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Décisions

CA Paris, Pôle 4 ch. 9, 16 novembre 2017, n° 17-10317

PARIS

Arrêt

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. David

Conseillers :

Mmes Mongin, Bou

TI Melun, du 28 avr. 2017

28 avril 2017

Faits, procédure et prétentions des parties

Le 9 août 2016, Cathy L. a acquis un véhicule d'occasion de marque Volkswagen auprès de Anthony C., en sa qualité de négociant automobile exerçant sous l'enseigne Ca Auto, moyennant un prix de 3 500 euros

Par lettre recommandée du 25 novembre 2016, Cathy L. s'est plainte de défaillances et pannes à répétition et a mis en demeure Anthony C. de procéder à la remise en état de l'aile arrière droite, de changer les serrures et de lui fournir toutes les factures correspondantes aux réparations effectuées sur le véhicule.

Le 20 décembre 2016, Cathy L. a assigné Anthony C. devant le Tribunal d'instance de Melun afin d'obtenir la résolution de la vente du véhicule sur le fondement des articles L. 217-4 et suivants du Code de la consommation et la condamnation du défendeur à lui restituer le prix de vente, soit 3 500 euros, outre 676,06 euros au titre du remboursement des frais de réparation et de dépannage avancés, 2 450 euros au titre de la perte de jouissance consécutive à l'immobilisation du véhicule et 2 000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile.

Par jugement réputé contradictoire du 28 avril 2017, le tribunal a débouté Cathy L. de ses demandes au motif qu'elle ne rapportait pas la preuve du défaut de conformité du véhicule et l'a condamnée aux dépens.

Par déclaration du 23 mai 2017, Cathy L. a interjeté appel de cette décision.

Par ordonnance du 31 mai 2017, Cathy L. a été autorisée à assigner Anthony C. à jour fixe pour l'audience du 11 octobre 2017.

Par acte d'huissier du 9 juin 2017, Cathy L. a fait assigner Anthony C. pour cette audience en lui signifiant la déclaration d'appel, la requête et l'ordonnance, l'acte ayant été déposé à l'étude.

Aux termes de cette assignation, Cathy L. demande à la cour, sur le fondement des articles L. 217-4 et suivants du Code de la consommation, 1103, 1217 et 1224 du code civil, d'infirmer le jugement, de prononcer la résolution de la vente, de condamner Anthony C. à lui rembourser la somme de 3 500 euros avec intérêts à compter du jugement à intervenir, de lui donner acte qu'elle restituera le véhicule en contrepartie de la restitution du prix, de dire que les frais éventuels de restitution seront supportés par Anthony C. et de condamner ce dernier à lui verser les sommes de 960,58 euros au titre du remboursement des frais de réparation et de dépannage avancés, celle de 2 450 euros au titre de la perte de jouissance consécutive à l'immobilisation du véhicule pendant 49 jours, et celle de 2 000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile. Elle sollicite en outre la capitalisation des intérêts et la condamnation de l'intimé aux dépens.

L'appelante invoque que le véhicule livré n'est pas conforme à l'usage qu'elle était en droit d'attendre en ce qu'il a déjà fait l'objet de trois immobilisations, que les travaux prévus lors de la vente n'ont toujours pas été effectués, que les documents et factures afférents aux réparations antérieures et postérieures à la vente ne lui ont jamais été remis et que de nouveaux désordres sont apparus nécessitant l'engagement de frais supplémentaires conséquents. Elle se prévaut de l'article L. 217-6 du Code de la consommation et ajoute que si le véhicule a pu rouler entre les différentes immobilisations, c'est en raison des réparations qu'elle a engagées et en partie payées.

Anthony C. n'a pas constitué avocat.

MOTIFS DE L'ARRET

Sur la résolution de la vente

En vertu de l'article L. 217-3 du Code de la consommation, les dispositions relatives à l'obligation de conformité au contrat s'appliquent aux relations contractuelles entre le vendeur agissant dans le cadre de son activité professionnelle ou commerciale et l'acheteur agissant en qualité de consommateur.

En l'espèce, tel est le cas, Anthony C. ayant vendu le véhicule en sa qualité de négociant automobile et Cathy L. l'ayant acquis comme consommatrice.

Selon l'article L. 217-4 du Code de la consommation, le vendeur livre un bien conforme au contrat et répond des défauts de conformité existant lors de la délivrance.

Il résulte de l'article L. 217-5 du même code que le bien est conforme au contrat s'il est propre à l'usage habituellement attendu d'un bien semblable ou s'il présente les caractéristiques définies d'un commun accord par les parties.

Il résulte en outre de l'article L. 217-7 du même code que pour les biens vendus d'occasion, les défauts de conformité apparus dans un délai de six mois à partir de la délivrance du bien sont présumés exister au moment de la délivrance, sauf preuve contraire, le vendeur pouvant combattre cette présomption si celle-ci n'est pas compatible avec la nature du bien ou le défaut de conformité invoqué.

En l'espèce, il ressort des pièces versées aux débats (fiche d'appel et d'intervention, facture Depannfirst, facture Speedy et facture Midas) que le véhicule est tombé en panne le 14 décembre 2016 en raison de la défaillance du pot d'échappement dont le coût de réparation pris en charge par Cathy L. s'est élevé au total à 712,78 euros, hors frais de dépannage. Cette panne a rendu le véhicule impropre à l'usage habituellement attendu d'un bien semblable. Elle est apparue dans les six mois à partir de la délivrance du véhicule de sorte qu'en l'absence de preuve contraire, le défaut constaté est présumé avoir existé au moment de la délivrance.

Le devis de la société Speedy du 13 décembre 2016 démontre également la nécessité de changer des pièces de direction (suspension, rotules de direction gauche et droite) pour un montant de 451,20 euros, les défauts affectant ces pièces essentielles au fonctionnement en toute sécurité du véhicule caractérisant une impropriété à l'usage habituellement attendu qui est présumée avoir existé lors de la délivrance eu égard à la date d'apparition et en l'absence de preuve contraire.

En revanche, il n'est pas établi qu'Anthony C. se soit engagé lors de la vente à fournir des factures de réparation ou à effectuer des travaux sur le véhicule (remise en état d'une aile, changement de serrures et du dispositif antivol). En effet, les seuls SMS qui sont produits faisant état de ces éléments émanent de Cathy L. et ne suffisent donc pas à justifier d'un accord des parties ou d'un engagement du vendeur en ce sens.

Mais il résulte des échanges de SMS et d'une facture versés aux débats que le véhicule a subi, avant la panne de décembre 2016, une première panne le 3 septembre 2016 à la suite d'une défaillance de la boîte de vitesses et une deuxième immobilisation en octobre 2016 en raison d'un problème de joints. Il apparaît que les réparations nécessaires ont été faites et il n'est pas établi que Cathy L. en ait supporté un quelconque coût, Anthony C. ayant notamment indiqué dans un SMS que Cathy L. n'avait rien à régler pour la boîte de vitesses et cette dernière ne produisant aucune facture se rapportant à ces éléments à son nom et ne justifiant d'aucun paiement fait par elle à ces titres. Il s'en déduit que, concernant ces défauts qui ont rendu le véhicule impropre à son usage attendu et qui sont présumés avoir aussi existé lors de la délivrance, compte tenu de leur date d'apparition et en l'absence de preuve contraire, le vendeur a amiablement assuré leur réparation avant l'introduction du litige, sans toutefois avoir indemnisé Cathy L. pour le préjudice subi du fait de l'immobilisation du véhicule.

Les derniers défauts de conformité apparus qui sont liés à la défaillance du pot d'échappement et aux pièces de direction n'ont jamais fait l'objet d'une prise en charge par le vendeur en dépit de la réclamation de Cathy L. contenue dans son assignation du 20 décembre 2016.

En outre, il ne s'agit pas de défauts mineurs puisque le coût de la réparation du pot d'échappement s'est élevé à 712,78 euros et que celui des pièces de direction est estimé à 451,20 euros, soit au total 1 163 98 euros par rapport à un prix d'achat du véhicule de 3 500 euros.

Enfin, s'agissant d'un véhicule d'occasion aux caractéristiques spécifiques, le remplacement du bien apparaît impossible et n'a d'ailleurs jamais été proposé par le vendeur.

Ainsi, il y a lieu, en application de l'article L. 217-10 du Code de la consommation, de prononcer la résolution de la vente et, par voie de conséquence, de condamner Anthony C. à restituer la somme de 3 500 euros, représentant le prix de vente, avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt, à Cathy L., cette dernière étant pour sa part tenue de restituer le véhicule à Anthony C. qui devra supporter les éventuels frais de restitution conformément à l'article L. 217-11 alinéa premier du même code.

Sur les dommages et intérêts

L'article L. 217-11 alinéa deux du Code de la consommation prévoit que les articles L. 217-9 et L. 217-10 ne font pas obstacle à l'allocation de dommages et intérêts.

En l'espèce, comme cela a déjà été relevé, il n'est pas établi que Cathy L. ait supporté un quelconque coût au titre des réparations rendues nécessaires par les deux premières pannes. Elle sera donc déboutée de ce chef.

En revanche, il apparaît que Cathy L. a acquitté la somme de 27,80 euros pour le dépannage lié à la panne du 14 décembre 2016 et celle de 712,78 euros pour la réparation du pot d'échappement. S'agissant d'un préjudice résultant d'un défaut de conformité, Anthony C. sera condamné à lui verser à ce titre la somme de 740,58 euros (27,80 + 712,78).

Les défauts de conformité qui ont occasionné plusieurs immobilisations du véhicule sont à l'origine d'une perte de jouissance pour Cathy L.. Il résulte des SMS produits que la première panne a immobilisé le véhicule du 3 septembre au 4 octobre 2016, de la facture du garage du Lys que la deuxième panne l'a immobilisé du 18 octobre 2016 au 1er novembre 2016 et que la troisième panne a généré un jour d'immobilisation. La perte de jouissance en découlant sera justement réparée par l'allocation d'une somme de 1 000 euros.

Sur la capitalisation des intérêts

Les intérêts dus au moins pour une année entière produiront intérêt.

Sur les dépens et l'article 700 du Code de procédure civile

Anthony C. sera condamné aux dépens de première instance et d'appel et à payer à Cathy L. la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

Par ces motifs, LA COUR, Statuant publiquement, par défaut : Infirme le jugement en toutes ses dispositions ; Statuant à nouveau et ajoutant: Prononce la résolution de la vente conclue le 9 août 2016 entre Anthony C. et Cathy L. portant sur un véhicule Golf Volkswagen d'occasion numéro d'identification WVWZZZ1JZ1D018701 ; En conséquence, Condamne Anthony C. à restituer à Cathy L. la somme de 3 500 euros avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt ; Dit que Cathy L. est tenue de restituer le véhicule susvisé à Anthony C. qui devra supporter les éventuels frais de restitution ; Condamne Anthony C. à payer à Cathy L. les sommes de: - 740,58 euros au titre des frais de réparation et de dépannage ; - 1 000 euros au titre de la perte de jouissance ; - 1 500 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ; Dit que les intérêts dus au moins pour une année entière produiront intérêt ; Rejette les plus amples demandes ; Condamne Anthony C. aux dépens de première instance et d'appel.