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Décisions

CA Toulouse, 1re ch. sect. 1, 4 juin 2018, n° 16-01280

TOULOUSE

Arrêt

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Bélières

Conseillers :

Rouger, Muller

TGI Toulouse, du 19 janv. 2016

19 janvier 2016

EXPOSÉ DU LITIGE

En vertu de permis de construire délivrés, l'un le 31 octobre 2000 pour l'édification d'un centre de remise en forme et modifié à plusieurs reprises, l'autre le 11 septembre 2003 pour l'édification d'une résidence services, la SARL Capitole Patrimoine du groupe Home Hôtel a entrepris la réalisation au [...] d'un programme immobilier dénommé " Résidence-Balnéo Les Trois Cannelles " comprenant cinq bâtiments, dont le bâtiment E à usage de balnéothérapie, avant de se voir étendre le 17 mai 2004 la procédure de redressement judiciaire ouverte le 27 octobre 2003 à l'égard de la SCI Les Terrasses de Charlary.

La SCCV Les Cannelles, immatriculée au RCS de Toulouse le 9 décembre 2003 sous le numéro 451 157 085, a acquis le terrain, cadastré section D n° 854 et 856 pour une contenance de 1 ha 33 a 21 ca, de la SARL l'Amalbert Investissement le 14 janvier 2004 et, le chantier ayant été déclaré ouvert depuis le 19 janvier 2004, elle a poursuivi la réalisation de l'ensemble immobilier qui a été soumis au régime de la copropriété selon règlement contenant état descriptif de division reçu en la forme authentique le 7 février 2004.

À la suite d'un démarchage téléphonique par un conseiller en patrimoine de la SARL P3 Consultants, M. Olivier S. et son épouse Mme Corinne B., domiciliés en Suisse, ont réalisé un investissement locatif dans cette résidence ouvrant droit à défiscalisation dans le cadre du régime loueur en meublé non professionnel (LMNP), selon les modalités suivantes :

- suivant contrat de réservation préliminaire sous seing privé conclu le 23 septembre 2003 avec la SARL Capitole Patrimoine et acte authentique de vente passé le 10 mars 2004 avec la SCCV Les Cannelles devant Me Xavier G., notaire associé à Caraman, ils ont acquis en l'état futur d'achèvement un appartement de type 2 avec terrasse situé au rez-de-chaussée du bâtiment C et une place de parking non couverte, constituant les lots n° 42 et 125 de la copropriété, ce au prix de 108 030 euros TTC, frais compris, sans avoir versé de dépôt de garantie

- selon offre préalable acceptée le 11 décembre 2003 et acte authentique de prêt reçu le 23 février 2004 par Me Denis T., notaire associé à Nice, ils ont souscrit auprès de la SA Crédit Immobilier de France Financière Rhône-Ain (CIFFRA) un prêt " Investimmo 02 révisable " d'un montant de 109 549 euros et d'une durée de 180 mois destiné à financer intégralement cette acquisition, remboursable in fine à taux d'intérêt révisable et garanti notamment par l'adhésion de M. Olivier S. au contrat d'assurance collectif conclu par le prêteur auprès des SA CNP Assurances et CNP Invalidité Accident Maladie (CNP IAM), par l'affectation hypothécaire du bien et par le nantissement d'un contrat d'assurance vie à capital variable Horizons souscrit auprès de la SA Optimum Vie à effet du 10 octobre 2003

- lors de la signature du contrat de réservation, ils ont donné le lot n° 42 à bail à titre commercial pour neuf ans à la Société de gestion Les Trois Cannelles en cours de constitution représentée par M. Paul B., également gérant de la SARL Capitole Patrimoine, en vue d'y exercer une activité de prestations para-hôtelières incluant la sous-location meublée du logement, le nettoyage des locaux, la distribution de petits-déjeuners, la fourniture de linge de maison et l'accueil-gardiennage moyennant un loyer annuel de 6 323 euros HT en déclarant opter pour l'assujettissement à la TVA.

Après achèvement des travaux des appartements, le bien a été livré aux acquéreurs le 28 avril 2005, mais le bâtiment de balnéothérapie n'a jamais été édifié.

La SARL Valgo Résidences, à laquelle le droit au bail a été cédé le 21 mars 2007 à effet rétroactif du 27 octobre 2005 par le mandataire liquidateur de M. Paul B., a à son tour été placée en redressement judiciaire le 31 juillet 2008, son administrateur judiciaire a résilié le bail commercial le 26 septembre 2008 à effet du 31 octobre 2008, la résidence a été vidée de ses occupants fin 2008, puis transformée en résidence à usage d'habitation classique, mais le logement est resté vacant et, en l'absence d'activité para-hôtelière ouvrant droit à défiscalisation depuis cette date, M. Olivier S. s'est vu notifier le 29 avril 2011 par l'administration fiscale une proposition de rectification portant sur la somme de 28 949 euros, pénalités comprises, au titre du reversement de 16/20èmes de la TVA sur le prix d'acquisition, qui lui avait été remboursée pour un montant de 17 704 euros.

Entre-temps, la SCCV Les Cannelles a été radiée du RCS le 16 décembre 2008 après clôture des opérations de liquidation consécutives à sa dissolution anticipée décidée à compter du 30 septembre 2008.

Par actes d'huissiers en date des 17 et 18 juin 2013, les époux S. B. ont fait assigner M. Jean C. en qualité de mandataire ad hoc de la SCCV Les Cannelles, désigné à cette fin par ordonnance en date du 11 juin 2013, la SA Crédit Immobilier de France Rhône Alpes Auvergne (CIFRAA), la SA CNP Assurances et la SA CNP IAM devant le tribunal de grande instance de Toulouse en nullité de la vente et, subséquemment, nullité du prêt et résiliation de l'adhésion au contrat d'assurance pour dol et, à défaut, pour défaut de dépôt de garantie et, subsidiairement, en responsabilité du vendeur et réparation du préjudice subi.

Par jugement en date du 19 janvier 2016, le tribunal a dit que M. Jean C. n'est pas assigné ni partie à l'instance à titre personnel, débouté les consorts S. B. de leurs demandes, rejeté toutes les demandes indemnitaires formées à titre reconventionnel, déclaré le jugement commun au CIFD venu aux droits de la SA CIFRAA et à la CNP, dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du Code de procédure civile et condamné les consorts S. B. aux dépens.

Pour statuer ainsi, il a considéré que l'action en nullité était atteinte par la prescription quinquennale et que la responsabilité contractuelle du vendeur n'était pas engagée.

Suivant déclaration en date du 10 mars 2016, M. Olivier S. et Mme Corinne B. divorcée S. ont relevé appel général de ce jugement, avant de conclure le 8 juin 2016 dans le délai de trois mois imparti par l'article 908 du Code de procédure civile.

Dans leurs dernières conclusions (récapitulatives) notifiées par voie électronique les 15 et 24 janvier 2018, ils demandent à la cour, infirmant le jugement dont appel en ce qu'il les a déboutés de leurs demandes, au visa des articles 1116, 1154, 2222 et 1382 du Code civil et L. 261-15 du Code de la construction et de l'habitation, de :

- à titre principal, dire et juger leur action en nullité pour dol recevable, fixer le point de départ de cette action au 30 septembre 2008, dire et juger que leur consentement a été surpris par dol et, en conséquence, prononcer la nullité de l'acte authentique de vente du 10 mars 2004

- à titre subsidiaire, si la cour considère qu'aucun dol n'est caractérisé, dire et juger que le contrat de réservation du 21 avril 2004 (sic) contrevient aux dispositions impératives de l'article L. 261-15 du Code de la construction et l'habitation en l'absence de paiement d'un dépôt de garantie et que leur demande est recevable et, en conséquence, prononcer la nullité du contrat de réservation du 23 septembre 2004 (sic) et de l'acte authentique de vente du 10 mars 2004

- dans l'un et l'autre cas, ordonner la publication de l'arrêt au service de la publicité foncière de Toulouse, prononcer la nullité et, à tout le moins, la résolution de l'acte authentique de prêt conclu avec le CIFD venant aux droits du CIFRAA, ordonner la résiliation de leurs adhésions au contrat d'assurance collectif souscrit auprès des sociétés CNP Assurances et CNP IAM, dire et juger, en conséquence des nullités/résolutions prononcées, que les parties devront être remises en l'état, que le prix de vente d'un montant de 108 030 euros devra leur être restitué par la SCCV Les Cannelles prise en la personne de son administrateur ad hoc M. Jean C., avec intérêts au taux légal à compter de l'arrêt à intervenir et capitalisation dans les conditions de l'article 1154 du Code civil, qu'ils ne devront transférer à cette société la propriété du bien immobilier litigieux qu'après l'arrêt des sommes dues par celle-ci, qu'ils devront restituer au CIFD les sommes mises à leur disposition, soit au total 109 549 euros, que celui-ci devra leur restituer le montant du capital, des intérêts, frais et accessoires de toute nature acquittés par eux à la date de l'arrêt à intervenir et que la SCCV Les Cannelles sera condamnée à les relever et garantir des restitutions précitées et dire et juger que l'annulation de la vente laisse subsister pour eux un préjudice qui sera réparé par la condamnation de la SCCV Les Cannelles prise en la personne de son administrateur ad hoc M. Jean C. à leur payer, à titre de dommages et intérêts, les sommes de 2 000 euros au titre des peines et soins et de 10 000 euros au titre du préjudice moral, avec intérêts aux taux légal à compter de l'arrêt à intervenir et capitalisation dans les conditions de l'article 1154 du Code civil

- à titre plus subsidiaire, si la cour considère qu'il n'y a pas lieu d'ordonner la nullité de la vente, dire et juger que des manquements fautifs les ont privés de la perte de chance (sic) de n'avoir pas contracté l'opération litigieuse et sont aussi à l'origine d'un important préjudice moral et, en conséquence, condamner la SCCV Les Cannelles prise à la personne de son administrateur ad hoc M. Jean C. au paiement, à titre de dommages et intérêts, des sommes de 105 429 euros en réparation de la perte de chance et de 15 000 euros en réparation du préjudice moral, avec intérêts au taux légal à compter de l'arrêt à intervenir et capitalisation dans les conditions de l'article 1154 du Code civil

- en tout état de cause, condamner la SCCV Les Cannelles prise en la personne de son administrateur ad hoc M. Jean C. au paiement de la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens, ordonner l'exécution provisoire sur les condamnations indemnitaires à intervenir, déclarer les intimés infondés en leurs appels incidents et les débouter de toutes leurs demandes.

Dans ses dernières conclusions (n° 2 responsives et récapitulatives) notifiées par voie électronique le 29 septembre 2016, M. Jean C. en qualité d'administrateur ad hoc de la SCCV Les Cannelles demande à la cour, au visa des articles 122 du Code de procédure civile, 1304 et 2248 du Code civil et L. 261-15 du Code de la construction et de l'habitation, de confirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions, de déclarer prescrite l'action engagée par M. S. et Mme B. et, en toute hypothèse, de débouter ceux-ci de leurs demandes, notamment indemnitaires, de débouter le CIFD de ses demandes dirigées contre la SCCV Les Cannelles et de condamner M. S. et Mme B. à lui verser la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

Dans ses dernières conclusions (récapitulatives avec intervention volontaire) notifiées par voie électronique le 12 juillet 2017, la SA CIFD venant aux droits de la SA CIFRAA par fusion absorption demande à la cour, au visa des articles 1109 et 1304 anciens (devenus 1130, 1144, 1147, 1152 et 2224) du Code civil, de dire et juger recevable son intervention volontaire, de confirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions, notamment en ce qu'il a déclaré prescrite l'action en nullité du contrat de vente entraînant celle du contrat de prêt souscrits par M. S. et Mme B., subsidiairement, en cas de nullité de la vente entraînant celle du prêt, de condamner in solidum M. S. et Mme B. et la SCCV Les Cannelles prise en la personne de son administrateur ad hoc à lui payer la somme empruntée de 109 549 euros, avec intérêts au taux légal depuis la mise à disposition des fonds ou, à défaut, depuis la signification des premières conclusions devant le tribunal en date du 26 novembre 2013 conformément à l'article 1153 ancien (devenu 1231-6) du Code civil, mais sous déduction de l'ensemble des sommes payées au titre des intérêts et des frais du prêt in fine par les emprunteurs, ce par compensation conformément aux articles 1289 ancien (devenu 1347) et suivants du Code civil, de dire et juger que l'inscription de privilège de prêteur de deniers et d'hypothèque conventionnelle publiée à Toulouse le 16 avril 2004, volume 2004 V n° 2134, sur les lots n° 42 (appartement) et 125 (parking) continuera de produire ses effets jusqu'à complet remboursement des sommes susvisées et de condamner la partie qui succombera aux entiers dépens de première instance et d'appel, ainsi qu'au paiement d'une indemnité de 3 000 euros par application de l'article 700 du Code de procédure civile.

Dans leurs dernières conclusions notifiées par voie électronique le 29 juillet 2016, la SA CNP Assurances et la SA CNP IAM demandent à la cour, au visa de l'article 1134 du Code civil, de constater qu'elles s'en rapportent quant au bien-fondé des demandes de M. S. et Mme B. et plus particulièrement de celles relatives à la résiliation de leur adhésion au contrat d'assurance, de dire et juger qu'elles ont exécuté de bonne foi leurs obligations contractuelles et de condamner la partie succombante à leur payer la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 30 janvier 2018.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la nullité pour dol

En droit, l'article 1116 ancien (devenu 1137) du Code civil dispose, en son alinéa 1er, que le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les manœuvres pratiquées par l'une des parties sont telles qu'il est évident que, sans ces manœuvres, l'autre partie n'aurait pas contracté et, en son alinéa 2, qu'il ne se présume pas et doit être prouvé.

Conformément à l'article 1304 ancien du même Code, l'action en nullité pour dol se prescrit par cinq ans à compter du jour où le dol a été découvert.

En l'espèce, le dol allégué a trait principalement à la non-réalisation de la balnéothérapie et accessoirement au contexte immobilier local.

Or, contrairement à ce qu'a considéré le premier juge, aucun élément ne démontre que les consorts S. B. aient pu avoir connaissance de ces difficultés avant la dissolution anticipée de la SCCV Les Cannelles le 30 septembre 2008 et la résiliation du bail commercial le 26 du même mois dans le cadre du redressement judiciaire de la SARL Valgo Résidences, une telle connaissance ne pouvant être déduite ni de l'acte authentique de vente du 10 mars 2004 qui ne fait pas état de la caducité du permis de construire n° 3146200CC030 délivré le 31 décembre 2000 en vue d'édifier un centre de remise en forme, mais rappelle au contraire la modification de ce permis obtenue le 11 septembre 2003 sous le numéro 3146202CC031, la confirmation du permis de construire n° 3146203CC010 délivré le 13 septembre 2003 en vue d'édifier une résidence services et le transfert de " ce permis " au profit du vendeur le 28 janvier 2004, ni de la livraison de leur appartement le 28 avril 2005, qui ne les obligeait pas à émettre de réserve sur l'absence de réalisation des installations de balnéothérapie et ne laissait pas présager que celles-ci ne seraient pas réalisées dans un second temps, ni de l'avenant au bail commercial et du nouveau bail régularisés le 13 décembre 2006 au profit de la SARL Valgo Résidences, qui ne laissait pas présager de la situation de vacance locative subie fin 2008 et ayant conduit les copropriétaires à décider en 2009 de transformer l'immeuble en résidence à usage d'habitation classique.

Dès lors, les consorts S. B. doivent être jugés recevables en leur action qui, engagée le 18 juin 2013 contre le mandataire ad hoc de la SCCV Les Cannelles, n'est pas atteinte par la prescription quinquennale, le jugement dont appel étant infirmé sur ce point.

Au fond, le dol peut être constitué par le silence d'une partie dissimulant à son cocontractant un fait qui, s'il avait été connu de lui, l'aurait empêché de contracter, à charge pour ce dernier de rapporter la preuve que l'auteur de cette réticence a eu l'intention de le tromper puisque le dol, supposant la conscience de la faute et la volonté de réaliser le dommage, ne se présume pas.

Certes, la SCCV Les Cannelles, qui vient aux droits de la SARL Capitole Patrimoine à laquelle elle s'est substituée en qualité de promoteur-vendeur dans tous ses droits et obligations, doit répondre du dol éventuellement commis par cette dernière au préjudice des acquéreurs.

En outre, dans la mesure où le bien vendu est présenté au contrat de réservation du 23 septembre 2003 comme situé dans la " Résidence-Balnéo Les Trois Cannelles " et où la procuration pour acquérir et emprunter du 9 février 2004 et l'acte authentique de vente en l'état futur d'achèvement du 10 mars 2004 font tous état du " bâtiment E désigné sur le plan Balnéothérapie ", les consorts S. B. justifient suffisamment que la réalisation du complexe de balnéothérapie, constituant un indiscutable atout pour la résidence, a été un élément déterminant de leur consentement, sans lequel ils n'auraient pas procédé à l'investissement litigieux, quand bien même ce bâtiment E restait défini au règlement de copropriété de la résidence Les Trois Cannelles du 7 février 2004 comme un simple " lot transitoire n° 149 ", correspondant à " un emplacement sur lequel pourra être édifié un bâtiment sur sous-sol, rez-de-chaussée et étage, sous réserve des autorisations administratives et des règlements en vigueur ".

Toutefois, ils échouent à rapporter la preuve du dol qu'ils allèguent à ce titre dès lors que la SCCV Les Cannelles a obtenu le transfert à son profit le 30 juillet 2004 du permis de construire n° 3146202CC031 concernant le complexe de balnéothérapie et de son dernier modificatif n° 3146203CC031 du 16 juillet 2004 relatif à l'implantation, l'aménagement intérieur et l'aspect extérieur du complexe, a affiché ce permis modifié sur le chantier comme constaté par huissier le 11 octobre 2004, a confié une étude géotechnique complémentaire à la SARL GFC en février 2005 et une mission de contrôle technique à la SA Bureau Veritas en janvier 2006 pour la construction du complexe et a participé en février 2006 à la recherche d'un exploitant pour le spa avec le maître d'œuvre et les sociétés Valgo Résidences, Les Sources d'Equilibre et Conseil Invest et justifie ainsi avoir, postérieurement à la vente, poursuivi sérieusement la réalisation du projet de balnéothérapie, ce qui exclut toute mensonge délibéré de sa part sur cette réalisation à laquelle elle a ensuite personnellement renoncé, ce au plus tard lors de sa dissolution anticipée.

Par ailleurs, l'unique extrait des chiffres clés publiés par l'INSEE en 2011 concernant l'évolution et la structure de la population ainsi que le logement à Rouffiac Tolosan n'est pas de nature à établir que le programme immobilier comprenant 59 appartements à usage d'habitation, 24 locaux potentiellement à usage professionnel ou commercial et 65 places de parking, outre le lot transitoire n° 149, était d'emblée inadapté à l'état du marché locatif local, ni a fortiori que le vendeur aurait volontairement omis de le préciser aux acquéreurs.

Les consorts S. B. ne peuvent donc qu'être déboutés de leur demande d'annulation de la vente et, subséquemment, du prêt fondé sur le dol.

Sur la nullité pour absence de dépôt de garantie

En droit, en matière de ventes d'immeuble à construire, l'article L. 261-15 du Code de la construction et de l'habitation, dans sa rédaction en vigueur à la date des faits, dispose que la vente peut être précédée d'un contrat préliminaire par lequel, en contrepartie d'un dépôt de garantie effectué à un compte spécial, le vendeur s'engage à réserver à un acheteur un immeuble ou une partie d'immeuble, que ce contrat doit comporter les indications essentielles relatives à la consistance de l'immeuble, à la qualité de la construction et aux délais d'exécution des travaux ainsi qu'à la consistance, à la situation et au prix du local réservé, que les fonds déposés en garantie sont indisponibles, incessibles et insaisissables jusqu'à la conclusion du contrat de vente et restitués, dans le délai de trois mois, au déposant si le contrat n'est pas conclu du fait du vendeur, si la condition suspensive prévue à l'article L. 312-16 du Code de la consommation n'est pas réalisée ou si le contrat proposé fait apparaître une différence anormale par rapport aux prévisions du contrat préliminaire et que toute autre promesse d'achat ou de vente est nulle.

Conformément à l'article 1304 ancien du Code civil, l'action en nullité pour inobservation des dispositions d'ordre public de protection du texte susvisé se prescrit par cinq ans à compter de l'acte entaché d'irrégularité.

En l'espèce, l'action engagée le 18 juin 2013 contre le mandataire ad hoc de la SCCV Les Cannelles, plus de cinq ans après la signature du contrat de réservation intervenue le 23 septembre 2003, et non le 21 avril 2004 ni le 23 septembre 2004, est prescrite.

Les consorts S. B. seront donc déclarés irrecevables en leur demande d'annulation tant du contrat de réservation que de la vente et, subséquemment, du prêt fondé sur l'absence de dépôt de garantie, le jugement dont appel étant réformé en ce qu'il a rejeté cette demande tout en retenant la prescription.

Sur la responsabilité du promoteur-vendeur

L'action en responsabilité intentée par l'acquéreur d'un bien immobilier contre son vendeur est soumise depuis le 19 juin 2008, date d'entrée en vigueur de la loi 2008-561 du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription en matière civile, à la nouvelle prescription quinquennale de droit commun prévue par l'actuel article 2224 du Code civil, qui a réduit le délai de prescription antérieurement applicable, fixé à trente ans par l'ancien article 2262 du même Code si l'on considère qu'il s'agit d'une action en responsabilité contractuelle comme l'a fait le premier juge et comme l'admet le mandataire ad hoc de la SCCV Les Cannelles ou à dix ans à compter de la manifestation du dommage ou de son aggravation par l'ancien article 2270-1 du même Code si l'on considère qu'il s'agit d'une action en responsabilité civile extracontractuelle comme le laisse penser le visa de l'article 1382 ancien (devenu1240) du Code civil au dispositif des conclusions des consorts S. B. qui font état de manquements du vendeur professionnel à ses obligations d'information et de conseil uniquement dans la phase précontractuelle, sans se prononcer sur la nature, contractuelle ou délictuelle, de la responsabilité encourue du fait de tels manquements.

Dans tous les cas, la prescription n'était pas acquise à la date de l'assignation introductive de l'instance du 18 juin 2013, intervenue moins de cinq ans après l'entrée en vigueur de la loi susvisée et moins de dix ans après la signature du contrat de réservation préliminaire, de sorte que l'action des consorts S. B. est recevable.

Au fond, l'article L. 111-1 du Code de la consommation, dans sa rédaction en vigueur à la date des faits, dispose que tout professionnel vendeur de biens ou prestataire de services doit, avant la conclusion du contrat, mettre le consommateur en mesure de connaître les caractéristiques essentielles du bien ou du service.

En l'espèce, il n'est pas établi que la présentation, avant la vente, des lots réservés ait été inexacte en ce qu'elle faisait référence explicite à la construction d'un complexe de balnéothérapie et au moins implicite à la rentabilité de l'investissement dans le contexte immobilier local, même si ces prévisions ont été démenties par la suite avec la déconfiture du preneur exploitant la résidence services et l'abandon du projet de balnéothérapie par le promoteur-vendeur, de sorte que les manquements imputés à ces deux titres à la SCCV Les Cannelles venue aux droits de la SARL Capitole Patrimoine n'apparaissent pas caractérisés.

Les consorts S. B. seront donc également déboutés de leur demande de dommages et intérêts, le jugement dont appel étant confirmé sur ce point.

Sur les demandes accessoires

Les dispositions du jugement dont appel disant que M. Jean C. n'est pas partie à l'instance à titre personnel, rejetant toutes demandes indemnitaires formées à titre reconventionnel et déclarant le jugement commun à la SA CIFD venue aux droits de la SA CIFRAA et aux SA CNP Assurances et CNP IAM, indemnes de toute critique, seront confirmées.

Parties perdantes, les appelants supporteront in solidum les entiers dépens de première instance et d'appel, sans qu'il apparaisse équitable de faire application à leur encontre de l'article 700 du Code de procédure civile au titre des frais non compris dans les dépens exposés par les intimés.