CA Toulouse, 2e ch., 17 octobre 2018, n° 16-05199
TOULOUSE
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Uskon Uzay Sistem (Sté)
Défendeur :
MMA Iard (SA) , MMA Iard Assurances Mutuelles (Sté), Berdan Civata (Sté), Constructions Saint Eloi (Sas), Ergo Sigorta Adana Bolge Mudurlugu (Sté) , Sa-Ra Enerji Insaat Ticaret Sanayi As Adana Fabrik A (Sté)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Penavayre
Conseillers :
Truche, Sonneville
Exposé du Litige
La société Constructions Saint Éloi (CSE en abrégé) est attributaire du lot numéro 3 " charpente métallique " d'un marché de travaux publics relatif à la construction d'une piscine-patinoire du complexe sportif des Argoulets à Toulouse pour un montant de 1 262 153,93 euros hors-taxes.
Suite à un devis accepté le 2 septembre 2009, la société CSE a passé commande à la société Uskon Uzay Sistem (Uskon en abrégé) d'une charpente métallique préfabriquée qui a été livrée courant décembre 2009.
Le 22 juin 2010, il a été constaté le cisaillement d'un boulon de gamme M56 dans la structure de la patinoire et compte tenu des risques d'effondrement, le maître de l'ouvrage a ordonné l'arrêt du chantier.
La société Uskon a été informée du sinistre le 23 juin 2010.
Le boulon litigieux a été analysé par des laboratoires spécialisés qui ont révélé une anomalie de traitement thermique ayant pour conséquence la formation d'une fissure appelée " tapure de trempe " qui le rend inapte à son utilisation.
Les sociétés Uskon, constructeur de la charpente métallique préfabriquée, et la société Berdan Civata, fournisseur des vis et boulons (sociétés de droit turc) après concertation avec la société CSE et le bureau de contrôle mandaté par la mairie de Toulouse ont décidé de changer tous les boulons de traction de type M56 et M64 (88) qui sont des éléments portant de la toiture.
Les travaux de reprise ont été réalisés courant août/septembre et le chantier a repris son cours normal le 20 septembre 2010.
Les assureurs de la société CSE ont fait diligenter une expertise pour chiffrer les dommages qui ont été évalués à 674 562,26 euros et ont indemnisé les différentes sociétés intervenant sur le chantier, en ce compris CSE qui a perçu une somme de 268 010,45 euros .
Par actes d'huissier du 20 juin 2012, la société CSE et son assureur, la société Covea Risksont assigné les sociétés Uskon et Berdan devant le tribunal de commerce de Toulouse.
Par jugement du 20 février 2014, une expertise a été ordonnée et confiée à Monsieur P..
L'expert a déposé son rapport le 23 janvier 2015 après avoir confié pour analyse le boulon litigieux au laboratoire du Cetim.
Par actes d'huissier déposés au greffe le 29 juin 2015 , la société Berdan Civata a appelé en cause la société Sa-Ra Enerji Insaat Ticaret Sanayi As Adana Fabrika(la société Sa-Ra) qui a réalisé le traitement thermique des boulons et son assureur, la société Ergo Sigorta Adana Bolge Mudurlugu.
Par jugement du 21 juillet 2016 assorti de l'exécution provisoire, le tribunal de Commerce de Toulouse a :
-déclaré valable l'assignation d'appel en cause de la Sa-Ra diligenté par la société Berdan
-déclaré inopposable à cette société les rapports d'expertise diligentés dans la présente instance en ce compris le rapport d'expertise judiciaire de Monsieur P.
- débouté la société Berdan de sa demande tendant à voir condamner la société Sa-Ra à la relever et garantir de toutes les condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre
-débouté la société Sa-Ra de sa demande de condamnation de la société Berdan à lui payer la somme de 150 000 à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive
-condamné la société Berdan à payer à la société Sa-Ra la somme de 2500 sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile
- rejeté la demande de nouvelle expertise au contradictoire de toutes les parties
-condamné solidairement la société Uskon Uzay Sistemet la société Berdan Civata à payer à la société Covea Risks et à la société Constructions Saint Eloi la somme de 476 014 outre 12 000 sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile
-Rejeté l'appel en garantie formé par la société Uskon à l'encontre de la société Berdan
-débouté la société Uskon de sa demande tendant à voir condamner la société Constructions Saint Éloi à lui payer la somme de 41 164,90 euros à titre de dommages et intérêts
-débouté la société Berdan de sa demande tendant à voir condamner la société Constructions Saint Éloi et son assureur à lui payer la somme de 44 394 en réparation des frais occasionnés par le litige
-débouté la société Berdan de son appel en garantie à l'encontre de la société Ergo Sigorta Adana Bolge Mudurlugu
-condamné les sociétés Uskon et Berdan aux entiers dépens de l'instance.
La société Uskon a interjeté appel de cette décision par déclaration enregistrée le 24 octobre 2016.
La société Berdan a également relevé appel de ce jugement le 22 décembre 2016.
Les deux procédures ont été jointes par ordonnance du conseiller de la mise en état du 9 février 2017.
Par ordonnance du 28 juillet 2017, le conseiller de la mise en état a dit n'y avoir lieu à radiation de l'affaire sur le fondement de l'article 526 du Code de procédure civile et renvoyé la procédure à la mise en état.
L'ordonnance de clôture est en date du 25 juin 2018.
Moyens et prétentions des parties
La société Uskon Uzay Sistema notifié ses conclusions récapitulatives le 15 mai 2018 .
Elle demande d'infirmer le jugement du tribunal de commerce et en conséquence:
A titre principal,
-de débouter les sociétés CSE et Covea Risks de toutes leurs demandes
A titre subsidiaire,
-de condamner la société Berdan à la garantir de toutes les condamnations qui seraient prononcées contre elle-même
A titre reconventionnel,
-de condamner la société CSE à lui payer la somme de 41 164,90 euros à titre de dommages et intérêts (pour les frais de personnel qu'elle a envoyé en France pour superviser les opérations)
-de condamner les sociétés CSE et Covea Risksà lui payer solidairement la somme de 40 000 sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile et à titre subsidiaire de mettre cette somme à la charge de la société Berdan
-de condamner les sociétés CSE et Covea Risksaux entiers dépens de l'instance en ce compris les frais d'expertise et de traduction, et subsidiairement de mettre ces sommes à la charge de la société Berdan.
Elle soutient en substance :
-que la tapure de trempe est imputable à la société Berdan qui était seule en charge de la fabrication des boulons
-que les anomalies de montage commises par la société CSE sont graves en raison de leurs conséquences sur la structure tubulaire
-que le partage de responsabilité entre les deux causes de rupture du boulon tel que retenu par le tribunal est critiquable car les erreurs et anomalies de montage sont bien plus à l'origine du sinistre que la tapure de trempe
-que les conditions de la responsabilité pour vice caché ne sont pas réunies car le vice constaté n'est pas suffisant pour rendre le boulon impropre et qu'en outre il n'a pas été utilisé pour l'usage convenu, c'est à-dire pour supporter une force de tension telle que définie dans les plans de construction annexés au devis du 31 août 2009
-qu'il ne peut lui être reproché un défaut de contrôle du boulon alors que dans des productions standard, la tapure de trempe est indécelable ,sans destruction de la pièce contrôlée
-qu'il appartenait à la seule société Berdan d'effectuer les contrôles, d'une part par la qualification de son processus de fabrication et d'autre part par échantillonnage sur la chaîne de production
- que le partage de responsabilité de 15 % pour défaut de contrôle est arbitraire alors qu'elle n'avait pas les moyens d'opérer ce contrôle et a pour effet de dévaloriser à la fois le défaut de fabrication et le défaut de montage
- que la société Berdan doit la garantir de toute condamnation, quel que soit le fondement invoqué
-que la décision de remplacer 88 boulons par précaution et dans un souci de sécurité du public,était nécessaire et non fautive,qu'en tout état de cause elle a été avalisée par la société CSE et que le retard en résultant ne lui est pas imputable.
La société Berdan Civata a notifié ses conclusions récapitulatives le 20 juin 2018.
Elle sollicite à titre principal une nouvelle expertise judiciaire au contradictoire de toutes les parties et à titre subsidiaire, le rejet des demandes formées par les sociétés CSE et MMA Iard car les conditions de l'action rédhibitoire ne sont pas réunies.
A titre infiniment subsidiaire et en cas de condamnation ,elle demande :
-de rejeter la demande de garantie présentée par la société Uskon
- de condamner la société Sa-Ra à la relever et garantir de toutes les condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre
-de condamner son assureur, la société Ergo Sigorta à la relever et garantir de toutes les condamnations qui seraient prononcées à son encontre
A titre reconventionnel :
-de condamner les sociétés CSE et MMA Iard à lui verser la somme de 44 394 en réparation des frais occasionnés par le présent litige outre une somme de 25 000 sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.
Elle prétend à titre principal que le rapport d'expertise est entaché d'erreurs manifestes en ce qui concerne l'existence d'un défaut de fabrication imputable à la société Berdan, l'imputabilité de la décision de remplacement des 88 boulons ainsi que la détermination des préjudices subis, ce qui justifie amplement la demande de contre-expertise.
A titre subsidiaire, elle demande de rejeter les prétentions formées à son encontre par les sociétés CSE et MMA Iard aux motifs :
-que les boulons qu'elle a livrés étaient conformes à la norme ISO sur les plans chimique et mécanique
-qu'il est inconcevable que la tapure de trempe constatée qui présente une anomalie infime, ait été à l'origine d'une rupture affectant la viabilité de la construction
-qu'en l'espèce ce sont les erreurs de montage et de vissage qui ont permis la cassure du boulon
-que la société CSE ne peut invoquer la garantie des vices cachés puisqu'elle n'a pas utilisé les boulons conformément à leur destination normale et a exercé une contrainte de traction supérieure à la capacité de la vis alors qu'elle est un professionnel des travaux publics
-que les conditions d'engagement de sa responsabilité ne sont pas réunies
-qu'en effet, conformément à la norme ISO 6157-1,la société Uskon aurait dû lui demander un contrôle à 100 % de la présence ou non de fissures, ce qu'elle n'a pas fait
-qu'en l'absence d'instructions précises de sa part, sa responsabilité ne peut être retenue
-que la faute alléguée à son encontre ne présente aucun lien de causalité direct avec le préjudice invoqué (le retard du chantier du fait du remplacement de 88 boulons) alors qu'elle a fabriqué et livré dans les sept jours les boulons de remplacement (le 17 juillet 2010)
-qu'elle n'a pas participé à la décision de procéder au remplacement desdits boulons qui s'est tenue le 20 juillet 2010 à la mairie de Toulouse
-que le retard est essentiellement lié à la volonté d'Uskon de superviser les opérations de montage et d'envoyer des techniciens qui n'ont pu obtenir leur visa avant le 18 août 2010.
A titre subsidiaire, elle prétend que la responsabilité de la société SA-Ra à laquelle elle a confié en sous-traitance le procédé de galvanisation à chaud préconisé par le bon de commande est engagée car elle n'a pas respecté la norme ISO 10 684-2004 concernant la température appliquée.
Elle prétend que l'intervention de cette société était parfaitement connue de la part de la société Uskon puisqu'elle ne disposait pas d'installations idoines avant 2015. Elle prétend également que le rapport d'expertise qui a été communiqué à la société Sa-Ra lui est opposable dès lors qu'il a été soumis à la libre discussion des parties.
Les sociétés Constructions Saint Éloi, la compagnie MMA Iard et la compagnie MMA Iard ASSURANCES MUTUELLES venant aux droits de la société Covea Risksont notifié leurs conclusions récapitulatives le 20 mars 2017.
Elles demandent , sur le fondement des articles 1231 et suivants (ancien article 1147), 1641 et suivants , 1245 et suivants (ancien article 1386-1 et suivants) 1240 (ancien article 1382) du Code civil:
-de leur donner acte qu'elles viennent aux droits de la société Covea Risks
-de confirmer le jugement en ce qu'il a retenu la responsabilité des sociétés Uskon et Berdan et les a condamnées à les indemniser des préjudices subis
-sur appel incident, de réformer le jugement en ce qu'il a limité la condamnation des sociétés Uskon et Berdan à la somme de 476 014 euros
-de les condamner à verser des dommages-intérêts d'un montant total de 589 862 , avec intérêts de droit à compter de l'assignation du 20 juin 2012
-de confirmer la décision en ce qu'elle leur a alloué 12 000 sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile et y ajoutant, de condamner chacune des sociétés appelantes à leur verser 30 000 de ce chef
-de condamner les sociétés Uskon et Berdan solidairement aux entiers dépens.
Elles agissent à titre principal sur le fondement de la garantie des vices cachés, à titre subsidiaire sur la responsabilité du fait des produits défectueux, et à défaut sur le fondement de la responsabilité délictuelle à l'encontre de la société Berdan.
Elles soutiennent pour l'essentiel :
-que la charpente métallique préfabriquée acquise par la société CSE souffrait d'un vice caché puisqu'elle ne présentait pas la solidité attendue d'un tel ouvrage,
-que le boulon d'assemblage Berdan M56 souffrait lui-même d'un vice caché qui le rendait impropre à sa destination normale consistant à supporter, sans rompre, les tubes qu'il reliait
-que c'est à bon droit que les premiers juges ont dit que le sinistre résultait d'un vice de fabrication du boulon litigieux dénommé " tapure de trempe "
-qu'il n'y a pas lieu de retenir une part de responsabilité de 30 % de la société CSE et que cette dernière aurait dû être mise entièrement hors de cause car la cause essentielle du sinistre est liée à un défaut de fabrication et non pas à des anomalies de montage
-que de telles anomalies de montage ne sont pas démontrées
-que les sociétés Uskon et Berdan doivent prendre en charge 80 % des préjudices en relation avec la rupture du boulon litigieux pour un montant de 354 076 80
-que les sociétés Uskon et Berdan sont seules responsables des conséquences financières liées au changement de 88 boulons et doivent prendre en charge le préjudice en résultant à hauteur de 231 963
-qu'il y a lieu également de mettre à leur charge les frais d'expertise du Cetim à hauteur de 3822
-qu'il y a lieu de rejeter la demande reconventionnelle de la société Uskon qui sollicite la prise en charge des frais qu'elle a dû exposer avant les opérations d'expertise.
Elles expliquent que l'expert judiciaire a distingué dans son rapport les conséquences financières résultant de la rupture du boulon litigieux et les conséquences résultant de la décision de changer par précaution 88 boulons (en raison d'une suspicion de défaut généralisé) et demandent que la société CSE soit mise hors de cause au titre des conséquences financières liées à cette décision car elle a été placée devant le fait accompli, la décision s'étant prise entre Uskon et Berdan et non pas de façon collégiale.
La société Sa-Ra Enerji Inssat Ticaret Sanayi A.S a conclu le 17 mars 2017.
Elle demande de confirmer le jugement du 21 juillet 2016 en toutes ses dispositions,
A titre principal :
-de débouter purement et simplement la société Berdan de l'intégralité de ses demandes dirigées contre elle en ce compris sa demande de jonction entre la présente instance et celle engagée selon assignation du 20 juin 2012
-de prononcer sa mise hors de cause
-de dire que la société Berdan ne démontre pas une quelconque implication ou responsabilité de sa part dans le cadre du marché litigieux
-de dire que l'ensemble des rapports d'expertise, y compris le rapport d'expertise judiciaire sont non contradictoires à son égard et lui sont inopposables
-de constater la mauvaise foi de la société Berdan
A titre subsidiaire :
-d'ordonner la mise en place d'une expertise judiciaire contradictoire à son égard
A titre infiniment subsidiaire :
-de limiter éventuellement sa garantie à la somme de 2682,40 euros
En tout état de cause :
-de condamner la société Berdan à lui payer la somme de 8000 sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile et de mettre à sa charge les entiers dépens de l'instance.
Elle soutient que la société Berdan ne démontre pas qu'elle a eu un rôle quelconque dans la fabrication du boulon utilisé dans le cadre du marché passé avec la société CSE, et sollicite sa mise hors de cause.
Elle explique qu'elle a été mise en cause cinq ans après le sinistre, sans avoir jamais été appelée à participer à l'expertise et sans avoir reçu un quelconque justificatif concernant le marché alors qu'à aucun moment sa responsabilité n'a été évoquée lors des opérations d'expertise.
Elle demande, en application de l'article 16 du Code de procédure civile et de l'article 6 -1 de la Convention européenne des droits de l'homme,que le rapport d'expertise lui soit déclaré inopposable dès lors qu'elle n'était ni présente ni représentée aux opérations d'expertise et a été assignée postérieurement au dépôt du rapport.
À titre très subsidiaire, elle fait valoir que sa garantie en qualité de sous-traitant ne saurait excéder 10 % des sommes réclamées compte tenu du défaut de surveillance qui peut être reproché à la société Berdan et des fautes imputables aux autres sociétés.
La société Ergo Sigorta Adana Bolge Mudurlugu régulièrement assignée par acte d' huissier déposé au greffe le 29 juin 2017, en application de la Convention de La Haye du 15 novembre 1965 n'a pas constitué avocat.
Il y a lieu de se reporter expressément aux conclusions susvisées pour plus ample informé sur les faits de la cause, moyens et prétentions des parties, conformément à l'article 455 du Code de procédure civile.
Motifs de la décision
Sur la garantie des vices cachés :
L'ensemble des parties, y compris les sociétés de droit turc, ont conclu sur le fondement de la garantie des vices cachés prévue par les articles 1641 et suivants du Code civil qui dispose que le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine ou qui en diminue tellement cet usage que l'acheteur ne l'aurait pas acquise ou n'en aurait donné qu'un prix moindre s'il les avait connus.
Il incombe au vendeur de livrer une chose exempte de vices et à défaut, il doit sa garantie.
Les défauts qui rendent la chose impropre à sa destination normale constituent des vices définis par l'article 1641 et c'est l'unique fondement possible de l'action formée contre le fabriquant et le vendeur intermédiaire.
Lorsque la chose viciée est intégrée dans un ensemble, l'acquéreur peut agir tant à l'encontre du vendeur que contre le fabriquant de l'élément défectueux.
En l'espèce la société CSE a passé commande auprès de la société Uskon d'une charpente métallique pré-fabriquée galvanisée et laquée, conformément aux préconisations du marché.
La charpente a été fabriquée en Turquie et livrée prête à monter. La société Uskon a acquis auprès de la société Berdan les boulons d'assemblage de la charpente qui avaient fait l'objet d'une galvanisation à chaud conformément aux préconisations du marché.
Alors que les opérations de montage étaient terminées et que les travaux de couverture étaient en cours, il a été constaté un phénomène de cisaillement d'un boulon qui a imposé l'arrêt du chantier .
Le boulon de type Berdan M56 mis en cause a été envoyé pour analyse à deux laboratoires qui ont confirmé l'existence d'une "tapure de trempe.
La société Uskon s'est rapprochée de son fournisseur, la société Berdan, et après concertation, a proposé de procéder au remplacement de 88 boulons de type M56 ou M64 (en réalité 76) qui supportaient les plus fortes tensions suivant mail du 15 juillet 2010.
Le chantier a repris avec un retard de trois mois et les assureurs de la société CSE ont dédommagé l'ensemble des sociétés attributaires du marché.
Selon l'expert judiciaire ,Monsieur P., le boulon litigieux présentait un manque de conformité indéniable caractérisé par un défaut de type " tapure de trempe ". Selon lui, un tel défaut sur un boulon galvanisé à chaud ne peut se déceler ou se révéler dans la majorité des cas que par destruction de la pièce et ce défaut constitue un vice caché du produit vendu.
Il explique cependant que le mécanisme de rupture du boulon est le résultat de la combinaison de la formation au sein du boulon d'une fissure , facteur déclenchant, et d'efforts supplémentaires apportés au montage à la section déjà affaiblie en raison de la fissure préexistante, par des anomalies d'assemblage de barres voisines et par un vissage non conforme à la norme, facteurs aggravants.
Il conclut que si la fissure de trempe n'a pas été directement la cause de la rupture du boulon, elle a introduit un effet amplificateur des contraintes s'exerçant sur la pièce, y compris celles résultant des anomalies de montage. La concentration de contraintes en fond de fissure a provoqué le dépassement du seuil de propagation de cette fissure, stable en dessous de ce seuil mais instable à partir du seuil. La tapure de trempe n'est donc pas la cause exclusive du sinistre mais elle a permis la rupture du boulon. Elle en est la cause essentielle, les anomalies de montage constituant un facteur aggravant.
Il ajoute que les autres boulons, tout aussi surchargés car également soumis aux anomalies de montage, ont résisté parce qu'ils n'étaient pas fissurés.
Il conclut à un partage de responsabilité en imputant à chaque société les défauts suivants :
-la société Uskon : 20 % pour défaut de contrôle, toutes les barres étaient réputées essayées en traction à la valeur de charge maximale
-la société Berdan : 60 % pour un défaut de fabrication et un défaut de contrôle
-la société CSE : 20 % pour un défaut de contrôle (prévu par le CCTP) et des anomalies de montage aggravant le risque de rupture d'un boulon pré fissuré.
Le tribunal n'a pas suivi entièrement ses conclusions et a réparti les responsabilités comme suit : 15 % pour la société Uskon, 55 % pour la société Berdan et de 30 % pour la société CSE au motif que l'expert avait sous-estimé la responsabilité de la société CSE suite à son assemblage défectueux et qu'il y avait lieu de lui attribuer la fourchette haute proposée par l'expert.
Il a été procédé tant au cours des opérations d'expertise amiable que des opérations d'expertise judiciaire à l'analyse du boulon litigieux par différents laboratoires spécialisés qui ont tous conclu que le boulon présentait une fissure de type " tapure de trempe " qui apparaît lors du traitement thermique ou opération de galvanisation à chaud.
Le Cetim qui est un laboratoire de référence en matière d'études métallurgiques , a confirmé la présence d'une fissuration préliminaire inhérente à la fabrication (qu'il estime vraisemblablement imputable aux opérations de traitement thermique du fait de la pollution de l'atmosphère du four à l'origine de la probable décarburation, de la sévérité des conditions de refroidissement couplée à la présence significative d'inclusions non métalliques ayant pu engendrer une tapure') conjuguée à l'action d'une contrainte de traction potentiellement supérieure à la capacité de charge de la vis comme causes principales de la défaillance.
Rien ne permet de remettre en cause ces conclusions qui sont complètes et approfondies, le fait que les autres boulons figurant dans le stock de la société Berdan n'aient été affectés d'aucun vice , ainsi qu'il a été constaté par les laboratoires sollicités par cette société, ne pouvant utilement contredire les constatations réalisées sur le boulon qui a fait défaut.
La société Berdan demande une contre-expertise en faisant valoir que les conclusions de l'expert sont contestables car selon son propre expert ,la société JPS, la rupture du boulon est totalement indépendante de la présence de la tapure et n'est due qu'aux erreurs du montage réalisé par la société CSE, ce qui permet de l'exonérer de toute responsabilité dans le litige.
Il sera cependant observé que ce rapport établi de manière non contradictoire ne peut sérieusement contredire les conclusions de l'expert judiciaire lequel a pris en compte les observations des parties dans plusieurs dires et y a répondu.
Par ailleurs la société Berdan n'a jamais remis en cause à proprement parler l'existence d'un défaut susceptible d'affecter la fabrication du boulon puisqu'elle a mis en cause son sous-traitant,la société Sa-Ra dès le début (mail du 15 juillet 2010) dans le processus de galvanisation par immersion à chaud.
De même il ne saurait sérieusement être soutenu que le boulon litigieux ne présente pas de vice caché au motif qu' il respecte les normes techniques applicables, à savoir la norme ISO 898'1 (sur les caractéristiques mécaniques des éléments de fixation) ce qui n'est pas contestable en l'espèce.
Le respect par le fabricant de normes établies pour la réalisation d'un produit ne suffit pas à le décharger de toute garantie en cas de dommage effectivement réalisé et l'existence d'un vice caché peut toujours être constatée alors même que le produit est conforme aux normes existantes en termes de dimension, de dureté et de résistance.
En conséquence il y a lieu de rejeter la demande de contre-expertise qui n'apparaît pas pertinente, le rapport de Monsieur P. complété par celui du Cetim permettant la juridiction de statuer en connaissance de cause sur le litige.
Il en résulte qu'il n'est pas sérieusement contestable que le boulon de fixation servant à relier les barres métalliques de la charpente et la charpente elle-même, étaient affectés d'un vice de fabrication antérieur à la vente et que ce vice était indécelable pour l'acquéreur.
Si ce vice n'est pas la cause unique du sinistre , il en est la cause première et essentielle dès lors que les autres boulons soumis aux mêmes contraintes ont résisté.
Il s'agit d'un défaut inhabituel et grave qui est tout à fait inacceptable en matière de construction de charpente métallique.
Ce défaut de conformité rend la chose vendue impropre à sa destination puisqu'elle ne respecte pas les normes de sécurité attendues pour un tel ouvrage ainsi qu'il a été constaté par le maître de l'ouvrage qui a interrompu immédiatement le chantier.
Si les erreurs de montage de la société CSE ont constitué un facteur aggravant et indissociable du sinistre pour une part que l'expert a proposé de répartir dans des proportions qui seront ci-après exposées et discutées, ces dernières ne sont pas la cause exclusive et déterminante du dommage.
Dès lors ni le vendeur professionnel ni le fabricant ne peuvent être exonérés de la garantie des vices cachés.
En conséquence il y a lieu de confirmer la décision des premiers juges qui ont condamné solidairement les sociétés Uskon et Berdan à garantir le dommage occasionné par le défaut de fabrication vis-à-vis de l'acquéreur et de ses assureurs.
Sur le préjudice :
L'expert judiciaire a proposé de distinguer les conséquences financières résultant de la rupture du boulon litigieux (retard du chantier et dédommagement des entreprises intervenantes) et les conséquences résultant de la décision de changer 88 boulons en raison d'une suspicion de défaut généralisé des boulons d'assemblage de la charpente.
Pour un montant total de préjudice de 674 559 , il évalue le coût de retard du chantier à 442 596 et le surcoût lié à la réparation de 88 boulons à 231 963 .
Ces évaluations ne font l'objet d'aucune contestation de la part des parties et seront retenues comme base de discussion.
L'expert a proposé un partage de responsabilité en imputant à chaque société les défauts suivants :
-la société Uskon : 10 à 30 % pour défaut de contrôle, toutes les barres étaient réputées essayées en traction à la valeur de charge maximale
-la société Berdan : 40 à 80 % pour défaut de fabrication et défaut de contrôle
-la société CSE : 10 à 30 % pour défaut de contrôle (prévu par le CCTP) et anomalies de montage aggravant le risque de rupture d'un boulon pré fissuré.
Le tribunal a pour sa part retenu un partage de responsabilité détaillé comme suit :
-pour la société Uskon : 15 %
-pour la société Berdan : 55 %
-pour la société CSE : 30 % au motif qu'en attribuant à la société CSE le pourcentage moyen de responsabilité de 20 %, l'expert avait sous-estimé la responsabilité de cette société en raison d' un assemblage défectueux et qu'il y a lieu plutôt de mettre à sa charge un pourcentage de responsabilité représentant la fourchette haute.
La société CSE et ses assureurs réclament la réparation de l'ensemble des préjudices en lien avec le vice rédhibitoire étant précisé qu'ils ne remettent pas en cause la proposition de l'expert de leur faire supporter 20 % du préjudice en lien avec la rupture du boulon ( soit 88 519 restant à charge ) mais contestent devoir assumer une quelconque part de responsabilité dans la décision de procéder au remplacement de 88 boulons alors que le tribunal a mis à sa charge une somme de 69 589 de ce chef.
-Sur la répartition du coût lié au retard de chantier (indemnités versées aux entreprises) évalué à 442 596 .
Après avoir observé que les erreurs d'assemblage et de serrage imputés à la société CSE ne sont pas minimes contrairement à ce qui est soutenu,que notamment l'interversion de deux barres de longueurs différentes sont de nature à provoquer des surcharges dans les boulons d'attache susceptibles de conduire à la défaillance de l'un d'eux lorsqu'il présente un défaut de fabrication comme en l'espèce, que ces erreurs ont exercé des contraintes supplémentaires et ont constitué un facteur aggravant du sinistre,il y a lieu de laisser à la charge de la société CSE une part significativedu dommage subi auquel elle a contribué par ses manquements.
En effet ce que la société CSE appelle les " singularités "de montage ne sont ni éloignées de la zone de cisaillement ni situées dans des " zones de tolérance " et le rapport du Cetim a mis en évidence que certaines réglementations ou règles de l'art n'avaient pas été respectées.
De même l'expert a stigmatisé les opérations de montage en relevant que la société CSE n'avait pas semblé se référer au dernier plan communiqué par la société Ukson, " les bons plans n'étant pas sur le chantier au bon moment ".
Compte tenu de ces éléments, il y a lieu de laisser à la charge de la société CSE une partie du préjudice subi à hauteur de 30 % calculé comme suit : 442 596 x 30% =132 778,80 euros.
- Sur le préjudice lié à la décision de procéder au remplacement de 88 boulons au lieu de 8 seulement, dont le surcoût est évalué à 231 963 .
L'expert a proposé de répartir le préjudice comme suit : 70 % pour Uskon , 30 % pour Berdan et 0 % pour CSE exonérant cette dernière société de toute responsabilité.
Compte tenu des contestations élevées à cet égard par les parties, il y a lieu de déterminer dans quelles conditions est intervenue la prise de décision et à qui elle est imputable.
Les sociétés Uskon et Berdan soutiennent qu'il s'agit d'une décision collégiale dont les trois sociétés impliquées dans le sinistre doivent supporter une part tandis que la société CSE fait valoir pour sa part qu'elle a été mise devant le fait accompli.
Il résulte cependant des courriers versés aux débats que dans les suites immédiates du sinistre, la société CSE a cherché avec l'aide de ses co-contractants les moyens de réparer le sinistre dans les meilleurs délais et de répondre aux interrogations légitimes du maître de l'ouvrage et du bureau technique en charge de la surveillance du chantier, sur la sécurité de l'ouvrage.
En effet la rupture du boulon a conduit à l'affaissement d'une barre tubulaire du treillis constituant la charpente. La barre pendait, suspendue à son autre extrémité, cette situation endommageant le boulon encore intact ce qui a nécessité la mise en place d'étais.
Les premières analyses ayant révélé l'existence d'une tapure de trempe, il a été décidé que la réparation du sinistre ne consisterait pas en un simple remplacement des 8 boulons attachant la sphère à la charpente mais qu'au final 88 boulons seraient remplacés suivant une procédure lourde, avec étayage la charpente et du plancher . Le chantier a été partiellement arrêté pendant trois mois à cet effet.
Le tribunal a réparti la charge de ses travaux à proportion de 30 % pour CSE, 35 % pour Uskon et 35 % pour Berdan.
À cet égard, il y a lieu de constater que la décision de procéder au remplacement de l'ensemble des boulons d'assemblage était nécessaire à titre de mesure de précaution car il n'était pas possible de laisser planer un doute sur la solidité de la construction s'agissant d'un établissement recevant du public.
La décision a été prise après concertation entre la société Uskon et la société Berdan qui a livré dès le mois de juillet 2010, un nouveau lot de boulons conformes au CCTP, la société CSE étant tenue informée des préconisations de ses fournisseurs et ayant accepté de les mettre en œuvre sous le contrôle des techniciens de la société Uskon dépêchés en France pour surveiller les opérations de montage.
Il s'agit d'une décision collective à laquelle les trois sociétés avaient un égal intérêt égal puisqu'elle présentait un caractère pérenne et sécurisé, sans pour autant allonger excessivement les délais de reprise du chantier.
Dès lors il y a lieu de dire que chaque société devra supporter un tiers du préjudice lié au surcoût de ce chef soit la somme de 231 963: 3 = 77 321,29 .
En définitive, il y a lieu de laisser à la charge de la société CSE les sommes suivantes : 132 778 +77 321,29 = 210 009, 29.
Les sociétés Uskon et Berdan seront condamnées à payer solidairement à la société CSE et à ses assureurs le préjudice excédentaire qui s'élève à 464 549,71 euros (674 559 - 210 009,29 euros).
Sur l'action récursoire de la société Uskon à l'encontre de la société Berdan :
Le vendeur intermédiaire , condamné sur le fondement de la garantie des vices cachés, peut exercer son recours contre le fabriquant.
La société Uskon demande à être relevée et garantie de toutes les condamnations prononcées à son encontre par la société Berdan qui est à l'origine du défaut de fabrication au motif qu'aucune part de responsabilité ne doit être laissée à sa charge du fait d'un prétendu défaut de contrôle.
Cependant la société Uskon a manqué à ses obligations de contrôle du lot de boulons qu'elle a commandés à la société Berdan en n'exigeant par de son fournisseur la communication des processus internes de contrôle de la boulonnerie fabriquée sous sa responsabilité ou des contrôles par échantillonnage. Dès lors elle ne peut être totalement exonérée de toute responsabilité.
Compte tenu des éléments fournis aux débats, sa part de responsabilité doit être évalué à 30 % et celle de la société Berdan à 70 %, faute pour cette dernière d'avoir contrôlé le processus de galvanisation à chaud réalisé par son sous-traitant, défaut de contrôle qui est reconnu explicitement dans les échanges de courriels (notamment celui du 15 juillet 2010).
En conséquence, la société Berdan sera condamnée à relever et garantir la société Uskon à hauteur de 70 % du préjudice restant à répartir, soit la somme de 325 184,79 euros ( 464 549,71 euros x 70 %).
Le surplus sera supporté par la société Uskon à hauteur de 139 364,91euros.
Sur l'appel en garantie de la société Sa-Ra :
Il y a lieu de prendre acte du fait que la société intimée ne conclut plus en cause d'appel à l'annulation de l'assignation qui a été délivrée par la société Berdan et ne s'oppose pas non plus à la jonction de l'appel en cause avec l'instance principale.
Par contre elle soutient que la société Berdan ne démontre pas qu'elle ait été impliquée d'une quelconque façon dans le cadre du marché attribué à la société CSE.
Il appartient à la société Berdan de rapporter la preuve de l'intervention de la société Sa-Ra concernant les opérations de galvanisation des boulons litigieux et il ne suffit pas à cet égard d'établir que les deux sociétés ont entretenu des relations contractuelles suivies dans une période de temps contemporaine à la fabrication des pièces litigieuses (novembre et décembre 2009).
Il a été observé à bon droit pas les premiers juges par des motifs pertinents que la cour s'approprie qu'aucune des pièces produites ne porte trace de références fiables pouvant être recoupées et permettant de rattacher de manière probante les factures produites à une commande concernant la galvanisation des boulons destinés au montage de la charpente commandée par la société CSE.
En effet les factures émises par la société Sa-Ra à l'attention de la société Berdan les 20, 21 et 25 novembre 2009 et le 9 décembre 2009 (pièce numéro 12) ne sont pas traduites et sont accompagnées de quatre documents illisibles annotés à la main, ne comportant ni tampon ni signature , le listing du 6 novembre 2009 établi à l'en tête de la société Sa-Ra le 6 novembre 2009 n'est pas traduit et est inexploitable de même que la fiche de contrôle (pièces numéro 18) établie les 6 et 11 novembre 2009 dont on ignore si elle se rapporte aux opérations litigieuses.
En l'état il y a lieu de constater qu'il n'existe aucune réelle traçabilité des travaux de sous-traitance confiés par la société Berdan et rien ne permet de dire, avec un degré de certitude suffisant ,que le lot de boulons incriminés dans le présent litige ait été précisément confié à la société intimée pour les opérations de galvanisation au cours desquelles la tapure de trempe est survenue et que l'accident de fabrication lui est imputable.
Par ailleurs il y a lieu d'observer que la société Sa-Ra n'a pas été appelée à participer aux opérations d'expertise alors que le procédé de galvanisation est mis en cause dès l'origine , la société Berdan reconnaissant que l'intervention avait été réalisée selon un processus non sécurisé dans les courriels échangés avec la société Uskon .
En tardant à dénoncer le sinistre à la société intimée alors qu'elle devait le faire à bref délai , en ne l'appelant pas à participer aux opérations d'expertise dont elle avait connaissance, en l'assignant en justice devant le tribunal de Commerce de Toulouse peu de temps après l'avoir mise en demeure de fournir des explications , dans un délai incompatible avec la complexité du litige, l'éloignement des parties et la nécessité de procéder à la traduction d'un grand nombre de documents, il y a lieu de constater que la société Berdan a fait preuve de déloyauté à son égard.
Compte tenu des circonstances,il serait inéquitable de laisser à la charge de la société intimée partie des frais irrépétibles par elle engagés pour assurer sa représentation en justice. Il lui sera alloué sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,la somme de 2500 pour les frais exposés en cause d'appel outre ceux alloués par les premiers juges.
Sur la mise en cause de la société Ergo Sigorta Adana Bolge Mudurlugu
La société Berdan a appelé en cause son assureur devant le tribunal de Commerce de Toulouse sans s'expliquer sur ce choix procédural. La société Ergo Sigorta n'a pas constitué avocat .
Si la société Berdan produit un contrat d'assurance responsabilité établi à son nom le 25 juin 2009 par la société Ergo Sigorta Anonim Sirketi et sa traduction en français, elle n'explicite pas en quoi le sinistre, objet des présentes, est susceptible d'être pris en charge par son assureur.
La cour ne peut se livrer à une analyse du contrat et de ses conditions de mise en œuvre en ses lieux et place et ce, d'autant que la traduction n'est manifestement pas l'œuvre d'un juriste et comporte des termes approximatifs difficiles à interpréter.
Par ailleurs elle ne produit aucune déclaration de sinistre ni accusé de réception permettant de vérifier qu'elle a notifié le dommage à son assureur avant l'échéance du contrat .
Dès lors c'est à juste raison que le tribunal de commerce a débouté la société Berdan de son appel en garantie à l'encontre de son assureur.
Sur les autres demandes :
La société Uskon demande à être remboursée des frais qu'elle a exposés pour se rendre en France et participer aux opérations d'expertise pour un montant total de 41 164,90 euros.
De même la société Berdan réclame le remboursement d'une somme de 44 394 en remboursement des frais d'expertise qu'elle a engagés pour faire analyser ses productions par différents laboratoires techniques.
Cependant la responsabilité desdites sociétés étant engagée, elles ne peuvent être dédommagées des frais annexes qui ne sont pas en lien direct avec le sinistre.
Compte tenu du partage de responsabilité, il n'apparaît pas inéquitable de laisser à la charge des sociétés CSE et MMA Iard les frais irrépétibles qu'elles ont exposés tant en première instance qu'en appel.
La partie qui succombe ne peut réclamer de frais irrépétibles.
Les frais d'appels en cause des sociétés Sa-Ra et Ergo Sigota Adana seront laissés à l'entière charge de la société Berdan Civata qui succombe dans ses prétentions à leur égard.
Par contre,les parties ayant un intérêt égal à la solution du litige, il y a lieu de partager l'ensemble des frais exposés au cours de la présente procédure, y compris les frais d'expertise et d'analyse du CETIM (pour un coût de 3822 ) à proportion d' un tiers pour chacune d'entre elles.
Par ces motifs LA COUR statuant après en avoir délibéré, Donne acte aux sociétés MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles qu'elles viennent aux droits de la société Covea Riks, Réforme partiellement le jugement du 21 juillet 2016 en ce qu'il a condamné solidairement les sociétés Uskon et Berdan à payer à la société Constructions Saint Éloi la somme de 476 014 , débouté la société Uskon de son action récursoire à l'encontre de la société Berdan ,et alloué une somme de 12 000 à titre de frais irrépétibles à la société CSE et à son assureur, Et statuant nouveau des chefs réformés, Condamne solidairement les sociétés Uskon et Berdan à payer à la société Constructions Saint Éloi et aux société MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles la somme de 464 549,52 euros en réparation du préjudice subi, Fait droit à l'action récursoire de la société Uskon Uzay Sistemà l'encontre de la société Berdan Civata, Condamne la société Berdan Civata à relever et garantir la société Uskon Uzay Sistemde toutes les condamnations qui sont prononcées à son encontre à hauteur de 325 184,79, Dit que le surplus représentant une somme de 139 364,73 euros restera à la charge définitive de la société Uskon, Confirme le jugement du 21 juillet 2016 pour le surplus, Y ajoutant, Condamne la société Berdan Civata à payer à la société Sa-Ra la somme de 2500 sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, Déboute les parties de leurs autres demandes et de leurs prétentions contraires, Rejette les demandes formées en application de l'article 700 du Code de procédure civile, Dit que les frais d'appel en cause des sociétés Sa-Ra Enerji Et Ergo Sigorta Adana Bolge Mudurlugu seront laissés à l'entière charge de la société Berdan Civata, Fait masse des dépens en ce compris les frais d'expertise et les frais exposés par le Cetim à hauteur de 3822 et dit que les sociétés Contructions Saint Éloi et MMA Iard, la société Uskon Uzay Sistemet la société Berdan Civata supporteront un tiers de l'ensemble des frais exposés au cours de la présente procédure, avec distraction au profit des conseils constitués.