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Décisions

CA Paris, Pôle 1 ch. 2, 14 juin 2018, n° 17-07253

PARIS

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Access Story (SARL)

Défendeur :

Amazon Services Europe (Sté), Amazon Payments Europe (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Chevalier

Conseillers :

Mmes Bodard-Hermant, Dellelis

T. com. Paris, prés., du 17 mars 2017

17 mars 2017

EXPOSÉ DU LITIGE

La SARL de droit luxembourgeois Amazon Services Europe, dont le siège se situe <adresse>, gère la vente d'articles sur les sites européens d'Amazon sur internet, notamment www.amazon.fr.

Il s'agit d'articles vendus soit directement par cette société, soit par des personnes tierces souhaitant vendre leurs marchandises sur le marché en ligne accessible via les sites Amazon.

Pour accéder au statut de " Vendeur Tiers ", il est nécessaire d'adhérer au service " Vendre sur Amazon " et d'ouvrir un " compte vendeur ".

Les Vendeurs Tiers ont aussi la possibilité de souscrire auprès de la société Amazon Services le service complémentaire " Expédié par Amazon ", qui comprend divers services de logistique, stockage, enlèvement, emballage, livraison.

La relation entre les Vendeurs Tiers et Amazon Services pour la fourniture des services " Vendre sur Amazon " et " Expédié sur Amazon " est régie par le Contrat Amazon Services Europe Business Solutions, qui comprend des conditions générales ainsi que des conditions spécifiques pour chacune de ces conventions.

Le compte vendeur ouvert par les Vendeurs Tiers est soumis à la législation luxembourgeoise sur le secteur financier et géré par la SCA de droit luxembourgeois Amazon Payments Europe dont le siège se situe <adresse>, en vertu d'un contrat spécifique dit " Contrat Utilisateur APE ".

L'ouverture de ce compte de paiement auprès d'Amazon Payments Europe est une condition sine qua non de l'utilisation des services " Vendre sur Amazon " et " Expédié par Amazon " gérés par Amazon Services Europe.

En tant qu'établissement de monnaie électronique, la société Amazon Payments Europe est soumise à la législation en matière de lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme, en vertu de laquelle elle est tenue de respecter une obligation d'identification des Vendeurs Tiers.

La SARL Access Story a été constituée le 9 février 2016. Elle a pour activité la vente à distance de tous types d'accessoires pour appareils électroniques.

Elle a adhéré aux services " vendre sur Amazon " et " expédié par Amazon ", gérés par la société Amazon Services Europe et a ainsi ouvert un compte vendeur.

Le 3 octobre 2016, les sociétés Amazon ont fermé la boutique de vente en ligne de la SARL Access Story et suspendu l'accès de celle-ci à son compte de paiement.

Le 23 novembre 2016, la société Amazon Payments Europe a adressé à la SARL Access Story un message électronique dans lequel elle l'a informée que son compte n'avait pas passé le processus de vérification et que, par conséquent, elle ne pouvait plus vendre sur les sites de vente Amazon européens ni accéder à son espace vendeur.

Par acte en date du 13 janvier 2017, la SARL Access Story a assigné les sociétés Amazon Services Europe et Amazon Payments Europe devant le juge des référés du Tribunal de commerce de Paris sur le fondement de l'article L. 442-6 du Code de commerce et des articles 872 et 873 du Code de procédure civile afin que soient ordonnés :

- la communication sous astreinte de ses éléments comptables, financiers et relatifs à ses stocks de marchandises détenus par Amazon, avec justificatifs ;

- la restitution sous astreinte des fonds sur son compte vendeur et des stocks de marchandises qu'elles détiennent ;

- le versement d'une provision à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice subi suite à la rupture brutale des relations commerciales établies par les sociétés Amazon.

Par ordonnance contradictoire en date du 17 mars 2017, le président du Tribunal de commerce de Paris :

- s'est déclaré compétent pour connaître de l'action de la société Access Story sur le fondement de l'article L. 442-6 du Code de commerce ;

- a dit n'y avoir lieu à référé sur l'ensemble des demandes de la société Access Story ;

- a débouté les sociétés Amazon Service Europe et Amazon Payments Europe de leur demande de suppression du bandeau informatif sur le site internet de la société Access Story ;

- a dit n'y avoir lieu à l'application de l'article 700 du Code de procédure civile ;

- a condamné la société Access Story aux dépens de l'instance.

Par déclaration en date du 4 avril 2017, la SARL Access Story a fait appel de cette ordonnance.

Au terme de ses conclusions communiquées par voie électronique le 3 mai 2018, elle a demandé à la cour, sur le fondement des articles 872 et 873 du Code de procédure civile et L. 442-6 du Code de commerce, de :

- juger son appel recevable et ses réclamations bien fondées ;

- confirmer l'ordonnance rendue le 17 mars 2017 par le président du Tribunal de commerce de Paris en ce qu'il a dit être compétent sur son action sur le fondement de l'article L. 442-6 du Code de commerce et rejeter l'exception d'incompétence formulée par les sociétés Amazon Services Europe et Amazon Payments Europe ;

- l'infirmer en ce qu'il a dit n'y avoir lieu à référé pour l'ensemble de ses demandes ;

statuant à nouveau,

- juger que la fermeture intervenue le 3 octobre 2016 sans préavis, sans notification et sans motif de sa boutique en ligne Amazon par les sociétés Amazon Services Europe et Amazon Payments Europe constitue une rupture brutale des relations commerciales établies entre les sociétés ;

en conséquence,

- ordonner aux sociétés Amazon Services Europe et Amazon Payments Europe de lui communiquer ses éléments comptables, financiers et relatifs à ses stocks de marchandises qu'elles détiennent, avec justificatifs (bons de commandes, factures, bons de livraison, expédition et retours, demandes de remboursement notamment) dans les 48 heures du prononcé de la décision à intervenir sous astreinte de 5 000 euros par jour de retard ;

- ordonner aux sociétés Amazon Services Europe et Amazon Payments Europe de lui restituer les fonds présents sur son compte vendeur et ses stocks de marchandises qu'elles détiennent dans les 48 heures du prononcé de la décision à intervenir sous astreinte de 5 000 euros par jour de retard ;

- se réserver la faculté de liquider les astreintes ;

- condamner in solidum les sociétés Amazon Services Europe et Amazon Payments Europe à lui verser la somme de 100 000 euros à titre de dommages et intérêts provisionnels en réparation du préjudice subi du fait de la rupture brutale des relations commerciales établies entre les parties ;

- condamner in solidum les sociétés Amazon Services Europe et Amazon Payments Europe au remboursement des montants correspondant aux factures n° LU-ASE-2017-2975834, n° LU-ASE-2017-2975836, n° LU-ASE-2017-2975833 et n° LU-ASE-2017-2975835 pour un montant total de 1 005,49 euros, sur son compte bancaire, dans les 48 heures du prononcé de la décision à intervenir sous astreinte de 5 000 euros par jour de retard ;

- débouter les sociétés Amazon Services Europe et Amazon Payments Europe de l'ensemble de leurs réclamations ;

- les condamner in solidum aux dépens de première instance et d'appel et à la somme de 15 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

Les sociétés Amazon Services Europe et Amazon Payments Europe, par conclusions transmises par voie électronique le 14 mai 2018, ont demandé à la cour, sur le fondement des règlements (UE) n° 1215/2012 du 12 décembre 2012, et (CE) n° 593/2008 du 17 juin 2008 et des articles 872, 873 du Code de procédure civile et L. 442-6, I, 5° du Code de commerce, de :

à titre liminaire et principal :

- infirmer l'ordonnance du 27 mars 2017 en ce que le président du tribunal de commerce s'est déclaré compétent pour connaître des demandes de la société Access Story et en ce qu'il les a déboutées de leur demande reconventionnelle ;

et, statuant à nouveau,

- se déclarer incompétent pour connaître des demandes de la société Access Story ;

- renvoyer la société Access Story à mieux se pourvoir devant les juridictions luxembourgeoises ;

- se déclarer compétent pour connaître de leur demande reconventionnelle ;

- juger que l'insertion de mentions visant " Amazon " sur le site internet www.king-cameleon.fr constitue un trouble manifestement illicite ;

- ordonner à la société Access Story de supprimer ou de faire supprimer toute mention relative à un quelconque différend avec l'une quelconque des sociétés Amazon dans les trois jours du prononcé de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;

à titre subsidiaire :

- confirmer l'ordonnance en date du 27 mars 2017, sauf en ce qu'elle les a déboutées de leur demande reconventionnelle ;

et, statuant à nouveau,

- dire que l'insertion de mentions visant " Amazon " sur le site internet www.king-cameleon.fr constitue un trouble manifestement illicite ;

- ordonner à la société Access Story de supprimer ou de faire supprimer toute mention relative à un quelconque différend avec l'une quelconque des sociétés Amazon dans les trois jours du prononcé de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;

en tout état de cause :

- condamner la société Access Story à régler à chacune la somme de 15 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.

Il est renvoyé aux conclusions des parties pour la connaissance des moyens et des arguments qu'elles ont exposés au soutien de leurs demandes, conformément à l'article 455 du Code de procédure civile.

Sur ce, LA COUR

Sur la compétence

Le président du tribunal de commerce s'est déclaré compétent au motif que l'action de la SARL Acess Story était portée en référé et non au fond et était basée sur la responsabilité délictuelle des sociétés Amazon sur le fondement de l'article L. 442-6 du Code de commerce, de sorte que les clauses attributives de compétence territoriale stipulées dans les contrats liant les parties sont inopposables et que la demanderesse a saisi la juridiction du fait dommageable, conformément à l'article 5.1 du règlement (CE) n° 44/2001 du Conseil du 22 décembre 2000 concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale et à l'article 46 du Code de procédure civile.

Les sociétés Amazon Services Europe et Amazon Payments Europe contestent cette appréciation et soulèvent l'incompétence de la cour pour connaître du présent litige sur le fondement des clauses attributives de compétence stipulées à l'article 19 du contrat Business Solutions et à l'article 11.7 du contrat utilisateur APE et de l'article 25 du règlement (UE) n° 1215/2012 du Parlement européen et du Conseil du 12 décembre 2012, concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale.

La SARL Acess Story demande la confirmation de l'ordonnance attaquée en ce que le premier juge s'est déclaré compétent pour les moyens et arguments suivants :

- la rupture des relations commerciales établies, en vertu de l'article L. 442-6 du Code de commerce, engage la responsabilité civile délictuelle de son auteur ;

- aux termes de l'article 46 du Code de procédure civile, le demandeur peut saisir à son choix, outre la juridiction du lieu ou demeure le défendeur, en matière délictuelle la juridiction du lieu du fait dommageable ou celle dans le ressort de laquelle le dommage a été subi ;

- la Cour de cassation a jugé que le fait dommageable en matière de rupture des relations commerciales établies, sanctionnée par l'article L. 442-6 du Code de commerce, se situait au siège social de la société victime de la rupture et elle a son siège social à Vitry-sur-Seine ;

- le décret n° 2009-1384 du 11 novembre 2009 attribue la compétence exclusive du présent litige au Tribunal de commerce de Paris en première instance et, aux termes de l'article 5 du règlement n° 44/2001, une personne domiciliée sur le territoire d'un Etat membre peut être attraite dans un autre Etat membre, en matière délictuelle ou quasi délictuelle, devant le tribunal du lieu ou le fait dommageable s'est produit ou risque de se produire ;

- par ailleurs, une clause attributive de compétence territoriale est inopposable à la partie qui saisit le juge des référés ;

- en outre, l'article 31 du règlement n° 44/2001 prévoit que les mesures provisoires ou conservatoires prévues par la loi d'un Etat membre peuvent être demandées aux autorités judiciaires de cet Etat, même si, en vertu du présent règlement, une juridiction d'un autre Etat membre est compétente pour connaître du fond ;

- enfin, les clauses attributives de compétence stipulées dans les contrats qu'elle a conclus avec les sociétés Amazon Services Europe et Amazon Payments Europe doivent être interprétées strictement et ne couvrent pas le présent litige qui se fonde sur l'article L. 442-6 du Code de commerce et qui a trait uniquement à la fermeture brutale de sa boutique en ligne et non à son utilisation des services et aux obligations stipulées dans ces contrats.

La cour retiendra que l'exception d'incompétence soulevée par les sociétés intimées est fondée, et cela pour les motifs suivants.

Le contrat Amazon Services Europe Business Solutions contient à l'article 19 la clause suivante :

" Le droit du Grand-Duché du Luxembourg régit ce Contrat et tous ses termes et conditions, sans toutefois donner effet aux règles en matière de conflits de lois ou à la Convention des Nations-Unies sur les Contrats de Vente Internationale de Marchandises. Tout litige relatif, de quelques manières que ce soit, à votre utilisation des Services ou à ce Contrat [...] (b) relèvera exclusivement de la compétence des tribunaux et cours du district de la ville de Luxembourg, au Luxembourg, si vous vous enregistrez pour les Services en tant qu'entreprise ".

Le contrat Utilisateur APE stipule à l'article 11.7, intitulé " Droit applicable ; Juridiction " ce qui suit :

" [...] Les lois du Grand-Duché du Luxembourg gouvernent ce Contrat et tous ses termes et conditions, sans application des principes de conflits de lois. Toute réclamation relative de quelque manière que ce soit à votre utilisation du Service ou à ce Contrat [...] (b) sera exclusivement déposée devant les tribunaux de la Ville de Luxembourg, Luxembourg si vous vous inscrivez pour un Compte en tant que professionnel ".

Les réclamations de la SARL Access Story entrent dans le champ d'application de ces clauses.

La SARL Access Story demande, en effet, la condamnation des sociétés Amazon Services Europe et Amazon Payments Europe à lui communiquer les éléments comptables et financiers relatifs à ses stocks de marchandises, à lui restituer les fonds présents sur son compte vendeur et ses stocks de marchandises, à lui verser la somme de 100 000 euros à titre de provision à valoir sur la réparation du préjudice subi du fait de la rupture brutale de leurs relations commerciales et à lui rembourser quatre factures.

Ces réclamations sont en lien avec les deux contrats susvisés, puisqu'elles ont trait aux conditions dans lesquelles il a été mis fin à ceux-ci et aux conséquences qu'il convient d'en tirer pour la société Access Story.

Et les deux clauses précitées visent tout litige ou toute réclamation relative de quelques manières que ce soit à l'un et à l'autre de ces contrats.

Enfin, elles recouvrent indistinctement les litiges soumis au juge du fond et ceux portés devant le juge des référés.

L'article 25 du règlement UE n° 1215/2012, applicable à partir du 10 janvier 2015, donc au litige en examen et qui a remplacé le règlement n° 44/2001, énonce que, si les parties, sans considération de domicile, sont convenues d'une juridiction ou de juridictions d'un Etat membre pour connaître des différends nés ou à naître d'un rapport de droit déterminé, ces juridictions sont exclusivement compétentes, sauf si la validité de la convention attributive de juridiction est entachée de nullité quant au fond selon le droit de cet Etat membre.

En vertu de ce texte, le litige opposant les parties doit être porté devant les juridictions luxembourgeoises désignées par les clauses compromissoires précitées.

Pour s'opposer à cette analyse, la SARL Access Story soutient que son action, en ce qu'elle est fondée sur l'article L. 442-6 du Code de commerce, serait de nature délictuelle, de sorte que ni les clauses attributives de compétence susvisées ni l'article 25 du règlement n° 1215/2012 ne seraient applicables.

Cette argumentation ne saurait toutefois être accueillie dans la mesure où il a été jugé par la Cour de cassation qu'une clause attributive de compétence visant tout litige ou différend né du contrat ou en relation directe avec celui-ci est applicable dans le cadre d'un litige international né d'une demande fondée sur l'article L. 442-6 du Code de commerce.

En outre, comme les parties intimées l'ont rappelé, la Cour de justice de l'Union européenne a dit pour droit dans l'arrêt du 14 juillet 2016, Granarolo (C-196/15) qu'une action indemnitaire fondée sur une rupture brutale de relations commerciales ne relève pas de la matière délictuelle ou quasi délictuelle au sens du règlement 44/2001 s'il existait entre les parties une relation commerciale établie, ce qui est le cas dans l'affaire en examen au vu des contrats Amazon Services Europe Business Solutions et Utilisateur APE.

La SARL Access Story soutient encore que, en vertu de l'article 31 du règlement n° 44/2001, qu'il convient de lire comme l'article 35 du règlement n° 1215/2012, les mesures provisoires ou conservatoires prévues par la loi d'un Etat membre peuvent être demandées aux autorités judiciaires de cet Etat, même si, en vertu du présent règlement, une juridiction d'un autre Etat membre est compétente pour connaître du fond.

Cependant, comme les parties intimées l'ont exposé, les réclamations de la SARL Access Story tendant à la condamnation des sociétés Amazon Services Europe et Amazon Payments Europe à lui communiquer les éléments comptables et financiers relatifs à ses stocks de marchandises et à lui restituer les fonds présents sur son compte vendeur ainsi que ses stocks de marchandises, ne constituent pas des mesures provisoires ou conservatoires au sens de ces notions autonomes dans les règlements n° 44/2001 et n° 1215/2012 en ce qu'elles ne visent pas à maintenir une situation de fait ou de droit afin de sauvegarder des droits dont la reconnaissance est demandée par ailleurs au juge du fond.

En outre, s'agissant des demandes de provision, il a été jugé à la suite des arrêts rendus par la Cour de justice de l'Union européenne les 17 novembre 1989, Van U. Maritime (C-391/95) et 27 avril 1999, M. (C-99/96) que si elles peuvent être soumises à la juridiction d'un Etat contractant alors que le litige au fond relève de la compétence des juridictions d'un autre Etat contractant, c'est à la condition, d'une part, que le remboursement au défendeur de la somme allouée soit garanti dans l'hypothèse où le demandeur n'obtiendrait pas gain de cause au fond de l'affaire et, d'autre part, que la mesure sollicitée ne porte que sur des avoirs déterminés du défendeur se situant, ou devant se situer, dans la sphère de la compétence territoriale du juge saisi.

Or, force est de constater que la SARL Access Story ne justifie pas ni même ne fait mention d'élément de nature à établir que ces conditions soient satisfaites.

Enfin, il n'y a pas de contradiction à faire droit à l'exception d'incompétence soulevée par les intimées en ce qui concerne les demandes de l'appelante et à se déclarer compétent pour connaître de leur demande reconventionnelle.

En effet, cette demande, en ce qu'elle vise à voir ordonner à la société Access Story de supprimer ou de faire supprimer toute mention relative à un quelconque différend avec l'une quelconque des sociétés Amazon dans les trois jours du prononcé de l'arrêt à intervenir, sous astreinte, ne relève pas du champ d'application des clauses attributives de compétence tant qu'il est vrai qu'il ne s'agit pas d'une réclamation relative à l'un des contrats liant les parties.

Sur la demande reconventionnelle

Les sociétés Amazon Services Europe et Amazon Payments Europe fondent leur demande sur les dispositions de l'article 873, alinéa 1er, du Code de procédure civile et exposent qu'Access Story a inséré sur son site internet (king-cameleon.com/promotions) un bandeau indiquant :

" Information importante : Chers Clients, le site internet Amazon a clôturé notre boutique vendeur. Nous vous prions de bien vouloir nous excuser pour la gêne occasionnée par cette situation et exerçons tous recours pour y remédier ".

Leur demande visant à voir ordonner à la société Access Story de supprimer ou de faire supprimer toute mention relative à un quelconque différend avec l'une quelconque des sociétés Amazon dans les trois jours du prononcé de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 500 euros par jour de retard doit donc être comprise comme tendant à voir ordonner la suppression de ce bandeau.

Les sociétés intimées font valoir que ledit bandeau, toujours visible, leur cause un dommage puisqu'il peut donner l'impression à quiconque consultant le site internet d'Access Story que la fermeture du Compte Vendeur est illégitime. Il porte, selon elles, une atteinte très sérieuse à leur image et constitue en réalité une forme de dénigrement.

Cependant, comme le juge des référés du tribunal de commerce l'a retenu, le bandeau incriminé a un caractère informatif et il ne ressort pas avec l'évidence requise en référé que l'indication selon laquelle la SARL Access Story a exercé tout recours pour remédier à la gêne occasionnée par la fermeture de sa boutique en ligne, même si elle n'est pas complètement exacte, tant il est vrai que la SARL Access Story n'a pas demandé la réouverture de son compte vendeur dans cette instance ni saisi le juge du fond, porte atteinte à l'image des sociétés intimées.

L'ordonnance attaquée sera donc confirmée en ce qu'elle a dit n'y avoir lieu à référé sur la demande des sociétés Amazon Service Europe et Amazon Payments Europe de suppression du bandeau litigieux sur le site internet de la société Access Story.

Sur les dépens et les frais de procédure

Les parties ayant chacune obtenu gain de cause pour une partie de leurs réclamations, elles devront garder la charge de leurs dépens de première instance et d'appel.

L'équité ne commande pas de faire application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.

Par ces motifs, LA COUR, Infirme l'ordonnance rendue le 17 mars 2017 par le juge des référés du Tribunal de commerce de Paris en ce qu'il s'est déclaré compétent pour connaître des demandes de la SARL Access Story contre les sociétés Amazon Services Europe et Amazon Payments Europe ; Statuant à nouveau, Renvoie les parties à se pourvoir ainsi qu'elles aviseront devant les juridictions luxembourgeoises en application des clauses compromissoires stipulées dans les contrats Amazon Services Europe Business Solutions et Utilisateur APE ; Confirme l'ordonnance du 17 mars 2017 en ce qu'elle a dit n'y avoir lieu à référé sur la demande des sociétés Amazon Services Europe et Amazon Payments Europe visant à voir ordonner à la SARL Access Story la suppression du bandeau inséré sur son site internet (king-cameleon.com/promotions) indiquant : " Information importante : Chers Clients, le site internet Amazon a clôturé notre boutique vendeur. Nous vous prions de bien vouloir nous excuser pour la gêne occasionnée par cette situation et exerçons tous recours pour y remédier " ; Dit que chaque partie gardera la charge de ses dépens ; Dit n'y avoir lieu à l'application de l'article 700 du Code de procédure civile.