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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 6, 25 mai 2018, n° 16-02110

PARIS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Lorenza Paris Joaillerie Haute Couture (SARL)

Défendeur :

Caisse d'Epargne et de Prévoyance Île-de-France (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Chandelon

Conseillers :

Mmes Guesdon, Liegeois

Avocats :

Mes Bordeianu, Sola

T. com. Paris, du 7 déc. 2015

7 décembre 2015

La société société à responsabilité limitée Lorenza Paris joaillerie haute couture dont la gérante est Mme X et dont l'activité porte sur la création, la fabrication, la vente et l'achat en bijouterie, joaillerie, orfèvrerie, pierres fines et précieuses, perles et métaux précieux a ouvert un compte courant professionnel dans les livres de la Caisse d'épargne et de prévoyance Île-de-France le 14 avril 2011.

Suivant convention en date du 14 juin 2011, la Caisse d'épargne et de prévoyance Île-de-France a consenti à la société Lorenza Paris joaillerie haute couture un prêt d'un montant de 140 000 euros, d'une durée de 84 mois, remboursable au taux nominal fixe de 4,30 % l'an par échéances mensuelles de 2 050,91 euros, après une période de préfinancement de 3 mois et une période de différé d'amortissement de 4 mois et ce, afin de " post " financer l'acquisition d'un pas de porte de locaux commerciaux destinés à l'exploitation d'un fonds de commerce de joaillerie <adresse>.

Le prêt a été garanti à hauteur de 35 % par OSEO garantie régions et également à hauteur de 35 % par OSEO garantie.

Mme X et M. Y se sont portés caution personnelle et solidaire de ce même prêt par actes séparés du 14 juin 2011 chacun à hauteur de 15 % de son montant, outre les intérêts et les pénalités, soit dans la limite de la somme de 27 300 euros pour une durée de 111 mois.

Le 28 juin 2012, la Caisse d'épargne et de prévoyance Île-de-France a accordé à la société Lorenza Paris joaillerie haute couture une autorisation de découvert d'un montant de 30 000 euros, au taux d'intérêt de 12,60 % l'an, pour une durée indéterminée à compter de cette date, chacune des parties ayant la faculté de dénoncer cette convention par courrier recommandé avec accusé de réception sous réserve de respecter un préavis de 60 jours.

Par acte sous seing privé en date du 18 décembre 2012, Mme X s'est portée caution personnelle et solidaire de toutes sommes dues par la société Lorenza Paris joaillerie haute couture à la Caisse d'épargne et de prévoyance Île-de-France dans la limite de 39 000 euros couvrant le paiement du principal, des intérêts et le cas échéant des pénalités ou intérêts de retard pour une durée de 14 mois, soit jusqu'au 1er février 2014.

A compter du 27 avril 2011, la société Lorenza Paris joaillerie haute couture a bénéficié auprès de la Caisse d'épargne et de prévoyance Île-de-France d'un contrat de prestations de services monétiques lui permettant de bénéficier d'un système de paiement par carte bancaire de proximité qui a été étendu par convention du 21 octobre 2013 à un système de paiement à distance par carte bancaire CB ou agrées CB, outre la location d'un terminal de paiement électronique (TPE) sans et avec contact.

Par courrier recommandé avec avis de réception en date du 20 janvier 2014, la Caisse d'épargne et de prévoyance Île-de-France a informé la société Lorenza Paris joaillerie haute couture de sa décision de mettre un terme au " contrat monétique " avec effet au 27 janvier 2014 en raison d'incidents de paiement intervenus sur plusieurs règlements effectués au profit de la société émanant de cartes bancaires volées et ces opérations étant contrepassées par la banque au débit du compte de sa cliente.

Le 27 janvier 2014, la société Lorenza Paris joaillerie haute couture a déposé plainte par l'intermédiaire de sa gérante, Mme X, pour des faits d'escroquerie en bande organisée et utilisation frauduleuse de carte bancaire commis à son préjudice entre le 11 et le 21 décembre 2013 pour un montant total 24 085 euros pouvant atteindre la somme de 60 630 euros, correspondant au total des transactions effectuées par un intermédiaire dénommé Edy s'étant présenté comme représentant une conciergerie de luxe à Londres chargée d'effectuer des achats de bijoux pour différents clients étrangers.

Par courrier recommandé en date du 31 mars 2014, la Caisse d'épargne et de prévoyance Île-de-France a mis en demeure Mme X en sa qualité de caution de lui régler la somme de 18 296,95 euros correspondant au solde débiteur du compte courant au 1er février 2014.

Par courriers recommandés en date du 31 juillet 2014, la Caisse d'épargne et de prévoyance Île-de-France a mis en demeure la société Lorenza Paris joaillerie haute couture de lui régler la somme de 73 343,27 euros au titre du solde débiteur de son compte courant et celle de 14 652,38 euros au titre des échéance impayées du prêt sous quinze jours à défaut de quoi la déchéance du terme interviendrait et la somme de 101 766,64 serait exigible au titre du solde de ce prêt.

Par courriers recommandés du même jour, la Caisse d'épargne et de prévoyance Île-de-France a également mis en demeure les deux cautions personnes physiques, Mme X et M. Y, de lui régler les sommes réclamées au titre du prêt, dans la limite de leur engagement de caution.

Par acte d'huissier de justice en date des 5 septembre 2014 pour la société Lorenza Paris joaillerie haute couture et des 12 et 16 septembre 2014 pour Mme X et M. Y, la Caisse d'épargne et de prévoyance Île-de-France a saisi le Tribunal de commerce de Paris.

Par jugement réputé contradictoire en date du 7 décembre 2015, les deux cautions n'ayant pas comparu, le Tribunal de commerce de Paris a :

- condamné la société Lorenza Paris joaillerie haute couture à payer à la Caisse d'épargne et de prévoyance Île-de-France la somme de 73 343,27 euros, outre intérêts au taux conventionnel de 12,6 % à compter du 31 juillet 2014 mais a débouté la banque de sa demande de condamnation dirigée contre Mme X, en sa qualité de caution, au motif que la garantie donnée par celle-ci jusqu'au 1er février 2014 avait expiré lors de sa mise en demeure,

- condamné la société Lorenza Paris joaillerie haute couture, solidairement avec Mme X et M. Y à hauteur de 27 300 euros chacun, à payer à la Caisse d'épargne et de prévoyance Île-de-France la somme de 101 766,64 euros avec intérêts au taux conventionnel de 7,30 %, intérêts de retard inclus, à dater du 31 juillet 2014,

- ordonné la capitalisation des intérêts,

- condamné la société Lorenza Paris joaillerie haute couture a payer la somme de 3 000 euros à la Caisse d'épargne et de prévoyance Île-de-France en application de l'article 700 du Code de procédure civile,

- débouté la Caisse d'épargne et de prévoyance Île-de-France du surplus de ses demandes, condamné la société Lorenza Paris joaillerie haute couture aux dépens.

Par déclaration remise au greffe de la cour le 14 janvier 2016, la société Lorenza Paris joaillerie haute couture a interjeté appel de ce jugement.

Mme X et M. Y n'ayant pas constitué avocat, elle leur a signifié sa déclaration d'appel à étude le 23 mars 2016 pour Mme X et suivant les modalités de l'article 659 du Code de procédure civile pour M. Y, le 24 mars 2016.

Dans ses dernières conclusions notifiées le 13 avril 2016, la société Lorenza Paris joaillerie haute couture demande à la cour de :

- infirmer le jugement en date du 7 décembre 2015 dans toutes ses dispositions,

- rejeter toutes conclusions contraires,

- statuant à nouveau, débouter la Caisse d'épargne et de prévoyance Île-de-France de toutes ses demandes,

condamner la Caisse d'épargne et de prévoyance Île-de-France à lui payer la somme de 10000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile.

La société Lorenza Paris joaillerie haute couture fait valoir que :

Concernant le solde débiteur du compte courant qui lui est réclamé,

- la Caisse d'épargne et de prévoyance Île-de-France n'a pas porté au crédit du compte de la société un chèque d'un montant de 23 000 euros pourtant établi par sa gérante dès le 10 janvier 2014 afin de régulariser le découvert non autorisé signalé par la banque,

- la Caisse d'épargne et de prévoyance Île-de-France a contribué à ce découvert en contrepassant, sans avertir sa cliente, dès le 23 décembre 2013, des paiements intervenus par carte bancaire réalisés à distance qui se seraient révélés frappés d'opposition par les titulaires de ces moyens de paiement car frauduleux alors même qu'ils avaient été autorisés par le biais du terminal de paiement électronique, la banque annulant ainsi des encaissements pour un montant total 62 564,27 euros alors même que les crédits enregistrés à ce titre étaient au total de 60 630 euros, soit un différentiel inexpliqué de 1 934,2 euros et a contrepassé également pour un montant de 22 440 euros les paiements reçus de Mme A, cliente ayant réglé en boutique par carte bancaire des achats dans des conditions parfaitement régulières, pour un montant total de 25 420 euros,

- les stipulations du contrat de prestations de services monétiques invoquées par la Caisse d'épargne et de prévoyance Île-de-France au titre desquelles elle ne devrait aucune garantie à sa cliente pour ces paiements frauduleux à distance qui ont pourtant reçu une autorisation de sa part créent un déséquilibre significatif entre les droits obligations des parties au sens de l'article L. 442-6 du Code de commerce qui engage la responsabilité de la banque,

- la Caisse d'épargne et de prévoyance Île-de-France a également manqué à son obligation de conseil en s'abstenant d'avertir la société Lorenza Paris joaillerie haute couture des risques encourus du fait des différents concours financiers qu'elle a accordés tenant au prêt d'un montant de 140 000 euros de 2011, à une autorisation de découvert d'un montant de 30 000 euros de 2012 et aux contrats TPE avec paiement à distance, notamment sur les conséquences en cas d'impayés par le TPE sur le bon remboursement des échéances du prêt,

Concernant le solde du prêt,

- les échéances étaient payées par prélèvement sur le compte courant devenu débiteur suite aux achats frauduleux, cette inexécution n'est pas fautive mais relève d'un cas de force majeure de sorte que la Caisse d'épargne et de prévoyance Île-de-France n'est pas en droit de prononcer la déchéance du terme,

- la société Lorenza Paris joaillerie haute couture aurait pu reprendre le paiement des échéances après avoir fait intervenir les assurances interbancaires permettant de la dédommager.

La société Lorenza Paris joaillerie haute couture n'ayant pas fait signifier ses conclusions d'appelante à Mme X et à M. Y, par ordonnance en date du 28 juin 2016, le magistrat chargé de la mise en état a prononcé la caducité partielle de la déclaration d'appel uniquement à l'égard de Mme X et de M. Y et a constaté que l'instance se poursuivait entre la société Lorenza Paris joaillerie haute couture et la Caisse d'épargne et de prévoyance Île-de-France.

Dans ses dernières écritures notifiées le 6 juin 2016 et signifiées à étude, le 9 juin 2016, à l'encontre de Mme X et suivant les modalités de l'article 659 du Code de procédure civile, le 7 juin 2016, à l'encontre de M. Y, la Caisse d'épargne et de prévoyance Île-de-France demande à la cour de :

- confirmer le jugement rendu le 7 décembre 2015 par le Tribunal de commerce de Paris en ce qu'il a :

- condamné la société Lorenza Paris Joaillerie Haute Couture à payer à la Caisse d'Epargne et de Prévoyance Île-de-France la somme de 73 343,27€, outre les intérêts au taux conventionnel de 12,60 % à compter du 31 juillet 2014,

- condamné la société Lorenza Paris Joaillerie Haute Couture, solidairement avec les cautions Madame X et Monsieur Y à hauteur de 27 300 € chacun, à payer à la Caisse d'Epargne et de Prévoyance Île-de-France la somme de 101 766,64 € en principal outre les intérêts au taux conventionnel de 7,30 % intérêts de retard inclus à dater du 31 juillet 2014,

- ordonné la capitalisation des intérêts à date du 19 septembre 2014,

- condamné la société Lorenza Paris Joaillerie Haute Couture à payer à la Caisse d'Epargne et de Prévoyance Île-de-France la somme de 3 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- condamné la société Lorenza Paris Joaillerie Haute Couture aux dépens.

- infirmer le jugement rendu le 7 décembre 2015 par le Tribunal de commerce de Paris en ce qu'il a débouté la Caisse d'Epargne et de Prévoyance Île-de-France de sa demande tendant à la condamnation de Madame X à payer le solde débiteur du compte de la société Lorenza dans la limite de son engagement de caution correspondant.

Statuant à nouveau :

- condamner solidairement la société Lorenza Paris Joaillerie Haute Couture et Madame X, cette dernière dans la limite de son engagement de caution à hauteur de 39 000 €, à payer à la Caisse d'Epargne et de Prévoyance Île-de-France, au titre du compte courant n° 90000 08 0021290 73, la somme de 73 343,27 €, outre les intérêts au taux contractuel de 12,60 % à compter du 31 juillet 2014, date de la mise en demeure.

- dire que les intérêts produits seront capitalisés chaque année pour produire à leur tour intérêts, conformément à l'article 1154 du Code civil.

- débouter la société Lorenza Paris Joaillerie Haute Couture Madame X, et Monsieur Y de leurs demandes.

- condamner solidairement la société Lorenza Paris Joaillerie Haute Couture Madame X, et Monsieur Y à payer à la Caisse d'Epargne et de Prévoyance Île-de-France la somme de 5 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

- condamner solidairement la société Lorenza Paris Joaillerie Haute Couture Madame X, et Monsieur Haroutioun Y aux entiers dépens.

La Caisse d'épargne et de prévoyance Île-de-France fait valoir que :

- aux termes du contrat TPE et du contrat monétique commerçant conclus avec la société Lorenza Paris joaillerie haute couture, elle ne doit pas de garantie à sa cliente commerçante au titre de paiements frauduleux réalisés par carte bancaire à distance, aucune obligation n'ayant été contractée en ce sens entre les parties et la loi ne protégeant pas le commerçant bénéficiaire des paiements par carte bancaire comme elle le fait pour le porteur de la carte débitée,

- si la société Lorenza Paris joaillerie haute couture a été victime des agissements d'un tiers qui a procédé à des achats avec des cartes bancaires, la Caisse d'épargne et de prévoyance Île-de-France y est étrangère et n'a pas à supporter ce risque qui pèse sur le commerçant d'autant, qu'en l'espèce, la société Lorenza Paris joaillerie haute couture n'est pas respecté l'ensemble des mesures de sécurité édictées au contrat de prestation de services monétiques, la banque étant légitime à contrepasser les opérations qui n'ont pu être valablement encaissées,

- le fait que la victime d'une infraction pénale en subisse les conséquences et que ce préjudice ne soit pas " couvert " par la banque ne crée pas un déséquilibre significatif, au sens des dispositions du Code de commerce ,

- le chèque d'un montant de 23 000 euros a été encaissé par la gérante de la société Lorenza Paris joaillerie haute couture sur son propre compte personnel et si une erreur a été commise c'est sur instructions de Mme X qui a rempli le bordereau de remise de chèque et qui, en tout état de cause aurait pu ensuite transférer les fonds sur le compte courant de la société,

- la société Lorenza Paris joaillerie haute couture ne rapporte pas la preuve du différentiel invoqué entre les crédits encaissés s'étant avérés frauduleux et les montants contrepassés par la banque,

- elle a annulé les paiements effectués par Mme A car les mesures de sécurité n'ont pas été respectées, la signature manuscrite de la cliente n'ayant pas été vérifiée,

- le tribunal a estimé à tort que le cautionnement de Mme X souscrit le 18 décembre 2012 pour une durée de 14 mois, dans la limite de 39 000 euros, ne pouvait être mis en œuvre, faute de mise en demeure adressée à la caution avant le 1er février 2014 alors que la caution est tenue, au terme de son engagement, de garantir toutes sommes dues par le débiteur au cours de sa durée de validité de sa garantie, peu important la date à laquelle le créancier en demande le paiement et en poursuit le recouvrement,

- la déchéance du terme du prêt est régulière, la société Lorenza Paris joaillerie haute couture ayant été défaillante dans le paiement des échéances de remboursement et ne pouvant valablement invoquer un cas de force majeure, même si elle a été victime d'une infraction, d'autant que ses manquements fautifs ont concouru à son préjudice et qu'elle n'a pas donné suite aux demandes de régularisation adressées en juillet 2014 par l'établissement prêteur.

L'ordonnance de clôture a été rendue le16 janvier 2018.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la demande en paiement au titre du solde débiteur du compte courant

Il résulte des conditions particulières et générales de la convention " monétique commerçant " signée par Mme X en sa qualité de gérante de la société Lorenza Paris joaillerie haute couture le 21 novembre 2011, qui a étendu les services fournis par la banque aux paiements par carte bancaire à distance, que la société Lorenza Paris joaillerie haute couture n'a pas souscrit au système " paiement à distance sécurisé " qui prévoit une garantie des paiements par l'établissement bancaire.

Or, il est clairement stipulé que les opérations de paiement à distance réalisés, sans cette option, même s'ils ont été autorisées et réalisées conformément aux mesures de sécurité, ne sont réglées par la Caisse d'épargne et de prévoyance Île-de-France que sous réserve d'une " bonne fin d'encaissement ".

De plus, la clause 5 intitulée " Débit en cas d'opérations non garanties " des conditions particulières du contrat prévoit que la société Lorenza Paris joaillerie haute couture autorise expressément la Caisse d'épargne et de prévoyance Île-de-France " à débiter d'office son compte du montant de toute opération de paiement non garantie n'ayant pu être imputée au compte sur lequel la carte fonctionne. "

Dans ces conditions, la société Lorenza Paris joaillerie haute couture ne peut faire grief à la Caisse d'épargne et de prévoyance Île-de-France ni d'avoir contrepassé les achats par carte bancaire qui ont fait l'objet d'une opposition de leur titulaire en raison de d'utilisation frauduleuse ni de ne pas l'en avoir avertie préalablement.

Par ailleurs, il résulte de l'article L. 442-6 2° du Code de commerce que le fait par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers de soumettre ou de tenter de soumettre un partenaire commercial à des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties, engage sa responsabilité et l'oblige à réparer le préjudice causé.

Néanmoins, en l'espèce, le fait que le contrat monétique commerçant conclu par la société Lorenza Paris joaillerie haute couture lui fasse assumer le risque lié à des paiements frauduleux reçus de ses clients par carte bancaire à distance ou en boutique ne crée pas un déséquilibre significatif au sens de ce texte alors qu'en sa qualité de commerçant, professionnel bénéficiant des paiements, elle ne bénéficie pas, à la différence du porteur de la carte débitée d'une protection légale contre l'utilisation frauduleuse d'un tel moyen de paiement et supporte donc, comme pour les autres moyens de paiement le risque d'impayé qui pourrait en résulter et qui n'est pas plus du fait de la banque, sauf à avoir contracté avec celle-ci une garantie conventionnelle en ce sens.

Concernant le montant du solde débiteur réclamé, il résulte des pièces produites qu'à la suite d'un courrier électronique du 13 janvier 2014 de la banque informant la société Lorenza Paris joaillerie haute couture d'une interdiction d'émettre des chèques en raison d'un découvert de plus de 3 000 euros n'ayant pas permis d'honorer un chèque de 20 000 euros tiré sur son compte, la société Lorenza Paris joaillerie haute couture a établi un chèque d'un montant de 23 000 euros le 10 janvier 2014.

Néanmoins, ce chèque n'a pas été déposé sur son compte courant, le bordereau produit aux débats mentionnant qu'il l'a été sur le compte bancaire de Mme X sans que la société ne rapporte la preuve que cet encaissement sur le compte personnel de sa gérante résulte d'une erreur commise par la banque et sans justifier non plus que cette somme ait été retransférée par la suite sur son compte, le solde débiteur continuant de s'aggraver en raison, notamment, de paiements par carte bancaire enregistrés en décembre 2013 et contrepassés en février 2014 par la banque du fait de leur caractère frauduleux.

De même, la société Lorenza Paris joaillerie haute couture ne justifie pas d'une différence entre les achats frauduleux portés au crédit de son compte et les contrepassations effectuées par la banque.

En effet, les paiements litigieux mentionnés dans le tableau récapitulatif qu'elle produit n'apparaissent pas tous sur l'historique du compte versé aux débats par la banque et des frais de régularisation ont été prélevés à l'occasion des régularisations effectuées.

Enfin, la Caisse d'épargne et de prévoyance Île-de-France précise que les paiements par carte bancaire effectués en boutique par Mme A le 31 décembre 2013 ont été contrepassés pour un montant total de 22 440 euros car la carte bancaire utilisée a fait l'objet d'une opposition pour vol.

Or, il résulte de la clause 5.1 des conditions générales du contrat monétique commerçant que le risque d'impayé pèse, pour les paiements dits de proximité, sur le commerçant s'il n'a pas respecté l'une des mesures de sécurité, chaque mesure étant indépendante et l'autorisation donnée par le serveur ne valant garantie que sous réserve du respect des autres mesures de sécurité, la clause 6.2.6 imposant ainsi de faire signer le ticket TPE pour les transactions supérieures à 1 500 euros et la clause suivante précisant que lorsque la signature est requise et que la carte ne comporte pas le panonceau de signature, le commerçant doit vérifier la conformité de la signature utilisée avec celle qui figure sur la pièce d'identité présentée par le titulaire de la carte.

En l'espèce, la société Lorenza Paris joaillerie haute couture produit pour les achats effectués par cette cliente des tickets de débit portant une signature mais ni la photocopie du permis de conduire de cette personne, domiciliée à Kuala Lumpur, ni la déclaration d'exportation au service des Douanes à renseigner par la société venderesse et l'acheteur versées aux débats ne comportent la signature de Mme A de sorte que la société Lorenza Paris joaillerie haute couture ne démontre pas qu'elle a vérifié, comme elle y était tenue par le contrat monétique commerçant, l'authenticité de la signature manuscrite du titulaire de la carte bancaire déclarée volée ayant servi aux paiements.

Dans ces conditions, la Caisse d'épargne et de prévoyance Île-de-France justifie d'un solde débiteur du compte courant de la société Lorenza Paris joaillerie haute couture à concurrence de 71 663,93 euros au 7 mai 2014, porté à la somme de 73 743,27 euros au 31 juillet 2014 date de la mise en demeure.

Sur le cautionnement de Mme X au titre du solde débiteur du compte courant

L'engagement de caution personnelle et solidaire souscrit par Mme X le 18 décembre 2012 dans la limite de la somme de 39 000 euros pour une durée de 14 mois, il est stipulé que ce cautionnement expire le 1er février 2014.

La clause II précise que : " ... , l'arrivée du terme n'emportant décharge de la Caution qu'à la suite du paiement effectif par cette dernière des sommes dues, pendant la durée du Cautionnement, par le Débiteur principal à la Caisse d'Epargne. " mais également que : " Ce cautionnement couvrira alors tous les engagements nés avant la date d'expiration du présent cautionnement, en principal, y compris ceux dont les échéances et exigibilités seront postérieures à cette date, ainsi que les intérêts, commissions, frais et accessoires, pénalités et intérêts de retard courus à la date d'expiration du cautionnement. "

Ainsi, aux termes de cet engagement, Mme X est tenue, en sa qualité de caution à garantir les sommes dues à la banque au titre du solde débiteur du compte courant de la société Lorenza Paris joaillerie haute couture à la date de l'expiration de son engagement soit au 1er février 2014, à savoir la somme de 18 296,95 euros, outre intérêts au taux conventionnel de 12,60 % l'an à compter du 31 juillet 2014, comme demandé par la banque et dans la limite de la somme de 39 000 euros, peu important que la demande en paiement de la banque soit intervenue postérieurement à l'expiration de son cautionnement.

Le jugement déféré est donc infirmé en ce qu'il a rejeté la demande de condamnation de Mme X en sa qualité de caution à concurrence de cette somme, Mme X n'étant pas tenue, en revanche à garantir des opérations inscrites au débit du compte courant de la société Lorenza Paris joaillerie haute couture postérieurement au 1er février 2014 même si elles résultent principalement de régularisations effectuées par la Caisse d'épargne et de prévoyance Île-de-France sur les paiements frauduleux par carte bancaire du mois de décembre 2013.

Sur la demande en paiement au titre du solde du prêt

La défaillance de la société Lorenza Paris joaillerie haute couture dans le paiement des échéances du prêt est établie et le fait que le défaut de provision du compte courant sur lequel elles étaient prélevées par la Caisse d'épargne et de prévoyance Île-de-France résulte de paiement frauduleux dont auraient été victime la société Lorenza Paris joaillerie haute couture ne présente pas le caractère de la force majeure.

Elle admet d'ailleurs qu'elle aurait pu solliciter la mise en jeu d'une assurance si elle avait bénéficié de délais pour régulariser sa situation entre janvier et juillet 2014.

En outre, il résulte d'une pièce produite aux débats par la Caisse d'épargne et de prévoyance Île-de-France qu'à la suite de la plainte déposée le 27 janvier 2014 par Mme X, une information judiciaire a été ouverte et qu'elle a été mise en examen.

Enfin, la société Lorenza Paris joaillerie haute couture ne rapporte pas la preuve d'un manquement de la Caisse d'épargne et de prévoyance Île-de-France à une obligation de conseil, non spécifiquement contractée, concernant un risque d'impayés du système de paiement à distance par carte bancaire et de ses conséquences sur le remboursement des échéances du prêt alors qu'il ressort clairement du contrat monétique qu'elle pouvait être amenée à supporter un tel risque et qu'elle n'ignorait pas que les échéances du prêt étaient prélevées sur le même compte courant.

Là encore, aucune faute n'est imputable à la Caisse d'épargne et de prévoyance Île-de-France.

Sur les demandes accessoires

Par ailleurs, le jugement est confirmé en ses dispositions relatives aux dépens et à l'article 700 du Code de procédure civile.

La société Lorenza Paris joaillerie haute couture, qui succombe en appel, supportera les dépens d'appel et ses frais irrépétibles.

En application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, il est inéquitable de laisser à la charge de la Caisse d'épargne et de prévoyance Île-de-France les frais non compris dans les dépens exposés en appel et il convient de condamner la société Lorenza Paris joaillerie haute couture à lui payer la somme de 3 000 euros à ce titre.

Par ces motifs, Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a rejeté la demande de condamnation solidaire de Mme X, en sa qualité de caution, avec la société Lorenza Paris joaillerie haute couture au titre du solde débiteur du compte courant, Statuant à nouveau de ce chef, Condamne la société Lorenza Paris joaillerie haute couture à payer à la Caisse d'épargne et de prévoyance Île-de-France la somme de 73 343,27 euros avec intérêts aux taux de 12,60 % l'an à compter du 31 juillet 2014 dont la somme de 18 296,95 euros avec intérêts au taux de 12,60 % à compter du 31 juillet 2014, solidairement avec Mme X, en sa qualité de caution, dans la limite de son engagement de 39 000 euros, Y ajoutant, Condamne la société Lorenza Paris joaillerie haute couture aux dépens d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile. Condamne la société Lorenza Paris joaillerie haute couture à payer à la Caisse d'épargne et de prévoyance Île-de-France la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile.