Livv
Décisions

Cass. 1re civ., 6 juin 2018, n° 17-13.437

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

PARTIES

Demandeur :

Gernez

Défendeur :

Les Ecuries du bois d'Hamage (SCEA), Miquel

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Batut

Rapporteur :

Mme Le Gall

Avocat général :

M. Drouet

Avocat :

SCP Ghestin

Jur. prox. Douai, du 24 juin 2016

24 juin 2016

LA COUR : - Attendu, selon le jugement attaqué, que M. Gernez, qui avait confié un cheval en pension à la société Les Ecuries du bois d'Hamage (la société) suivant contrat verbal, l'a repris un peu plus d'un an après ; qu'il a attrait celle-ci devant une juridiction de proximité aux fins d'obtenir le paiement de diverses sommes ;

Sur le premier moyen : - Attendu que M. Gernez fait grief au jugement de rejeter sa demande formée au titre du paiement d'un préavis, alors, selon le moyen : 1°) que tout professionnel vendeur de biens ou prestataire de services doit, avant la conclusion du contrat, mettre le consommateur en mesure de connaître les caractéristiques essentielles du bien ou du service, notamment la durée du contrat et les modalités de résiliation ; que le juge de proximité, qui constate en l'espèce l'absence de contrat écrit entre la société et M. Gernez, a déduit la connaissance qu'aurait eu celui-ci de l'existence du règlement intérieur prévoyant un préavis de résiliation d'un mois de la seule constatation qu'il s'était acquitté des sommes réclamées pendant la durée d'exécution du contrat et " qu'il ne pouvait donc ignorer son existence ni les modalités de préavis " ; qu'en statuant de la sorte, la juridiction de proximité a violé les articles L. 111-1 et L. 111-2 du Code de la consommation ; 2°) qu'en cas de litige relatif à l'application des obligations légales d'information à fournir au consommateur, il appartient au professionnel de rapporter la preuve de l'exécution de ses obligations ; qu'en omettant de subordonner l'application de la clause de préavis à la preuve préalable de l'information donnée avant la conclusion du contrat par la société, la juridiction de proximité a violé l'article L. 111-4 du Code de la consommation ; 3°) que celui qui est légalement ou contractuellement tenu d'une obligation particulière d'information doit rapporter la preuve de l'exécution de cette obligation ; qu'il incombe au professionnel qui se prétend créancier au titre d'une clause de préavis de résiliation de prouver que, lors de la conclusion du contrat verbal, le cocontractant avait pris connaissance des stipulations qui lui sont opposées pour justifier cette créance ; que, pour débouter M. Gernez de sa demande en remboursement des sommes versées au titre du préavis, le juge de proximité, qui constate qu'aucun contrat écrit n'a été établi entre les parties, se contente de relever que M. Gernez avait, durant la période d'exécution du contrat, respecté les règles figurant dans le règlement intérieur ; qu'en s'abstenant de rechercher si la société avait spécialement informé M. Gernez de la nécessité de respect d'un préavis de résiliation, la juridiction de proximité a privé sa décision de base légale au regard des articles 1353 nouveau du Code civil et des articles L. 111-1 et L. 111-2 du Code de la consommation ;

Mais attendu qu'ayant relevé que M. Gernez était venu au sein de la société acquitter le préavis du mois de décembre, la juridiction de proximité, qui n'était pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation ni de procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérante, a pu en déduire que celui-ci avait connaissance du règlement intérieur stipulant ce préavis ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le deuxième moyen : - Attendu que M. Gernez fait grief au jugement de rejeter sa demande de remboursement de frais de cotisation, alors, selon le moyen, que M. Gernez avait soutenu dans ses conclusions que la société avait reconnu que le montant de 84 euros correspondait à une cotisation annuelle de " droit d'accès aux installations " mais que ce montant lui avait été facturé trois fois en mai, septembre et novembre 2014 et qu'il avait donc payé des sommes indues à ce titre ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen, la juridiction de proximité a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;

Mais attendu que la juridiction de proximité, qui n'était pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, a estimé qu'à la lecture des factures émises, aucune double facturation n'apparaissait ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le troisième moyen : - Attendu que M. Gernez fait grief au jugement de le condamner à payer des dommages-intérêts à la société, alors, selon le moyen : 1°) que la cassation à intervenir sur la base du premier ou du deuxième moyen de cassation qui sera de nature à démontrer que M. Gernez disposait de moyen sérieux à l'appui de sa demande, contrairement à ce qu'a affirmé le juge de proximité pour justifier sa condamnation au profit de la société, devra entraîner l'annulation par voie de conséquence du chef de dispositif attaqué, en application de l'article 624 du Code de procédure civile ; 2°) qu'en toute hypothèse, une action en justice ne peut, sauf circonstance particulières qu'il appartient au juge de spécifier, constituer un abus de droit ; que l'erreur d'une partie sur le bien-fondé de ses prétentions n'est pas de nature à constituer un abus du droit d'agir en justice ; qu'en se fondant sur l'affirmation selon laquelle M. Gernez " ne disposait d'aucun élément pouvant justifier la condamnation de la Scea Les Ecuries du Bois d'Hamage à quelque titre que ce soit ", la juridiction de proximité a violé l'article 1382 ancien du Code civil, devenu l'article 1240 nouveau du même code ; 3°) qu'il résulte de surcroît des propres constatations du jugement attaqué, d'une part, que le conseil de l'ordre des vétérinaire avait écrit à M. Gernez pour lui confirmer que l'établissement d'un diagnostic et l'administration d'une injection à un cheval relevaient des attributions exclusives d'un vétérinaire et qu'il en résultait donc que la pratique dénoncée était bien illégale et, d'autre part, que la société avait fait l'objet d'un avertissement de la part de la direction départementale de la protection des populations du Nord en raison de l'irrégularité des tarifs affichés des prestations et qu'il s'agissait là de deux des principaux reproches adressés par M. Gernez à cette société au soutien des demandes dirigées contre elle ; qu'en affirmant, néanmoins, pour justifier sa condamnation pour abus de procédure " qu'il ne disposait d'aucun élément pouvant justifier la condamnation de la Scea Les Ecuries du Bois d'Hamage " et que ses plaintes auprès du conseil de l'ordre des vétérinaires et des administrations caractériseraient son intention de nuire, la juridiction de proximité a violé l'article 1382 du Code civil, devenu l'article 1240 nouveau du même code ;

Mais attendu que les dommages-intérêts ont été accordés à la société, non au titre d'un abus du droit d'agir en justice, mais en réparation du dommage causé par les démarches entreprises par M. Gernez auprès de tiers, établissant son intention de nuire, et caractérisé par les demandes de pièces, contrôles et rendez-vous avec les administrations concernées générant un dysfonctionnement du centre équestre ainsi qu'un préjudice de réputation ; que le moyen n'est pas fondé ;

Par ces motifs : Rejette le pourvoi.