CA Paris, Pôle 5 ch. 4, 13 décembre 2017, n° 13-21011
PARIS
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Pays Basque Evasion (SARL)
Défendeur :
Cam And Co (SARL)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Luc
Conseillers :
Mmes Mouthon Vidilles, Comte
Avocats :
Mes Bellichach Rota, Marx, Brault
Faits et procédure
La société Pays Basque Evasion est spécialisée dans le commerce alimentaire de gros non spécialisé.
La société Cam & Co est spécialisée dans le domaine de la restauration traditionnelle.
Le 10 mars 2005, un contrat de franchise Pakito a été signé entre la société Cam & Co et la société Pays Basque Evasion.
Le 19 avril 2010, la société Pays Basque Evasion a adressé une mise en demeure à la société Cam & Co pour un retard de règlement sur les factures de redevances des mois de novembre 2009, février 2010 ainsi que sur les factures d'achat de marchandises d'avril 2010.
Le 23 décembre 2010, la société Pays Basque Evasion a résilié le contrat de franchise Pakito, aux torts exclusifs de la société Cam & Co.
Par ordonnance du 11 mai 2011, la société Cam & Co a été condamnée par le président du Tribunal de commerce de Paris à régler à la société Pays Basque Evasion les sommes de 2 439,59 euros et 8 391,47 euros et contrainte à communiquer son chiffre d'affaires à la société Pays Basque Evasion, pour qu'elle puisse calculer les redevances dues par son franchisé.
Par acte du 17 mai 2011, la société Cam & Co a assigné la société Pays Basque Evasion, demandant la résolution de son contrat de franchise.
Par jugement du 9 octobre 2013, le Tribunal de commerce de Paris a :
- débouté la société Cam & Co de sa demande de résolution du contrat de franchise Pakito signé avec la société Pays Basque Evasion,
- débouté la société Cam & Co de sa demande de restitution de 105 704,74 euros au titre des redevances versées à la société Pays Basque Evasion,
- débouté la société Cam & Co de sa demande de restitution de 225 670 euros au titre du remboursement de marges,
- débouté la société Cam & Co de sa demande de 50 000 euros pour préjudice commercial,
- dit que le contrat de franchise du 10 mars 2005 a été résilié le 23 décembre 2010 par la société Pays Basque Evasion aux torts exclusifs du franchisé,
- condamné la société Cam & Co à payer à la société Pays Basque Evasion la somme de 14 020 euros au titre des redevances dues pour les trimestres 3 et 4 de l'année 2010, augmentée des intérêts au taux légal à compter de la date du jugement,
- condamné la société Cam & Co à payer à la société Pays Basque Evasion la somme de 30 000 euros à titre de dommages et intérêts, augmentée des intérêts au taux légal à compter de la date du jugement, déboutant pour le surplus,
- ordonné la capitalisation des intérêts précités à compter de la date du jugement,
- débouté la société Pays Basque Evasion de ses autres demandes de dommages et intérêts,
- débouté les parties de leurs demandes autres, plus amples ou contraires,
- condamné la société Cam & Co à verser à la société Pays Basque Evasion 2 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,
- ordonné l'exécution provisoire,
- condamné la société Cam & Co aux dépens de l'instance, dont ceux à recouvrer par le greffe, liquidés à la somme de 82,17 euros dont 13,25 euros de TVA.
La société Cam & Co a relevé appel de ce jugement par déclaration remise au greffe le 30 octobre 2013.
La procédure devant la cour a été clôturée le 17 octobre 2017.
LA COUR
Vu les conclusions du 12 octobre 2017 par lesquelles la société Pays Basque Evasion, appelante, invite la cour, au visa des articles 1134, 1147, 1149, 1153, 1154, 1315, 1382, 1383, 1384 anciens du Code civil, vu les articles 6, 9, 696 et 700 du Code de procédure civile, à :
* sur les manquements contractuels commis pendant la durée du contrat de franchise :
- infirmer le jugement du 9 octobre 2013 du Tribunal de commerce de Paris en ce que le montant des dommages et intérêts alloués a été limité à la somme de 30.000 euros,
- infirmer le jugement du 9 octobre 2013 du Tribunal de commerce de Paris en ce que sa demande indemnitaire au titre des pertes de marges subies en sa qualité de centrale d'achat a été rejetée,
- infirmer le jugement du 9 octobre 2013 du Tribunal de commerce de Paris en ce que les demandes indemnitaires de la société Pays Basque Evasion au titre de ses préjudices moral et d'atteinte à l'image de son réseau de franchise ont été rejetées,
statuant à nouveau :
- condamner la société Cam & Co à lui payer la somme de 79 549 euros à titre de dédommagement des pertes de redevances qu'elle a subies en sa qualité de franchiseur, outre les intérêts dus par
application des articles 1153 et 1154 anciens du Code civil courant à compter de la décision à intervenir,
- condamner la société Cam & Co à lui payer la somme de 286 453 euros à titre de dédommagement des pertes de marges qu'elle a subies en sa qualité de centrale d'achat, outre les intérêts dus par application des articles 1153 et 1154 anciens du Code civil courant à compter de la décision à intervenir,
- condamner la société Cam & Co à lui payer la somme de 204 952 euros à titre de dédommagement des préjudices qu'elle a subis du fait de l'atteinte à l'image de son réseau de franchise, outre les intérêts dus par application des articles 1153 et 1154 anciens du Code civil courant à compter de la décision à intervenir,
- condamner la société Cam & Co à lui payer la somme de 50 000 euros à titre de dédommagement du préjudice moral qu'elle a subi, outre les intérêts dus par application des articles 1153 et 1154 anciens du Code civil courant à compter de la décision à intervenir,
* sur les manquements contractuels commis postérieurement au terme du contrat de franchise :
- infirmer le jugement du 9 octobre 2013 du Tribunal de commerce de Paris en ce qu'il a considéré que la société Cam & Co n'avait pas manqué à ses obligations de non concurrence post contractuelle,
statuant à nouveau :
- condamner la société Cam & Co à lui payer la somme de 86 848 euros à titre de dédommagement de la perte de chance qu'elle a subie de pouvoir signer un nouveau franchie sur l'ancien territoire contractuel de la société Cam & Co, outre les intérêts dus par application des articles 1153 et 1154 anciens du Code civil courant à compter de la décision à intervenir,
* sur les actes de concurrence déloyale et parasitaires :
- infirmer le jugement du 9 octobre 2013 du Tribunal de commerce de Paris en ce qu'il a considéré que la société Cam & Co n'avait pas manqué à ses obligations de non concurrence post contractuelle,
statuant à nouveau :
- condamner la société Cam & Co à lui payer la somme de 100 000 euros à titre de dédommagement des préjudices qu'elle a subis du fait des actes de concurrence déloyale et de parasitisme commis par la société Cam & Co, outre les intérêts dus par application des articles 1153 et 1154 anciens du Code civil courant à compter de la décision à intervenir,
- confirmer le jugement du 9 octobre 2013 du Tribunal de commerce de Paris pour le surplus,
* sur les demandes de la société Cam & Co
à titre principal :
- confirmer le jugement du 9 octobre 2013 du Tribunal de commerce de Paris en ce qu'il a débouté la société Cam & Co de l'ensemble de ses demandes,
à titre subsidiaire, dans l'hypothèse où la juridiction de céans considérerait qu'un principe de responsabilité doit être retenu à son encontre,
- ramener son quantum à de plus justes proportions,
en tout état de cause,
- rejeter toutes prétentions adverses,
- condamner la société Cam & Co au paiement d'une somme de 20 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,
- condamner la société Cam & Co aux entiers dépens de première instance et d'appel dont le montant pourra être recouvré par Me Jacques Bellichach, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédures civile ;
Elle fait valoir que :
- la société Cam & Co a commis des manquements contractuels pendant la durée d'exécution du contrat de franchise du 10 mars 2005, en matière d'approvisionnement, de publicité, de redevances et d'information et en commercialisant des produits totalement incompatibles avec le concept de Pakito,
- la société Cam & Co a violé ses obligations contractuelles de confidentialité, en rendant publics des documents relatifs au réseau Pakito, strictement confidentiels,
- la société Cam & Co a commis des fautes postérieurement à la résiliation du contrat de franchise du 23 décembre 2010, en violant ses obligations de restitution des éléments portant la marque Pakito, notamment en continuant d'utiliser l'enseigne " Pakito ",
- la société Cam & Co a violé ses obligations de non concurrence post-contractuelle, en maintenant dans ses locaux une activité de restauration en tous points identique à celle développée dans le cadre du réseau de franchise Pakito, - la société Cam & Co a commis des actes de concurrence déloyale et de parasitisme, en entretenant la confusion avec le réseau de franchise Pakito, en maintenant dans son restaurant du Chesnay, la décoration, l'aménagement intérieur, les matériels, les cartes propres au réseau et en ne remplaçant pas avant le mois de juin 2011, l'enseigne Pakito,
- la société Cam & Co a profité de manière indue des investissements réalisés par elle en continuant à utiliser les descriptifs, formules, couleurs et photographies spécifiques au réseau Pakito pour présenter son restaurant sur les sites internet spécialisés,
- lorsque la résiliation fautive est imputable au franchisé, ce dernier doit être condamné à payer au franchiseur les redevances qu'il aurait dû percevoir jusqu'au terme du contrat,
- la société Cam & Co n'a pas réglé les redevances dues au titre des trimestres 3 et 4 de 2010 et la résiliation a entrainé pour l'appelante une perte de redevance de 65 529 euros,
- elle a subi un préjudice du fait des pertes de marges en qualité de centrale d'achat,
- elle a subi un préjudice consistant en la perte de chance de pouvoir désigner un nouveau franchisé sur l'ancien territoire de la société Cam & Co,
- elle a subi des préjudices immatériels consistant notamment en une atteinte à sa réputation et à la qualité de la marque et du réseau de franchise,
- la demande de résolution du contrat de franchise est sans objet, le contrat de franchise ayant été résilié par elle,
- la remise en cause rétroactive n'a pas de sens puisque le contrat s'est exécuté paisiblement pendant 5 ans,
- elle n'a pas commis les manquements allégués par la société Cam & Co,
- la société Cam & Co ne saurait remettre en cause le bien-fondé de la franchise Pakito, la contestation des éléments de la franchise ayant été formulée pour la première fois en 2010,
- la société Cam & Co ne démontre pas que la société PBE n'aurait pas exécuté les obligations mises à sa charge en qualité de franchiseur,
- elle a pleinement exécuté son obligation de communiquer le savoir-faire propre au réseau Pakito, son obligation d'assistance ainsi que ses obligations d'approvisionnement ;
Vu les conclusions du 2 avril 2014 par lesquelles la société Cam & Co, intimée ayant formé appel incident, demande à la cour, au visa de l'article 1184 du Code civil, de :
- infirmer le jugement du 9 octobre 2013 du Tribunal de commerce de Paris
statuant à nouveau,
- dire que le contrat de franchise du 10 mars 2005 est résolu, en raison de l'inexécution de la part de la société Pays Basque Evasion de ses obligations,
- condamner la société Pays Basque Evasion à lui verser la somme de 105 704,74 euros, au titre de la restitution de l'ensemble des redevances perçues,
- condamner la société Pays Basque Evasion à lui verser la somme de 225 670 euros en remboursement de la marge injustifiée et abusive pratiquée sur les prix des produits fournis,
- condamner la société Pays Basque Evasion à lui verser la somme de 50 000 euros à titre de dommages-intérêts pour le préjudice commercial subi,
- débouter la société Pays Basque Evasion de toutes ses demandes, fins et conclusions,
- condamner la société Pays Basque Evasion à lui verser la somme de 25 000 sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'à payer les entiers dépens ;
Elle explique que :
- sa demande de résolution du contrat de franchise est recevable dans la mesure où elle conteste l'existence des éléments constitutifs de la franchise dès l'origine,
- ceux-ci sont inexistants dès l'origine,
- il y a ni signe distinctif ni savoir-faire ; le concept existait sur un seul établissement, aucune formation, assistance technique et commerciale, ni publicité n'étaient apportées,
- la clause d'approvisionnement exclusif du contrat est nulle,
- la nullité de cette clause entraîne la nullité du contrat en entier car elle constitue un élément essentiel de ce dernier,
- la centrale d'achat était déficiente pour la fourniture et le réapprovisionnement,
- elle a subi un préjudice matériel constitué par le paiement d'une redevance sans aucune contrepartie et par l'obligation qui lui a été faite d'acheter des produits à des prix largement au-dessus de ceux du marché,
- elle a aussi subi un préjudice commercial constitué de l'ensemble des difficultés qu'elle a rencontrées à cause de ses relations contractuelles avec la société PBE, des avances de trésorerie qu'elle a dû faire à la place du franchiseur pour la société CWJ et Associés,
- elle s'est rapprochée de la société PBE afin de lui faire vainement part de ses demandes et de la lassitude de la clientèle quant à la carte,
- elle a seulement rajouté 2 plats et 2 desserts de peur de perdre sa clientèle,
- elle n'a eu d'autres choix que de ne pas respecter les règles d'approvisionnement du fait de l'incurie de la société appelante,
- elle a réglé la quasi-totalité des factures à l'exception d'une facture qui est toujours contestée,
- elle conteste devoir payer les dernières redevances prévues par le contrat de franchise du fait de l'inexécution de ses obligations par la société PBE,
- la société PBE ne justifie pas ses demandes indemnitaires relatives aux prétendues pertes des redevances et pertes des marges,
- les demandes fondées sur l'atteinte à l'image de la société PBE sont fondées sur un reportage en caméra cachée floutant les visages et tout signe permettant une identification,
- elle conteste avoir commis des actes de parasitisme, n'utilisant que les couleurs rouge, verte et blanche, du Pays Basque, qui n'appartiennent pas à la société PBE,
- elle s'est acquittée du mieux qu'elle pouvait de son obligation de supprimer, du jour au lendemain, toute allusion au concept Pakito ;
SUR CE
La cour se réfère, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens échangés et des prétentions des parties, à la décision déférée et aux dernières conclusions échangées en appel.
En application de l'article 954 alinéa 2 du Code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions.
Sur la nullité de la clause d'approvisionnement exclusif
La société Cam & Co demande la nullité du contrat de franchise du fait de la nullité de la clause d'approvisionnement exclusif au motif que la concurrence ne joue pas, les franchisés étant contraints de commander 85% des produits proposés auprès du franchiseur. Ce dernier conteste la demande de nullité de la clause, au motif que celle-ci est licite.
La clause 3.3 relative à l'approvisionnement impose au franchisé de se fournir pour 85% de ses achats de la nomenclature contractuelle auprès de son franchisé, de solliciter et obtenir l'autorisation du franchiseur de commercialiser un produit non compris dans ladite nomenclature, et d'acheter les produits au prix fixé par le franchiseur.
Or, il convient de relever que l'exclusivité d'approvisionnement participe de l'économie générale du contrat et ne peut constituer en soi une cause de nullité de la clause, mais aussi du contrat.
Il y a donc lieu de rejeter la demande de nullité de la clause 3.3 du contrat de franchise et du contrat de franchise.
Sur la demande de résolution du contrat de franchise formulée la société Cam & Co
La société Cam & Co soutient que le concept de la franchise n'est pas original et est dépourvu de savoir-faire, que la société PBE n'a pas réalisé les investissements, en termes de communication, qui lui incombent. Elle explique qu'elle n'a bénéficié d'aucune assistance continue de la part du franchiseur. Enfin, elle relève que la centrale d'achat est déficiente et que les prix pratiqués sont 30% plus chers que dans le commerce alimentaire.
La société BPE allègue que la résolution du contrat de franchise ne peut être sollicitée alors que le contrat a été exécuté paisiblement pendant les 5 premières années. Elle excipe n'avoir commis aucun manquement à ses obligations de franchiseur.
L'article 1184 ancien du Code civil, applicable aux faits de l'espèce, dispose que
" la condition résolutoire est toujours sous-entendue dans les contrats synallagmatiques, pour le cas où l'une des deux parties ne satisfera point à son engagement.
Dans ce cas, le contrat n'est point résolu de plein droit. La partie envers laquelle l'engagement n'a point été exécuté, a le choix ou de forcer l'autre à l'exécution de la convention lorsqu'elle est possible, ou d'en demander la résolution avec dommages et intérêts.
La résolution doit être demandée en justice, et il peut être accordé au défendeur un délai selon les circonstances ".
Si la société PBE a unilatéralement prononcé la résiliation du contrat de franchise aux torts exclusifs de son franchisé, la demande en résolution du même contrat formulée par la société Cam & Co porte sur un fondement aux conséquences juridiques différentes. Ainsi, cette demande n'est pas sans objet.
Il y a d'abord lieu de rappeler que si pendant l'exécution du contrat, le franchiseur est tenu de procurer une assistance, celle-ci est de nature exclusivement technique et commerciale et constitue une obligation de moyens. Le franchisé est un commerçant indépendant seul responsable de la gestion de son entreprise.
La résolution d'un contrat ne peut être prononcée que si les inexécutions relevant des obligations définies dans le contrat, dont il est fait état et qui sont établies, sont d'une gravité suffisante.
S'agissant des griefs relatifs à l'obligation de concession de signes distinctifs notoires, la société Cam & Co ne peut formuler utilement ce reproche à la société BPE sur le fondement de la résolution du contrat, en ce qu'il est constant que le franchiseur a rempli son obligation contractuelle de lui mettre à disposition les éléments distinctifs définis contractuellement.
En outre, sur le grief de l'absence de transmission du savoir-faire, il ressort du contrat de franchise que le franchiseur s'engage à communiquer au franchisé les éléments relatifs au restaurant de Paris. Le document d'information pré-contractuelle explique que le savoir-faire tient " aux soins apportés à la sélection des produits du Pays Basque et de l'Espagne ainsi qu'au référencement des principaux fournisseurs " et décrit le concept. Si la société Cam & Co conteste avoir reçu le document communiqué en pièce n°1 par l'appelant, il n'apparaît toutefois pas que la société Cam & Co ait réclamé ces documents auprès de la société BPE pendant les premières années d'exécution du contrat. Par ailleurs, pour les mêmes motifs que ceux repris ci-dessus, la remise en cause des éléments du savoir-faire en eux même ne peut prospérer dans le cadre d'une action en résolution dudit contrat, celle-ci ne pouvant être fondée que sur l'inexécution d'une gravité suffisante d'obligations contractuelles.
Concernant le défaut d'assistance, le contrat de franchise précise que " le franchisé et son gérant reconnaissent avoir une connaissance suffisante du concept Pakito et des produits pour avoir travaillé au sein du premier restaurant Pakito. Dans ces conditions, ils renoncent à se prévaloir d'une quelconque formation théorique et pratique portant sur la connaissance des produits, les méthodes commerciales et les méthodes de gestion. (') PBE (') a d'ores et déjà assisté son futur franchisé dans le rachat du fonds de commerce destiné à devenir le futur restaurant ". Il n'est pas convenu, dans le contrat, de formation ultérieure à l'ouverture du restaurant. Par ailleurs, les problèmes rencontrés avec l'expert-comptable choisi par le franchiseur ne peuvent être reprochés à celui-ci, n'étant pas responsable des éventuelles fautes commises par ce tiers. De même, s'agissant du choix de la banque, si le contrat prévoit une obligation d'assistance notamment pour négocier un découvert bancaire, il convient de relever qu'il ne s'agit que d'une obligation de moyen et d'assistance, le franchisé ayant à mener lui-même ces démarches directement. En outre, le franchisé ne démontre pas avoir sollicité son franchiseur sur ce point. Ce grief ne peut donc être retenu.
S'agissant de l'absence d'assistance continue pendant l'exécution du contrat, il convient de relever que si la société PBE ne démontre pas avoir présenté de nouveaux produits conformément aux dispositions contractuelles, à l'article 2.6.3, toutefois, la société Cam & Co ne justifie pas avoir sollicité son franchiseur sur ce point de 2005 à 2010. En outre, s'agissant de l'absence d'évolution de la carte, il apparaît que la société Cam & Co ne démontre pas avoir proposé avant l'année 2010 des modifications qui lui ont été refusées par la société PBE. Cette faute n'apparaît donc pas suffisamment grave pour justifier la résolution du contrat.
Enfin, la société PBE démontre avoir communiqué sur le concept Pakito, respectant ainsi son obligation de promotion, par les articles de presse produits tant dans la presse spécialisée ( Gault & Millau, Petit Futé.) que dans la presse générale (L'Express, Elle, A nous Paris, Métro, le Figaro, le Parisien.).
Au regard de l'ensemble de ces éléments, il y a lieu de rejeter la demande de résolution du contrat de franchise, de restitution des redevances, des marges indûment perçues. Le jugement doit être confirmé sur ce point.
La société PBE sollicite la confirmation du jugement en ce qu'il a prononcé la résiliation du contrat aux torts de la société Cam & Co.
La société PBE reproche d'abord à la société Cam & Co de ne pas avoir garanti la réputation et la qualité de la marque, par l'intervention d'un de ses salariés dans un reportage sur la chaîne de télévision France 2. Or, il convient de relever que le reportage est en caméra cachée et sans que le nom du restaurant ne soit repris dans le reportage, ni qu'il soit fait un lien avec un réseau de franchise. Ce grief doit être rejeté.
En revanche, il ressort des éléments du dossier que la société Cam & Co a commis de nombreuses fautes à son égard pendant la durée d'exécution du contrat en :
- violant les obligations contractuelles par la communication des marges pratiquées par le réseau à un interlocuteur qui s'est avéré être un journaliste de la chaîne de télévision France 2,
- ne commandant pas 85% de ses achats auprès de son franchiseur, les pourcentages en 2009 et 2010, partiellement contestés, s'élevant à 59% et 42%, contrairement aux dispositions de l'article 3.3.1 du contrat de franchise,
- procédant à des animations et des publicités sans l'accord préalable du franchiseur, contrairement aux dispositions de l'article 3.9 du contrat de franchise,
- cessant de payer ses factures de redevances dès le mois de mai 2010, et avec retard pour certaines précédentes,
- ne communiquant pas au franchiseur le montant de son chiffre d'affaires réalisé au 3ème et 4ème trimestre 2010, contrairement à ses obligations contractuelles.
Au regard de l'ensemble de ces violations contractuelles cumulées, il apparaît que c'est à bon droit que la société PBE a procédé à la résiliation du contrat de franchise le 23 décembre 2010 aux torts exclusifs de la société Cam & Co. Il y a donc lieu de confirmer le jugement sur ce point.
Sur la demande de réparation du préjudice commercial de la société Cam & Co
Concernant le grief relatif aux prix excessifs des produits vendus exclusivement par le franchiseur, la société Cam & Co ne communique que des factures d'autres fournisseurs datant de l'année 2011, et des listings de prix correspondant aux produits de la société BPE dont la date n'est pas connue. Ces éléments ne peuvent établir que depuis l'entrée en vigueur du contrat de franchise en 2015, la société BPE n'a pas respecté ses obligations, ce d'autant que le contrat de franchise ne prévoit aucune obligation relative aux prix fixés par le franchiseur à l'article 3.3.4 du contrat de franchise.
De même, la société Cam & Co ne justifie d'aucune défaillance dans la livraison des produits fournis par la société BPE.
Il y a donc lieu de rejeter les demandes d'indemnisation formulées sur ce point. Le jugement est donc confirmé, en ce qu'il a débouté la société Cam & Co de sa demande en réparation de son préjudice commercial.
Sur les demandes formulées par la société PBE
Sur les manquements contractuels de la société Cam & Co pendant la durée du contrat de franchise et la réparation de la perte des redevances et des marges en qualité de centrale d'approvisionnement
Par application des dispositions de l'article 1152 alinéa 2 du Code civil, les premiers juges ont réduit la somme de 79 549 euros au titre des redevances qui auraient dû revenir à la société PBE si le contrat de franchise s'était poursuivi jusqu'à son terme au 10 mars 2013, à celle de 30 000 euros.
La société PBE sollicite l'infirmation du jugement en considérant qu'elle a subi une perte de redevances du fait de la résiliation du contrat de franchise aux torts exclusifs de la société Cam & Co et qu'il ne s'agit nullement d'une clause pénale susceptible d'être modérée.
Il a été relevé ci-dessus que la société Cam & Co avait commis des fautes contractuelles ayant conduit à la résiliation du contrat de franchise par la société BPE.
Ainsi, si la demande est justifiée dans son principe du fait même de la résiliation fautive du contrat de franchise par la société Cam & Co qui a ainsi engagé sa responsabilité et doit réparation du préjudice subi par le franchiseur du fait de cette rupture, il convient, en revanche et tout d'abord, de relever qu'aucune indemnité n'est prévue au contrat en cas de résiliation aux torts du franchisé.
Par ailleurs, si la somme réclamée de ce chef est calculée sur la base du chiffre d'affaires réalisé de juillet 2009 à juin 2010 par le franchisé, et de la redevance prévisionnelle d'exploitation sur une durée de 2,225 exercices, correspondant à la durée qui restait à courir à compter de la date de résiliation jusqu'au 10 mars 2013, terme du contrat, le mode de calcul ainsi retenu présente un caractère purement mécanique et ne tient pas compte de l'aléa inhérent à la vie des affaires, lequel prend un relief particulier au regard de la longueur de la période considérée.
Il convient, dès lors, de fixer le préjudice subi à ce titre à la seule somme de 30 000 euros retenue à bon droit par le jugement déféré.
La société Cam & Co était tenue en application de l'article 3.3 du contrat de franchise de s'approvisionner exclusivement auprès de la société PBE pour les produits mentionnés à l'annexe 3.
La société Cam & Co ne conteste pas s'être partiellement affranchie de cette obligation entre 2009 à 2010 mais fait valoir que le préjudice invoqué par le franchiseur est purement hypothétique.
La société PBE sollicite à ce titre la somme de 223 595,80 euros au titre de ces deux années outre celle demandée au titre des années restant à courir jusqu'au terme du contrat.
Toutefois, la société PBE ne justifie nullement du préjudice qu'elle aurait subi du fait de l'inexécution partielle de l'obligation d'approvisionnement. En effet, la perte de marge qu'elle invoque, ne peut être déterminée au vu des seules pièces qu'elle verse aux débats, soit des factures d'achat pour les années 2009 à 2010 et une attestation de son expert-comptable mentionnant sa marge commerciale au titre des années 2008 à 2010.
Dès lors, le préjudice qui aurait été subi et qui ne pourrait être constitué que par la perte de chance de réaliser une marge commerciale pour les années postérieures à la résiliation du contrat et restant à courir jusqu'à son terme conventionnel, n'est pas plus justifié.
Le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il l'a déboutée de la demande formée à ce titre.
Sur les manquements contractuels de la société Cam & Co postérieurement au terme du contrat de franchise, et la perte de chance de désigner un nouveau franchisé
La société PBE fait état d'une perte de chance l'empêchant de conclure un contrat de franchise avec un nouveau franchisé sur ce territoire et résultant de la violation de la clause de non concurrence. Elle demande l'allocation d'une somme de 86 848 euros à titre de dommages et intérêts.
La société Cam & Co soutient que le réseau est inexistant, aucun nouveau restaurant n'ayant ouvert depuis 2005, et que la perte de chance est nulle, aucun candidat ne s'étant présenté.
La clause de non- concurrence prévue au contrat pour une durée de deux ans après la cessation du contrat dans les départements limitrophes du territoire est licite dès lors qu'elle est limitée dans l'espace et dans le temps et qu'aucune disproportion aux intérêts légitimes du franchiseur n'est établie ni même invoquée.
La rupture du contrat est le fait du franchisé. La société Cam 1 Co ne conteste pas avoir poursuivi son activité de restauration de tapas sous une autre enseigne dans les deux années après la date de résiliation du contrat.
Toutefois, il doit être relevé que le contrat ne prévoit pas que son non-respect est sanctionné par l'allocation de dommages et intérêts.
La violation de l'obligation de non- concurrence à laquelle était tenue la société Cam & Co jusqu'au 23 décembre 2012, a fait perdre à la société PBE une chance de contracter avec un nouveau franchisé. Une perte de chance ne peut être égale à la chance perdue. La société PBE a d'ores et déjà été indemnisée au titre de la perte de redevances sur la période restant à courir jusqu'au terme du contrat initialement fixé.
Compte tenu de ces éléments, la perte de chance subie par la société PBE sera équitablement réparée par l'allocation d'une somme de 5 000 euros.
Il y a donc lieu de condamner la société Cam & Co à payer à la société PBE la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts. Il y a lieu d'infirmer le jugement sur ce point, en ce qu'il a débouté la société BPE de sa demande de ce chef.
Sur les actes de concurrence déloyale et de parasitisme
Sur l'atteinte à l'image du réseau et le préjudice moral
La société PBE soutient que le reportage diffusé sur la chaîne de télévision France 2 dans l'émission " Envoyé Spécial ", lui a causé un préjudice pour atteinte à son image, ayant reçu des messages de mécontentement de ses clients.
La société Cam & Co conteste l'atteinte à l'image du réseau au motif que ni le restaurant ni l'employé ne sont identifiables, que les éléments décrits correspondent au concept Pakito et que sans le communiqué réalisé par le responsable du réseau Pakito, personne n'aurait réagi. Elle explique également que le réseau Pakito n'est pas connu.
En l'espèce, il convient de relever que l'enseigne Pakito n'est pas mentionnée dans le reportage, ni même que ce restaurant appartient à un réseau. Ensuite, il apparaît que les réactions négatives sont intervenues après le communiqué réalisé par le responsable du réseau Pakito, alors que rien ne démontre que le lien pouvait être établi entre le réseau et le restaurant dont il est question dans le reportage. Enfin, s'agissant des reprises sur des sites internet, il n'est jamais fait mention du réseau Pakito.
Ainsi, la société PBE ne démontrant pas que son réseau est notoire, le mot Pakito désignant aussi une danse et le nom d'un DJ, ni qu'au regard des images diffusées, le lien entre le restaurant et le réseau était réalisé, le logo du réseau n'ayant pas été reproduit, elle ne peut invoquer avoir subi une atteinte à l'image du réseau.
Dès lors, il y a lieu de rejeter sa demande de ces chefs et de confirmer le jugement sur ces points.
Sur la concurrence déloyale
La concurrence déloyale doit être appréciée au regard du principe de la liberté du commerce qui implique qu'un signe qui ne fait pas l'objet de droits, puisse être librement reproduit, sous certaines conditions tenant à l'absence de faute par la création d'un risque de confusion dans l'esprit de la clientèle sur l'origine du produit, circonstance attentatoire à l'exercice paisible et loyal du commerce.
L'appréciation de la faute au regard du risque de confusion doit résulter d'une approche concrète et circonstanciée des faits de la cause prenant en compte notamment le caractère plus ou moins servile, systématique ou répétitif de la reproduction ou de l'imitation, l'ancienneté d'usage, l'originalité et la notoriété de la prestation copiée.
La société BPE reproche à la société Cam & Co d'avoir entretenu la confusion en conservant le mobilier, le matériel et la décoration intérieure et en utilisant les formules et couleurs du concept Pakito.
La société Cam & Co conteste avoir commis des actes de concurrence déloyale en ce que les éléments que revendique la société BPE ne sont pas originaux ni susceptibles d'appropriation par elle.
L'huissier de justice n'a pas constaté le 18 février 2011 la présence d'aucune représentation de l'enseigne Pakito. Il convient de relever que la société BPE ne peut s'attribuer le thème de la décoration évoquant le Pays basque et l'Espagne ni leurs couleurs. Les éléments d'agencement qu'elle revendique ne sont pas spécifiques à son concept ni susceptibles de créer un risque de confusion avec son réseau. De même, s'agissant du recours aux conserves pour élaborer les plats, cette pratique ne peut être fautive comme constituant des actes de concurrence déloyale à son égard. Enfin, s'agissant des plats proposés par le restaurant, s'agissant de plats locaux non originaux, aucune confusion avec le réseau ne peut, là encore, être établie.
En conséquence, il y a lieu de rejeter sa demande de ce chef et de confirmer le jugement sur ce point.
Sur les dépens et l'application de l'article 700 du Code de procédure civile
Le sens du présent arrêt conduit à confirmer le jugement sur les dépens et l'application qui y a été faite des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.
La société Cam & Co, partie perdante en cause d'appel, doit être condamnée aux dépens d'appel, qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile, ainsi qu'à payer à la société PBE la somme supplémentaire de 2 000 euros par application de l'article 700 du Code de procédure civile en cause d'appel.
Le sens du présent arrêt conduit à rejeter la demande par application de l'article 700 du Code de procédure civile formulée par la société Cam & Co.
Par ces motifs, LA COUR, confirme le jugement, sauf en ce qu'il a débouté la société PBE de sa demande de dommages et intérêts pour violation de la clause de non concurrence, L'infirmant sur ce point, Statuant à nouveau, condamne la société Cam & Co à payer à la société PBE la somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts pour violation de la clause de non concurrence, Y ajoutant, rejette la demande de nullité de la clause 3.3 du contrat de franchise et du contrat de franchise, condamne la société Cam & Co aux dépens d'appel, qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile, ainsi qu'à payer à la société PBE la somme supplémentaire de 2 000 euros par application de l'article 700 du Code de procédure civile en cause d'appel, rejette toute autre demande.