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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 4, 26 septembre 2018, n° 15-09123

PARIS

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Socobeval (Sté)

Défendeur :

Bovi Vic SL (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Luc

Conseillers :

Msme Mouthon Vidilles, Comte

Avocats :

Mes Bernabe, Reck, Grappotte-Benetreau, Diaz

T. com. Nancy, du 13 mars 2015

13 mars 2015

FAITS ET PROCÉDURE

La société commercialisation de bétail élevage et viande en Alsace (ci-après "Socobeval") est une société française spécialisée dans l'import/export de bétail.

La société Bovi Vic SL (ci-après Bovi) exerce une activité de vente de bétail en Espagne.

Il n'est pas contesté que la société Socobeval a livré, depuis 1997, des veaux en provenance d'Allemagne et d'Autriche, à la société Bovi.

En 2006, une maladie animale, dite de la langue bleue, s'est déclarée en Allemagne et celle-ci a principalement affecté les bovins. Cette maladie a affecté l'Allemagne en 2007.

Les autorités sanitaires ont alors établi de lourdes restrictions relatives au transport d'animaux provenant des zones touchées, dont l'Allemagne, et à destination de la France et de l'Espagne notamment.

La reprise des échanges a été autorisée en 2008. La société Socobeval estime qu'à compter du mois d'août 2008, la société Bovi a cessé de façon brutale, sans préavis, leurs relations commerciales, pour s'approvisionner directement auprès de ses fournisseurs étrangers.

Le 24 février 2010, la société Socobeval a alors adressé un courrier recommandé à la société Bovi afin de rappeler à cette dernière ses obligations contractuelles.

Le 23 février 2011, la société Socobeval a fait délivrer à la société Bovi une sommation.

Puis, par exploit du 17 mars 2011, la société Socobeval a assigné la société Bovi Vic SL devant le Tribunal de grande instance de Mulhouse afin que cette dernière soit condamnée à payer des dommages et intérêts pour non-respect d'un préavis de 30 mois.

Par jugement du 27 août 2012, le Tribunal de grande instance de Mulhouse s'est déclaré incompétent au profit du Tribunal de commerce de Nancy.

Par jugement du 13 mars 2015, le Tribunal de commerce de Nancy a :

- déclaré la société Socobeval mal fondée en l'ensemble de ses demandes, l'en a déboutée,

- déclaré la société Bovi Vic SL mal fondée en sa demande indemnitaire, l'en a déboutée,

- condamné la société Socobeval à payer à la société Bovi Vic SL la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile,

- fait masse des dépenses du présent jugement et les a mis à la charge de la société Socobeval.

La société Socobeval a relevé appel de ce jugement.

LA COUR

Vu l'appel de la société Socobeval et ses conclusions, notifiées le 25 mai 2018, par lesquelles il est demandé à la cour, au visa de l'article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce, de :

- déclarer l'appel de la société Socobeval recevable en la forme et bien fondé au fond,

- infirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions,

statuant à nouveau,

- condamner la société intimée à payer à la société appelante la somme de 1 166 040 euros à titre de dommages et intérêts, pour non-respect d'un préavis de 30 mois, assortie des intérêts de droit à compter de la mise en demeure du 24 février 2010,

- condamner la société intimée à payer à la société appelante la somme de 10 000 euros au titre du préjudice moral subi,

- débouter la société intimée de sa demande reconventionnelle et de l'ensemble de ses prétentions,

- condamner la société intimée à payer à la société appelante la somme de 15 000 euros au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,

- condamner la société la société intimée aux entiers frais et dépens';

Vu les dernières conclusions de la société Bovi Vic SL, intimée, notifiées le 22 mai 2018, par lesquelles il est demandé à la cour de :

vu les articles 1315 et 1382 du Code civil,

vu l'article 9 du Code de procédure civile,

vu l'article L. 442-6 du Code de commerce,

- recevoir la société Bovi en ses écritures et l'en déclarer bien fondée,

en conséquence,

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté la société Socobeval de l'ensemble de ses demandes,

- réformer pour le surplus,

statuant de nouveau,

- condamner la société Socobeval à payer à la société Bovi Vic la somme de 50 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,

- condamner la société Socobeval à payer la société Bovi Vic la somme de 50 000 euros à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive,

- condamner la société Socobeval à payer à la société Bovi Vic la somme de 20 000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile,

- condamner la société Socobeval aux entiers dépens';

SUR CE

Sur la rupture brutale des relations commerciales établies

La société appelante reproche à la société Bovi d'avoir rompu brutalement leurs relations commerciales établies en ne reprenant pas, après la crise sanitaire, en octobre 2008, le flux habituel des échanges entre elles.

Si aux termes de l'article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce, " Engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers : De rompre brutalement, même partiellement, une relation commerciale établie, sans préavis écrit tenant compte de la durée de la relation commerciale et respectant la durée minimale de préavis déterminée, en référence aux usages du commerce, par des accords interprofessionnels ", la société qui se prétend victime de cette rupture doit établir au préalable le caractère suffisamment prolongé, régulier, significatif et stable du courant d'affaires ayant existé entre elle et l'auteur de la rupture, qui pouvait lui laisser augurer que cette relation avait vocation à perdurer.

Il incombe également à la société qui s'en prétend victime de démontrer que la rupture incombe au partenaire assigné.

Si les parties s'accordent sur l'existence de relations commerciales établies entre elles, sur le point de départ de celles-ci et sur le caractère de force majeure de la crise sanitaire ayant entraîné un arrêt temporaire des relations, elles s'opposent sur l'imputabilité de la rupture et sur le moment de l'arrêt des relations.

La société Socobeval estime que c'est la société Bovi qui est l'auteur de la rupture de leurs relations commerciales, en qualité d'acheteur. Elle fait valoir qu'après la période de suspension des relations contractuelles entre les parties dûe à la crise sanitaire ayant entraîné la fermeture des frontières avec l'Espagne, constitutive d'un cas de force majeure, les relations entre les parties auraient dû être reprises en octobre 2008. La société Bovi n'ayant pas émis de commandes à compter de cette date, elle serait responsable de la rupture. Le motif de cette rupture résiderait dans la volonté de la société Bovi d'acheter directement le bétail aux fournisseurs allemands.

En réplique, la société Bovi fait valoir que les relations antérieures se déroulaient sur la base d'une offre de bétail de la société Socobeval et qu'en l'espèce, celle-ci ne démontrant [sic] pas lui avoir proposé des bovins à l'achat ; par conséquent, c'est elle qui est responsable de la rupture. Elle souligne par ailleurs qu'elle n'a pas évincé l'appelante dans le but d'augmenter ses revenus en réduisant ses charges mais a subi au contraire une situation qui a entraîné pour elle une perte de clients. La société Socobeval, confrontée à la baisse de l'offre des producteurs allemands, qui s'étaient tournés vers l'Europe du Nord pendant la crise sanitaire et ne souhaitaient pas reprendre le flux antérieur des échanges avec Socobeval, aurait renoncé à approvisionner la société Bovi, à cause de la baisse de rentabilité de l'activité, confrontée à l'augmentation du prix du transport. Ainsi, elle soutient que loin d'avoir cessé d'acheter des bovins à la société Socobeval, c'est cette dernière qui a cessé de lui en vendre. Elle prétend que les relations commerciales entre les parties se sont poursuivies jusqu'en janvier 2010 avec la société Vilatra qui appartient à la même famille que la société Bovi.

La charge de la preuve de la rupture et de son imputabilité incombe à la partie victime, qui doit établir qu'elle a subi un arrêt des relations commerciales sans préavis, à savoir, en l'espèce, que lors de la réouverture des frontières, après la crise sanitaire, la société Bovi aurait dû prendre l'initiative en commandant des veaux à la société Socobeval. Cette démonstration doit être dénuée de toute ambiguïté sur les circonstances de la rupture.

La société Socobeval démontre l'arrêt de tout flux d'affaires avec la société Bovi en octobre 2008, la société Bovi ne rapportant pas la preuve que le petit volume de transactions réalisé par elle avec la société Vilatra, société indépendante dont les associés sont communs avec ceux de la société Socobeval, constituerait le prolongement de celles ayant existé avec la société Socobeval.

Cet arrêt des relations n'a fait l'objet d'aucun préavis écrit de part et d'autre.

Pour établir la preuve de l'imputabilité de la rupture à la société Bovi, la société appelante verse aux débats :

- des attestations de plusieurs fournisseurs allemands (pièces 10a à 10d de Socobeval) par lesquelles ceux-ci ont expliqué que les veaux étaient livrés par eux à Socobeval en France, et qu'à partir de l'arrêt des relations de Socobeval avec Bovi, ils n'ont plus été sollicités par Socobeval : ces attestations ne démontrent pas que la rupture est imputable à la société Bovi ;

- une attestation de M. Hagspiel, fournisseur allemand (pièce 40), relatant, en complément de sa précédente déclaration " j'ajoute que (...) j'aurais pu livrer l'entreprise Socobeval après l'épidémie de fièvre catarrhale : en réalité, je ne l'ai pas livrée (contrairement à ce qui est écrit par erreur dans une traduction de ma déclaration en français). Je me souviens en effet que l'entreprise Bovi a refusé la livraison de veaux que l'entreprise Socobeval avait proposé de lui vendre après la fin de l'épidémie de fièvre catarrhale. Nous avons appris que l'entreprise Bovi achetait directement en Allemage et excluait l'entreprise Socobeval pour éliminer un intermédiaire " : cette déclaration est sujette à caution, car elle vient compléter une première déclaration qui ne contenait pas cette affirmation, selon laquelle l'entreprise Bovi aurait refusé la livraison de veaux que l'entreprise Socobeval avait proposé de lui vendre après la fin de l'épidémie de fièvre catarrhale ;

- une attestation de Daniel Dreyfuss qui servait d'intermédiaire entre les sociétés Socobeval et Bovi et témoigne avoir insisté auprès de Bovi en Espagne pour que cette société reprenne les relations avec Socobeval (pièce 12 de Socobeval) : mais la circonstance que la société Bovi ait été sollicitée ne démontre pas que la rupture lui soit imputable ;

- une attestation de M. Fessler (pièce 27 de Socobeval) courtier en bovins sur le marché allemand et exposant : " je peux attester qu'il est notoire et d'ailleurs à ma connaissance personnelle que la société Bovi, depuis qu'elle a décidé de cesser ses relations commerciales avec la société Socobeval, continue à se fournir directement auprès des anciens fournisseurs allemands de cette dernière. J'atteste également que Monsieur Daniel Dreyfuss, avec lequel je suis en relations régulières, m'avait indiqué qu'il était intervenu à de nombreuses reprises auprès des dirigeants de la société Bovi pour qu'ils arrêtent de se fournir directement en Allemagne et renouent avec la société Socobeval " : les observations formulées ci-dessus sont vraies aussi pour cette attestation ;

- deux attestations sur l'origine de la rupture émanant pour l'une de M. Gouin, qui a travaillé avec la société Socobeval : " je peux vous dire que connaissant très bien la Socobeval et les personnes qui la dirigent, je ne crois pas un seul instant que ce soit eux qui ont arrêté de travailler avec la société Bovi. J'atteste donc par la présente que pour ma part, je suis certain que ce n'est pas Socobeval qui a arrêté les relations commerciales. D'ailleurs quand on travaille de façon hebdomadaire avec un client depuis autant d'années et pour des montants de cette importance, il faut être fou ou bête d'arrêter à moins d'un problème majeur, ce qui ne me paraît pas être le cas " (pièce 21a de Socobeval). L'autre émane de M. Linder, directeur d'abattoir et expose : " je ne peux croire un seul instant que Socobeval aurait voulu arrêter de livrer un client aussi important que Bovi " (pièce 21b de Socobeval) : mais ces attestations ne font état que de simples opinions des deux intéressés ;

- deux attestations de transporteurs sous-traitants, MM. Kirmayr et Leicht (pièces 22a et 22b de Socobeval) relatant avoir transporté les veaux depuis l'Allemagne ou l'Autriche jusqu'au siège de la société Socobeval à Menspach, où ceux-ci étaient triés, abreuvés et nourris, puis livrés en Espagne à Vic chez Bovi : elles ne rapportent pas plus la preuve de l'imputabilité de la rupture ;

- deux mises en demeure adressées par la société Socobeval à la société Bovi les 24 février 2010 et 22 février 2011 : la première est signée de M. Harfenist (pièce 4 de Socobeval) : " Nous avons constaté que nos relations commerciales relatives à notre activité " import " étaient arrêtées, nos seules livraisons portant sur quelques veaux de provenance française. Dans le même temps nous avons appris que vous vous fournissez depuis directement auprès de nos fournisseurs étrangers. Je rappelle que la rupture des relations d'affaires ne peut intervenir qu'après le respect d'un délai de préavis dont la durée dépend de l'importance de ses relations. En l'espèce vous ne nous avez jamais informé de votre décision de cesser nos relations commerciales concernant les veaux dont je fais état ci-dessus. (...). Cette situation nous est particulièrement préjudiciable, d'une part en raison de la perte d'activité qui en découle, d'autre part en raison des importants investissements que nous avons dû réaliser faire ce marché, outre l'embauche du personnel compétent ". La seconde mise en demeure est signée du conseil de la société Socobeval et sollicite l'allocation de la somme de 958 800 euros en réparation de la perte de marge brute sur une période de 30 mois de préavis due à la rupture brutale alléguée des relations commerciales (pièce 5 de Socobeval). Ces deux mises en demeure, adressées près d'un an et demi après la prétendue rupture brutale, ne sont pas davantage probantes.

De tout ce qui précède, il résulte que, selon l'usage de la profession relaté par une attestation de la Fédération des Commerçants en Bestiaux (FFCB) (pièce 3 de Socobeval), les relations entre les parties étaient purement orales. La société Socobeval livrait des veaux achetés en Allemagne à la société Bovi en Espagne. Pour ce faire, les veaux étaient livrés par les fournisseurs allemands à Socobeval en France et après tri et accord sur le prix au siège de Socobeval, les veaux étaient livrés en quantités variables à la société Bovi, en Espagne, sans que celle-ci ne se soit liée par des commandes préalables. Selon l'attestation de M. Daniel Dreyfuss du 22 août 2013 (pièce 12 de l'appelante), qui s'est rendu chez Bovi en Espagne et a insisté auprès de Bovi pour que cette société reprenne les relations commerciales : " Le nombre de veaux livrés à Bovi variait selon l'offre d'une semaine à l'autre. Il n'y avait pas de commande précise, mais nonobstant les variations, Socobeval livrait par mon intermédiaire la société Bovi chaque semaine. (...) J'atteste que Socobeval et moi-même avons été à plusieurs reprises contactés par d'autres clients espagnols. Toutefois nous avons dû décliner leur demande, Bovi ayant exigé une exclusivité de livraison sur le marché espagnol ".

En l'absence de tout bon de commande, il apparaît que l'initiative des relations venait de l'offre de la société Socobeval. En effet, compte tenu d'un accord oral consacré par l'usage, il était convenu que la société Bovi, comme d'ailleurs d'autres négociants en bétail, achète des veaux chaque semaine, parmi ceux livrés dans les locaux de Socobeval, selon une procédure constante, à partir d'une offre hebdomadaire faite par la société Socobeval, les quantités achetées et les prix étant négociés chaque semaine, selon l'état et la qualité des veaux livrés.

En outre, la société Bovi, qui soutient que c'est la société Socobeval qui ne lui a pas proposé de veaux à la vente et qui serait à l'origine de la rupture, appuie ses assertions sur plusieurs attestations, qui font ressortir que la société Socobeval ne souhaitait plus acheter aux fournisseurs allemands, ceux-ci ayant, pendant la crise, trouvé d'autres débouchés, et ne pouvant plus, une fois la crise passée, proposer le même volume à la société Socobeval, dont le désintérêt pour le maintien des relations antérieures ressort de plusieurs déclarations.

C'est ainsi que la société Schmitz, fournisseur de veaux allemand a déclaré : " Après la fin des interdictions d'exporter, l'entreprise Schmitz a renoué ses relations commerciales avec l'Espagne, entre autres également avec l'entreprise Vilarta, mais pas avec la société Socobeval qui n'a montré aucun intérêt à le faire " (pièce 6 la société Bovi).

De même, la société Wiesinger a attesté : " en octobre 2008, lorsque les problèmes de l'épidémie de la langue bleue ont été surmontés et les frontières avec l'Espagne à nouveau ouvertes, l'entreprise Socobeval a signalé au soussigné qu'il lui était difficile de poursuivre leurs relations commerciales, étant donné que les coûts de transport constituaient un problème en raison de la chute des ventes de veaux provenant d'Allemagne et d'Autriche. Jusqu'en avril 2009, le soussigné a maintenu ses relations commerciales avec Socobeval grâce à des veaux destinés à Bovi, mais a cherché entre temps des alternatives plus économiques de routes de transport à travers l'Italie, en raison des problèmes de frais de transport. Cependant cette dernière route de transport n'a pas intéressé Socobeval étant donné que si les veaux étaient envoyés par l'Italie, les jeunes veaux provenant de la France n'étaient pas livrés. Pour cette raison, les relations commerciales déjà mentionnées ont pris fin en avril 2009 " (pièce 10 de Bovi). La rétractation de ce fournisseur à la demande de la société Socobeval ne saurait enlever à cette déclaration son caractère convaincant et explicatif.

Au total, après l'interruption des relations commerciales, due à la fièvre catarrhale qui a entraîné la fermeture temporaire des frontières avec l'Espagne, il n'est donc pas démontré par la société Socobeval que l'initiative de la reprise des relations aurait dû venir de la société Bovi et donc, que la rupture lui serait imputable.

Le jugement entrepris sera donc confirmé sur ce point.

Sur les demandes reconventionnelles de la société Bovi Vic

La société Bovi estime avoir subi un préjudice du fait de la rupture abusive des relations par la société Socobeval, ayant subi une situation qui a entraîné pour elle une perte de clients et demande dans le dispositif de ses conclusions que la société Socobeval soit condamnée à lui payer la somme de 50 000 euros à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive.

Mais elle ne démontre pas en quoi cette rupture serait abusive, se contentant de souligner dans le corps de ses écritures que la " rupture brutale opérée par Socobeval n'a pas permis à Bovi Vic de préparer la transition entre Socobeval et un nouvel intermédiaire éventuel ".

Sa demande sera donc rejetée.

Elle estime par ailleurs que l'action intentée par la société appelante revêt un caractère abusif et demande, à ce titre, que la société Socobeval soit condamnée à lui verser la somme de 50 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive.

Mais l'appréciation inexacte qu'une partie fait de ses droits ne caractérise pas à elle seule l'abus du droit d'agir et ce n'est que dans des circonstances tout à fait exceptionnelles que le fait d'intenter une action en justice est susceptible de constituer un abus, l'accès au juge étant un droit fondamental et un principe général garantissant le respect du droit. L'exercice d'une action en justice ne dégénère en abus que dans le cas de malice, de mauvaise foi ou d'erreur grossière équivalente à un dol, les juges du fond ayant l'obligation de caractériser les circonstances ayant fait dégénérer en abus le droit d'agir.

Or, la société Bovi ne rapporte pas la preuve d'abus de la part de la société Socobeval et sa demande sera rejetée.

Sur les dépens et frais irrépétibles

Succombant au principal, la société Socobeval sera condamnée à supporter les dépens d'appel ainsi qu'à payer à la société Bovi Vic la somme de 10 000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile.

Par ces motifs : LA COUR, confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions ; y ajoutant ; rejette la demande de la société Bovi Vic pour procédure abusive et rupture abusive ; condamne la société Socobeval aux dépens de l'instance d'appel qui seront recouvrés selon les dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile ; condamne la société Socobeval à payer à la société Bovi Vic la somme de 10 000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile.