CJUE, 2e ch., 20 décembre 2017, n° C-291/16
COUR DE JUSTICE DE LâUNION EUROPEENNE
ArrĂȘt
PARTIES
Demandeur :
Schweppes SA
Défendeur :
Red Paralela SL, Red Paralela BCN SL, Orangina Schweppes Holding BV, Schweppes International Ltd, Exclusivas RamĂrez SL
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. IleÂic (rapporteur)
Juges :
M. Rosas, Mmes Toader, Prechal, JaraÂiunas
Avocat général :
M. Mengozzi
Avocats :
Mes López Chocarro, Gómez Sånchez, Pellisé Urquiza, Quero Navarro, Joaniquet Tamburini, Gonzålez Navarro, Quemada Cuatrecasas, Otero Lastres
LA COUR (deuxiĂšme chambre),1 La demande de dĂ©cision prĂ©judicielle porte sur l'interprĂ©tation de l'article 7, paragraphe 1, de la directive 2008/95/CE du Parlement europĂ©en et du Conseil, du 22 octobre 2008, rapprochant les lĂ©gislations des Ătats membres sur les marques (JO 2008, L 299, p. 25, et rectificatif JO 2009, L 11, p. 86), ainsi que de l'article 36 TFUE.
2 Cette demande a Ă©tĂ© prĂ©sentĂ©e dans le cadre d'un litige opposant Schweppes SA, sociĂ©tĂ© de droit espagnol, Ă Red Paralela SL et Ă Red Paralela BCN SL, anciennement CarbĂČniques Montaner SL (ci-aprĂšs, ensemble, " Red Paralela "), au sujet de l'importation en Espagne, par ces derniĂšres, de bouteilles d'eau tonique portant la marque Schweppes en provenance du Royaume-Uni.
Le cadre juridique
3 L'article 7 de la directive 2008/95, intitulĂ© " Ăpuisement du droit confĂ©rĂ© par la marque ", dispose :
" 1. Le droit conféré par la marque ne permet pas à son titulaire d'interdire l'usage de celle-ci pour des produits qui ont été mis dans le commerce dans la Communauté sous cette marque par le titulaire ou avec son consentement.
2. Le paragraphe 1 n'est pas applicable lorsque des motifs légitimes justifient que le titulaire s'oppose à la commercialisation ultérieure des produits, notamment lorsque l'état des produits est modifié ou altéré aprÚs leur mise dans le commerce. "
4 La directive 2008/95 est abrogĂ©e avec effet au 15 janvier 2019 par la directive (UE) 2015/2436 du Parlement europĂ©en et du Conseil, du 16 dĂ©cembre 2015, rapprochant les lĂ©gislations des Ătats membres sur les marques (JO 2015, L 336, p. 1), entrĂ©e en vigueur le 12 janvier 2016, et dont l'article 15 correspond, en substance, Ă l'article 7 de la directive 2008/95.
Le litige au principal et les questions préjudicielles
5 Le signe " Schweppes " jouit d'une renommĂ©e mondiale, notamment pour la boisson " eau tonique ", disponible en plusieurs variantes. Ce signe ne fait pas l'objet d'un enregistrement unique en tant que marque de l'Union europĂ©enne, mais est enregistrĂ© depuis longtemps en tant que marque nationale, verbale et figurative, dans chacun des Ătats membres de l'Union europĂ©enne et de l'Espace Ă©conomique europĂ©en (EEE). Ces marques nationales sont en substance identiques.
6 Initialement, toutes les marques Schweppes enregistrées dans l'EEE (ci-aprÚs les " marques parallÚles ") appartenaient à Cadbury Schweppes.
7 Au cours de l'année 1999, Cadbury Schweppes a cédé à Coca-Cola/Atlantic Industries (ci-aprÚs " Coca-Cola ") une partie de ces marques parallÚles, dont celles enregistrées au Royaume-Uni. Cadbury Schweppes est restée titulaire de l'autre partie de ces marques parallÚles, dont celles enregistrées en Espagne.
8 La carte ci-dessous indique, en couleur sombre, les Ătats membres de l'EEE et de son voisinage dans lesquels Coca-Cola est titulaire des marques Schweppes :
9 Au terme de plusieurs acquisitions et restructurations, les marques parallÚles conservées par Cadbury Schweppes appartiennent aujourd'hui à Schweppes International Ltd, société de droit du Royaume-Uni.
10 Cette derniÚre société a accordé à Schweppes une licence exclusive sur les marques parallÚles espagnoles en cause au principal.
11 Schweppes et Schweppes International sont toutes deux contrĂŽlĂ©es par Orangina Schweppes Holding BV, sociĂ©tĂ© de droit nĂ©erlandais, qui est Ă la tĂȘte du groupe Orangina Schweppes.
12 Le 29 mai 2014, Schweppes a intentĂ© une action en contrefaçon des marques parallĂšles espagnoles contre Red Paralela, au motif que les dĂ©fenderesses au principal avaient importĂ© et distribuĂ© en Espagne des bouteilles d'eau tonique portant la marque Schweppes en provenance du Royaume-Uni. Schweppes estime, en effet, que cette commercialisation en Espagne est illicite, Ă©tant donnĂ© que ces bouteilles d'eau tonique ont Ă©tĂ© fabriquĂ©es et mises sur le marchĂ© non par elle-mĂȘme ou avec son consentement, mais par Coca-Cola, qui selon Schweppes ne prĂ©sente aucun lien Ă©conomique ou juridique avec le groupe Orangina Schweppes. Elle soutient dans ce contexte que, au vu de l'identitĂ© des signes et des produits en cause, le consommateur n'est pas en mesure de distinguer l'origine commerciale de ces bouteilles.
13 En dĂ©fense, Red Paralela invoque l'Ă©puisement du droit de marque qui rĂ©sulterait, pour ce qui concerne les produits Schweppes en provenance d'Ătats membres de l'Union oĂč Coca-Cola est titulaire des marques parallĂšles, d'un consentement tacite. Red Paralela considĂšre en outre qu'il existe incontestablement des liens juridiques et Ă©conomiques entre Coca-Cola et Schweppes International dans l'exploitation commune du signe " Schweppes " comme marque universelle.
14 Selon les constatations effectuées par la juridiction de renvoi, les faits pertinents aux fins de la présente affaire sont les suivants :
- Schweppes International a favorisĂ©, malgrĂ© le fait qu'elle ne soit titulaire des marques parallĂšles que dans une partie des Ătats membres de l'EEE, une image globale de la marque Schweppes ;
- Coca-Cola, titulaire des marques parallĂšles enregistrĂ©es dans les autres Ătats membres de l'EEE, a contribuĂ© au maintien de cette image de marque globale ;
- cette image globale est source de confusion pour le public pertinent espagnol quant Ă l'origine commerciale des produits " Schweppes " ;
- Schweppes International est responsable du site Internet européen spécifiquement consacré à la marque Schweppes (www.schweppes.eu), qui contient non seulement des informations générales sur les produits de cette marque, mais également des liens vers divers sites locaux, notamment vers le site britannique géré par Coca-Cola ;
- Schweppes International, qui ne dĂ©tient aucun droit sur la marque Schweppes au Royaume-Uni (oĂč la marque est dĂ©tenue par Coca-Cola), revendique sur son site Internet l'origine britannique de la marque ;
- Schweppes et Schweppes International utilisent l'image des produits " Schweppes " d'origine britannique dans leur publicité ;
- Schweppes International se livre, au Royaume-Uni, à des actions de promotion et d'information auprÚs de la clientÚle en ce qui concerne les produits " Schweppes " sur les réseaux sociaux ;
- la prĂ©sentation des produits " Schweppes " commercialisĂ©s par Schweppes International est trĂšs similaire - voire, dans certains Ătats membres, comme au Danemark et au Pays-Bas, identique - Ă celle des produits " Schweppes " d'origine britannique ;
- Schweppes International, dont le siĂšge est au Royaume-Uni, et Coca-Cola coexistent pacifiquement sur le territoire du Royaume-Uni ;
- Ă la suite de la cession, survenue au cours de l'annĂ©e 1999, d'une partie des marques parallĂšles Ă Coca-Cola, les deux titulaires des marques parallĂšles dans l'EEE ont demandĂ©, sur leurs territoires respectifs, l'enregistrement de nouvelles marques Schweppes identiques ou similaires pour les mĂȘmes produits (telle que, par exemple, la marque SCHWEPPES ZERO) ;
- bien que Schweppes International soit le titulaire des marques parallÚles aux Pays-Bas, l'exploitation de la marque dans ce pays (à savoir l'élaboration, l'embouteillage et la commercialisation du produit) est effectuée par Coca-Cola en qualité de licencié ;
- Schweppes International ne s'oppose pas Ă ce que des produits " Schweppes " d'origine britannique soient commercialisĂ©s en ligne dans plusieurs Ătats membres de l'EEE, dans lesquels elle est titulaire des marques parallĂšles, comme en Allemagne et en France ; des produits " Schweppes " sont, par ailleurs, vendus sur l'ensemble du territoire de l'EEE par l'intermĂ©diaire de sites Internet, sans distinction d'origine ;
- Coca-Cola ne s'est pas opposée, sur la base des droits qu'elle détient sur les marques parallÚles, à la demande d'enregistrement, par Schweppes International, d'un modÚle communautaire contenant l'élément verbal " Schweppes ".
15 La juridiction de renvoi estime que les circonstances de l'affaire au principal se distinguent nettement de celles des affaires à l'origine de la jurisprudence de la Cour en matiÚre d'épuisement du droit de marque et qu'elles pourraient rendre nécessaires une nouvelle réflexion sur l'équilibre entre la protection de ce droit et la libre circulation des marchandises au sein de l'Union.
16 Dans ces conditions, le Juzgado de lo Mercantil no 8 de Barcelona (tribunal de commerce no 8 de Barcelone, Espagne) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :
" 1) L'article 36 TFUE, l'article 7, paragraphe 1, de la directive [2008/95] et l'article 15, paragraphe 1, de la directive [2015/2436] s'opposent-ils Ă ce que le titulaire d'une marque dans un ou plusieurs Ătats membres empĂȘche l'importation parallĂšle ou la commercialisation de produits en provenance d'un autre Ătat membre sous une marque identique ou presque identique appartenant Ă un tiers, alors que ledit titulaire a favorisĂ© une image de marque globale et associĂ©e Ă l'Ătat membre dont proviennent les produits dont il entend interdire l'importation ?
2) L'article 36 TFUE, l'article 7, paragraphe 1, de la directive [2008/95] et l'article 15, paragraphe 1, de la directive [2015/2436] s'opposent-ils à la vente de produits sous une marque notoirement connue au sein de l'Union alors que les titulaires des enregistrements donnent, dans l'ensemble de l'EEE, une image de marque globale qui crée une confusion aux yeux du consommateur moyen quant à l'origine commerciale de ces produits ?
3) L'article 36 TFUE, l'article 7, paragraphe 1, de la directive [2008/95] et l'article 15, paragraphe 1, de la directive [2015/2436] font-ils obstacle Ă ce que le titulaire de marques nationales identiques ou similaires enregistrĂ©es dans diffĂ©rents Ătats membres s'oppose Ă l'importation, dans un Ătat membre dans lequel il dĂ©tient la marque, de produits qui portent une marque identique ou similaire Ă la sienne et proviennent d'un Ătat membre dans lequel il n'est pas titulaire de la marque, alors que, dans au moins un des Ătats membres dans lesquels il en est titulaire, il a expressĂ©ment ou implicitement consenti Ă l'importation de ces mĂȘmes produits ?
4) L'article 36 TFUE, l'article 7, paragraphe 1, de la directive [2008/95] et l'article 15, paragraphe 1, de la directive [2015/2436] font-ils obstacle Ă ce que le titulaire A d'une marque X enregistrĂ©e dans un Ătat membre s'oppose Ă l'importation de produits portant cette marque, si ces produits proviennent d'un autre Ătat membre oĂč une marque Y, identique Ă la marque X, appartient Ă un titulaire B qui la commercialise, alors que :
- les titulaires A et B ont des rapports commerciaux et économiques intenses, bien que, à proprement parler, ils ne dépendent pas l'un de l'autre pour l'exploitation commune de la marque X ;
- les titulaires A et B coordonnent leur stratégie de marque en favorisant délibérément une apparence ou une image de marque unique et globale aux yeux du public pertinent, ou
- bien que, à proprement parler, ils ne dépendent pas l'un de l'autre pour l'exploitation commune de la marque X, les titulaires A et B ont des rapports commerciaux et économiques intenses et coordonnent leur stratégie de marque en favorisant délibérément une apparence ou une image de marque unique et globale aux yeux du public pertinent ? "
Sur les questions préjudicielles
Sur la recevabilité
17 Schweppes, Schweppes International et Orangina Schweppes Holding soutiennent, à titre principal, que le renvoi préjudiciel est irrecevable.
18 Ă cet Ă©gard, elles allĂšguent, tout d'abord, que le renvoi prĂ©judiciel est dĂ©nuĂ© de fondement. En effet, les constatations factuelles, contenues dans la dĂ©cision de renvoi et rĂ©sumĂ©es au point 14 du prĂ©sent arrĂȘt, sur lesquelles repose ce renvoi, seraient entachĂ©es d'erreurs manifestes. Cette dĂ©cision de renvoi serait, par ailleurs, incomplĂšte, dĂšs lors, notamment, qu'elle omettrait dĂ©libĂ©rĂ©ment de prĂ©senter la position de Schweppes et de Schweppes International, visant Ă contester lesdites apprĂ©ciations factuelles, en violation de leurs droits de la dĂ©fense.
19 Ensuite, Schweppes, Schweppes International et Orangina Schweppes Holding font valoir que les questions préjudicielles posées sont abstraites et reposent sur des affirmations générales et hypothétiques. La Cour se trouverait ainsi dans l'impossibilité d'en apprécier la nécessité et la pertinence.
20 Enfin, Schweppes, Schweppes International et Orangina Schweppes Holding soutiennent que les doutes de la juridiction de renvoi portent non pas sur l'interprétation du droit de l'Union, mais uniquement sur le point de savoir si certaines situations factuelles, qui n'ont pas encore été traitées par la jurisprudence de la Cour en matiÚre d'épuisement du droit conféré par la marque, sont susceptibles de relever de celle-ci. Cette jurisprudence étant parfaitement définie et établie, l'interprétation des dispositions du droit de l'Union sollicitée par la juridiction de renvoi ne susciterait plus aucun doute, de sorte que la saisine de la Cour n'aurait pas été nécessaire.
21 Ă cet Ă©gard, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante de la Cour, dans le cadre de la procĂ©dure prĂ©judicielle prĂ©vue Ă l'article 267 TFUE, fondĂ©e sur une nette sĂ©paration des fonctions entre les juridictions nationales et la Cour, le juge national est seul compĂ©tent pour constater et apprĂ©cier les faits du litige au principal. Dans ce cadre, la Cour est uniquement habilitĂ©e Ă se prononcer sur l'interprĂ©tation ou la validitĂ© du droit de l'Union au regard de la situation factuelle et juridique telle que dĂ©crite par la juridiction de renvoi, afin de donner Ă cette derniĂšre les Ă©lĂ©ments utiles Ă la solution du litige dont elle est saisie (arrĂȘts du 28 juillet 2016, Kratzer, C 423/15, EU:C:2016:604, point 27, et du 27 avril 2017, A-Rosa Flussschiff, C 620/15, EU:C:2017:309, point 35).
22 Partant, il n'appartient pas à la Cour de mettre en doute les appréciations factuelles sur lesquelles repose la demande de décision préjudicielle.
23 En outre, la Cour a itĂ©rativement jugĂ© qu'il appartient de mĂȘme au seul juge national, qui est saisi du litige et doit assumer la responsabilitĂ© de la dĂ©cision juridictionnelle Ă intervenir, d'apprĂ©cier, au regard des particularitĂ©s de l'affaire, tant la nĂ©cessitĂ© que la pertinence des questions qu'il pose Ă la Cour. En consĂ©quence, dĂšs lors que les questions posĂ©es portent sur l'interprĂ©tation du droit de l'Union, la Cour est, en principe, tenue de statuer (arrĂȘts du 26 janvier 2017, Banco Primus, C 421/14, EU:C:2017:60, point 29, ainsi que du 20 septembre 2017, Andriciuc e.a., C 186/16, EU:C:2017:703, point 19).
24 Ainsi, le rejet par la Cour d'une demande de dĂ©cision prĂ©judicielle introduite par une juridiction nationale n'est possible que lorsqu'il apparaĂźt de maniĂšre manifeste que l'interprĂ©tation sollicitĂ©e du droit de l'Union n'a aucun rapport avec la rĂ©alitĂ© ou l'objet du litige au principal, lorsque le problĂšme est de nature hypothĂ©tique ou encore lorsque la Cour ne dispose pas des Ă©lĂ©ments de fait et de droit nĂ©cessaires pour rĂ©pondre de façon utile aux questions qui lui sont posĂ©es (arrĂȘts du 14 mars 2013, Allianz HungĂĄria BiztosĂtĂł e.a., C 32/11, EU:C:2013:160, point 26, ainsi que du 26 janvier 2017, Banco Primus, C 421/14, EU:C:2017:60, point 30).
25 Or, tel n'est pas le cas en l'espÚce. En effet, il ressort de la demande de décision préjudicielle que les questions posées ont un rapport direct avec le litige au principal et sont pertinentes afin de permettre à la juridiction de renvoi de trancher celui-ci. Cette demande contient, par ailleurs, suffisamment d'éléments pour déterminer la portée de ces questions et y apporter une réponse utile.
26 Enfin, il y a lieu de rappeler que les juridictions nationales conservent l'entiĂšre libertĂ© de saisir la Cour si elles l'estiment opportun, sans que la circonstance que les dispositions dont l'interprĂ©tation est demandĂ©e ont dĂ©jĂ Ă©tĂ© interprĂ©tĂ©es par la Cour ait pour consĂ©quence de faire obstacle Ă ce que la Cour statue de nouveau (arrĂȘts du 17 juillet 2014, Torresi, C 58/13 et C 59/13, EU:C:2014:2088, point 32, ainsi que du 20 septembre 2017, Andriciuc e.a., C 186/16, EU:C:2017:703, point 21).
27 Il résulte des considérations qui précÚdent que la demande de décision préjudicielle est recevable.
Sur le fond
28 à titre liminaire, il convient de relever que les questions préjudicielles portent tant sur le droit dérivé de l'Union, à savoir sur l'article 7, paragraphe 1, de la directive 2008/95 et sur l'article 15, paragraphe 1, de la directive 2015/2436, qui le remplace, que sur le droit primaire de l'Union, à savoir sur l'article 36 TFUE.
29 à cet égard, il convient de constater, d'une part, que, s'agissant de ces deux dispositions de droit dérivé, le litige au principal est régi, compte tenu de la date des faits, par la premiÚre de ces dispositions. C'est donc seulement au regard de celle-ci qu'il appartient à la Cour de se prononcer dans le cadre de la présente demande de décision préjudicielle.
30 D'autre part, il importe de rappeler que l'article 7 de la directive 2008/95, libellĂ© en des termes gĂ©nĂ©raux, rĂ©glemente de maniĂšre complĂšte la question de l'Ă©puisement du droit de marque en ce qui concerne les produits mis dans le commerce dans l'Union et que, lorsque des directives de l'Union prĂ©voient l'harmonisation de mesures nĂ©cessaires Ă assurer la protection des intĂ©rĂȘts visĂ©s par l'article 36 TFUE, toute mesure nationale y relative doit ĂȘtre apprĂ©ciĂ©e au regard des dispositions de cette directive et non des articles 34 Ă 36 TFUE. Cependant, ladite directive doit, comme toute rĂ©glementation de droit dĂ©rivĂ© de l'Union, ĂȘtre interprĂ©tĂ©e Ă la lumiĂšre des rĂšgles du traitĂ© FUE relatives Ă la libre circulation des marchandises et notamment de l'article 36 TFUE (voir, en ce sens, arrĂȘts du 11 juillet 1996, Bristol-Myers Squibb e.a., C 427/93, C 429/93 et C 436/93, EU:C:1996:282, points 25 Ă 27 et jurisprudence citĂ©e, ainsi que du 20 mars 1997, Phytheron International, C 352/95, EU:C:1997:170, points 17 et 18).
31 Ainsi, par ses quatre questions, qu'il convient de traiter ensemble, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l'article 7, paragraphe 1, de la directive 2008/95, lu Ă la lumiĂšre de l'article 36 TFUE, doit ĂȘtre interprĂ©tĂ© en ce sens qu'il fait obstacle Ă ce que le titulaire d'une marque nationale s'oppose Ă l'importation de produits identiques revĂȘtus de la mĂȘme marque provenant d'un autre Ătat membre, oĂč cette marque, qui appartenait initialement au mĂȘme titulaire, est dĂ©sormais dĂ©tenue par un tiers en ayant acquis les droits par cession, lorsque l'un ou plusieurs des Ă©lĂ©ments suivants sont prĂ©sents :
- le titulaire a favorisĂ© une image de marque globale et associĂ©e Ă l'Ătat membre de provenance des produits dont il entend faire interdire l'importation ;
- le titulaire et le tiers coordonnent leur stratégie de marque pour favoriser délibérément, dans l'ensemble de l'EEE, l'apparence ou l'image d'une marque unique et globale ;
- l'image de marque unique et globale ainsi donnĂ©e crĂ©e une confusion aux yeux du consommateur moyen quant Ă l'origine commerciale des produits revĂȘtus de cette marque ;
- le titulaire et le tiers ont des rapports commerciaux et Ă©conomiques Ă©troits, mĂȘme si, Ă proprement parler, ils ne dĂ©pendent pas l'un de l'autre pour l'exploitation commune de la marque ;
- le titulaire a expressĂ©ment ou implicitement consenti que les mĂȘmes produits que ceux dont il entend faire interdire l'importation soient importĂ©s dans un ou plusieurs autres Ătats membres dans lesquels il dĂ©tient encore les droits de marque.
32 Red Paralela, les gouvernements grecs et néerlandais ainsi que la Commission européenne proposent, avec des nuances différentes, d'apporter une réponse affirmative à cette question, tandis que Schweppes, Schweppes International et Orangina Schweppes Holding considÚrent que celle-ci appelle une réponse négative.
33 En vertu de l'article 7, paragraphe 1, de la directive 2008/95, le droit conféré par la marque ne permet pas à son titulaire d'interdire l'usage de celle-ci pour des produits qui ont été mis dans le commerce dans l'Union sous cette marque par le titulaire ou avec son consentement.
34 L'article 7, paragraphe 1, de la directive 2008/95 est libellĂ© en des termes qui correspondent Ă ceux employĂ©s par la Cour dans les arrĂȘts qui, en interprĂ©tant les articles 30 et 36 du traitĂ© CE (devenus articles 28 et 30 CE, eux-mĂȘmes devenus articles 34 et 36 TFUE), ont reconnu en droit de l'Union le principe de l'Ă©puisement du droit de marque. Ainsi, cette disposition reprend la jurisprudence de la Cour selon laquelle le titulaire d'un droit de marque protĂ©gĂ© par la lĂ©gislation d'un Ătat membre ne saurait invoquer cette lĂ©gislation pour s'opposer Ă l'importation ou Ă la commercialisation d'un produit qui a Ă©tĂ© mis en circulation dans un autre Ătat membre par lui-mĂȘme ou avec son consentement (voir, en ce sens, arrĂȘts du 11 juillet 1996, Bristol-Myers Squibb e.a., C 427/93, C 429/93 et C 436/93, EU:C:1996:282, point 31, ainsi que du 20 mars 1997, Phytheron International, C 352/95, EU:C:1997:170, point 20).
35 Cette jurisprudence relative au principe de l'Ă©puisement du droit de marque, fondĂ©e sur l'article 36 TFUE, vise, tout comme l'article 7, paragraphe 1, de la directive 2008/95, Ă concilier les intĂ©rĂȘts fondamentaux de la protection des droits de marque, d'une part, et ceux de la libre circulation des marchandises dans le marchĂ© intĂ©rieur, d'autre part (voir, en ce sens, arrĂȘt du 11 juillet 1996, Bristol-Myers Squibb e.a., C 427/93, C 429/93 et C 436/93, EU:C:1996:282, point 40).
36 S'agissant du droit de marque, la Cour a itĂ©rativement jugĂ© que ce droit constitue un Ă©lĂ©ment essentiel du systĂšme de concurrence non faussĂ© que le droit de l'Union entend Ă©tablir et maintenir. Dans un tel systĂšme, les entreprises doivent ĂȘtre en mesure de s'attacher la clientĂšle par la qualitĂ© de leurs produits ou de leurs services, ce qui n'est possible que grĂące Ă l'existence de signes distinctifs permettant d'identifier ces produits et ces services. Pour que la marque puisse jouer ce rĂŽle, elle doit constituer la garantie que tous les produits qui en sont revĂȘtus ont Ă©tĂ© fabriquĂ©s sous le contrĂŽle d'une entreprise unique Ă laquelle peut ĂȘtre attribuĂ©e la responsabilitĂ© de leur qualitĂ© (arrĂȘts du 17 octobre 1990, HAG GF, C 10/89, EU:C:1990:359, point 13, ainsi que du 11 juillet 1996, Bristol-Myers Squibb e.a., C 427/93, C 429/93 et C 436/93, EU:C:1996:282, point 43 et jurisprudence citĂ©e).
37 Par consĂ©quent, ainsi que la Cour l'a reconnu Ă maintes reprises, l'objet spĂ©cifique du droit de marque est notamment d'assurer au titulaire le droit d'utiliser la marque pour la premiĂšre mise en circulation d'un produit et de le protĂ©ger ainsi contre les concurrents qui voudraient abuser de la position et de la rĂ©putation de la marque en vendant des produits indĂ»ment pourvus de cette marque. En vue de dĂ©terminer la portĂ©e exacte de ce droit exclusif reconnu au titulaire de la marque, il faut tenir compte de la fonction essentielle de la marque, qui est de garantir au consommateur ou Ă l'utilisateur final l'identitĂ© d'origine du produit marquĂ©, en lui permettant de distinguer sans confusion possible ce produit de ceux qui ont une autre provenance (arrĂȘts du 17 octobre 1990, HAG GF, C 10/89, EU:C:1990:359, point 14, ainsi que du 11 juillet 1996, Bristol-Myers Squibb e.a., C 427/93, C 429/93 et C 436/93, EU:C:1996:282, point 44 et jurisprudence citĂ©e).
38 Or, la fonction essentielle de la marque serait compromise si, en l'absence de tout Ă©lĂ©ment de consentement de la part du titulaire, celui-ci ne pouvait pas s'opposer Ă l'importation d'un produit identique ou similaire revĂȘtu d'une marque identique ou prĂȘtant Ă confusion, qui a Ă©tĂ© fabriquĂ© et mis en circulation dans un autre Ătat membre par un tiers n'ayant aucun lien Ă©conomique avec ce titulaire (voir, en ce sens, arrĂȘts du 17 octobre 1990, HAG GF, C 10/89, EU:C:1990:359, points 15 et 16, ainsi que du 22 juin 1994, IHT Internationale Heiztechnik et Danzinger, C 9/93, EU:C:1994:261, points 33 Ă 37).
39 Cette analyse ne saurait ĂȘtre modifiĂ©e par le seul fait que la marque du titulaire et celle apposĂ©e sur le produit dont ce titulaire entend faire interdire l'importation ont appartenu initialement au mĂȘme titulaire, et ce indĂ©pendamment du point de savoir si le fractionnement de ces marques est dĂ» Ă une expropriation, et donc Ă un acte de puissance publique, ou Ă une cession contractuelle volontaire, Ă condition toutefois que, en dĂ©pit de leur origine commune, chacune desdites marques ait, Ă partir de l'expropriation ou de la cession, rempli de façon indĂ©pendante, dans le cadre territorial qui lui est propre, sa fonction de garantir que les produits marquĂ©s proviennent d'une seule source (voir, en ce sens, arrĂȘts du 17 octobre 1990, HAG GF, C 10/89, EU:C:1990:359, points 17 et 18, ainsi que du 22 juin 1994, IHT Internationale Heiztechnik et Danzinger, C 9/93, EU:C:1994:261, points 46 Ă 48).
40 Cette derniĂšre condition fait, Ă l'Ă©vidence, dĂ©faut lorsque, aprĂšs la cession d'une partie des marques parallĂšles nationales Ă un tiers, le titulaire, seul ou en coordonnant sa stratĂ©gie de marque avec ce tiers, a continuĂ© Ă favoriser de maniĂšre active et dĂ©libĂ©rĂ©e l'apparence ou l'image d'une marque unique et globale, en crĂ©ant ou en renforçant ainsi une confusion aux yeux du public concernĂ© quant Ă l'origine commerciale des produits revĂȘtus de cette marque. Par un tel comportement, qui a pour effet que la marque du titulaire ne remplit plus sa fonction essentielle de façon indĂ©pendante dans le cadre territorial qui lui est propre, le titulaire a lui-mĂȘme portĂ© atteinte Ă cette fonction, voire dĂ©naturĂ© celle-ci. Par consĂ©quent, il ne saurait se prĂ©valoir de la nĂ©cessitĂ© de sauvegarder ladite fonction pour s'opposer Ă l'importation de produits identiques revĂȘtus de la mĂȘme marque provenant d'un autre Ătat membre oĂč cette marque est dĂ©sormais dĂ©tenue par ledit tiers.
41 Il appartient aux juridictions nationales d'apprécier si tel a été le cas, en tenant compte de l'ensemble des éléments caractérisant la situation individuelle en cause.
42 Dans ce contexte, il convient nĂ©anmoins de relever que ne saurait suffire Ă cet Ă©gard la seule circonstance que ce titulaire continue, aprĂšs la cession, d'Ă©voquer l'origine gĂ©ographique historique des marques parallĂšles nationales, et ce mĂȘme s'il ne dĂ©tient plus les droits pour le territoire en question et entend faire interdire l'importation des produits revĂȘtus de ces marques en provenance de celui-ci.
43 Dans l'hypothĂšse oĂč ces juridictions constatent que la condition Ă©noncĂ©e au point 39 du prĂ©sent arrĂȘt est satisfaite, il importe encore de rappeler que la fonction essentielle de la marque n'est nullement mise en cause par la libertĂ© des importations lorsque le titulaire de la marque dans l'Ătat d'importation et le titulaire de la marque dans l'Ătat d'exportation sont identiques ou lorsque, mĂȘme s'ils sont des personnes distinctes, ils sont liĂ©s Ă©conomiquement (voir, en ce sens, arrĂȘt du 22 juin 1994, IHT Internationale Heiztechnik et Danzinger, C 9/93, EU:C:1994:261, points 34 et 37).
44 Ainsi que la Cour l'a dĂ©jĂ constatĂ©, un tel lien Ă©conomique existe, notamment, lorsque les produits en question ont Ă©tĂ© mis en circulation par un licenciĂ© ou par une sociĂ©tĂ© mĂšre ou par une filiale du mĂȘme groupe ou encore par un concessionnaire exclusif. En effet, dans toutes ces situations, le titulaire ou l'entitĂ© dont celui-ci fait partie a la possibilitĂ© de contrĂŽler la qualitĂ© des produits sur lesquels la marque est apposĂ©e (voir, en ce sens, arrĂȘt du 22 juin 1994, IHT Internationale Heiztechnik et Danzinger, C 9/93, EU:C:1994:261, points 34 et 37).
45 La Cour a, par ailleurs, soulignĂ© que l'Ă©lĂ©ment dĂ©terminant est la possibilitĂ© d'un contrĂŽle sur la qualitĂ© des produits et non l'exercice effectif de ce contrĂŽle. Dans ce contexte, elle a relevĂ© Ă titre d'exemple que, si le donneur de licence tolĂšre la fabrication de produits de mauvaise qualitĂ© par le licenciĂ© alors qu'il a les moyens contractuels de l'empĂȘcher, il doit en assumer la responsabilitĂ©. De mĂȘme, si la fabrication des produits est dĂ©centralisĂ©e au sein d'un mĂȘme groupe de sociĂ©tĂ©s et que les filiales Ă©tablies dans chacun des Ătats membres fabriquent des produits dont la qualitĂ© est adaptĂ©e aux particularitĂ©s de chaque marchĂ© national, ces diffĂ©rences de qualitĂ© ne sauraient ĂȘtre invoquĂ©es pour s'opposer Ă l'importation de produits fabriquĂ©s par une sociĂ©tĂ©-sĆur, le groupe devant subir les consĂ©quences de son choix (voir, en ce sens, arrĂȘt du 22 juin 1994, IHT Internationale Heiztechnik et Danzinger, C 9/93, EU:C:1994:261, point 38).
46 Ainsi que l'a relevĂ© M. l'avocat gĂ©nĂ©ral aux points 72 Ă 82 de ses conclusions, il rĂ©sulte de cette jurisprudence que la notion de " lien Ă©conomique ", au sens de celle-ci, renvoie Ă un critĂšre non pas formel, mais substantiel, qui n'est nullement limitĂ© aux situations Ă©numĂ©rĂ©es au point 44 du prĂ©sent arrĂȘt et qui, en particulier, est Ă©galement satisfait lorsque, aprĂšs le fractionnement de marques parallĂšles nationales dĂ» Ă une cession territorialement limitĂ©e, les titulaires de ces marques coordonnent leurs politiques commerciales ou s'accordent afin de contrĂŽler conjointement l'utilisation desdites marques, de telle sorte qu'ils ont la possibilitĂ© de dĂ©terminer directement ou indirectement les produits sur lesquels la marque est apposĂ©e et d'en contrĂŽler la qualitĂ©.
47 En effet, permettre à de tels titulaires de protéger leurs territoires respectifs contre l'importation parallÚle de ces produits aboutirait à un cloisonnement des marchés nationaux qui n'est pas justifié par l'objet du droit de marque et qui n'est notamment pas nécessaire pour préserver la fonction essentielle des marques concernées.
48 Ainsi, dans les circonstances dĂ©crites au point 46 du prĂ©sent arrĂȘt, il y a lieu de considĂ©rer que le produit a Ă©tĂ© mis dans le commerce dans l'Ătat membre d'exportation avec le consentement du titulaire du droit de marque protĂ©gĂ© par l'Ătat membre d'importation au sens de l'article 7, paragraphe 1, de la directive 2008/95, lu Ă la lumiĂšre de l'article 36 TFUE.
49 à cet égard, il convient de préciser que la constatation qu'il existe, aprÚs le fractionnement de marques parallÚles nationales dû à une cession territorialement limitée, des liens économiques entre les titulaires de ces marques n'est soumise ni à la condition que ces titulaires dépendent formellement l'un de l'autre pour l'exploitation commune desdites marques ni à celle qu'ils exercent effectivement la possibilité de contrÎler la qualité des produits concernés.
50 Par ailleurs, si la Cour a dĂ©jĂ constatĂ© que, par lui-mĂȘme, c'est-Ă -dire en l'absence de tout lien Ă©conomique, le contrat de cession ne donne pas au cĂ©dant les moyens de contrĂŽler la qualitĂ© des produits commercialisĂ©s et marquĂ©s par le cessionnaire, il rĂ©sulte prĂ©cisĂ©ment de cette constatation qu'il en va autrement lorsque de tels liens Ă©conomiques existent entre le cĂ©dant et le cessionnaire (voir, en ce sens, arrĂȘt du 22 juin 1994, IHT Internationale Heiztechnik et Danzinger, C 9/93, EU:C:1994:261, points 41 et 43).
51 Il appartient aux juridictions nationales d'apprécier l'existence de tels liens économiques, en tenant compte de tous les éléments pertinents de l'espÚce.
52 Dans ce contexte, il convient de relever que, s'il incombe, en principe, Ă l'opĂ©rateur qui invoque l'Ă©puisement d'apporter la preuve que les conditions d'application de l'article 7, paragraphe 1, de la directive 2008/95 sont rĂ©unies (voir, en ce sens, arrĂȘt du 20 novembre 2001, Zino Davidoff et Levi Strauss, C 414/99 Ă C 416/99, EU:C:2001:617, point 54), cette rĂšgle doit ĂȘtre amĂ©nagĂ©e lorsqu'elle est de nature Ă permettre au titulaire de cloisonner les marchĂ©s nationaux, favorisant ainsi le maintien des diffĂ©rences de prix entre les Ătats membres (voir, en ce sens, arrĂȘt du 8 avril 2003, Van Doren + Q, C 244/00, EU:C:2003:204, points 37 et 38).
53 Un tel aménagement de la charge de la preuve s'impose en cas de fractionnement volontaire de marques parallÚles nationales, dÚs lors qu'il est difficile, voire impossible, pour un tel opérateur de démontrer l'existence de liens économiques entre les titulaires de ces marques, ces liens découlant habituellement d'accords commerciaux ou d'arrangements informels entre ces titulaires auxquels l'opérateur n'a pas accÚs.
54 Cela Ă©tant, comme l'a Ă©galement relevĂ© M. l'avocat gĂ©nĂ©ral au point 94 de ses conclusions, il incombe Ă l'opĂ©rateur d'avancer un ensemble d'indices prĂ©cis et concordants permettant d'infĂ©rer l'existence de tels liens Ă©conomiques. Il appartient Ă la juridiction de renvoi de vĂ©rifier si les faits rĂ©sumĂ©s au point 14 du prĂ©sent arrĂȘt constituent de tels indices.
55 Au regard de l'ensemble des considĂ©rations qui prĂ©cĂšdent, il convient de rĂ©pondre aux questions posĂ©es que l'article 7, paragraphe 1, de la directive 2008/95, lu Ă la lumiĂšre de l'article 36 TFUE, doit ĂȘtre interprĂ©tĂ© en ce sens qu'il fait obstacle Ă ce que le titulaire d'une marque nationale s'oppose Ă l'importation de produits identiques revĂȘtus de la mĂȘme marque provenant d'un autre Ătat membre, oĂč cette marque, qui appartenait initialement au mĂȘme titulaire, est dĂ©sormais dĂ©tenue par un tiers en ayant acquis les droits par cession, lorsque, aprĂšs cette cession,
- le titulaire, seul ou en coordonnant sa stratĂ©gie de marque avec ce tiers, a continuĂ© Ă favoriser de maniĂšre active et dĂ©libĂ©rĂ©e l'apparence ou l'image d'une marque unique et globale, en crĂ©ant ou en renforçant ainsi une confusion aux yeux du public concernĂ© quant Ă l'origine commerciale des produits revĂȘtus de cette marque,
ou
- il existe des liens Ă©conomiques entre le titulaire et ledit tiers, au sens oĂč ils coordonnent leurs politiques commerciales ou s'accordent afin de contrĂŽler conjointement l'utilisation de la marque, de telle sorte qu'ils ont la possibilitĂ© de dĂ©terminer directement ou indirectement les produits sur lesquels ladite marque est apposĂ©e et d'en contrĂŽler la qualitĂ©.
Sur les dépens
56 La procĂ©dure revĂȘtant, Ă l'Ă©gard des parties au principal, le caractĂšre d'un incident soulevĂ© devant la juridiction de renvoi, il appartient Ă celle-ci de statuer sur les dĂ©pens. Les frais exposĂ©s pour soumettre des observations Ă la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l'objet d'un remboursement.
Par ces motifs, la Cour (deuxiĂšme chambre) dit pour droit :
L'article 7, paragraphe 1, de la directive 2008/95/CE du Parlement europĂ©en et du Conseil, du 22 octobre 2008, rapprochant les lĂ©gislations des Ătats membres sur les marques, lu Ă la lumiĂšre de l'article 36 TFUE, doit ĂȘtre interprĂ©tĂ© en ce sens qu'il fait obstacle Ă ce que le titulaire d'une marque nationale s'oppose Ă l'importation de produits identiques revĂȘtus de la mĂȘme marque provenant d'un autre Ătat membre, oĂč cette marque, qui appartenait initialement au mĂȘme titulaire, est dĂ©sormais dĂ©tenue par un tiers en ayant acquis les droits par cession, lorsque, aprĂšs cette cession,
- le titulaire, seul ou en coordonnant sa stratĂ©gie de marque avec ce tiers, a continuĂ© Ă favoriser de maniĂšre active et dĂ©libĂ©rĂ©e l'apparence ou l'image d'une marque unique et globale, en crĂ©ant ou en renforçant ainsi une confusion aux yeux du public concernĂ© quant Ă l'origine commerciale des produits revĂȘtus de cette marque,
ou
- il existe des liens Ă©conomiques entre le titulaire et ledit tiers, au sens oĂč ils coordonnent leurs politiques commerciales ou s'accordent afin de contrĂŽler conjointement l'utilisation de la marque, de telle sorte qu'ils ont la possibilitĂ© de dĂ©terminer directement ou indirectement les produits sur lesquels ladite marque est apposĂ©e et d'en contrĂŽler la qualitĂ©.