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Décisions

CA Montpellier, 1re ch. B, 10 octobre 2018, n° 16-02660

MONTPELLIER

Arrêt

PARTIES

Défendeur :

Espace Design Mobalpa (Eurl)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Torregrosa

Conseillers :

M. Combes, Mme Remili

TI Montpellier, du 18 févr. 2016

18 février 2016

Faits et procédure

Selon bon de commande du 6 juin 2014 modifiant celui précédemment signé le 27 mars 2014 Patrice G. a confié à l'Eurl Espace Design Mobalpa la fourniture et la pose d'une cuisine moyennant le prix de 4 486,03 €.

A la suite de l'installation de la cuisine le 15 septembre 2014 et aux motifs que celle-ci présentait un certain nombre de non conformités qu'il signalait dès le 22 septembre 2014, Patrice G. a fait assigner l'Eurl Espace Design Mobalpa devant le tribunal d'instance de Montpellier, lequel selon jugement rendu le 18 février 2016 l'a débouté de l'ensemble de ses demandes et condamné à payer à son adversaire la somme de 800 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

Moyens et prétentions des parties

Patrice G. a relevé appel de cette décision dans des formes et des délais qui n'apparaissent pas critiquables.

Par conclusions dernières en date du 24 février 2017 il fait d'abord porter ses critiques sur un meuble d'angle dont la longueur n'est pas de 95 cm mais seulement de 80 cm et dont la porte ne mesure que 30 cm au lieu des 40 cm qu'il souhaitait, le fait constituant un manquement de l'Eurl Espace Design Mobalpa à l'obligation d'information et de conseil pesant sur elle, comme à celle consistant à livrer une chose conforme à ses obligations contractuelles.

Il relève en l'occurrence l'absence d'un plan de conception métré préalablement à la signature du bon de commande, comme postérieurement celle d'un plan coté, ce qui l'aurait privé d'apprécier pleinement l'offre et de s'engager en toute connaissance de cause, et soutient que le plan d'implantation du 24 mars 2014 ne correspond pas à la cuisine livrée et posée.

Il considère en outre que son adversaire n'a pas respecté les consignes données en remplaçant le meuble d'angle existant d'une longueur de 95 cm qui occupait tout l'espace par un meuble dont la longueur n'est que de 80 cm auquel a été ajouté un fileur de 15 cm.

Concluant à la condamnation de l'Eurl Espace Design Mobalpa à mettre la cuisine en conformité, il inclut ensuite dans cette même demande les réserves formées lors de la pose et d'autres formées depuis lors que le premier juge n'aurait pas examinées.

Enfin et au vu du constat dressé à sa requête le 17 novembre 2016, il sollicite la condamnation sous astreinte de la même à reprendre les malfaçons que celui-ci révèle.

Soutenant que sa cuisine est inutilisable en ce sens qu'il n'a pu depuis le 15 septembre 2014 poser le plan de travail, il réclame en réparation du préjudice qui en découle la condamnation de son adversaire à lui payer la somme provisoirement arrêtée de 13 200 € à titre de dommages et intérêts outre celle de 2 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

Par conclusions dernières en date du 29 juillet 2016, l'Eurl Espace Design Mobalpa qui reconnaît avoir reçu plans et photographies de la cuisine alors en place, soutient avoir rempli son devoir de conseil en passant plusieurs heures en compagnie de son client pour concevoir une cuisine correspondant aux attentes de celui-ci et l'avoir informé des caractéristiques des éléments composant la cuisine dont les dimensions du meuble d'angle litigieux, alors qu'il n'a formé aucune exigence particulière à ce sujet, a accepté le plan d'implantation et n'a émis aucune réserve à réception de la cuisine de telle sorte qu'il n'existe aucun manquement à son obligation de délivrance conforme.

Contestant les défauts qu'il invoque - si elle ne mentionne pas cette offre au dispositif de ses conclusions - elle accepte de reprendre certains d'entre eux, soit le remplacement de la façade de tiroir en 120 cm et un fileur abîmés lors du transport, la fourniture et la pose d'un fileur pour élément haut Ref. FIH69, le remplacement d'un panneau de décoration et la rectification des défauts de pose sur un fileur et une plinthe.

Elle conteste en revanche l'existence de malfaçons que Patrice G. n'avait jamais invoquées et conteste que la cuisine livrée dans les délais prévus soit inutilisable par le seul fait d'un prétendu écart de 10 cm de largueur de la porte du meuble bas alors que son adversaire a sciemment décidé de ne pas poser le plan de travail qui ne faisait pas partie de la commande.

Concluant à la confirmation de la décision déférée, elle sollicite la condamnation de Patrice G. à lui payer la somme de 1 900 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

Motifs

Attendu en premier lieu que par application de l'article L. 111-1 du Code de la consommation dans sa rédaction applicable aux faits de l'espèce, le vendeur professionnel est tenu d'une obligation précontractuelle d'information, visant à faire connaître au consommateur les caractéristiques essentielles du bien vendu qui lui impose, notamment, de se renseigner sur les besoins de l'acheteur et de l'informer de l'adéquation de la chose proposée à l'utilisation qui en est recherchée ; et qu'il lui incombe de rapporter la preuve de ce qu'il a bien satisfait à cette obligation ;

Que de l'aveu de l'appelant lui-même qui développe cette critique sur 8 pages, le litige ne porte que sur les dimensions du meuble d'angle ;

Attendu qu'il ressort toutefois de la relation des faits par les parties que le vendeur s'est correctement informé des souhaits de son client, prenant en compte les photographies et le plan coté remis par celui-ci et en proposant un premier projet le 27 mars 2014, ensuite amendé le 6 juin 2014 pour tenir compte des modifications souhaitées, le tout aboutissant à un bon de commande énumérant le détail des éléments numérotés de 1 à 17 composant la cuisine, parmi lesquels le meuble bas d'angle litigieux n° 6 référencé BAEF95 aux dimensions 95 x 58 x 69 comprenant une porte sans autre précision, et facturant des prestations dont le déplacement pour prises de cotes et réalisation des plans techniques ;

Que si le premier grief porte sur l'absence d'un plan métré ou coté, celui produit par l'Eurl Espace Design Mobalpa à l'échelle 1/33 daté du 27 mars 2014 et approuvé par Patrice G., s'il ne fait effectivement pas mention de métrés, précise l'implantation de chacun des éléments composant la cuisine dont les dimensions sont connues par la lecture du bon de commande, le projet ainsi soumis à l'appelant lui permettant de connaître les caractéristiques de la cuisine proposée au point qu'il a pu réclamer les modifications qui lui paraissaient nécessaires ; et que la critique reste du domaine de la forme dès lors que ce plan respecte nécessairement les dimensions de la pièce et les contraintes nées des ouvertures existantes pour cette raison que l'implantation des éléments de mobilier s'est faite sans erreur, traduisant la connaissance par le vendeur des mesures exactes des lieux à la faveur d'une visite lui ayant permis d'opérer les relevés nécessaires et démontrant en conséquence qu'il ne s'est pas contenté du plan remis par son client pour concevoir ce projet ;

Que contrairement à ce que soutient ensuite Patrice G., figure encore au projet l'élément n°4 fileur pour élément bas de 15 cm de largeur associé au meuble d'angle qui a effectivement été implanté ainsi que l'illustre la photographie qu'il produit en pièce 20 de telle sorte que n'existe aucune discordance entre le plan et le bon de commande ;

Et que rien ne permet enfin de retenir que le vendeur aurait du respecter une consigne liée à la reprise à l'identique des dimensions des meubles d'origine, laquelle se concilierait d'ailleurs mal avec la prestation attendue de la conception d'une nouvelle cuisine, ni que le meuble d'angle ait nécessairement du être équipé d'une porte de 40 cm, l'appelant reconnaissant lui-même dans un courriel du 21 novembre 2014 qu'il aurait du exiger cette précision, alors de surcroît qu'étant présent lors de la pose il n'a émis aucune observation relative aux dimensions du meuble en cause ;

Qu'au résultat de l'ensemble la démonstration est suffisamment apportée que le vendeur a rempli l'obligation précontractuelle d'information pesant sur lui ;

Attendu en second lieu qu'en vertu de l'article L. 211-5 du Code de la consommation, le vendeur est tenu de livrer un bien conforme au contrat et répond des défauts de conformité existant lors de la délivrance ; et qu'aux termes de l'article L. 211-7, les défauts de conformité qui apparaissent dans un délai de six mois à partir de la délivrance du bien sont présumés exister au moment de la délivrance, sauf preuve contraire ;

Attendu que si la conformité du meuble d'angle au bon de commande ressort suffisamment de ce qui précède dès lors que celui livré présente les dimensions et caractéristiques qui s'y trouvent mentionnées, le débat est clos par le certificat de fin de travaux du 15 septembre 2014 qui mentionne la satisfaction du client sur les huit items concernant ces travaux dont trois sont relatifs à la mise en place des éléments, au réglage des façades et des faces de tiroirs, à la vérification de la pose, du bon fonctionnement et de la conformité des meubles, façades, plans de travail et mise en route des appareils électroménagers et sanitaires, et ne contient pour seules réserves que celles relatives à un fileur abîmé et un tiroir écaillé et se termine par cette appréciation 'travail de pro explications précises conseils judicieux et idées de déco appréciées' ;

Que le vendeur ne conteste pas devoir procéder aux reprises de ces réserves comme il accepte de reprendre celles énumérées dans le courrier adressé le 4 décembre 2014 par l'Union de consommateurs saisie du litige à l'exception justifiée, d'abord du remplacement de l'armoire de four alors que la modification avait été acceptée pour une raison esthétique ainsi que le précise l'appelant en conséquence infondé à revenir sur cet accord, ensuite de l'adaptation d'une plaque métallique de protection qui n'a pas fait l'objet de la commande ;

Qu'il conviendra de lui en donner acte et au besoin de l'y condamner ;

Attendu en revanche que si Patrice G. invoque diverses malfaçons qui affecteraient selon lui la cuisine et qui pour la plupart concernent un défaut d'aspect ou des éclats du stratifié dont l'origine n'est pas établie, il ne rapporte pas la preuve qui lui incombe au moyen de simples photographies et d'un constat dressé à sa requête le 17 novembre 2016, soit deux ans après l'installation, alors même que ces griefs ne figurent ni à sa réclamation du 4 décembre 2014 visée ci-dessus, ni à l'exploit introductif d'instance du 27 avril 2015 ;

Attendu enfin que Patrice G. ne fait pas davantage la démonstration d'un préjudice distinct de celui qui sera réparé par la reprise des non conformités relevées en invoquant l'impossibilité d'utiliser la cuisine en raison du caractère limité de ces désordres, dont il ne peut sérieusement soutenir qu'ils l'aient empêché de poser le plan de travail et de rendre en conséquence la cuisine inutilisable au point de ne pouvoir recevoir sa famille ;

Attendu que succombant pour l'essentiel Patrice G. doit les dépens sans qu'il apparaisse justifié en équité de prononcer à son encontre la condamnation prévue par l'article 700 du Code de procédure civile.

Par ces motifs, LA COUR, Statuant par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe et en dernier ressort, Déclare l'appel recevable en la forme, Confirme le jugement déféré, Y ajoutant, Donne acte à l'Eurl Espace Design Mobalpa de son engagement de procéder au remplacement de la façade de tiroir en 120 cm et du fileur abîmés lors du transport, à la fourniture et à la pose d'un fileur pour élément haut Ref. FIH69, au remplacement d'un panneau de décoration et à la rectification des défauts de pose sur un fileur et une plinthe ; au besoin l'y condamne, Rejette toute autre demande et dit inutiles ou mal fondées celles plus amples ou contraires formées par les parties, Condamne Patrice G. aux dépens.