CA Versailles, 14e ch., 1 février 2018, n° 17-03755
VERSAILLES
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Siligom (SAS)
Défendeur :
Profil Plus (SAS)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Bouvier
Conseillers :
Mmes Grison-Pascail, Soulmagnon
Exposé du litige
La SAS Siligom, créée en 1998, anime un réseau de 280 distributeurs de pneumatiques exerçant leur activité sous l'enseigne Siligom, auxquels elle apporte une marque commune, un approvisionnement auprès des manufacturiers de pneumatiques et une politique commune de recherche de clients grands comptes.
La SAS Profil Plus, créée en 2007, exerce des activités identiques à celle de la société Siligom, sur le marché très concurrentiel de négociants spécialisés en pneus industriels, dans lequel est également présent un réseau tel que Point S. Elle regroupe 208 adhérents.
Le nombre d'adhérents est un enjeu majeur pour les acteurs du marché, la croissance du réseau se traduisant en une augmentation des redevances dues par les adhérents aux sociétés têtes de réseau.
La société Siligom s'est plainte, à compter de l'année 2016, d'actes de dénigrement commis à son détriment par la société Profil Plus en vue de la désorganiser et de récupérer de nouveaux adhérents, reprochant notamment à sa concurrente d'avoir fait établir par son conseil des lettres type de résiliation à l'attention des adhérents Siligom prêts à quitter le réseau.
Convaincue de l'existence des manœuvres déloyales de sa concurrente, disant avoir constaté le départ ces dernières années de 15% de ses adhérents vers la société Profil Plus (40 adhérents sur 280), la société Siligom a mis en demeure le 30 septembre 2016 la société Profil Plus de cesser ses agissements déloyaux.
Puis elle a saisi, par acte du 15 décembre 2016, le juge des référés du Tribunal de commerce de Nanterre, afin qu'il soit enjoint sous astreinte à la société Profil Plus de cesser ses actes de dénigrement auprès de ses adhérents et ordonné la publication de la décision à intervenir dans les locaux de la société Profil Plus ainsi que sur son site internet, et dans trois revues spécialisées.
Par ordonnance contradictoire du 5 mai 2017, le juge des référés, retenant notamment que les propos portant appréciation péjorative de l'entreprise subissant des actes de dénigrement avec intention de nuire sont constitutifs d'actes de dénigrement, donc de concurrence déloyale ; que la société Siligom ne démontre aucunement que le projet de lettre ait été émis, voire même inspiré, par la société Profil Plus, maître M. étant l'un de ses conseils parmi d'autres ; qu'il n'est pas démontré que cet avocat ait été le mandataire de la société Profil Plus ou qu'il ait agi sur ses ordres ; qu'aucune preuve d'un quelconque dénigrement de la part de la société Profil Plus n'est apportée par les courriers, aucun élément ne permettant de déterminer si la société Profil Plus en a été à l'origine, voire même l'inspiratrice ; que la société Siligom ne prouve pas avoir subi un quelconque préjudice, se contentant d'affirmer que 15 % de ses adhérents auraient alors quitté son réseau en 2016, sans apporter la preuve d'un quelconque lien de causalité avec les actes de dénigrement allégués ; que les actes allégués remontent à près de huit mois et que la société Siligom n'apporte aucun élément nouveau depuis septembre 2016 ; qu'aucune urgence n'est ainsi établie, a :
- débouté la société Profil Plus de sa demande de rejeter des débats la pièce n° 5 versée par la société Siligom,
-débouté la société Siligom de ses demandes d'enjoindre à la société Profil Plus de cesser ses actes de dénigrement auprès des adhérents Siligom, de ne plus entrer en contact avec aucun adhérent Siligom, sous astreinte de 1 000 euros par infraction constatée, et d'ordonner la publication, aux frais de la société Profil Plus, dans les locaux de la société Profil Plus ainsi que sur le site internet de cette dernière et dans trois revues spécialisées,
- condamné la société Siligom à payer à la société Profil Plus la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, déboutant du surplus,
- condamné la société Siligom aux dépens.
Le 15 mai 2017, la société Siligom a relevé appel de cette décision.
Dans ses conclusions reçues au greffe le 22 novembre 2017, auxquelles il convient de se reporter pour plus ample exposé de ses prétentions et moyens, la société Siligom, appelante, demande à la cour de :
- infirmer en toutes ses dispositions l'ordonnance de référé du 5 mai 2017 en ce qu'elle a considéré que les actes allégués par elle n'étaient pas constitutifs de dénigrement,
Statuant à nouveau,
- dire que la société Profil Plus s'est rendue coupable de comportements déloyaux en faisant intervenir l'un de ses conseils habituels pour préparer au profit d'adhérents Siligom leurs lettres de démission,
- dire que la société Profil Plus a incontestablement été l'instigatrice de ces manœuvres déloyales ayant pour but de capter les adhérents de son réseau, et notamment en ce que l'un de ses préposés était en copie cachée des échanges de mails entre l'avocat et les adhérents ciblés,
- dire que le SMS adressé par M. L. à M. F. le 6 octobre 2016, message comportant des informations tendancieuses et diffusées de manière péjorative sous forme d'insinuations mensongères, constitue inévitablement et incontestablement un acte de dénigrement,
En conséquence,
- dire que l'ensemble de ces actes constituent des actes de dénigrement,
- dire que la société Profil Plus s'est ainsi rendue coupable à son encontre d'actes de concurrence déloyale,
- enjoindre à la société Profil Plus de cesser ses actes de dénigrement auprès de ses adhérents, sous astreinte de 1 000 euros par nouvelle infraction constatée à compter du prononcé de la décision à intervenir,
Plus particulièrement,
- faire interdiction à la société Profil Plus de faire adresser par l'un quelconque de ses préposés à tout adhérent tout SMS, mail, courrier ou quelque autre forme de communication visant à critiquer la politique de développement menée par elle ou à susciter des doutes sur le bien-fondé ou l'intérêt qu'auraient ses adhérents de rester intégrés à son réseau et ce également sous astreinte de 1 000 euros par nouvelle infraction constatée,
- ordonner la publication, aux frais de la société Profil Plus, de la décision à intervenir, dans les locaux de la société Profil Plus ainsi que sur le site internet de cette dernière, et dans trois revues spécialisées qu'elle aura préalablement choisies,
- condamner la société Profil Plus à lui verser la somme de 15 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens d'instance.
Au soutien de ses demandes, la SAS Siligom fait valoir notamment :
- que le dénigrement est constitué dès qu'il porte sur des éléments de la personnalité du concurrent : critique du prix des produits, de la qualité des services rendus, des méthodes commerciales ; qu'il peut exister sur tout support, écrit ou oral, et l'ampleur de la diffusion, ou au contraire son caractère restreint, ne sera pris en considération que pour l'évaluation du préjudice ; que le dénigrement est enfin réalisé dès lors qu'il vise un concurrent déterminé ou déterminable ; qu'il comporte un message critique, émanant d'un acteur économique qui cherche à bénéficier d'un avantage concurrentiel en pénalisant son concurrent ; que la jurisprudence considère que le dénigrement peut être constitué peu important la véracité des propos tenus ;
- que la société Profil Plus a multiplié les procédés déloyaux pour convaincre ses adhérents de quitter son réseau : diffuser une fausse rumeur, faire naître des doutes et une méfiance, les orienter vers son conseil pour qu'il les accompagne dans toutes les formalités juridiques et administratives à mettre en œuvre pour quitter le réseau, faire établir par son conseil des modèles type de courriers de résiliation ou de remise en cause du réseau et les adresser directement aux adhérents, faire envoyer via ses collaborateurs des SMS sur les téléphones portables des dirigeants des sociétés adhérentes au réseau ;
- que, s'agissant des courriers adressés à ses adhérents, seule la société Profil Plus peut être à l'origine de l'établissement des modèles types de courriers qui font état d'une prétendue fusion avec Best Drive et d'un prétendu changement d'enseigne, dont ils n'auraient jamais eu connaissance ;
- qu'il n'a pas été contesté que deux des trois adhérents spécifiquement concernés, mais aussi un nombre important d'autres adhérents ont quitté son réseau pour rejoindre celui de la société Profil Plus ; qu'il n'a pas non plus été contesté en première instance par la société Profil Plus que le cabinet F., et plus particulièrement maître M., faisait bien partie de ses conseils habituels ;
- que, s'agissant de la fausse rumeur, la société Profil Plus a également fait en sorte de décrédibiliser ses modes de fonctionnement en prétendant qu'elle prendrait des décisions sur l'avenir du réseau sans en référer préalablement à ses adhérents ;
- que ce déferlement d'actes de dénigrement mis en place par la société Profil Plus est concomitant à la position précaire de cette dernière sur le marché ces dernières années.
Dans ses conclusions reçues le 6 novembre 2017, auxquelles il convient de se reporter pour plus ample exposé de ses prétentions et moyens, la société Profil Plus, intimée, demande à la cour de:
- confirmer l'ordonnance en toutes ses dispositions,
Y ajoutant :
- condamner la société Siligom à lui verser la somme de 15 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens tant de première instance que d'appel ;
En tout état de cause :
-débouter la société Siligom de l'intégralité de ses demandes.
Au soutien de ses demandes, la SAS Profil Plus fait valoir :
- que selon la doctrine, le dénigrement vise des agissements qui " tendent à jeter le discrédit sur un concurrent ou sur les produits fabriqués " ; que la jurisprudence considère que le dénigrement consiste à porter atteinte à l'image de marque d'une entreprise ou d'un produit désigné ou identifiable afin de détourner la clientèle en usant de propos ou d'arguments répréhensibles ayant ou non une base exacte, diffusés ou émis en tout cas de manière à toucher les clients de l'entreprise visée, concurrente ou non de celle qui en est l'auteur ; qu'ils doivent jeter le discrédit ou répandre des informations malveillantes à l'encontre d'un ou plusieurs concurrents ; que les tribunaux s'emploient à distinguer le dénigrement de ce qui n'est qu'une simple critique ; que selon la jurisprudence, le démarchage ne constitue pas un acte de concurrence déloyale s'il n'est pas réalisé par des moyens critiquables tels que le dénigrement ou l'emploi d'informations mensongères ;
- qu'en l'espèce, la société Siligom ne verse aux débats aucune pièce probante permettant de justifier de la véracité de ses dires et procède par affirmations ;
- que les adhérents Siligom ont été fortement perturbés du rapprochement entre la société Siligom, Best Drive et Eurotyre au sein d'un groupement FleetPartner ; que ce rapprochement était connu de tous et figurait dans la presse ;
- que lorsqu'un négociant/adhérent d'un réseau concurrent à celui de la société Profil Plus est candidat pour éventuellement entrer dans son réseau, il lui est conseillé de vérifier son contrat en cours avec son conseil ; que lorsque ces candidats n'ont pas de conseil, il est arrivé plus que très rarement qu'elle leur donne le nom du cabinet F. disposant d'un département spécialisé dans les contrats commerciaux ; qu'en aucun cas, elle ne prend à sa charge l'accompagnement juridique de ces candidats ; que les trois adhérents de la société Siligom ont ainsi eu recours à un avocat spécialisé au sein de ce cabinet dont le nom a seulement été recommandé par elle ;
- que le projet de courrier qui est annexé au courriel de Me M. adressé à M. F. ne fait preuve d'aucun dénigrement ;
- que la société Siligom prétend qu'il y aurait eu des SMS adressés à des dirigeants de sociétés adhérentes au réseau Siligom, alors qu'il s'agit d'un unique SMS envoyé à un unique destinataire, sous la forme de quatre phrases interrogatives ; qu'il n'est en rien un dénigrement.
L'ordonnance de clôture a été prononcée le 30 novembre 2017.
MOTIFS DE LA DECISION
La cour rappelle, à titre liminaire, qu'elle n'est pas tenue de statuer sur les demandes de " dire " qui ne sont pas, hors les cas prévus par la loi, des prétentions en ce qu'elles ne sont pas susceptibles d'emporter des conséquences juridiques.
La cour relève à titre liminaire que l'appelante ne précise pas le fondement juridique de ses demandes, se limitant à viser dans le dispositif de ses conclusions les articles 872 et 873 du Code de procédure civile.
Elle évoque cependant dans ses écritures tout à la fois l'urgence à faire cesser des actes contraires à une pratique de libre-concurrence et le trouble manifestement illicite constitué par la politique agressive menée par Profil Plus qu'il convient de faire cesser.
Si l'appelante indique également attendre " une appréciation de principe ", énonçant à plusieurs reprises dans ses conclusions la recherche qui doit être opérée par " le juge du fond " en matière de concurrence déloyale, la cour rappelle qu'elle est en l'espèce saisie en matière de référé pour prononcer une mesure urgente ou destinée à faire cesser un trouble manifestement illicite, sans avoir à trancher le fond du litige.
L'article 872 du Code de procédure civile dispose que " dans tous les cas d'urgence, le président du tribunal de commerce peut, dans les limites de la compétence du tribunal, ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l'existence d'un différend ".
L'application de ce texte suppose la réunion de deux conditions cumulatives : l'urgence et l'absence de contestation sérieuse ou l'urgence et l'existence d'un différend et le juge peut alors prendre toute mesure utile à faire cesser ou empêcher la réalisation du dommage.
L'urgence et l'absence de contestation sérieuse ou de l'existence d'un conflit d'intérêts sérieux doivent s'apprécier au moment où la décision est rendue.
Selon l'article 873 du même code, " le président peut, dans les mêmes limites, et même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.
Dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, il peut accorder une provision au créancier ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire ".
Le dommage imminent s'entend du dommage qui n'est pas encore réalisé, mais qui se produira sûrement si la situation présente doit se perpétuer et le trouble manifestement illicite résulte de toute perturbation résultant d'un fait qui directement ou indirectement constitue une violation évidente de la règle de droit.
L'urgence n'a pas à être caractérisée pour l'application de ces dispositions.
La chambre commerciale de la Cour de cassation a défini le dénigrement comme " la divulgation d'une information de nature à jeter le discrédit sur un concurrent, peu important qu'elle soit exacte ", le dénigrement constituant un moyen concurrentiel déloyal, constitutif d'une faute délictuelle ouvrant droit à réparation dans les conditions de l'article 1240 du Code civil (anciennement 1382 du Code civil).
Le dénigrement suppose un message critique qui soit diffusé, impliquant la connaissance des faits reprochés par la clientèle. L'exactitude des propos tenus ne fait pas disparaître leur caractère éventuellement malveillant.
En premier lieu, il est reproché par la société Siligom à la société Profil Plus d'avoir diffusé des rumeurs déformées et tendancieuses sur la stratégie commerciale développée par le groupe en vue de convaincre les adhérents du réseau Siligom de le quitter au profit du réseau Profil Plus, à travers des visites effectuées par les collaborateurs de Profil Plus auprès des adhérents Siligom:
- en évoquant une prétendue fusion en cours entre Siligom et le réseau Best Drive et un changement d'enseigne, induisant auprès des adhérents l'idée que leur réseau allait s'affilier avec Continental et les placer sous son joug capitalistique, leur faisant perdre tous leurs avantages auprès du manufacturier Michelin avec lequel a été noué un partenariat particulier impliquant néanmoins une totale indépendance du réseau Siligom et des adhérents,
- en prétendant encore que Siligom opère sans concertation ou information préalable avec ses adhérents,
ces rumeurs décrédibilisant ses modes de fonctionnement et instaurant un climat de défiance.
Ainsi que le souligne la société intimée, les visites de collaborateurs Profil Plus auprès des adhérents Siligom pour diffuser des rumeurs visant à la discréditer et les inciter à rejoindre son réseau ne sont établies par aucun élément du dossier, ses adhérents étant eux-mêmes régulièrement démarchés par d'autres réseaux, en particulier Point S et Siligom, ainsi qu'en attestent notamment Relais Pneus (pièce 8 Profil Plus) et MM. S. et L. (pièces 13 et 14).
La société Profil Plus, pour démentir qu'elle est à l'origine de ces rumeurs et justifier de leur véracité, verse aux débats des coupures de presse qui font état d'un rapprochement en 2015 entre Siligom, Best Drive et Eurotyre dans une association Fleetpartner et de liens noués avec l'entité Best Drive sans toutefois mentionner un projet de fusion entre Siligom et Best Drive.
Pour autant, l'évocation vraie ou fausse de ce projet de fusion par trois adhérents-actionnaires envisageant de quitter le réseau Siligom, dans des courriers adressés à celle-ci les 24 août, 31 août et 12 septembre 2016, s'inscrit dans un contexte de modifications répétées des orientations stratégiques de Siligom sur un marché hautement concurrentiel pouvant susciter à elles seules des interrogations chez certains de ses adhérents, étant relevé qu'en 2016, Siligom a mis un terme à son association avec Fleet partner décidée en 2015 pour opérer un nouveau rapprochement avec le réseau Point S.
Comme l'a justement relevé le premier juge, il est donc légitime pour les signataires de ces lettres, qui se plaignent également d'une absence d'information préalable sur les choix stratégiques opérés par Siligom, visant tout à la fois l'association au sein de Fleetpartner ayant fait l'objet d'une communication publique et l'éventuelle fusion avec Best Drive, de solliciter des explications concernant l'avenir du réseau auquel ils appartiennent.
Si Siligom justifie qu'elle a répondu à ces courriers, contrairement à ce qu'a énoncé le premier juge, en réfutant notamment l'absence d'information, il ne peut qu'être constaté que les critiques émises par les adhérents n'engagent que leurs auteurs, qu'elles ne sont pas en elles-mêmes empreintes de malveillance, alors même qu'il n'est pas démontré qu'elles auraient été suggérées par la concurrence.
Cela l'est d'autant moins que plusieurs adhérents qui ont rejoint le réseau Profil Plus expliquent de manière circonstanciée que leur choix de quitter Siligom n'a été dicté que par des divergences concernant les orientations stratégiques et commerciales prises par celle-ci, qu'ils ont rencontré plusieurs autres réseaux avant de décider, affirmant encore qu'à aucun moment, Profil Plus n'a dénigré le réseau Siligom auquel ils appartenaient (pièces 9 à 14 intimée).
Il ne peut pas plus être déduit, avec l'évidence requise en référé, que la similitude dans la rédaction de ces courriers avec le projet de lettre émanant de maître M., avocat spécialisé en contrats commerciaux au sein du cabinet F., démontre l'implication active de Profil Plus en vue de dénigrer Soligom et récupérer ses adhérents, alors même que maître M. dément fermement avoir été mandaté par Profil Plus pour proposer aux adhérents de Siligom un modèle de lettre de résiliation contenant les informations discréditantes que celle-ci dénonce et précise s'agissant de M. F. S., adhérent Siligom Central Pneus, qu'il n'a jamais été question entre eux d'une adhésion au réseau Profil Plus et que les informations litigieuses lui ont été directement communiquées par l'adhérent lui-même (pièce 12 Siligom).
Il peut être ajouté, concernant M. F. S., qui a transféré à Siligom les courriels que lui a adressés maître M., que ce dernier évoque une prise de contact téléphonique le 28 juin 2016 mais également, dans son courriel du 15 juillet 2016 dans lequel il lui communique le projet de lettre à envoyer à Siligom, le courriel que lui a adressé le 7 juillet 2016 son client, lequel n'est pas versé aux débats par l'appelante malgré la sommation qui lui a été délivrée le 24 mars 2017, alors qu'il contient très certainement la demande personnelle de M. F. S. en vue de quitter le réseau Siligom et la comunication au conseil de toutes les informations litigieuses dénoncées, ce qui vient en contradiction avec les manœuvres déloyales imputées à Profil Plus.
Au demeurant, Profil Plus indique que sur ces trois résiliations, seul un des anciens adhérents de Siligom, la société Bayon Pneus, a rejoint son réseau tandis que Siligom prétend, sans le moindre élément justificatif, que ce sont deux adhérents, dont elle ne précise pas les noms, qui ont rejoint le réseau Profil Plus mais également " un nombre important d'autres adhérents Siligom ".
La pièce n°6 que l'appelante produit aux débats ne démontre rien, puisqu'elle correspond à un tableau des adhérents de Profil Plus dont certains apparaissent en " grisé ", sans aucune preuve de leur ancienne appartenance au réseau Siligom.
C'est donc très justement que le premier juge a estimé qu'aucun fait de dénigrement à l'égard de Siligom ne pouvait être caractérisé de manière non sérieusement contestable ou manifeste, à travers ces trois courriers dont Profil Plus aurait été l'instigatrice, ce qui n'est pas démontré, quand bien même celle-ci reconnaît avoir orienté ponctuellement certains candidats à l'adhésion à son réseau vers le cabinet d'affaires F., implanté dans plusieurs villes, qui est l'un de ses conseils parmi d'autres.
En second lieu, Siligom fait valoir, qu'outre le soutien juridique apporté par Profil Plus à ses adhérents pour quitter le réseau ou la déstabiliser, M. L., commercial chez Profil Plus a adressé à ses adhérents un SMS dont le contenu caractérise indiscutablement une volonté de dénigrement, ce qui a été constaté par un huissier de justice le 17 octobre 2016.
L'appelante ne peut se prévaloir d'un message envoyé à plusieurs adhérents de son réseau qui en compte 280, la preuve n'étant rapportée que d'un seul envoi du SMS litigieux le 6 octobre 2016 sur le téléphone portable de M. F. S., dont il doit être rappelé qu'il a envisagé de quitter le réseau Siligom au cours de l'été 2016, ce qui peut expliquer la relance qui lui a été faite par Profil Plus en octobre 2016.
Contrairement aux allégations de Siligom, il ne peut être considéré, de manière non sérieusement contestable ou manifeste, que le contenu de ce SMS la discrédite, vise " très clairement " à créer de l'inquiétude dans l'esprit de " ses adhérents " à travers quatre questions qui mettent directement en cause sa politique de partenariat avec Point S et la déprécie directement en la qualifiant de partenaire " en perte de vitesse sur ce marché " (pièce 5 Siligom).
La forme interrogative plutôt qu'affirmative témoigne au contraire et en général d'une critique mesurée permettant d'opérer une distinction entre les bonnes et mauvaises critiques, constitutives de dénigrement.
Les questions posées en termes non péjoratifs interpellent l'adhérent, qui a déjà manifesté son intérêt à quitter le réseau Siligom, mais qui ne l'a pas fait, sur les atouts que présente le partenariat de Siligom avec Point S et la mention d'un partenariat " en perte de vitesse sur le marché " est insuffisante pour caractériser, avec l'évidence requise en référé, une critique malveillante.
Il résulte de l'ensemble de ces constatations et énonciations, d'une part, sur le fondement de l'article 872 du Code de procédure civile, que ni l'urgence ni l'absence de contestation sérieuse sur l'existence de manœuvres déloyales de dénigrement imputables à Profil Plus ne sont caractérisées au jour où la cour statue, étant relevé que l'appelante ne fait état d'aucun élément nouveau depuis la dénonciation des faits le 30 septembre 2016, d'autre part, que n'est pas plus établie, au sens des dispositions de l'article 873, alinéa 1, du même code, l'existence d'un trouble manifestement illicite subi par Siligom, consistant en des actes de dénigrement commis par sa concurrente, destinés à la discréditer auprès de ses adhérents afin de les inciter à quitter son réseau.
Il n'y a donc pas lieu à référé sur l'ensemble des demandes de la société Siligom.
L'ordonnance déférée sera confirmée en toutes ses dispositions.
La société Siligom sera condamnée à payer à la société Profil Plus la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile et déboutée de sa prétention à ce titre.