Chacune de ces entreprises a réalisé en France un chiffre d'affaires supérieur à 50 millions d'euros (Cooperl : [...] d'euros pour l'exercice clos le 31 décembre 2016 ; actifs cibles : [...] d'euros pour l'exercice clos le 31 décembre 2015). Compte tenu de ces chiffres d'affaires, l'opération ne relève pas de la compétence de l'Union européenne. En revanche, les seuils de contrôle mentionnés au I de l'article L. 430-2 du Code de commerce sont franchis. Cette opération est donc soumise aux dispositions des articles L. 430-3 et suivants du Code de commerce relatifs à la concentration économique.

II. Délimitation des marchés pertinents

7. Les autorités de concurrence nationales ont identifié quatre stades différents de transformation de la viande1. La première transformation comprend la collecte d'animaux vivants en vue de l'abattage, à l'issue de laquelle sont obtenus et vendus les carcasses et les coproduits2. La deuxième transformation comprend le désossage et la découpe des carcasses. La troisième transformation consiste en la mise sous barquettes de viande prête à cuire. Enfin, la quatrième transformation correspond à la fabrication de produits élaborés à base de viande.

8. Cooperl est actif sur l'ensemble des stades de transformation de la viande, alors que les sociétés cibles sont exclusivement présentes au stade de la quatrième transformation.

A. LES MARCHÉS DE PRODUITS

1. LES MARCHÉS DE LA PREMIÈRE TRANSFORMATION

9. Au sein de la première transformation, les autorités de concurrence nationales distinguent, pour chaque espèce d'animaux abattus, les marchés de la collecte d'animaux vivants en vue de l'abattage, les marchés des prestations d'abattage pour le compte de tiers, les marchés des carcasses et les marchés des coproduits3.

10. Au cas d'espèce, seul le marché des coproduits comestibles de porc est concerné par l'opération, les sociétés cibles ne fabriquant que des produits de charcuterie salaison à base de porc.

2. LES MARCHÉS DE LA VIANDE FRAÎCHE DE PORC (DEUXIÈME ET TROISIÈME TRANSFORMATIONS)

11. Les autorités de concurrence ont retenu l'existence de marchés distincts par type de viande fraîche vendue. Elles ont ainsi distingué le marché de la viande fraîche de porc des autres types de viande fraîche4.

12. Le marché a également été segmenté par canaux de distribution : grandes et moyennes surfaces alimentaires (GMS), bouchers et charcutiers artisans (BCA), industrie agro-alimentaire (IAA) et restauration hors foyer (RHF)5.

13. Enfin, s'agissant de la viande porcine, les autorités de la concurrence nationales ont envisagé de retenir un marché unique des deuxième et troisième transformations, tout en laissant cette question ouverte6.

3. LES MARCHÉS DE LA VENTE DE PRODUITS DE CHARCUTERIE SALAISON (QUATRIÈME TRANSFORMATION)

14. Les autorités de concurrence nationales ont analysé plus spécifiquement les marchés de la charcuterie, qui concernent principalement la viande de porc7. Pour ces marchés, elles ont opéré une segmentation en fonction (i) de la famille à laquelle appartient le produit et (ii) du canal de distribution (GMS, IAA et RHF).

15. S'agissant de la segmentation par famille de produits, l'Insee, le ministère de l'Agriculture et la Fédération française des industriels charcutiers, traiteurs, transformateurs de viandes (FICT) utilisent une nomenclature qui distingue vingt-trois familles de produits regroupés selon leur mode de préparation (crus ou cuits), la technologie employée (salage, séchage, fumage, cuisson, conserve, surgelés) et la nature de la viande employée (porc, volaille, bœuf, gibier, etc.).

16. Le tableau suivant représente les neuf familles de produits sur lesquels les parties sont simultanément présentes :

Catégories de produits de charcuterie salaison (FICT)

Poitrines et leurs morceaux salés, saumurés, séchés ou fumés

Autres viandes de porc salées, saumurées, séchées ou fumées

Jambons cuits

Épaules cuites

Autres pièces cuites (rôtis,...)

Saucisses et saucissons secs

Pâtés et préparations diverses à base de foie (hors foie gras)

Autres préparations et conserves à base de porc, y compris les mélanges

Pâtés et préparations diverses à base de volaille ou de gibier (y compris viandes cuites de volaille)

17. Les autorités de la concurrence nationales ont considéré que chacune de ces familles de produits est susceptible de constituer autant de marchés distincts, tout en n'excluant pas l'existence de marchés regroupant plusieurs familles de produits8.

18. L'Autorité a ainsi considéré que le jambon et l'épaule cuite sont susceptibles de constituer un marché unique9. Cette délimitation est d'ailleurs confirmée par le test de marché réalisé pour les besoins de la présente opération. En effet, la totalité des répondants a indiqué à cet égard que les épaules cuites peuvent être produites sur les lignes de production utilisées pour le jambon cuit.

19. L'Autorité a par ailleurs de regrouper les pâtés et préparations diverses à base de foie (hors foie gras), les autres préparations et conserves à base de porc, y compris les mélanges, et les pâtés et préparations diverses à base de volaille ou de gibier en deux marchés distincts : (i) pâtés et préparations à base de viande et (ii) viandes cuites de volailles10.

20. En l'espèce, la partie notifiante considère qu'une segmentation des pâtés et conserves en trois familles distinctes fondées sur l'origine animale de la viande, selon la nomenclature de la FICT, n'est pas pertinente. En effet, les pâtés sont fréquemment des mélanges de viande issus de plusieurs espèces animales. Il apparaît également que le choix du consommateur est plus fréquemment orienté par la recette utilisée (mousse, rillette, terrine) que par la provenance animale des viandes

21. Par ailleurs, la partie notifiante considère qu'il n'existe aucune différence au niveau de la production des différents types de pâtés, à qualité équivalente. La grande majorité des répondants au test de marché ont en effet confirmé que, pour un même mode de distribution (libre-service ou coupe), les différents types de pâtés pouvaient être produits sur les mêmes lignes de production, et à coûts identiques.

22. La question de la pertinence d'une segmentation selon la famille de produits de la charcuterie salaison peut toutefois être laissée ouverte, les conclusions de l'analyse concurrentielle demeurant inchangées quelle que soit la délimitation retenue.

23. S'agissant de la segmentation par canal de distribution (GMS, IAA, RHF), seul le canal des GMS a fait l'objet de sous-segmentations supplémentaires, selon le mode de distribution (libre-service et coupe) et selon le positionnement commercial du produit avec une distinction entre les marques de fabricant (" MDF ") et les marques de distributeur (" MDD "), lesquelles comprennent également les marques de premier prix (" MPP ") et les marques " hard discount " (" MHD ").

24. Toutefois, la pertinence de la segmentation entre MDD et MDF a été analysée, et parfois remise en cause, selon les produits concernés11. La Commission européenne et le ministre de l'économie se sont ainsi interrogés, à l'occasion de décisions précédentes, sur la pertinence de cette segmentation pour les marchés de la charcuterie salaison de porc, tout en laissant la question ouverte12. Ils ont notamment relevé que la concurrence exercée par les produits MDD sur les produits MDF était forte, que la qualité des produits était similaire et que les processus de fabrication étaient identiques. La Commission a souligné, dans la décision Smithfield / Oaktree / Sara Lee Foods Europe, à la suite de son test de marché couvrant notamment la France, que l'existence des marques de distributeurs limitait effectivement la capacité des fournisseurs de MDF à augmenter leurs prix et qu'il était peu probable que cette segmentation soit pertinente13.

25. En l'espèce, s'agissant des pâtés et préparations à base de foie, la partie notifiante considère qu'il y a lieu de retenir un marché unique comprenant MDD et MDF, dans la mesure où (i) la qualité des produits et les processus de fabrication sont identiques, (ii) la largeur de gamme est similaire, et (iii) certaines MDD développent des stratégies de marque similaires aux MDF.

26. Les réponses des concurrents au test de marché confirment qu'à qualité équivalente, les coûts et le processus de fabrication sont similaires pour les pâtés et préparations à base de foie MDF et MDD. De même, la grande majorité des répondants confirment qu'il n'y a pas de différence significative de largeur de gamme entre les produits MDF et MDD.

27. Par ailleurs, il n'existe aucun obstacle technique, juridique ou financier à ce qu'un producteur de pâtés et préparations à base de foie MDF fabrique des produits MDD, dans la mesure où leurs processus de fabrication sont similaires. Ainsi, deux répondants spécialisés en produits MDF indiquent qu'ils pourraient se positionner sur le segment des MDD, en cas de sous-utilisation de leurs capacités de production.

28. À cet égard, le test de marché a mis en évidence l'existence d'importantes sur-capacités de production de plusieurs fournisseurs actuels de pâtés et préparations à base de foie, lesquels sont par suite susceptibles ainsi de répondre à un accroissement de demande des GMS en produits MDD.

29. Par ailleurs, la majorité des GMS interrogées dans le cadre du test de marché ont indiqué ne pas identifier de marque " incontournable " en matière de pâtés et préparations à base de foie, ce qui est de nature à accroître la substituabilité entre MDD et MDF, du point de vue des consommateurs, lorsque les produits sont vendus dans des gammes de prix identiques. En l'espèce, la moitié des répondants au test de marché ont indiqué que les consommateurs se reporteraient sur les pâtés et préparations à base de foie MDF, en cas d'augmentation significative du prix des produits MDD. Deux répondants soulignent, en particulier, la proximité des prix des pâtés et préparations à base de viande MDF et MDD.

La partie notifiante indique également que la différence de prix entre MDD et MDF sur ce segment est plus faible que celle observée sur le marché global de la charcuterie salaison. Cette proximité des prix entre MDF et MDD est confirmée sur le segment des pâtés et préparations à base de foie. En effet, l'écart de prix entre MDF et MDD est généralement inférieur à 10 %14.

30. Compte tenu de ce qui précède, il apparaît pertinent de retenir, pour les besoins de la présente analyse, un marché unique des pâtés et préparations à base de foie à destination des GMS (éventuellement sous-segmenté entre libre-service et coupe). S'agissant des autres produits de charcuterie salaison, la question de la pertinence d'une segmentation selon le positionnement commercial des produits et leur mode de distribution peut par ailleurs être laissée ouverte, les conclusions de l'analyse concurrentielle demeurant inchangées quelle que soit l'option retenue.

B. LES MARCHÉS GÉOGRAPHIQUES

31. Les autorités de concurrence ont retenu une dimension nationale pour l'ensemble des marchés de transformation de la viande15. Elles ont toutefois relevé, s'agissant des marchés des deuxième et troisième transformations, une tendance à l'augmentation des flux commerciaux transnationaux laquelle pourrait suggérer l'existence d'une dimension géographique plus large que nationale sur les marchés de la viande fraîche16.

32. En l'espèce, l'analyse concurrentielle, qui sera conduite sur des marchés de dimension nationale, tiendra compte de la pression concurrentielle exercée par les importations de viande fraîche de porc en France aux stades des deuxième et troisième transformations des produits de charcuterie salaison.

III. Analyse concurrentielle

33. Dans la mesure où les parties sont simultanément actives sur les marchés de la vente de produits de charcuterie salaison (quatrième transformation), l'opération est susceptible de produire des effets horizontaux sur ces marchés (A). Par ailleurs, Cooperl est seule présente sur les marchés des première, deuxième et troisième transformations : l'opération est donc également susceptible de produire des effets verticaux (B). Enfin, l'opération est susceptible d'emporter des effets congloméraux, dans la mesure où elle confère à la nouvelle entité une gamme élargie de produits de charcuterie salaison et un portefeuille de marques notoires (C).

A. ANALYSE DES EFFETS HORIZONTAUX

34. En l'espèce, les activités des parties en matière de produits de charcuterie salaison se chevauchent uniquement au stade de la quatrième transformation, à destination principalement des GMS.

1. VENTE DE PRODUITS DE CHARCUTERIE SALAISON AUX GMS

35. Sur les marchés de la vente de produits de charcuterie salaison aux GMS, les parts de marché en volume estimées des parties en 2016 sont les suivantes :

a) Le marché de la vente de pâtés et préparations diverses à base de foie

36. Sur le marché global de la vente de pâtés et préparations diverses à base de foie aux GMS, la part de marché en volume de la nouvelle entité est estimée à [40-50] %17, avec une position significative sur le segment du libre-service ([50-60] %18). Calculées en valeur, les positions de la nouvelle entité sont sensiblement plus faibles : [40-50] % au niveau global19 ([50-60] % en libre-service20 ; [10-20] % à la coupe21).

37. Ces positions ne sont toutefois pas susceptibles de conférer à la nouvelle entité un pouvoir de marché tel qu'elle puisse déterminer ses prix indépendamment des GMS et de ses concurrents.

38. Premièrement, la nouvelle entité fera face à des concurrents crédibles, de dimension nationale, qui disposent de parts de marché (en valeur) non négligeables, tels que les sociétés Henaff ([10-20] %), Fleury Michon ([10-20] %), Bordeau Chesnel ([5-10] %), et Raynal et Roquelaure ([5-10] %)22. Il existe par ailleurs des concurrents régionaux qui exercent une pression concurrentielle dans certaines régions (Lou Gascoun en Nouvelle-Aquitaine et Stoeffler en Alsace). Le test de marché a enfin mis en évidence d'importantes capacités de production disponibles chez plusieurs fournisseurs actuels de pâtés et préparations diverses à base de foie.

39. Deuxièmement, les positions des parties se sont réduites depuis 2016, en particulier sur le segment des produits en libre-service, pour lesquels l'acquéreur a perdu [confidentiel] appels d'offres de MDD en 2017 ([confidentiel]), tandis que les sociétés cibles ont vu leur part de marché diminuer de [confidentiel] points depuis le début de l'année sur ce même segment.

40. Troisièmement, les GMS disposent généralement d'un pouvoir de négociation important vis-à-vis de leurs fournisseurs, lequel résulte notamment de la forte concentration de leurs centrales d'achat23. S'agissant plus précisément des pâtés et préparations diverses à base de foie, ce contre-pouvoir est renforcé d'une part, par l'absence de marque incontournable, comme le confirme la majorité des répondants au test de marché, et, d'autre part, par la possibilité pour les GMS d'avoir des alternatives crédibles pour leurs approvisionnements, à la fois en produits MDF et MDD.

41. Enfin, la consommation de pâtés et préparations à base de viande est un marché en déclin, alors qu'en parallèle les charcuteries cuites à base de volaille24 sont en augmentation.

Ainsi, selon la partie notifiante, la consommation de pâtés et préparations à base de foie aurait diminué de 32 % entre 2002 et 2015 en France. Les répondants au test de marché confirment dans leur grande majorité cette tendance, estimant un rythme annuel de recul compris entre 2 % et 5 %.

Il s'en suit que toute hausse de prix de la nouvelle entité non contrebalancée par les GMS pourrait conduire à de nouvelles baisses de volume au profit de produits présent sur des marchés connexes pour lesquels les parties ne disposent pas de positions importantes, tels que les pâtés et préparations diverses à base de volaille ou de gibier, ou les autres préparations et conserves à base de porc.

42. Compte tenu de ces éléments, l'opération n'est pas de nature à porter atteinte à la concurrence par le biais d'effets horizontaux sur les marchés de la vente de pâtés et préparation à base de foie aux GMS.

b) Les marchés de la vente de jambons cuits

43. Sur le marché global de la vente de jambons cuits aux GMS, la nouvelle entité disposera d'une part de marché en volume estimée à [30-40] %25. Sur le segment des MDF, la nouvelle entité disposera d'une part de marché limitée, estimée à [10-20] %, avec une position plus conséquente sur les jambons MDF à la coupe ([40-50] %26) tandis que sur le segment des MDD, la nouvelle entité détiendra une position significative ([50-60] %27) et plus spécifiquement sur le segment des jambons cuits MDD en libre-service ([50-60] %28). Les parts de marchés calculées en valeur sont similaires29, à l'exception de la part de marché pour les jambons cuits MDF à la coupe, estimée à [20-30] %30.

44. Ces parts de marché peuvent toutefois être relativisées.

45. Tout d'abord, sur le segment spécifique du jambon cuit MDF à la coupe, l'incrément de part de marché résultant de la présente opération est limité à [0-5] points en valeur et à [0-5] point en volume. Par ailleurs, la partie notifiante souligne que les achats de jambon cuit à la coupe reculent en faveur des achats au rayon libre-service, ces derniers représentants 72,5 % des achats de jambon cuit.

46. Sur le segment des MDD, les parts de marché des sociétés cibles surestiment le pouvoir de marché réel des sociétés cibles dans la mesure où elles résultent principalement d'une politique commerciale agressive qui a occasionné des pertes importantes pour le groupe FTL. En effet, le groupe FTL a pratiqué en 2016 des prix sensiblement inférieurs à ceux de ses concurrents sur les marchés du jambon cuit. Ainsi, les sociétés cibles ont vendu aux GMS des jambons cuits à [confidentiel] euros le kilo, contre [confidentiel] euros pour Cooperl et [prix supérieur au prix pratiqué par les sociétés cibles] euros, en moyenne, sur le marché. Dans la mesure où ces prix ont permis au groupe FTL de remporter plusieurs appels d'offres de jambons cuits MDD et oùla nouvelle entité a annoncé vouloir pratiquer des prix en rapport avec ses coûts de production, les positions estimées de la nouvelle entité présentées ci-avant, résultant de l'addition des parts de marché en 2016, devraient diminuer en 2017, comme en témoignent plusieurs pertes de contrat intervenues depuis le début de l'année (voir ci-après).

47. Deuxièmement, la nouvelle entité fait face à plusieurs concurrents qui disposent de positions non négligeables sur l'ensemble des marchés des jambons cuits, tels que les sociétés Herta ([20-30] % en volume, [20-30] % en valeur), Fleury Michon ([10-20] % en volume et [10-20] % en valeur) ou Petitgas ([5-10] %) sur le segment du libre-service et Brient, Loste Tradi-France, Jean Floc'h et Charcuteries Gourmandes sur le segment de la coupe.

La partie notifiante souligne également l'existence de capacités de production disponibles chez certains de ces concurrents.

48. S'agissant plus particulièrement du segment des jambons cuits MDD, l'Autorité relève que la position de la nouvelle entité ne lui confère pas un pouvoir de marché suffisant susceptible de conduire à des hausses de prix sur ces marchés. En effet, les marchés des jambons cuits MDD sont caractérisés par l'existence de nombreux fournisseurs susceptibles de fournir les GMS conformément à leurs cahiers des charges, de sorte que la nouvelle entité ne sera pas incontournable. À cet égard, il existe actuellement de nombreux fournisseurs en produits MDD auxquels les GMS font appel : on peut citer ainsi Jean Floc'h, Brient, Bazin, Charcuteries Gourmandes, Loste Tradi-France, Kermené et Monique Ranou pour le groupement Intermarché. La partie notifiante indique ainsi avoir perdu [confidentiel] marchés de MDD (confidentiel]) en 2016 au profit de Jean Floc'h et de Charcuteries Gourmandes.

49. Troisièmement, l'Autorité relève que les GMS disposent d'un pouvoir de négociation important vis-à-vis de leurs fournisseurs, lequel résulte notamment de la forte concentration de leurs centrales d'achat31.

50. S'agissant plus particulièrement des marchés des produits MDD, l'Autorité relève que les changements de fournisseurs n'entraînent généralement pas de difficulté majeure pour les GMS dès lors qu'elles disposent d'alternatives dans leurs approvisionnements. S'agissant des jambons cuits, la grande distribution fait généralement appel à plusieurs fournisseurs concurrents, chaque appel d'offres concernant un nombre limité de références. Ainsi, s'agissant des produits MDD en libre-service, un même acheteur peut répartir ses achats entre plusieurs fournisseurs en fonction des références (exemple : jambon cuit supérieur découenné et dégraissé 4, 8 et 12 tranches ; jambons premier prix avec couenne 4 et 8 tranches et découenné et dégraissé 4, 8 et 12 tranches ; jambon supérieur sans additif dégraissé 4 tranches), ce qui facilite le changement de fournisseur.

51. Enfin, comme l'Autorité a déjà eu l'occasion de le relever, les contrats passés avec les fabricants concernant ces produits sont de faible durée ou de durée indéterminée mais pouvant être dénoncés à tout moment moyennant un court préavis32. En l'espèce, la majorité des GMS ayant recours à des contrats à durée indéterminée confirme pouvoir rompre aisément un contrat, moyennant un préavis.

La partie notifiante a également fourni de nombreux exemples de ruptures de contrats d'approvisionnement, dont plusieurs sont intervenus en 2017, de sorte que la part de marché de la nouvelle entité s'est réduite en 2017 (baisse de [0-5] points de la part de marché globale selon les estimations de la partie notifiante et de [5-10] points sur le segment des MDD en libre-service).

52. Compte tenu de ces éléments, l'opération n'est pas de nature à porter atteinte à la concurrence par le biais d'effets horizontaux sur les marchés de la vente de jambons cuits aux GMS.

c) Les marchés de la vente d'autres pièces cuites

53. Sur les marchés de la vente d'autres pièces cuites de porc aux GMS, la nouvelle entité disposera d'une part de marché globale en volume de [20-30] %33. S'agissant du segment des autres pièces cuites de porc MDD, la nouvelle entité détiendra une part de marché en volume estimée 11 à [30-40] %34 et à [20-30] % sur le segment du libre-service.

Calculées en valeur, ces parts de marché sont moins importantes35.

54. Ces parts de marché ne sont pas susceptibles de conférer à la nouvelle entité un pouvoir de marché, compte tenu en particulier de l'existence d'autres fournisseurs importants, tels que Fleury Michon (part de marché en valeur : [30-40] %), Kermené ([10-20] %), ou Brient ([5-10] %).

55. Par conséquent, l'opération n'est pas de nature à porter atteinte à la concurrence par le biais d'effets horizontaux sur les marchés de la vente d'autres pièces cuites aux GMS.

d) Les autres marchés de la vente d'autres produits de charcuterie salaison

56. Sur les marchés de la vente aux GMS d'épaules cuites, d' autres préparations et conserves à base de porc, y compris les mélanges, de pâtés et préparations diverses à base de volaille ou de gibier, de saucisses et saucissons secs, de poitrines et leurs morceaux, les parts de marché en volume de la nouvelle entité sont inférieures à 25 %, quelles que soient les segmentations envisagées.

57. Sur chacun de ces marchés, la nouvelle entité fera face à de nombreux concurrents comme Fleury Michon, Herta, Bordeau Chesnel, Raynal et Roquelaure, ou Aoste.

58. Par conséquent, l'opération n'est pas de nature à porter atteinte à la concurrence par le biais d'effets horizontaux sur ces marchés.

2. VENTE DE PRODUITS DE CHARCUTERIE SALAISON À LA RESTAURATION HORS FOYER (RHF) ET AUX GROSSISTES

59. Sur les marchés de la vente de produits de charcuterie salaison à la restauration hors foyer (RHF), les parts de marché en volume des parties en 2016 sont les suivantes : Cooperl Sociétés cibles Nouvelle entité Poitrines et leurs morceaux salés, saumurés, séchés ou fumés[20-30] %[0-5] %[20-30] %Autres viandes de porc salées, saumurées, séchées ou fumées[10-20] %[0-5] %[10-20] %Jambons cuits[20-30] %[20-30] %[40-50] %Épaules cuites[0-5] %[0-5] %[0-5] %Autres pièces cuites (rôtis,...)[30-40] %[0-5] %[30-40] %Saucisses et saucissons secs [10-20] %[5-10] %[10-20] %Pâtés et préparations diverses à base de foie[20-30] %[0-5] %[20-30] %34 Cooperl : [20-30] % ; sociétés cibles : [5-10] %. Sur le segment des autres pièces cuites MDF, la nouvelle entité disposera d'une part de marché en volume estimée à [10-20] % (les parties ne sont pas simultanément actives sur les mêmes segments de la coupe et du libre-service).

Autres préparations et conserves à base de porc, y compris les mélanges [5-10] %[0-5] %[5-10] %

a) Le marché de la vente à la RHF de jambons cuits

60. Sur le marché de la vente de jambons cuits à la RHF, la part de marché en volume de la nouvelle entité atteint [40-50] %36. En valeur, la part de marché est sensiblement inférieure ([30-40] %37).

61. La partie notifiante indique qu'il n'existe aucune donnée publique lui permettant d'évaluer la part de marché de ses concurrents sur ce canal de distribution. Elle cite néanmoins comme principaux concurrents les sociétés Jean Floc'h, Charcuteries Gourmandes, André Bazin, Loste Tradi -France, Brient et Tönnies.

62. L'Autorité a eu l'occasion de releverque le canal de la RHF dispose généralement d'un pouvoir de négociation important38, dans la mesure où il est constitué d'opérateurs puissants. Ainsi, les principaux clients de Cooperl ([confidentiel]) et des sociétés cibles ([confidentiel]) sont des entreprises disposant d'une forte puissance d'achat.

63. Enfin, le fonctionnement du marché, qui repose sur des appels d'offres remis en cause annuellement, et la neutralité du consommateur final à l'identité du fournisseur, facilitent le changement de fournisseur pour les grossistes et les acteurs de la RHF qui disposeront, à l'issue de l'opération, d'alternatives crédibles pour leur approvisionnement en jambons cuits.

64. Par conséquent, l'opération n'est pas de nature à porter atteinte à la concurrence par le biais d'effets horizontaux sur le marché de la vente à la RHF de jambons cuits.

b) Les marchés de la vente à la RHF d'autres pièces cuites et de pâtés et préparations diverses à base de foie

65. Sur les marchés de la vente à la RHF d'autres pièces cuites et de pâtés et préparations à base de foie, la nouvelle entité disposera de parts de marché en volume estimées respectivement à [30-40] % et à [20-30] %40. L'incrément de part de marché résultant de l'opération est inférieur ou égal à deux points, les sociétés cibles n'étant que marginalement présentes sur ces deux marchés. Or l'Autorité considère, " [d]ans le cas où l'une des parties à l'opération détient des parts de marché extrêmement faibles (moins de 2 points), [que] l'opération, a priori, n'emporte pas d'atteinte à la concurrence, à moins que ces parts ne viennent conforter une position déjà très forte "41.

66. Par ailleurs, la nouvelle entité fera face à la concurrence de fournisseurs importants : sur le marché des autres pièces cuites : Stalaven ([20-30] %), Brient ([10-20]%), Guyader ([10-20] %) et Tallec ([5-10] %) et, sur le marché des pâtés et préparations diverses à base de foie :

67. Par conséquent, l'opération n'est pas de nature à porter atteinte à la concurrence par le biais d'effets horizontaux sur les marchés de la vente à la RHF d'autres pièces cuites et de pâtés et préparations diverses à base de foie.

c) Les marchés de la vente à la RHF d'autres produits de charcuterie salaison

68. Sur les marchés de la vente à la RHF de poitrines et leurs morceaux salés, saumurés, séchés ou fumés, d'épaules cuites, de saucisses et saucissons secs, d'autres viandes porc salées, saumurées, séchées ou fumées et d'autres préparations et conserves à base de porc, y compris les mélanges, les parts de marché de la nouvelle entité sont inférieures à 25 %.

69. Sur ces marchés, la nouvelle entité fera face à la concurrence de nombreux fournisseurs, tels que les sociétés Stalaven, Stephan, Jean Floc'h, Charcuteries Gourmandes, Stemmelen, Loste Tradi-France, Aoste, France Salaison, Delpeyrat, Beretta, Berni et Aubret.

70. Par conséquent, l'opération n'est pas de nature à porter atteinte à la concurrence par le biais d'effets horizontaux sur ces marchés.

3. VENTE DE PRODUITS DE CHARCUTERIE SALAISON AUX IAA

71. Sur les marchés de la vente de produits de charcuterie salaison aux IAA, les parts de marché en volume estimées des parties en 2016 sont les suivantes : Cooperl Sociétés cibles Nouvelle entité Poitrines et leurs morceaux salés, saumurés, séchés ou fumés[5-10] %[0-5] %[10-20] % Autres viandes de porc salées, saumurées, séchées ou fumées[0-5] %<[0-5] %[0-5] %Jambons cuits[10-20] %[10-20] %[20-30] %Autres pièces cuites (rôtis,...)[0-5] %[0-5] %[0-5] %Saucisses et saucissons secs [10-20] %[0-5] %[10-20] %

72. Sur l'ensemble des marchés de la vente de produits de charcuterie salaisons aux IAA, les parts de marché de la nouvelle entité sont inférieures à 25 %.

73. Sur ces marchés, la nouvelle entité fera face à la concurrence de nombreux fournisseurs, tels que les sociétés Aubret, Stemmelen, Jean Floc'h André Bazin, Loste Tradi-France, Brient, Tonnies, Stalaven et Charcuteries Gourmandes.

74. Par conséquent, l'opération n'est pas de nature à porter atteinte à la concurrence par le biais d'effets horizontaux sur les marchés de la vente de produits de charcuterie salaison aux IAA.

4. ANALYSE DES EFFETS VERTICAUX

75. Une concentration verticale peut restreindre la concurrence en rendant plus difficile l'accès aux marchés sur lesquels la nouvelle entité sera active, voire en évinçant potentiellement les concurrents ou en les pénalisant par une augmentation de leurs coûts. Ce verrouillage peut viser les marchés aval, lorsque l'entreprise intégrée refuse de vendre un intrant à ses concurrents en aval, ou les marchés amont, lorsque la branche aval de l'entreprise intégrée refuse d'acheter les produits des fabricants actifs en amont et réduit ainsi leurs débouchés commerciaux.

76. Cependant, la pratique décisionnelle considère en principe qu'un risque d'effet vertical peut être écarté dès lors que la part de marché de l'entreprise issue de l'opération sur les marchés concernés ne dépasse pas 30 %42.

77. Cooperl vend de la viande fraîche de porc et des coproduits43, marchés sur lesquels les sociétés cibles sont présentes en tant qu'acheteur.

78. S'agissant du risque de verrouillage sur les marchés aval, les sociétés cibles se fournissent auprès de Cooperl en viande fraîche et en coproduits à hauteur de [5-10] % du chiffre d'affaires total réalisé par Cooperl. Après l'opération, la nouvelle entité pourrait ainsi être en mesure de réserver une part plus grande de sa production de viande fraîche et de coproduits pour ses activités aval de charcuterie salaison.

79. Toutefois, les parts de marché de Cooperl sur les marchés de la vente de viande fraîche et de coproduits en France sont limitées, et en tout état de cause inférieures à 30 % : elles sont estimées à [20-30] % en matière de viande fraîche et à [10-20]% sur le marché des coproduits.

Par conséquent, la nouvelle entité ne sera pas en mesure d'affaiblir ou d'évincer les fabricants de produits de charcuterie salaison des marchés de la quatrième transformation en les privant d'intrants. Sur ces marchés amont, ces concurrents disposeront d'alternatives crédibles, tels que les groupes Bigard/Socopa ([10-20] % de parts de marché sur les marchés de la viande fraiche de porc comme des coproduits), Kermené ([10-20] %) et Jean Floc'h ([5-10] %). Par ailleurs, sur les marchés de l'approvisionnement en viande fraîche, les fournisseurs européens constituent des alternatives pour les concurrents de la nouvelle entité. Le test de marché confirme en effet que plusieurs fabricants de produits de charcuterie salaisons s'approvisionnent en partie auprès de fournisseurs qui ne sont pas actifs sur le territoire national.

80. S'agissant du risque de verrouillage sur les marchés amont, les achats des sociétés Cibles auprès de Cooperl représentent [30-40] % de leurs approvisionnements en viande fraîche et en coproduits. Les sociétés cibles s'approvisionnent donc majoritairement auprès d'autres fournisseurs tels que [confidentiel] ([30-40] %), [confidentiel] ([10-20] %), [confidentiel] ([5-10] %) et [confidentiel] ([0-5] %). La nouvelle entité pourrait donc être incitée à réduire ses approvisionnements réalisés auprès de ses concurrents sur les marchés amont et s'engager dans une stratégie d'autoconsommation.

En tout état de cause, une telle stratégie n'aurait qu'un effet limité sur les marchés nationaux de la vente de viande fraîche et des coproduits, dans la mesure où les sociétés cibles représentent moins de [5-10] % des achats sur les marchés des coproduits porcins et moins de [5-10] % des achats de viandes fraîches de porc en France.

81. Par conséquent, l'opération n'est pas de nature à porter atteinte à la concurrence par le biais d'effets verticaux.

5. ANALYSE DES EFFETS CONGLOMÉRAUX

82. Une concentration a des effets congloméraux lorsque la nouvelle entité étend ou renforce sa présence sur plusieurs marchés dont la connexité peut lui permettre d'accroître son pouvoir de marché. La pratique décisionnelle des autorités de la concurrence considère en principe qu'un risque d'effet congloméral peut être écarté dès lors que la part de l'entité issue de l'opération sur les marchés concernés ne dépasse pas 30 %44.

a) Effet de gamme

83. La présente opération a pour effet d'accroître la position de Cooperl au-delà de 30 % sur certains segments de produits (jambon cuit à destination des GMS et de la RHF, pâtés et préparations à base de foie à destination des GMS) et d'étendre sa gamme de produits de charcuterie salaison. En effet, les sociétés cibles sont présentes sur des produits que Cooperl ne fabriquait pas, tels que les jambons salés, saumurés, séchés, ou fumés avec os ainsi que désossés, les autres viandes de porc salées, saumurées, séchées ou fumées (filets de bacon, filets de lard, coppa, pancetta) et les viandes cuites de volaille. Sur ces marchés, les sociétés cibles disposent toutefois de parts de marché inférieures à 30 % quelle que soit la segmentation retenue, à l'exception du marché de la vente aux GMS de viandes cuites de volaille sous MDD qui atteint [30-40] %.

84. Cependant, le mode d'organisation des achats de la grande distribution en matière de charcuterie salaison limite la capacité d'un fournisseur à mettre en place des stratégies de ventes liées. En particulier, les appels d'offres MDD concernent généralement un nombre limité de références, comme le confirment les exemples d'appels d'offres transmis par la partie notifiante : jambon supérieur cuit au torchon 4 tranches ; terrine de campagne 180 grammes et mousse de foie 180 grammes ; poitrine nature / fumée en tranche sous deux conditionnements.

En conséquence, la détention d'une gamme de produits MDD sur lesquels des positions supérieures à 30 % peuvent être constatées et d'une gamme de produits MDF ne constituent pas un argument de vente déterminant.

85. Par ailleurs, le contre-pouvoir des acheteurs de la grande distribution et de la RHD est à prendre en considération. Les GMS et les grossistes de la RHD détiennent une puissance d'achat importante, qui est susceptible de contrebalancer l'effet de détention d'une gamme élargie pour la nouvelle entité.

86. Enfin, la nouvelle entité fera face à des concurrents proposant des gammes équivalentes sur les différents marchés de la production de charcuterie salaison, tels que Fleury Michon, Herta, Aoste, et Kermené.

b) Effet de portefeuille

87. La présente opération permettra également à Cooperl, déjà détenteur de la marque Brocéliande, d'acquérir les marques des sociétés cibles telles que Madrange, Paul Prédault, Montagne Noire et Lampaulaise des Salaisons. Cependant,les marques de la nouvelle entité, si elles sont effectivement connues des consommateurs, ne sont pas généralement considérées comme " incontournables ".

Ainsi, sur les marchés de la vente aux GMS de jambons cuits, la totalité des répondants ont identifié Herta et Fleury Michon comme des marques incontournables, contrairement aux marques des sociétés cibles. À l'inverse, un seul répondant qualifie les 16 marques Madrange et Paul Prédault d'" incontournables " sur le marché spécifique du jambon cuit à la coupe. Sur le segment des pâtés et préparations à base de viande, la majorité des répondants ont indiqué ne pas identifier de marque incontournable.

88. Par conséquent, l'opération n'est pas de nature à porter atteinte à la concurrence par le biais d'effets congloméraux. DÉCIDE

Article unique : L'opération notifiée sous le numéro 17-087 est autorisée

1 Voir les lettres du ministre en charge de l'économie C2007-30 du 27 juin 2007 au directeur de la société Socopa, relative à une concentration dans le secteur de la transformation des viandes de boucherie, C2008-56 du 13 août 2008 aux conseils des sociétés Cooperl-Hunaudaye et Arca, relative à une concentration dans le secteur de la production la viande porcine et C2008-100 du 17 février 2009 au conseil de la société Bigard, relative à une concentration dans le secteur de la viande ; voir également les décisions de l'Autorité de la concurrence n° 10-DCC-22 du 8 mars 2010, relative à la prise de contrôle exclusif de la société Spanghero par la société coopérative Lur Berri, n° 10 -DCC-31 du 14 avril 2010, relative à la prise de contrôle exclusif d'actifs du groupe Bigard par la société C2 Développement (groupe Terrena), n° 11-DCC-68 du 26 mai 2011 relative à la prise de contrôle exclusif des sociétés Poujol Frères et Poujol Froid par la société Arcadie Sud-Ouest, n° 11 -DCC-154 du 24 octobre 2011 relative à la prise de contrôle exclusif de la société financière du Forest, holding du groupe GAD, par la société Centrale Coopérative Agricole Bretonne et n° 13 -DCC-116 du 28 août 2013 relative à la prise de contrôle exclusif par le groupe VanDrie de la société Tendriade-Collet SAS.2 Les coproduits peuvent être définis comme étant des sous-produits, comestibles ou non, issus de l'abattage d'animaux, comme la graisse, le sang ou la peau et les cuirs.

3 Voir les lettres C2007-30 du 27 juin 2007, C2008-56 et C2008 -100 précitées; voir également les décisions de l'Autorité de la concurrence n° 09 -DCC-52 du 12 octobre 2009 relative à la prise de contrôle de la société Brocéliande ALH SA par le groupe Cooperl Arc Atlantique, et les décisions n° 10 -DCC-22, n° 10-DCC-31, n° 11 -DCC-68, n° 11 -DCC-154 et n° 13 -DCC-116 précitées.

4 Voir les lettres C2007-30 du 27 juin 2007, C2008-56 et C2008-100 précitées et les décisions n°09 -DCC-52, n° 10-DCC-22, et n° 11 -DCC-154 précitées, ainsi que les décisions de l'Autorité de la concurrence n° 12 -DCC-178 du 19 décembre 2012 relative à la prise de contrôle conjoint du groupe Charcu Pac par le groupe coopératif Cooperl et les consorts Levy, n° 15-DCC-33 du 20 mars 2015 relative à la prise de contrôle exclusif de certains actifs du groupe Gad par la Société Vitréenne d'Abattage Jean Roze et n° 17 -DCC-23 du 17 février 2017 relative à la prise de contrôle exclusif de la société Brient par la coopérative agricole Agrial ; voir enfin les décisions de la Commission européenne M.1313 Danish Crown/Vestjyske Slagterier du 9 mars 1999, M.3337 Agrifund/Nordfleisch du 19 mars 2004, M.3605 Sovion/HMG du 21 décembre 2004 et M.3968 Sovion/Südfleisch du 21 décembre 2005.

5 Voir les lettres C2007-30, C2008-56 et C2008-100 précitées et les décisions n° 09 -DCC-52, n° 11 -DCC-154, n° 12 -DCC-178, n° 15 -DCC-33 et n° 17 -DCC-23 précitées.

6 Voir la lettre C2008-56 précitée et les décisions n° 11-DCC-154, n° 15 -DCC-33, et n° 17 -DCC-23 précitées.

7 Voir la lettre du ministre de l'économie, des finances et de l'emploi C2007-153 du 15 février 2008, aux conseils du groupe Pierre Schmidt, relative à une concentration dans le secteur de la charcuterie et des produits traiteurs ; voir également les décisions de l'Autorité de la concurrence n° 11 -DCC-104 du 4 juillet 2011 relative à la prise de contrôle exclusif de la société FIMA par la Société Financière de Turenne Lafayette, et les décisions n° 09 -DCC-52, n° 12-DCC-178 et n° 17 -DCC-23 précitées.

8 Voir la lettre C2007-153 précitée et la décision de l'Autorité de la concurrence n° 14 -DCC-85 du 20 juin 2014 relative à la prise de contrôle de certains actifs de la société Jean Caby par la société Financière Turenne Lafayette et la décision n° 09-DCC-52 précitée.

9 Voir la décision n° 09-DCC-52 précitée.

10 Voir la décision n° 14-DCC-85 précitée.

11 Voir notamment les décisions n° 09-DCC-52, n° 11 -DCC-154, n° 12-DCC-178 et n° 17 -DCC-23 précitées, ainsi que la décision de la Commission européenne M.4257 Smithfield/ Oaktree / Sara Lee Foods Europe du 28 juillet 2006.

12 Voir la lettre du ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi du 20 février 2009, au conseil de la société Financière Turenne, relative à une concentration dans le secteur de l'alimentation et la décision de la Commission européenne M.4257 précitée.

13 Décision M.4257 précitée.

14 Relevé de prix de l'Autorité de la concurrence effectué le 9 octobre 2017 sur les sites internet de différentes enseignes de la grande distribution.

15 Voir les lettres C2007-30, C2007-153, C2008-56 , et C2008 précitées et les décisions n° 09 -DCC-52 , n° 11-DCC-154, n° 12-DCC-178, n° 15 -DCC-33 , n° 17 -DCC-23 , et M.1313, M.3337, M.3605 et M.3968 précitées.

16 Voir les décisions n°11-DCC-154, n° 17 -DCC-154, M.3605 et M.3968 précitées.

17 Cooperl : [10-20] % ; sociétés cibles [20-30] %.

18 Cooperl : [20-30] % ; sociétés cibles : [30-40] %. Sur le segment de la coupe, la part de marché de la nouvelle entité est estimée à [20-30] % en volume (Cooperl : [10-20]% ; sociétés cibles : [10-20]%).

19 Cooperl : [10-20] % ; sociétés cibles: [20-30] %.

20 Cooperl : [10-20] % ; sociétés cibles : [30-40] %.

21 Cooperl : [10-20] % ; sociétés cibles : [5-10] %.

22 Ces parts de marché correspondent aux positions des concurrents sur le marché des pâtés et préparations à base de foie au niveau global.

23 Voir les décisions n° 14-DCC-85, n° 15-DCC-14 et n° 16-DCC-33 précitées.

24 Ces dernières sont inclues dans le marché des pâtés et préparations à base de volaille ou de gibier.

25 Cette part de marché est identique sur les segments de la coupe ([30-40] %) et du libre-service ([30-40] %).

26 Cooperl : [0-5] % ; sociétés cibles : [30-40] %. Sur le segment des jambons cuits MDF en libre-service, la nouvelle entité disposera d'une part de marché de [5-10] %.

27 Cooperl : [10-20] % ; sociétés cibles : [30-40] %.

28 Cooperl : [10-20] % ; sociétés cibles : [40-50] %.

29 La nouvelle entité disposera d'une part de marché [20-30] % sur le marché global et [40-50] % sur le segment des MDD (et [60-70] % sur le segment des MDD en libre-service).

30 Cooperl : [0-5] % ; sociétés cibles : [10-20] %.

31 Voir les décisions n° 14-DCC-85, n° 15-DCC-14 et n° 16-DCC-33 précitées.

32 Voir les décisions n° 15-DCC-14 et n° 16 -DCC-33 précitées.

33 Cooperl : [10-20] % ; sociétés cibles : [0-5] %. Les sociétés cibles ne sont pas présentes sur le segment des autres pièces cuites de porc à la coupe. La part de marché sur le segment du libre-service de la nouvelle entité s'élèvera quant à elle à [10-20] %.

35 En valeur, la nouvelle entité disposera d'une part de marché globale de [20-30]% (Cooperl : [10-20] % ; sociétés cibles : [5-10] %). Ses parts de marché en valeur sur les segments MDF et MDD sont estimées à [5-10] % (les parties ne sont pas simultanément actives sur les segments de la coupe et du libre-service) et à [30-40] % (les parties ne sont pas simultanément actives sur le segment de la coupe et la nouvelle entité disposera d'une part de marché de [30-40] % sur le segment libre-service).

36 Cooperl : [20-30] % ; sociétés cibles : [20-30] %.

37 Cooperl : [10-20] % ; sociétés cibles : [10-20] %.

38 Voir les décisions de l'Autorité de la concurrence n° 15-DCC-14 du 24 février 2015 relative à l'acquisition par LDC Volaille des actifs d'abattage et de commercialisation de volaille du groupe Glon Sanders, n° 16 -DCC-33 du 24 février 2016 relative à l'acquisition par LDC Volaille des actifs d'abattage, de commercialisation et de transport de volailles du groupe Agrial et n° 12 -DCC-178 précitée.

39 Cooperl : [30-40] % ; sociétés cibles : [0-5] %.

40 Cooperl : [20-30] % ; sociétés cibles : [0-5] %.

41 Voir le point 398 des lignes directrices de l'Autorité de la concurrence relatives au contrôle des concentrations.13 Stalaven ([5-10] %), Stephan ([5-10] %), Jean Floc'h ([5-10] %) et Loste Tradi-France ([5-10] %).

42 Lignes directrices de l'Autorité de la concurrence relative au contrôle des concentrations, point 453.

43 Cooperl détient également un réseau de 82 boucheries implantées dans le nord de la France. Plus de la moitié de ces boucheries sont adossées à des supermarchés d'enseigne [confidentiel]. Ces boucheries représentent moins de [0-5] % des achats réalisés sur les marchés amont de produits de charcuterie salaison.

44 Lignes directrices de l'Autorité de la concurrence relative au contrôle des concentrations, point 483.