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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 2, 6 juillet 2018, n° 17-07572

PARIS

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Maisons du Monde France (SAS)

Défendeur :

Cafom (SA), Vente-Unique.com (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme PERRIN

Conseillers :

Mmes Renard, Lehmann

TGI Paris, du 2 mars 2017

2 mars 2017

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

La société Maisons du Monde France (ci-après Maisons du Monde) est spécialisée depuis 1996 dans l'équipement et la décoration de la maison et commercialise ses produits dans 260 magasins en France et en Europe ainsi que sur son site internet accessible à l'adresse www.maisonsdumonde.fr.

Elle revendique des droits d'auteur sur une commode référencée 'Lazare' créée en 2011 et fabriquée en avril 2011par un sous-traitant, la société indienne Vinod Handicrafts, divulguée en 2012 sur son site internet et dans son catalogue 2012 et commercialisée sans interruption entre 2012 et 2016.

Cette commode a fait l'objet d'une enveloppe Soleau déposée le 27 août 2012 et ouverte par huissier le 2 décembre 2013.

Elle revendique également des droits d'auteur et des droits de dessins et modèles communautaires non enregistrés sur une commode et un cabinet référencé 'Serengeti' créés en 2013, fabriqués en novembre 2013 par un sous-traitant, la société indienne Basant, divulgués en 2014 sur son site internet et dans son catalogue 2014, et commercialisés en mars et juin 2014.

La SA société Cafom, créée en 1985, est spécialisée dans l'aménagement de la maison.

La société Vente-Unique.com, dont la SA Cafom est la centrale d'achats, est spécialisée dans la vente en ligne aux particuliers de mobilier, décoration et équipement de la maison via le site vente-unique.com.

La société Maisons du Monde indique avoir découvert en juin 2015 que :

- la société Vente-Unique.com offrait à la vente et commercialisait sous la référence 'Craig' sur son site internet vente-unique.com ainsi que sur les sites Cdiscount.com et rueducommerce.fr, une copie servile de la commode 'Lazare'. Deux procès-verbaux de constat ont été dressés le 22 juin 2015 sur les sites vente-unique.com et rueducommerce.fr.

- la société Vente-Unique.com offrait à la vente et commercialisait sous la référence 'Yamuna' sur son site internet vente-unique.com des copies serviles des modèles de commode et de cabinet 'Serengeti'. Un procès-verbal de constat a été dressé sur ce site le 22 juin 2015.

- la société Cafom offrait à la vente et commercialisait avec la société Vente-Unique.com sur les sites internet allemand kauf-unique.de, espagnol venta-unica.com, autrichien kauf-unique.at et suisse Vente-Unique.ch, des copies serviles des meubles 'Lazare' et 'Serengeti'; quatre procès-verbaux de constat ont été dressés sur les sites espagnol et allemand le 22 juin 2015.

Après l'envoi de mises en demeure de son conseil les 6 et 28 juillet 2015, la société Maisons du Monde a, selon actes d'huissier des 16 et 28 octobre 2015, fait assigner la société Vente-Unique.com et la société Cafom en contrefaçon de droits d'auteur et de modèles communautaires non enregistrés ainsi qu'en concurrence déloyale et parasitaire devant le Tribunal de grande instance de Paris.

Par jugement contradictoire en date du 2 mars 2017, assorti de l'exécution provisoire, le Tribunal de grande instance de Paris a :

- constaté que la demande de la SAS Maisons du Monde au titre des pièces 23 et 37 produites puis retirées des débats par la SA Vente-Unique.com et la SA Cafom est sans objet,

- déclaré irrecevables les demandes de la SAS Maisons du Monde au titre du droit d'auteur pour défaut de qualité à agir,

- rejeté la fin de non-recevoir opposée par la SA Vente-Unique.com et la SA Cafom au titre des modèles communautaires non enregistrés,

- dit qu'en commercialisant en 2015 des meubles référencés 'Yamuna ' consistant en la copie des modèles communautaires non enregistrés référencés 'Serengeti' (commode et cabinet) de la SAS Maisons du Monde, la SA Vente-Unique.com et la SA Cafom ont concurremment commis à son préjudice des actes de contrefaçon,

- condamné en conséquence in solidum la SA Vente-Unique.com et la SA Cafom à payer à la SAS Maisons du Monde la somme de 10 000 euros en réparation de son préjudice,

- rejeté les demandes indemnitaires complémentaires de la SAS Maisons du Monde au titre de la contrefaçon,

- interdit à la SA Cafom et à la SA Vente-Unique.com de fabriquer ou faire fabriquer, d'exporter, d'importer, d'offrir en vente, de vendre et de mettre sur le marché sur le territoire de l'Union européenne leurs meubles référencés Yamuna ou tout meuble consistant en la copie des modèles communautaires non enregistrés référencés 'Serengeti' (commode et cabinet) de la SAS Maisons du Monde,

- dit n'y avoir lieu au prononcé d'une astreinte à ce titre,

- rejeté les demandes de destruction et de publication judiciaire présentées par la SAS Maisons du Monde au titre de la contrefaçon,

- dit qu'en commercialisant en 2015 un meuble référencé 'Craig' consistant en la copie servile du meuble référencé 'Lazare' de la SAS Maisons du Monde dans des conditions générant un risque de confusion dans l'esprit du public, la SA Vente-Unique.com et la SA Cafom ont concurremment commis à son préjudice des actes de concurrence déloyale et parasitaire,

- condamné en conséquence in solidum la SA Cafom et la SA Vente-Unique.com à payer à la SAS Maisons du Monde la somme de 5 408,80 euros en réparation de son préjudice,

- interdit à la SA Cafom et à la SA Vente-Unique.com de fabriquer ou faire fabriquer, d'exporter, d'importer, d'offrir en vente, de vendre et de mettre sur le marché sur le territoire français leur meuble référencé 'Craig' ou tout autre meuble identique,

- dit n'y avoir lieu au prononcé d'une astreinte à ce titre,

- rejeté les demandes de destruction et de publication judiciaire présentées par la SAS Maisons du Monde au titre de la concurrence déloyale et parasitaire,

- rejeté la demande de la SA Vente-Unique.com et de la SA Cafom au titre des frais irrépétibles,

- condamné in solidum la SA Vente-Unique.com et la SA Cafom à payer à la SAS Maisons du Monde la somme de 10 000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile,

- condamné in solidum la SA Vente-Unique.com et la SA Cafom à supporter les entiers dépens de l'instance qui seront recouvrés directement par son conseil conformément à l'article 699 du Code de procédure civile.

La société Maisons du Monde France a interjeté appel de ce jugement par déclaration au greffe en date du 7 avril 2017 et les sociétés Vente-Unique.com et Cafom le 13 avril 2017.

Les procédures ont été jointes par ordonnance du conseiller de la mise en état du 1er février 2018.

Par dernières conclusions notifiées par voie électronique le 19 mars 2018, auxquelles il est expressément renvoyé, la société Maisons du Monde France demande à la cour de :

- la déclarer recevable en son appel et bien fondée en ses demandes,

- infirmer le jugement rendu le 2 mars 2017 ses dispositions qui lui sont défavorables,

- le confirmer pour le surplus,

Et statuant à nouveau :

- dire et juger que le modèle de commode créé en 2011 et commercialisé depuis 2012 sous la dénomination 'Lazare' est original et protégeable par le droit d'auteur au sens des dispositions des Livres I et III du Code de la propriété intellectuelle,

- dire et juger que les modèles de commode et de cabinet créés en 2013 et commercialisés en 2014 sous la dénomination 'Serengeti' sont originaux et protégeables par le droit d'auteur au sens des dispositions des Livres I et III du Code de la propriété intellectuelle,

- dire et juger que les modèles de commode et de cabinet créés en 2013 et commercialisés en 2014 sous la dénomination 'Serengeti' sont nouveaux et présentent un caractère individuel au sens des dispositions du Code de la propriété intellectuelle et du Règlement n°6/2002 du 12 décembre 2001 sur les dessins et modèles communautaires,

en conséquence,

- dire et juger qu'en reproduisant, en important, en offrant à la vente et en commercialisant des copies serviles des modèles de commode 'Lazare', de commode et de cabinet 'Serengeti', les sociétés Vente-Unique.com et Cafom ont commis des actes de contrefaçon de droits d'auteur et de modèles communautaires non enregistrés au sens des articles L. 122-4, L. 335-2 et L. 335-3, L. 513-4 et L. 515-1 du Code de la propriété intellectuelle et de l'article 19 du règlement n°6-2000 du 12 décembre 2001 sur les dessins et modèles communautaires,

- interdire aux sociétés Vente-Unique.com et Cafom d'importer, de reproduire, de faire fabriquer, de commercialiser, d'offrir à la vente et de vendre, sous quelque dénomination que ce soit et à quelque titre que ce soit, et ce, sous astreinte de 1 500 euros par infraction constatée à compter de la signification de l'arrêt à intervenir, tout article reproduisant les caractéristiques originales, propres et nouvelles des modèles de commode 'Lazare' et 'Serengeti' et de cabinet 'Serengeti',

- condamner la société Vente-Unique.com et la société Cafom, in solidum, à lui payer, à titre provisionnel, la somme de 50 000 euros en réparation de l'atteinte portée à la valeur de son modèle 'Lazare' et 'Serengeti' découlant des actes de contrefaçon,

- condamner la société Vente-Unique.com et la société Cafom, in solidum, à lui payer la somme de 100 000 euros en réparation du préjudice économique découlant des actes de contrefaçon,

- ordonner la production par les sociétés Cafom et Vente-Unique.com :

- des éléments comptables relatifs à l'origine et aux quantités de produits litigieux commandées par la société Vente-Unique.com, aux quantités de produits litigieux détenues en stock par la société Vente-Unique.com et aux quantités de produits litigieux vendues par la société Vente-Unique.com via notamment les plate-forme marchandes Discount (www. Cdiscount.com) et Rue du commerce (www.rueducommerce.fr) (quantités, prix, bons de commande, bons de livraison, factures),

- des éléments comptables relatifs à l'origine et aux quantités de produits litigieux sélectionnées, commandées et importées par la société Cafom et/ou la société Vente-Unique.com, aux quantités de produits litigieux détenues en stock par la société Cafom et/ ou la société Vente-Unique.com, et aux quantités de produits vendues / distribuées / référencées par la société Cafom et/ ou la société Vente-Unique.com notamment via les sites allemand 5www.kauf-unique.de), espagnol (www.venta-unica.com), autrichien (www.kauf-unique.at) et suisse (www.Vente-Unique.ch) du Groupe (quantités, prix, bons de commande, bons de livraison, factures),

- des documents commerciaux (plaquettes de présentation, catalogues') relatifs à la commercialisation en France et à l'étranger des produits litigieux,

- d'une attestation du Commissaire aux Comptes des sociétés Cafom et Vente-Unique.com certifiant de l'exhaustivité des éléments comptables et commerciaux susvisés.

à titre subsidiaire,

- dire et juger qu'en important, en offrant à la vente et en commercialisant des meubles reprenant les caractéristiques distinctives des modèles de commode 'Lazare' et 'Serengeti' et de cabinet 'Serengeti', les sociétés Vente-Unique.com et Cafom ont créé des risques de confusion et d'association constitutifs de concurrence déloyale et parasitaire et ont ainsi engagé leur responsabilité sur le fondement des articles 1240 et suivants du Code civil,

- interdire aux sociétés Vente-Unique.com et Cafom de reproduire sous quelque forme que ce soit et à quelque titre que ce soit, et ce, sous astreinte de 1 500 euros par infraction constatée à compter de la signification de l'arrêt à intervenir, tout article reprenant les caractéristiques distinctives des modèles 'Lazare' et 'Serengeti',

- condamner la société Vente-Unique.com et la société Cafom, in solidum, à payer à la société Maisons du Monde France, à titre provisionnel, la somme de 50 000 euros en réparation du préjudice découlant des actes de concurrence déloyale et parasitaire commis sur l'ensemble des territoires concernés et notamment, en Allemagne, en Espagne et en Suisse,

en tout état de cause,

- ordonner, sous le contrôle d'un huissier de justice désigné à cet effet, aux frais des sociétés Vente-Unique.com et Cafom et sous astreinte de 1 500 euros par jour de retard à compter de la signification de l'arrêt à intervenir, la destruction de la totalité du stock des produits reprenant les caractéristiques des modèles 'Lazare' et 'Serengeti' ,

- dire et juger qu'en application de l'article L. 131-3 du Code des procédures civiles d'exécution, les astreintes prononcées seront liquidées, s'il y a lieu, par la cour ayant statué sur la présente demande,

- ordonner également l'inscription du dispositif de l'arrêt à intervenir sur la page d'accueil de l'ensemble des sites internet de la société Vente-Unique.com et de la société Cafom (www.Cafom.com, www.Vente-Unique.com, www.venta-unica.com, www.kauf-unique.de, www.Vente-Unique.ch, www.kauf-unique.at) sur un espace égal à un quart de l'écran, pendant une durée d'un mois à compter de la signification de l'arrêt à intervenir, et ce sous astreinte de 1 500 euros par jour de retard à compter de la signification de l'arrêt à intervenir,

- ordonner la publication de l'arrêt à intervenir dans trois journaux ou revues au choix de la société Maisons du Monde France et aux frais de la société Vente-Unique.com et de la société Cafom, dans la limite d'un plafond hors taxes global de 30 000 euros pour l'ensemble des trois publications et ce, au besoin, à titre de dommages et intérêts complémentaires,

- dire et juger irrecevables et mal fondées l'ensemble des demandes des sociétés Vente-Unique.com et Cafom et les en débouter,

- condamner les sociétés Vente-Unique.com et Cafom à lui payer la somme de 15 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

- condamner les sociétés Vente-Unique.com et Cafom aux entiers dépens, lesquels comprendront les frais de constat, dont distraction au profit de son conseil, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

Par dernières conclusions notifiées par voie électronique le 28 février 2018, auxquelles il est expressément renvoyé, la société Cafom et la société Vente-Unique.com demandent à la cour de :

- confirmer le jugement du 2 mars 2017 en ses dispositions qui leur sont favorables,

- l'infirmer pour le surplus,

- dire et juger que la société Maisons du Monde n'est pas titulaire de droits d'auteur ou de droits sur des dessins et modèles communautaires non enregistrés sur les modèles 'Lazare' et 'Serengeti',

- dire et juger que la société Maisons du Monde est donc irrecevable à agir en contrefaçon de droits d'auteur ou de droits des dessins et modèles communautaires non enregistrés,

- dire et juger à titre principal que les modèles de meubles 'Lazare' et 'Serengeti' de la société Maisons du Monde ne sont pas des œuvres protégeables au sens du Code de la propriété intellectuelle et du Règlement communautaire n°6-2002 du 12 décembre 2001,

- dire et juger que le dessin et modèle non enregistré du modèle 'Serengeti' de la société Maisons du Monde est nul (sic),

- dire et juger à titre subsidiaire que les modèles de meubles 'Craig' et 'Yamuna' ne constituent pas des contrefaçons desdits modèles 'Lazare' et 'Serengeti',

- dire et juger à titre très subsidiaire que la société Maisons du Monde ne rapporte pas la preuve des préjudices qu'elle prétend avoir subis,

en conséquence,

- débouter la société Maisons du Monde de l'ensemble de ses demandes formées au titre de la contrefaçon des modèles 'Lazare' et 'Serengeti',

- déclarer la société Maisons du Monde irrecevable et en tout cas mal fondée à agir sur le fondement de la concurrence déloyale, faute de faits distincts de la contrefaçon,

- dire et juger qu'elles n'ont pas commis d'actes de concurrence déloyale ou parasitaire en commercialisant les modèles de meubles 'Craig' et 'Yamuna',

- dire et juger en conséquence qu'elles ne se sont pas placées dans le sillage de la société Maisons du Monde afin de tirer profit de leurs investissements, efforts et notoriété,

- dire et juger à titre subsidiaire que la société Maisons du Monde ne rapporte pas la preuve du préjudice allégué au titre de la concurrence déloyale et parasitaire,

en conséquence

- débouter la société Maisons du Monde de l'ensemble de ses demandes formées au titre de la concurrence déloyale et parasitaire,

- dire et juger à titre infiniment subsidiaire que les dommages et intérêts en réparation du préjudice que la société Maisons du Monde estime avoir subis ne peuvent être que purement symboliques,

en tout état de cause

- débouter la société Maisons du Monde de l'ensemble de ses demandes et notamment formées au titre de la contrefaçon, de la concurrence déloyale et parasitaire et de la publication du jugement à intervenir (sic),

- condamner la société Maisons du Monde à leur verser la somme globale de 20 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- condamner la société Maisons du Monde aux entiers dépens de l'instance.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 22 mars 2018.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la recevabilité à agir sur le fondement des droits d'auteur sur les meubles 'Lazare' et 'Serengeti'

Considérant que la société Maisons du Monde qui invoque une exploitation paisible sous son nom, revendique des droits d'auteur sur des meubles dénommés 'Lazare' et 'Serengeti' constitués de deux commodes et d'un cabinet ;

Considérant que les sociétés Cafom et Vente-Unique.com soutiennent quant à elles qu'aucune création n'est démontrée et qu'aucun des actes de commercialisation qui sont invoqués n'a de date certaine, ajoutant que les éléments de fait révèlent au contraire que les meubles revendiqués ont été conçus et fabriqués en Asie et que la société Maison du Monde pratique la méthode de la 'customisation' ;

Considérant, ceci exposé, que la personne morale qui commercialise de façon non équivoque une œuvre de l'esprit est présumée à l'égard des tiers recherchés en contrefaçon et en l'absence de toute revendication du ou des auteurs, détenir sur ladite œuvre les droits patrimoniaux de l'auteur ;

Que pour bénéficier de cette présomption simple, il lui appartient d'identifier précisément l'œuvre qu'elle revendique et de justifier de la date à laquelle elle a commencé à en assurer la commercialisation ; qu'il lui incombe également d'établir que les caractéristiques de l'œuvre qu'elle revendique sont identiques à celles dont elle rapporte la preuve de la commercialisation sous son nom ;

Qu'enfin, si les actes d'exploitation propres à justifier l'application de cette présomption s'avèrent équivoques, elle doit préciser les conditions dans lesquelles elle est investie des droits patrimoniaux de l'auteur ;

Qu'en l'espèce, la société Maisons du Monde verse aux débats :

pour le meuble 'Lazare'

- un procès-verbal du 2 décembre 2013 constatant l'ouverture de l'enveloppe Soleau déposée le 27 août 2012 et comportant une photographie de la commode référencée 'Lazare',

- un de ses catalogues édité en 2012 qui comporte une photographie identique à celle contenue dans l'enveloppe Soleau de la commode 'Lazare' proposée au prix de 590 euros TTC,

- les éditions suivantes de ses catalogues montrant que le meuble 'Lazare' a été reconduit de 2012 à 2016,

- des extraits de son site internet montrant le meuble 'Lazare',

Qu'elle produit également une attestation de sa secrétaire générale attestant la vente de ce produit sous cette appellation dès le 17 mars 2012 pour un chiffre d'affaires au 31 décembre 2013 de 625 480 euros TTC pour un total de 1 028 articles ;

pour la commode et le cabinet 'Serengeti'

- un procès-verbal de constat du 14 novembre 2016 dressé sur ses serveurs informatiques établissant que les meubles 'Serengeti' ont été divulgués sur le marché français les 24 février et 28 mars 2014,

- son catalogue 2014 comportant en page 176 une photographie du cabinet et en page 179 une photographie de la commode référencés 'Serengeti' au prix respectif TTC de 449,90 euros et de 549,90 euros ;

Qu'elle produit également deux attestations de sa secrétaire général et de son directeur administratif et financier établissant la vente sous la même référence de la commode dès le 16 juin 2014 et celle du cabinet le 8 mars 2014 qui ont généré des chiffres d'affaires TTC respectifs au 9 mai 2016 de 38 577 euros et 38 608 euros, des attestations de son chef de projet e-merchandising, et de son analyste en e-merchandising indiquant que les meubles 'Serengeti' ont été mis en ligne sur le site www.maisonsdumonde.com le 16 février 2014 et des attestations de ses directeurs de magasins, de sa responsable du contrôle de gestion des achats et de son directeur des opérations confirmant la commercialisation de ces meubles sur la même période ;

Considérant que ces éléments précis et concordants, qui permettent d'identifier les meubles revendiqués, de déterminer leurs caractéristiques et d'établir la date de leur première commercialisation et qui ne sont contredits par aucun élément contraire, suffisent à établir une présomption de titularité des droits d'auteur au profit de la société Maisons du Monde sur les meubles revendiqués ;

Que cette dernière doit donc être déclarée recevable à agir en contrefaçon de droits d'auteur sur les commodes 'Lazare' et 'Serengeti' ainsi que sur le cabinet 'Serengeti' ;

Sur la recevabilité à agir sur le fondement des modèles communautaires non enregistrés 'Serengeti'

Considérant que pour solliciter l'infirmation du jugement sur ce point les sociétés Cafom et Vente-Unique.com indiquent que la société Maisons du Monde ne démontre pas que la salariée dont le contrat est produit a créé le modèle revendiqué, et partant la titularité de ses droits sur le modèle 'Serengeti' ;

Considérant que selon l'article 14.3 dudit Règlement communautaire n° 6-2002 du 12 décembre 2001 sur les dessins ou modèles communautaires, le droit au dessin ou modèle créé par un salarié dans l'exercice de ses obligations ou suivant les instructions de l'employeur appartient à l'employeur, sauf convention contraire ;

Qu'en l'espèce madame Sabine G. atteste avoir créé en février 2013 les modèles 'Serengeti'; que son contrat de travail prévoit expressément que les droits de propriété intellectuelle sur les créations réalisées dans l'exercice de ses fonctions appartiennent à la société Maisons du Monde ;

Que c'est à bon droit que le tribunal a considéré que cette dernière était titulaire des droits de dessins et modèles communautaires non enregistrés sur les meubles 'Serengeti', l'argumentation des sociétés Cafom et Vente-Unique.com visant à contester la validité de la cession de droits intervenue au profit de la société Maisons du Monde sur le fondement de l'article L. 131-1 du Code de la propriété intellectuelle étant inopérante dès lors que, poursuivies en contrefaçon, elles ne peuvent invoquer les dispositions qui régissent les rapports entre les auteurs et leurs employeurs ;

Sur le caractère protégeable des meubles revendiqués

au titre du droit d'auteur

Considérant que les dispositions de l'article L. 112-1 du Code de la propriété intellectuelle protègent par le droit d'auteur toutes les œuvres de l'esprit, quels qu'en soient le genre, la forme d'expression, le mérite ou la destination, pourvu qu'elles soient des créations originales ;

Que selon l'article L.112-2 10° du même code, sont considérées notamment comme œuvres de l'esprit les œuvres des arts appliqués ;

Qu'en l'espèce, la société Maison du Monde conclut à l'infirmation du jugement en ce qu'il l'a déclarée irrecevable à agir sur le fondement des droits d'auteur sur les commodes 'Lazare' et 'Serengeti' ainsi que sur le cabinet 'Serengeti' faute de démonstration du caractère original de ces meubles ;

Que tout en sollicitant l'infirmation du jugement sur ce point, lequel a déclaré les demandes irrecevables, les sociétés Cafom et Vente-Unique.com concluent à l'absence de protection par le droit d'auteur des meubles revendiqués faute d'originalité ;

Considérant en l'espèce que la commode 'Lazare' revendiquée se caractérise selon la société Maisons du Monde comme suit :

- une structure en métal, sur roulettes en métal, le plateau du meuble étant en bois naturel,

- des tiroirs agencés de manière asymétrique sur trois niveaux,

- le premier niveau (le haut du meuble) se compose d'un grand tiroir en bois brut avec une poignée en métal et à droite duquel apparaissent les chiffres 1 et 6, séparés par un tiret et inscrits dans un style pochoir et en couleur noire,

- à droite de ce premier tiroir sont disposés deux tiroirs de plus petite hauteur, en bois peint de couleur blanche ; ces derniers comportent au milieu de chacun d'eux, un porte étiquette en métal, deux numéros (un à trois chiffres : 559 et l'autre à deux : 28), ces derniers étant inscrits en couleur noire dans un style pochoir sur le côté droit des tiroirs, contrastant ainsi avec la teinte de ces derniers,

- le niveau du milieu se compose d'une première série de trois tiroirs de petite taille de couleur grise avec poignée articulée ; à droite, est placé un tiroir en bois brut de grande

taille comportant deux poignées en métal noir,

- le dernier niveau du bas est constitué de deux tiroirs de taille et de couleur différentes : à gauche, un grand tiroir en métal de couleur noire avec deux poignées articulées, le numéro 227 étant apposé à droite du compartiment dans un style pochoir et en couleur blanche, contrastant ainsi particulièrement sur la teinte du fond du tiroir ; à droite, un tiroir carré de petite taille et en métal gris, au centre duquel se trouve une unique poignée articulée, et est ainsi représentée :

Considérant que la commode et le cabinet 'Serengeti' sont quant à eux caractérisés selon la société Maisons du Monde comme suit :

s'agissant de la commode :

- une forme rectangulaire dont la structure est en bois de manguier naturel et patiné,

- une série de 2 tiroirs sur trois niveaux, agrémentés de petites poignées bouton en métal noir,

- le tiroir gauche du haut présente une succession de motifs géométriques formant deslosanges, des carrés ou des triangles hachurés, horizontalement ou verticalement, d'un marron doux rappelant la couleur du henné,

- le tiroir du haut à droite se compose de plusieurs bandes verticales composées de petits triangles de couleurs, formant un motif à chevron de couleur beige et ocre, rappelant la couleur des terres d'Afrique du sud,

- les deux tiroirs du milieu ne sont pas décorés, la couleur douce du bois de manguier naturel patiné s'accordant parfaitement avec les motifs des autres tiroirs,

- le tiroir du bas à gauche présente un motif floral de couleur blanche évoquant des étoiles dont les branches verticales et horizontales sont reliées les unes aux autres et forment ainsi des lignes qui contrastent avec la douceur et la rondeur des autres branches du motif,

- le tiroir du bas à droite est composé de lignes verticales de couleur blanche au sein desquelles sont peints des motifs oblongs accolés par paires,

- l'ensemble de ces motifs étant appliqué au pochoir,

- un socle rectangulaire en bois de pochoir,

- un socle rectangulaire en bois de manguier naturel surélevant le meuble et lui conférant de la légèreté

s'agissant du cabinet :

- une forme carrée dont la structure est en bois de manguier naturel et patiné,

- une série de 9 tiroirs de petite taille et carrés sur trois niveaux,

- le tiroir du haut à gauche présente une série de 9 motifs en forme de cercles de couleur marron, rappelant la couleur du henné,

- le tiroir du haut au centre se compose de plusieurs bandes verticales composées de petits triangles de couleurs, formant un motif à chevron de couleur beige et ocre, rappelant la couleur des terres d'Afrique du sud,

- le tiroir du haut à droite présente une série de motifs brun foncé ayant la forme de petits insectes stylisés à plusieurs pattes,

- le tiroir du milieu à gauche est composé de lignes verticales de couleur blanche au sein desquelles sont peints des motifs oblongs accolés par paires,

- le tiroir du milieu au centre présente une succession de motifs géométriques formant des losanges, des carrés ou des triangles hachurés, horizontalement ou verticalement, d'un marron doux rappelant la couleur du henné,

- le tiroir du milieu à droite présente un motif floral de couleur blanche rappelant les étoiles dont les branches verticales et horizontales sont reliées les unes aux autres et forment ainsi des lignes qui contrastent avec la douceur et la rondeur des autres branches du motif,

- le tiroir du bas à gauche présente des motifs en forme de soleil de la même couleur que le meuble sur un fond brun légèrement hachuré,

- le tiroir du bas au centre présente des motifs en forme de demi-sphères, reliées l'une à l'autre en leur centre par un cercle plein de la même couleur que le meuble et sur un fond patiné blanc,

- le tiroir du bas à droite se compose de plusieurs lignes horizontales au sein desquelles se trouvent des motifs en forme d'étoile dont le centre est plein et forme un petit cercle, d'un marron doux rappelant la couleur du henné,

- l'ensemble de ces motifs étant appliqués au pochoir et insérés dans un cadre de couleurs carré,

- quatre pieds en bois massif teinté de couleur noire qui contraste avec les tons chauds et doux rappelant les terres d'Afrique du sud,

et sont ainsi représentés :

Que pour contester l'originalité de ces trois meubles, les sociétés Cafom et Vente-Unique.com soutiennent en substance, s'agissant du 'modèle Lazare' que les caractéristiques revendiquées, prises isolément ou en combinaison, sont celles du style industriel, rude, brut, solide et fonctionnel, qui depuis les années correspond à une tendance pour le mobilier des particuliers ;

Que s'agissant du 'modèle Serengeti', elles font valoir, également en substance, que la commode correspond à une commode ordinaire et banale, composée de 6 tiroirs symétriques et alignés en 2 colonnes de 3 tiroirs, et que le cabinet est composé de 9 portes symétriques et alignés en 3 rangées de portes, que ces éléments fonctionnels ne peuvent faire l'objet d'une appropriation ;

Considérant qu'il résulte en effet de l'examen des pièces produites à l'appui de cette argumentation, et notamment des divers extraits de sites internet versés aux débats que des meubles de style industriel sont proposés aux particuliers depuis plusieurs décennies pour remplir différentes fonctions, ce sous différentes formes, différentes tailles et différents coloris ;

Que si la société Maisons du Monde relève à juste titre qu'aucun des meubles antérieurs, lorsqu'ils ont une date certaine, ne reproduit, dans une même combinaison, l'ensemble des caractéristiques des meubles qu'elle oppose dans le cadre de la présente instance en contrefaçon et qu'aucun d'entre eux ne constitue donc une antériorité de toutes pièces, il convient néanmoins de rappeler que la notion d'antériorité est indifférente en droit d'auteur, seule la preuve du caractère original étant exigée comme condition de l'octroi de la protection au titre du livre I du Code de la propriété intellectuelle ;

Qu'en l'espèce la société Maisons du Monde ne revendique pas des droits d'auteur sur un style - le style industriel- en tant que tel, mais bien sur la combinaison des éléments précités qui caractérisent chacun des trois meubles revendiqués ; que ces meubles comportent des proportions, formes, compositions et combinaison d'éléments particuliers tels que sus-décrits, qui confèrent aux ensembles ainsi créés un aspect esthétique propre et original reflétant l'empreinte de la personnalité de leur auteur ;

qu'il s'ensuit que la commode 'Lazare', la commode 'Serengeti' et le cabinet 'Serengeti' doivent donc bénéficier de la protection au titre des droits d'auteur des livres I et III du Code de la propriété intellectuelle ;

Qu'il y a donc lieu en conséquence d'infirmer le jugement qui en a décidé autrement, étant rappelé que la condition d'originalité est une condition de la protection par le droit d'auteur et que l'action de la société Maisons du Monde est dès lors non seulement recevable mais aussi bien fondée à ce titre ;

au titre des dessins et modèles non enregistrés

Considérant qu'aux termes de l'article 1er -2 a) du Règlement du Conseil n° 6/2002 du 12 décembre 2001, un dessin ou modèle communautaire est protégé en qualité de dessin ou modèle communautaire non enregistré, s'il est divulgué au public selon les modalités prévues par le règlement ;

Que l'article 4-1 du même Règlement dispose que la protection d'un dessin ou modèle par un dessin ou modèle communautaire n'est assurée que dans la mesure où il est nouveau, c'est-à-dire qu'il n'est pas identique ou quasi-identique à un dessin ou modèle divulgué antérieurement, et présente un caractère individuel c'est-à-dire qu'il suscite chez l'observateur averti une impression visuelle d'ensemble différente de celle suscitée par toute création divulguée antérieurement ;

Que selon l'article 10 du même Règlement, la protection conférée par le dessin ou modèle communautaire s'étend à tout dessin ou modèle qui ne produit pas sur l'utilisateur averti une impression visuelle globale différente ;

Que par ailleurs, l'article 11-1 prévoit qu'un dessin ou modèle qui remplit les conditions énoncées dans la section 1 est protégé en qualité de dessin et modèle communautaire non enregistré pendant une période de 3 ans à compter de la date à laquelle le dessin ou modèle a été divulgué au public pour la première fois au sein de la Communauté, et l'article 11-2 précise qu'un dessin ou un modèle est réputé avoir été divulgué au public au sein de la Communauté s'il a été publié, exposé, utilisé dans le commerce ou rendu public de toute autre manière de telle sorte que dans la pratique normale des affaires, ces faits pouvaient être raisonnablement connus des milieux spécialisés du secteur concerné, opérant dans la Communauté ;

Qu'en l'espèce, les sociétés Cafom et Vente-Unique.com font valoir qu'aucune preuve certaine de la divulgation des modèles 'Serengeti' en 2014, sur le territoire de l'Union Européenne, n'est rapportée par la société Maisons du Monde et qu'au demeurant ces modèles ne sont pas nouveaux et ne présentent pas de caractère individuel ;

Considérant cependant que le catalogue Maisons du Monde 2014 montrant les modèles 'Serengeti', corroboré par les attestations de sa secrétaire générale et de son directeur administratif, suffit à donner date certaine à la divulgation de ces modèles ;

Que par ailleurs, comme en première instance les sociétés Cafom et Vente-Unique.com qui ne procèdent que par simples affirmations, n'opposent aucune antériorité, de sorte que le jugement doit donc être confirmé en ce qu'il a dit que la société Maisons du Monde bénéficie, pour les modèles de commode et de cabinet 'Serengeti', de la protection prévue par le Règlement précité sur les dessins et modèles communautaires non enregistrés ;

Sur la contrefaçon

Considérant qu'en vertu des articles L. 122-4 et L. 335-3 du Code de la propriété intellectuelle, toute reproduction, intégrale ou partielle, ou transformation d'une œuvre faite sans le consentement du titulaire des droits d'auteur constitue une contrefaçon ;

Que selon l'article 19 du Règlement n°6-2002 du 12 décembre 2001 sur les dessins ou modèles communautaires, le dessin ou modèle communautaire non enregistré confère à son titulaire le droit exclusif de l'utiliser et d'interdire à tout tiers de l'utiliser sans son consentement, si l'utilisation contestée résulte d'une copie du modèle protégé (...) ;

Qu'enfin selon l'article L. 515-1 du Code de la propriété intellectuelle toute atteinte aux droits définis par l'article 19 du règlement (CE) n° 6-2002 du Conseil du 12 décembre 2001 sur les dessins ou modèles communautaires constitue une contrefaçon engageant la responsabilité civile de son auteur ;

Qu'en l'espèce, les sociétés Cafom et Vente-Unique.com ne contestent pas la contrefaçon de la commode 'Lazare' par la commode 'Craig' ni la contrefaçon de la commode 'Serengeti' par la commode 'Yamuna' autrement qu'en contestant la condition d'originalité des meubles revendiqués et en ajoutant que le défaut de nouveauté et de caractère individuel prive de tout fondement l'action en contrefaçon des modèles 'Serengeti', lesquels présenteraient en tout état de cause des différences non négligeables avec le 'modèle Yamuna' ;

Qu'il résulte en conséquence des motifs sus-énoncés que la contrefaçon de la commode 'Lazare' par la commode 'Craig' est établie ; qu'elle résulte au demeurant des éléments du débat qui révèlent que la commode incriminée reproduit à l'identique la combinaison des caractéristiques de la commode 'Lazare' telles que ci-dessus décrites ;

Que par ailleurs , il résulte de la comparaison dans meubles en cause que la commode et le cabinet 'Yamuna' reproduisent à l'identique la combinaison des caractéristiques de la commode et du cabinet 'Serengeti' telles que ci-dessus décrites, les quelques différences minimes relevées tenant, pour la commode, à la couleur du bois et à la forme du piètement, et pour le cabinet également à la couleur du bois, à la forme des pieds et à la présence de poignées, n'étant pas de nature à modifier la même impression d'ensemble qui se dégagent des meubles en cause ; que la contrefaçon de droits d'auteur est donc établie et il sera ajouté au jugement de ce chef ;

Considérant enfin, que les meubles 'Yamuna' qui reproduisent des motifs qui peuvent être qualifiés d'identiques, dans une même disposition et sur une même structure de meubles, ne produisent pas sur l'utilisateur averti, soit en l'espèce sur l'acheteur de meubles, une impression visuelle globale différente et constituent des copies des modèles 'Serengeti' ; que la contrefaçon des modèles communautaires non enregistrées est donc également constituée, la copie excluant toute bonne foi des sociétés Cafom et Vente-Unique.com, lesquelles n'invoquent au demeurant aucun travail de création indépendant et n'établissent l'existence d'aucune antériorité ; que le jugement sera donc confirmé de ce chef ;

Sur la concurrence déloyale et parasitaire

Considérant que cette demande subsidiaire à l'action en contrefaçon devient sans objet ;

Sur les mesures réparatrices

Considérant qu'il sera fait droit à la mesure d'interdiction dans les termes précisés au dispositif du présent arrêt ; que cette mesure étant suffisante à faire cesser les actes illicites, la demande tendant à la destruction des stocks sera rejetée ;

Considérant qu'aux termes des articles L. 331-1-3 et L. 521-7 du Code de la propriété intellectuelle, 'Pour fixer les dommages et intérêts, la juridiction prend en considération distinctement :

1° Les conséquences économiques négatives de l'atteinte aux droits, dont le manque à gagner et la perte subis par la partie lésée ;

2° Le préjudice moral causé à cette dernière ;

3° Et les bénéfices réalisés par l'auteur de l'atteinte aux droits, y compris les économies d'investissements intellectuels, matériels et promotionnels que celui-ci a retirées de l'atteinte aux droits ;

Qu'interprétées à la lumière de la directive 2004/48/CE du 29 avril 2004 relative au respect des droits de propriété intellectuelle, ces dispositions impliquent que l'indemnisation, qui demeure corrélée au préjudice effectivement subi et démontré, ne peut en l'espèce être réalisée par un cumul des différents postes comme le soutient la société Maisons du Monde, lequel cumul serait non seulement sans lien avec le préjudice mais par nature punitif ;

Considérant que les sociétés Cafom et Vente-Unique.com ne contestent pas la commercialisation des commode et cabinet incriminés référencés 'Yamuna', laquelle résulte en tout état de cause des procès-verbaux de constat dressés le 22 juin 2015 sur les sites vente- unique.com, kauf-unique.de et venta-unica.com ; que la commode 'Yamuna 'était vendue au prix réduit de 279, 99 euros au lieu de 599 euros, le cabinet 'Yamuna' au prix réduit de 239, 99 euros au lieu de 449 euros et la commode ou buffet 'Craig 'au prix de 449,99 euros ou de 399, 99 euros;

Qu'il résulte des attestations de l'expert- comptable et du commissaire aux comptes de la société Vente- unique.com, en date du 11 octobre 2016, que les 'modèles Yamuna' ont été vendus sur internet à compter du 6 février 2015, 11 ventes ayant été réalisées au total sur le territoire de l'Union européenne, soit 3 cabinets, 7 commodes en France et 1 en Allemagne, et que par ailleurs 10 buffets ou commodes 'Craig' ont été vendues en France, le tout avec une marge totale de 2 200,76 euros ;

Que la société Maisons du Monde ayant assigné en France deux sociétés françaises la cour est compétente pour statuer sur les faits de contrefaçon commis sur le territoire de tout Etat membre ;

Considérant que le prix de vente du cabinet 'Serengeti' est de 449 euros, celui de la commode de la même gamme de 549 euros et celui de la commode 'Lazare' de 600 euros ; qu'entre 2014 et 2016 la société Maisons du Monde a vendu 123 cabinets 'Serengeti' pour un chiffre d'affaires TTC de 38 608 euros avec une marge de 69,67 %, 83 commodes 'Serengeti' pour un chiffre d'affaires TTC de 38 577 euros avec une marge de 71 % et au 31 décembre 2013 530 commodes 'Lazare' pour un chiffre d'affaires TTC de 336 165 euros avec une marge moyenne de 74, 41 % ;

Considérant que la perte de chance de reconduire les modèles 'Serengeti' ne présente aucun caractère certain pour la société Maisons du Monde ; qu'enfin la moindre qualité des meubles incriminés, qui ont la même provenance que les meubles revendiqués, n'est pas plus démontrée ;

Considérant qu'au regard de l'ensemble de ces éléments pris en compte distinctement, il sera alloué la somme totale de 30 000 € à la société Maisons du Monde en réparation des actes de contrefaçon commis à son encontre et ce, sans qu'il soit besoin de faire droit à la demande de communication de pièces complémentaires ;

Considérant qu'à titre de complément d'indemnisation il sera fait droit à une mesure de publication sur internet, ce dans les termes définis au dispositif du présent arrêt ;

Sur les autres demandes

Considérant que les sociétés Cafom et Vente-Unique.com qui succombent seront condamnées aux entiers dépens qui comprendront en outre les frais de constats, et qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile ;

Considérant enfin, que la société Maisons du Monde a dû engager des frais non compris dans les dépens qu'il serait inéquitable de laisser en totalité à sa charge ; qu'il y a lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile dans la mesure qui sera précisée au dispositif du présent arrêt.

Par Ces Motifs, LA COUR, Confirme le jugement rendu entre les parties le 2 mars 2017 par le Tribunal de grande instance de Paris en ce qu'il a dit qu'en commercialisant en 2015 des meubles référencés Yamuna consistant en la copie des modèles communautaires non enregistrés référencés 'Serengeti' (commode et cabinet) de la SAS Maisons du Monde France, la SA Vente-Unique.com et la SA Cafom ont concurremment commis à son préjudice des actes de contrefaçon. L'infirme pour le surplus et statuant à nouveau, Déclare la SAS Maisons du Monde France recevable à agir en contrefaçon de droits d'auteur et de dessins et modèles communautaires non enregistrés sur les meubles 'Lazare' et 'Serengeti'. Dit que le modèle de commode dénommé 'Lazare' est original et protégeable par le droit d'auteur au sens des dispositions des Livres I et III du Code de la propriété intellectuelle. Dit que les commode et cabinet dénommés 'Serengeti' sont originaux et protégeables par le droit d'auteur au sens des dispositions des Livres I et III du Code de la propriété intellectuelle. Dit que les modèles de commode et de cabinet dénommés 'Serengeti' sont nouveaux et présentent un caractère individuel au sens des dispositions du Code de la propriété intellectuelle et du Règlement n°6-2002 du 12 décembre 2001 sur les dessins et modèles communautaires. Dit qu'en reproduisant, en important, en offrant à la vente et en commercialisant des copies serviles des modèles de commode 'Lazare' et de commode et de cabinet 'Serengeti', les sociétés Vente-Unique.com et Cafom ont commis des actes de contrefaçon de droits d'auteur et de modèles communautaires non enregistrés. Interdit aux sociétés Vente-Unique.com et Cafom la poursuite de ces agissements sous astreinte de 1 000 euros par infraction constatée à compter de la signification du présent arrêt. Condamne in solidum la société Vente-Unique.com et la société Cafom à payer à la société Maisons du Monde France la somme totale de 30 000 euros à titre de dommages-intérêts définitifs en réparation des actes de contrefaçon commis à son encontre. Ordonne l'inscription du dispositif du présent arrêt sur la page d'accueil des sites internet vente-unique.com, kauf-unique.de et venta-unica.com, sur un espace égal à un tiers de l'écran, pendant une durée d'un mois à compter de la signification du présent arrêt et ce, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard passé ce délai. Condamne les sociétés Vente-Unique.com et Cafom à payer à la société Maisons du Monde France la somme supplémentaire de 10 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile. Rejette toutes autres demandes. Condamne les sociétés Vente-Unique.com et Cafom aux entiers dépens, lesquels comprendront les frais de constat, et dont distraction conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.