ADLC, 15 octobre 2018, n° 18-DCC-162
AUTORITÉ DE LA CONCURRENCE
Arrêt
relative à la prise de contrôle exclusif du groupe Capio par Ramsay Générale de Santé
L'Autorité de la concurrence,
Vu la demande de renvoi présentée le 19 juillet 2018 par Ramsay Générale de Santé, et la décision de renvoi de la Commission européenne du 13 août 2018, prise en application de l'article 4 paragraphe 4 du règlement (CE) n° 139/2004 du Conseil du 20 janvier 2004 relatif au contrôle des concentrations entre entreprises ; Vu le dossier de notification adressé complet au service des concentrations le 10 septembre 2018, relatif à la prise de contrôle exclusif du groupe Capio par Ramsay Générale de Santé, formalisée par une déclaration au marché du lancement d'une offre publique d'achat en date du 13 juillet 2018 ; Vu le livre IV du code de commerce relatif à la liberté des prix et de la concurrence, et notamment ses articles L. 430-1 à L. 430-7 ; Vu les éléments complémentaires transmis par la partie notifiante au cours de l'instruction ; Adopte la décision suivante :
I. Les entreprises concernées et l'opération
1. Ramsay Générale de Santé (ci-après, " Ramsay GDS ") est une société anonyme de droit français, qui exploite 120 établissements de santé en France et un établissement de santé en Italie. Ramsay GDS est contrôlée conjointement par la société Ramsay Health Care Limited (ci-après, " RHC "), via sa filiale à 100 % Ramsay Health Care UK Limited et par le groupe Crédit Agricole (ci-après, " GCA "), via sa filiale à 100 % Predica SA (ci-après, " Predica ")1. RHC est une société de droit australien qui exploite des établissements de santé au Royaume-Uni, en Australie, en France, en Indonésie et en Malaisie. GCA est un groupe français de services bancaires et d'assurances. En France, les établissements de Ramsay GDS offrent principalement des services de médecine, chirurgie, obstétrique, néonatologie, psychiatrie et santé mentale, soins de suite et de réadaptation, cancérologie et radiothérapie, activités de diagnostic, urgence et réanimation, et chirurgie esthétique de confort.
2. Capio AB (publ) est une société suédoise à la tête du groupe du même nom (ci-après, " Capio ") qui exploite 180 établissements de santé en Europe2, dont 23 sont localisés en France et offrent les mêmes services que les établissements de santé de Ramsay GDS. Capio est coté en bourse sur le Nasdaq Stockholm.
3. Le 13 juillet 2018, Ramsay GDS a rendu publique une offre d'achat de la totalité des actions de la société Capio AB (publ) à un prix de 48,5 couronnes suédoises (SEK) par action en numéraire. Cette offre est assortie de plusieurs conditions suspensives. L'une d'elles prévoit que les actionnaires de Capio acceptent cette offre si Ramsay GDS acquiert au moins 90% des actions de Capio. L'offre publique d'achat sur Capio par Ramsay GDS s'analyse comme un projet suffisamment abouti, au sens du paragraphe 113 des lignes directrices relatives au contrôle des concentrations et du premier alinéa de l'article L. 430-3 du code de commerce3. Il s'agit d'une concentration au sens de l'article L. 430-1 du code de commerce en ce qu'elle doit permettre à Ramsay GDS d'acquérir le contrôle exclusif de Capio.
4. Cette opération relève de la compétence de l'Union européenne en application de l'article 1er paragraphe 2 du règlement (CE) n° 139/2004 du Conseil sur les concentrations. En effet, les entreprises concernées ont réalisé ensemble un chiffre d'affaires hors taxes consolidé sur le plan mondial de plus de 5 milliards d'euros (Ramsay GDS : 2,24 milliards d'euros pour l'exercice clos le 31 juin 2018 ; Capio : 1,59 milliard d'euros pour l'exercice clos le 31 décembre 2017). De plus, chacune d'entre elles a réalisé un chiffre d'affaires dans l'Union européenne supérieur à 250 millions d'euros (Ramsay GDS : [> 250 millions] d'euros pour l'exercice clos le 31 juin 2018 ; Capio : [> 250 millions] d'euros pour l'exercice clos le 31 décembre 2017). Enfin, les entreprises concernées ne réalisent pas plus des deux tiers de leur chiffre d'affaires total dans l'Union européenne à l'intérieur d'un seul et même État membre.
5. Le 19 juillet 2018, Ramsay GDS a demandé à la Commission européenne, au moyen d'un mémoire motivé, le renvoi total de l'opération à l'Autorité de la concurrence, en application de l'article 4, paragraphe 4 du règlement n° 139/2004 précité. Par une décision M.9038 en date du 13 août 2018, la Commission européenne a considéré que les conditions d'un renvoi à l'Autorité de la concurrence étaient réunies. La prise de contrôle exclusif de Capio par Ramsay GDS est donc soumise, en application du IV de l'article L. 430-2 du code de commerce, au contrôle français des concentrations. La notification de l'opération a été adressée à l'Autorité de la concurrence le 10 septembre 2018.
II. Délimitation des marchés pertinents
6. L'opération emporte principalement un chevauchement d'activité entre les parties dans les secteurs de l'offre de diagnostics et de soins hospitaliers et de la chirurgie esthétique de confort. Par ailleurs, les parties proposent des soins de dialyse dans leurs établissements de santé.
A- LES MARCHÉS DE SERVICES
1. L'OFFRE DE DIAGNOSTICS ET DE SOINS HOSPITALIERS
7. En France4, la pratique décisionnelle des autorités de concurrence considère qu'il n'est pas pertinent de distinguer l'offre selon qu'elle émane d'établissements privés ou publics5. En effet, le patient est libre de choisir son établissement, public ou privé, sans considération économique, dans la mesure où le remboursement des soins ne dépend pas du statut de l'établissement dans lequel ceux-ci ont été dispensés. De plus, la généralisation à l'ensemble des établissements publics et privés du mode de financement constitué par la tarification à l'activité (dite " T2A "), d'une part, et le recours des patients à des assurances complémentaires, d'autre part, tendent à accroître la liberté de choix des patients quant à l'établissement dans lequel ils souhaitent être soignés. Par ailleurs, qu'ils soient publics ou privés, les établissements hospitaliers ont vocation, en principe, à accueillir tous les patients, sans considération économique ou sociale. Enfin, l'ensemble des établissements hospitaliers est soumis à un cadre juridique commun qui définit les conditions d'exercice de leur activité. Celle-ci est régulée au niveau régional par les agences régionales de santé (ci-après, " ARS "), avec lesquelles ils sont susceptibles de conclure des contrats d'objectifs et de moyens et, au niveau national, par la Haute Autorité de santé (ci-après, " HAS ") qui met notamment en œuvre un système de certification des établissements de santé.
8. Ce marché est toutefois segmenté par type d'activité pour tenir compte de la forte spécialisation des praticiens et des services des établissements hospitaliers, ainsi que de la nécessité pour un établissement hospitalier d'obtenir des ARS des autorisations spécifiques pour l'exercice de certaines spécialités médicales ou chirurgicales6.
9. La pratique décisionnelle des autorités de concurrence a ainsi envisagé une segmentation par " groupes d'activité spécialisée " (ci-après, " GAS "), correspondant aux grandes disciplines définies par le code de la santé publique : médecine, chirurgie, obstétrique (ci-après ensemble, " MCO "), néonatologie, psychiatrie, soins de suite et réadaptation (ci-après, " SSR "), soins de longue durée, cancérologie, activités de diagnostic, urgences, et réanimation7.
10. Une segmentation plus étroite de ces marchés par " catégorie majeure de diagnostic " (ci-après, " CMD ") a également été envisagée selon la classification des actes établie par le programme de médicalisation des systèmes d'information (ci-après, " PMSI ") mis en œuvre pour la tarification à l'activité8. Cette classification consiste, selon l'Agence technique d'information sur l'hospitalisation (ci-après, " ATIH ")9, à regrouper l'activité MCO en 28 " catégories majeures ", dont 26 CMD qui correspondent le plus souvent à un " système fonctionnel ".
11. Les 26 CMD (numérotées de CMD 1 à CMD 23, plus les CMD 25, 26 et 28) sont les suivantes :
CMD 1
affections du système nerveux
CMD 2
affections de l'oeil
CMD 3
affections des oreilles, du nez, de la gorge, de la bouche et des dents
CMD 4
affections de l'appareil respiratoire
CMD 5
affections de l'appareil circulatoire
CMD 6
affections du tube digestif
CMD 7
affections du système hépatobiliaire et du pancréas
CMD 8
affections et traumatismes de l'appareil musculosquelettique et du tissu conjonctif
CMD 9
affections de la peau, des tissus sous-cutanés et des seins
CMD 10
affections endocriniennes, métaboliques et nutritionnelles
CMD 11
affections du rein et des voies urinaires
CMD 12
affections de l'appareil génital masculin
CMD 13
affections de l'appareil génital féminin
CMD 14
grossesses pathologiques, accouchements et affections du post-partum
CMD 15
nouveau-nés, prématurés et affections de la période périnatale
CMD 16
affections du sang et des organes hématopoïétiques
CMD 17
affections myéloprolifératives et tumeurs de siège imprécis ou diffus
CMD 18
maladies infectieuses et parasitaires
CMD 19
maladies et troubles mentaux
CMD 20
troubles mentaux organiques liés à l'absorption de drogues ou induits par celles-ci
CMD 21
traumatismes, allergies et empoisonnements
CMD 22
brûlures
CMD 23
facteurs influant sur l'état de santé et autres motifs de recours aux services de santé
CMD 25
maladies dues à une infection par le VIH
CMD 26
traumatismes multiples graves
CMD 28 séances10
12. Cette segmentation permet de distinguer l'intégralité des actes médicaux accomplis au sein des établissements hospitaliers selon des critères à la fois médicaux et fonctionnels, tenant compte des parties du corps soignées, et économiques, les séjours ou les entrées classés dans un même groupe impliquant l'utilisation de ressources similaires.
13. Enfin, une sous-segmentation de chacune des CMD en fonction de la présence ou non d'un acte opératoire11 (ci-dessous, " AO " en présence d'un acte opératoire et " ANO " en l'absence d'acte opératoire) a également été envisagée. Cette sous-segmentation permet d'appréhender la différenciation accrue entre les établissements publics et privés, du fait de la plus forte spécialisation des établissements privés dans l'activité de chirurgie.
14. En tout état de cause, la question de la définition exacte des marchés de l'offre de diagnostics et de soins hospitaliers peut être laissée ouverte, dans la mesure où les conclusions de l'analyse concurrentielle demeurent inchangées, quelle que soit la délimitation retenue.
2. LA FOURNITURE DE SOINS DE DIALYSE
15. Les autorités de concurrence se sont interrogées sur l'existence d'un marché distinct de la fourniture de soins de dialyse12. Toutefois, il découle de la pratique décisionnelle européenne que ce type de soin n'est pas susceptible d'être distinguée d'autres offres de soins hospitaliers assimilables. Par ailleurs, l'Autorité de la concurrence a envisagé un segment distinct de l'offre de soins relevant de la CMD 28 (séances), à laquelle appartiennent les soins de dialyse.
16. En tout état de cause, la question de l'existence d'un marché distinct de la fourniture de soins de dialyse peut être laissée ouverte, dans la mesure où les conclusions de l'analyse concurrentielle demeurent inchangées, quelle que soit la délimitation retenue.
3. LA CHIRURGIE ESTHÉTIQUE DE CONFORT
17. Le code de la sécurité sociale définit une activité de chirurgie esthétique, parfois appelée " de confort ", distincte des diagnostics et des soins hospitaliers, qui donne lieu à facturation, sans prise en charge par les régimes obligatoires de sécurité sociale.
18. L'Autorité de la concurrence a considéré que ce marché inclut l'ensemble de l'activité de chirurgie esthétique de confort, que celle-ci soit exercée au sein d'établissements de santé, de centres autonomes de chirurgie esthétique ou en cabinet libéral13.
19. En tout état de cause, la question de l'existence d'un marché de la chirurgie esthétique de confort peut être laissée ouverte, dans la mesure où les conclusions de l'analyse concurrentielle demeurent inchangées, quelle que soit la délimitation retenue.
B- LES MARCHÉS GÉOGRAPHIQUES
1. L'OFFRE DE DIAGNOSTICS ET DE SOINS HOSPITALIERS
20. La Commission européenne estime que les marchés de l'offre de diagnostics et de soins hospitaliers peuvent être de dimension locale, correspondant à des zones accessibles en trente minutes de trajet en voiture14.
21. L'Autorité de la concurrence, tenant notamment compte des instruments de régulation utilisés par les ARS, considère que les marchés de l'offre de diagnostics et de soins hospitaliers peuvent être de dimension locale, départementale15 ou régionale. Ce périmètre est notamment fonction de la spécialité concernée16. L'Autorité de la concurrence a en particulier constaté que la taille des zones de provenance des patients est susceptible de varier, non seulement en fonction de l'établissement et des spécialités médico-chirurgicales qui y sont pratiquées, mais également en fonction de la région considérée, de sa densité de population et de son niveau d'équipement en établissements de soins hospitaliers. Enfin, la prise en charge par l'assurance maladie des coûts de transport supportés par certains patients tend à accroître leur consentement à voyager pour recevoir des soins.
22. L'Autorité de la concurrence a ainsi examiné, au cas par cas, les temps de trajets entre les établissements de soins hospitaliers des parties à une concentration. Elle a notamment pu constater que les patients effectuaient généralement un temps de trajet compris entre 30 minutes et une heure dans les départements du Var, de l'Aude17 et du Pas-de-Calais18, ainsi que dans l'ancienne région Limousin. S'agissant de la région Île-de-France, l'Autorité de la concurrence a considéré qu'elle constitue un marché géographique unique19. Elle a relevé en effet qu'elle se caractérise par une mobilité très importante des patients, compte tenu notamment de l'offre étendue des établissements de soins hospitaliers et de l'existence de pôles d'attraction régionale, voire nationale.
23. Dans la décision n° 17-DCC-195 précitée, l'Autorité de la concurrence a d'abord analysé les effets de l'opération aux niveaux régional (au sens des régions administratives avant l'adoption de la loi de réforme territoriale de 201520) et départemental. Puis, pour les zones dans lesquelles, du fait de la concentration, la position de la nouvelle entité atteignait 50 % sur au moins un marché ou un segment défini ci-dessus, la délimitation géographique a été affinée afin de refléter la réalité des trajets effectués par les patients. L'analyse concurrentielle a ainsi été complétée en examinant les effets de l'opération dans des zones correspondant à un rayon de trente minutes et à un rayon d'une heure de trajet en voiture autour des établissements de la cible, quelle que soit la région concernée. Toutefois, au cas d'espèce, la nouvelle entité ne détient pas de part de marché supérieure à 50 % aux niveaux régional ou départemental, quels que soient le marché ou segment considéré, de sorte qu'une analyse locale complémentaire n'est pas nécessaire.
24. En l'espèce, les activités des parties se chevauchent dans quatre régions : Île-de-France, Rhône-Alpes, Midi-Pyrénées et Provence-Alpes-Côte d'Azur.
25. En l'espèce, il n'y a pas lieu de remettre en cause la définition géographique des marchés de l'offre de diagnostics et de soins hospitaliers qui a été retenue dans la décision n° 17-DCC-195 précitée.
2. LA FOURNITURE DE SOINS DE DIALYSE
26. La Commission européenne a envisagé l'existence d'un marché des services de dialyse, en laissant ouverte la question de sa dimension géographique, à savoir nationale ou régionale/locale21.
27. En l'espèce, la question de la définition exacte d'un marché de la fourniture de soins de dialyse peut également être laissée ouverte, dans la mesure où les conclusions de l'analyse concurrentielle demeurent inchangées, quelle que soit la délimitation retenue.
3. LA CHIRURGIE ESTHÉTIQUE DE CONFORT
28. L'Autorité de la concurrence a retenu une dimension au moins régionale pour ce marché22. En effet, compte tenu du prix généralement élevé des opérations de chirurgie esthétique de confort (qui inclut les frais d'hospitalisation et les honoraires des praticiens), du caractère programmé des interventions et de l'importance de la réputation des praticiens, la distance que les patients sont prêts à parcourir est plus longue que pour les actes de diagnostics et de soins hospitaliers.
29. En tout état de cause, la question de la définition exacte du marché de la chirurgie esthétique de confort peut être laissée ouverte, dans la mesure où les conclusions de l'analyse concurrentielle demeurent inchangées, quelle que soit la délimitation retenue.
III. Analyse concurrentielle
A- LES SPÉCIFITÉS DU SECTEUR DE LA SANTÉ
1. CALCUL DES POSITIONS DES GROUPES D'ÉTABLISSEMENTS DE SOINS HOSPITALIERS
30. Pour estimer les positions de la nouvelle entité sur les marchés de l'offre de soins et de diagnostics hospitaliers, la partie notifiante a utilisé la base nationale publique du PMSI de l'ATIH, qui regroupe les statistiques des établissements de santé français. Les positions ont été calculées en nombre de séjours, conformément à la pratique décisionnelle de l'Autorité de la concurrence.
31. Cette méthode a été appliquée aux établissements de soins hospitaliers privés et publics.
2. LES EFFETS ANTICONCURRENTIELS SUSCEPTIBLES DE RÉSULTER D'UNE CONCENTRATION EXCESSIVE DE L'OFFRE DE SOINS ET DE DIAGNOSTICS HOSPITALIERS
32. La santé est un secteur qui présente des modalités de fonctionnement économique et réglementaire très spécifiques, parfois complexes, dans lequel la mise en œuvre des règles de concurrence doit être adaptée aux spécificités existantes. Les formes de concurrence entre établissements de santé et l'appréciation de l'effet de leur concentration sur le fonctionnement des marchés non-régulés ont donc fait l'objet d'une analyse au regard de la protection du bien-être des patients, mais aussi des intérêts des praticiens qui proposent leurs services aux établissements de santé et des performances du système actuel de régulation des soins et des diagnostics hospitaliers en France, conformément à la pratique décisionnelle de l'Autorité de la concurrence dans ce secteur23.
a) Les types d'effets potentiels24
(i) Les effets tarifaires
33. L'examen des effets horizontaux d'une concentration dans le secteur de l'offre de soins et de diagnostics hospitaliers doit tenir compte des mécanismes spécifiques de fixation des prix et de l'existence de particularités propres au système de santé français. En effet, les tarifs des prestations de soins délivrées par les établissements publics et privés sont régulés et fixés annuellement au niveau national, dans le cadre du système de tarification à l'activité (T2A). À chaque activité de soins correspond un tarif forfaitaire de la prestation que l'établissement peut facturer. Les établissements de santé n'ont pas la faculté de déroger à ces tarifs. Par conséquent, les cliniques privées ne peuvent pas, du fait du cadre réglementaire applicable, augmenter unilatéralement le tarif des soins conventionnés25 qu'elles délivrent. Ces tarifs forfaitaires concernent la majeure partie des prestations de soin.
34. La tarification des prestations annexes (dites " hôtelières ") est cependant librement déterminée par les établissements de santé. Ces prestations sont définies à l'article R. 162-27 du code de la sécurité sociale et comprennent : le supplément chambre particulière, l'hébergement et les repas des accompagnants, la télévision, le téléphone et les prestations exceptionnelles. Une concentration excessive des établissements de santé dans une zone géographique pertinente est donc susceptible d'engendrer une augmentation des tarifs de ces prestations, au détriment des patients.
35. D'autres effets potentiels ont été identifiés par l'Autorité de la concurrence26 : la détention par un même groupe de parts de marché supérieures à 50 % dans au moins deux CMD est susceptible d'inciter la nouvelle entité à pratiquer une hausse du prix des prestations annexes. Ce critère d'analyse, qui permet également d'appréhender de fortes positions sur les GAS, est conforme à la pratique décisionnelle de l'Autorité de la concurrence dans le secteur de la santé où elle a considéré que la détention d'une très forte position sur une seule CMD n'est pas, à elle seule, constitutive d'un pouvoir de marché27.
(ii) Les effets sur la qualité et la diversité des services
36. Les ARS, qui délivrent les autorisations d'activité, réalisent des missions d'inspections-contrôles concernant les conditions d'installation et de fonctionnement des activités de soins qui peuvent aboutir à des injonctions de mise en conformité, à une suspension ou à un retrait de l'autorisation, dans les conditions prévues par l'article L. 6122-13 du code de la santé publique. Par ailleurs, la HAS réalise une certification des établissements de santé tous les quatre à six ans, afin d'évaluer la qualité des prestations des hôpitaux et des cliniques en France. Ainsi, la possibilité de dégrader la qualité des soins proprement dite à la suite de l'opération apparaît limitée par l'existence de ces garde-fous.
37. Toutefois, l'Autorité de la concurrence considère qu'une entreprise qui détient des positions importantes dans au moins deux CMD est susceptible de dégrader la qualité de l'offre de soins, en étant incitée à réorganiser ses services entre les établissements qu'elle possède. Un groupe hospitalier peut être ainsi incité à concentrer son activité dans les CMD générant les plus gros volumes d'activité pour réaliser des synergies. Cette réallocation des moyens est susceptible d'être réalisée au détriment des CMD dans lesquelles l'activité du groupe est la moins importante et d'entraîner ainsi des fermetures de services, ce qui aurait pour effet de réduire la diversité des soins offerts aux patients dans une même zone géographique.
(iii) Les effets de nature conglomérale
38. Les autorisations de soin sont délivrées par les ARS et ne recouvrent pas forcément les CMD. Certaines sont connexes28. Les praticiens peuvent répartir leur activité entre plusieurs établissements en exerçant, à titre principal, dans un établissement pour une activité et, à titre secondaire, dans un autre établissement pour une activité connexe. Une opération de concentration, en réunissant au sein d'un même groupe plusieurs autorisations connexes d'activités de soins, est susceptible d'inciter un groupe hospitalier à conditionner la possibilité pour des praticiens liés, à titre principal, à un établissement tiers d'exercer ou de poursuivre l'exercice d'une partie de leur activité au sein de l'un de ses établissements à la résiliation du contrat d'exercice principal. Ce comportement aurait pour effet de permettre à un groupe hospitalier, qui dispose de fortes positions liées à la détention de plusieurs autorisations d'activité, de " capter " des praticiens d'établissements concurrents, ce qui est susceptible de menacer l'attractivité et la viabilité de ces derniers et, à terme, de réduire les alternatives offertes aux patients dans un territoire donné.
B- EFFETS HORIZONTAUX
1. L'OFFRE DE SOINS ET DE DIAGNOSTICS HOSPITALIERS
39. L'opération entraîne des chevauchements d'activité entre les parties dans les régions suivantes : (a) Île-de-France, (b) Rhône-Alpes, (c) Midi-Pyrénées, (d) Provence-Alpes-Côte d'Azur.
40. Les parts de marché qui figurent dans la présente décision pour les segments des CMD tiennent compte de la sous-segmentation acte opératoire/acte non opératoire.
a) Effets de l'opération en Île-de-France
41. L'opération entraîne un chevauchement d'activités en Île-de-France, dans la mesure où Ramsay GDS détient 45 établissements de santé dans cette région et Capio y détient 3 établissements.
42. Quel que soit le GAS analysé, la position de la nouvelle entité est inférieure ou égale à 25 %29.
43. S'agissant des positions de la nouvelle entité par CMD, elles sont inférieures à 50 %. Sa plus forte position concerne les actes opératoires en matière d'affections et traumatismes de l'appareil musculo-squelettique et du tissu conjonctif (CMD 8) : [30-40] % (Ramsay GDS : [30-40] % ; Capio : [0-5] %).
44. Par conséquent, l'opération n'est pas susceptible de porter atteinte à la concurrence par le biais d'effets horizontaux en Île-de-France.
b) Effets de l'opération en Rhône-Alpes
45. L'opération entraîne un chevauchement d'activité entre les parties en Rhône-Alpes, dans le seul département du Rhône (69). En effet, Ramsay GDS détient 17 établissements de santé dans cette région, dont 8 dans le département du Rhône. Capio y détient 5 établissements, tous situés dans le département du Rhône.
Au niveau de l'ancienne région Rhône-Alpes
46. Quel que soit le GAS analysé, la position de la nouvelle entité est inférieure à 25 %.
47. S'agissant des positions de la nouvelle entité par CMD, elles sont inférieures à 50 %. Sa plus forte position concerne les actes opératoires en matière de traumatismes, allergies et empoisonnements (CMD 21) : [30-40]% (Ramsay GDS : [10-20] % ; Capio : [10-20] %).
48. Par conséquent, l'opération n'est pas susceptible de porter atteinte à la concurrence par le biais d'effets horizontaux en Rhône-Alpes.
Au niveau du département du Rhône
49. Dans ce département, Ramsay GDS détient les établissements de santé suivants : la clinique Iris à Lyon, la clinique Iris à Marcy-L'Etoile, la clinique Iris à Saint-Priest, la clinique Mon Repos à Écully, l'hôpital privé de l'Est Lyonnais à Saint-Priest, l'hôpital privé Jean Mermoz et son centre de radiothérapie à Lyon, ainsi que le centre de radiothérapie Charcot à Sainte-Foy-lès-Lyon. Capio y détient les cinq établissements suivants : la clinique du Tonkin et le centre Bayard à Villeurbanne, la clinique de la Sauvegarde à Lyon, la clinique du Grand Large à Décines-Charpieu et la polyclinique du Beaujolais à Arnas30.
50. Quel que soit le GAS analysé, la position de la nouvelle entité est inférieure à 30 %. La plus forte position de la nouvelle entité concerne le GAS " chirurgie ", dans lequel sa part de marché a été estimée à [20-30] % (Ramsay GDS : [5-10] % ; Capio : [10-20] %).
51. S'agissant des positions de la nouvelle entité par CMD, elles sont inférieures à 50 %. Sa plus forte position concerne les actes opératoires relatifs aux facteurs influant sur l'état de santé et autres motifs de recours aux services de santé (CMD 23) : [40-50]% (Ramsay GDS : [0-5] % ; Capio : [40-50] %)31.
52. En outre, dans ce département, la nouvelle entité fera face à la concurrence de nombreux établissements de santé, publics ou privés, tels que les hospices civils de Lyon, regroupant quatorze établissements de santé à Lyon, le CHU de Grenoble, la clinique Val d'Ouest Vendôme et la clinique du Parc.
53. Par conséquent, l'opération n'est pas susceptible de porter atteinte à la concurrence, par le biais d'effets horizontaux, dans le département du Rhône.
c) Effets de l'opération en Midi-Pyrénées
54. L'opération entraîne un chevauchement d'activité entre les parties en Midi-Pyrénées, dans le seul département de la Haute-Garonne (31). En effet, Ramsay GDS détient 2 établissements de santé situés dans le département de la Haute-Garonne où Capio détient également 4 établissements.
Au niveau de l'ancienne région Midi-Pyrénées
55. Quel que soit le GAS analysé, la position de la nouvelle entité est inférieure à 25 %.
56. S'agissant des positions de la nouvelle entité par CMD, elles sont inférieures à 50 %. Sa plus forte position concerne les actes opératoires en matière d'affections endocriniennes, métaboliques et nutritionnelles (CMD 10) : [30-40] % (Ramsay GDS : [5-10] % ; Capio : [30-40] %).
57. Par conséquent, l'opération n'est pas susceptible de porter atteinte à la concurrence, par le biais d'effets horizontaux, en Midi-Pyrénées.
Au niveau du département de la Haute-Garonne
58. Dans ce département, Ramsay GDS détient deux établissements de santé : la clinique de l'Union et la clinique Le Marquisat, situés à Saint-Jean. Capio y détient les quatre établissements suivants : la clinique de Beaupuy, la clinique des Cèdres à Cornebarrieu, la clinique Saint-Jean Laguedoc et la polyclinique du Parc, situés à Toulouse.
59. Quel que soit le GAS analysé, la position de la nouvelle entité est inférieure à 50 %. Sa plus forte position concerne le GAS " chirurgie " dans lequel sa part de marché est estimée à [30-40] % (Ramsay GDS : [10-20] % ; Capio : [20-30] %).
60. S'agissant des positions de la nouvelle entité par CMD, elles sont inférieures à 50 %. Sa plus forte position concerne les actes opératoires relatifs aux affections endocriniennes, métaboliques et nutritionnelles (CMD 10) : [40-50] % (Ramsay GDS : [5-10] % ; Capio : [40-50] %).
61. En outre, dans ce département, la nouvelle entité fera face à la concurrence de nombreux établissements de santé, publics ou privés, tels que le CHU de Toulouse constitué de plusieurs établissements hospitaliers, la clinique Médipole Garonne ou la clinique Pasteur.
62. Par conséquent, l'opération n'est pas susceptible de porter atteinte à la concurrence, par le biais d'effets horizontaux, dans le département de la Haute-Garonne.
d) Effets de l'opération en Provence-Alpes-Côte d'Azur
63. L'opération entraîne un chevauchement d'activité entre les parties en Provence-Alpes-Côte d'Azur. En effet, Ramsay GDS détient 15 établissements de santé dans cette région, dont 13 dans le département des Bouches-du-Rhône et 2 dans le département du Var. Capio y détient 2 établissements, tous situés dans le département du Vaucluse. Les activités des parties ne se chevauchent donc pas à un niveau départemental.
64. Quels que soient les GAS et les CMD analysés, la position de la nouvelle entité est inférieure à 25 %.
65. Par conséquent, l'opération n'est pas susceptible de porter atteinte à la concurrence, par le biais d'effets horizontaux, en Provence-Alpes-Côte d'Azur.
2. LA FOURNITURE DE SOINS DE DIALYSE
66. Dans l'hypothèse où un tel marché serait délimité, les activités des parties ne se chevauchent que dans les régions suivantes : Île-de-France et Rhône-Alpes, et dans le département du Rhône.
67. Au niveau régional, la part de marché de la nouvelle entité sera inférieure à 25 %, à l'exception de l'Île-de-France où la position de la nouvelle entité est estimée à [30-40] %, avec un incrément de parts de marché limité (Ramsay GDS : [30-40] % ; Capio : [0-5] %).
68. Dans le département du Rhône, la part de marché de la nouvelle entité a été estimée à [30-40]% (Ramsay GDS : [5-10] % ; Capio : [30-40] %). La nouvelle entité fera face à la concurrence de plusieurs établissements de santé dans ce département, dont l'hôpital Nephrocare Tassin-Charcot ([30-40] %) et les Hospices Civils de Lyon ([20-30] %).
69. Par conséquent, l'opération n'est pas susceptible de porter atteinte à la concurrence, par le biais d'effets horizontaux, sur un éventuel marché de la fourniture de soins de dialyse.
3. LA CHIRURGIE ESTHÉTIQUE DE CONFORT
70. En l'absence de données exhaustives provenant du PMSI, les positions des parties ont été évaluées en nombre de praticiens.
71. Au niveau national, la part de marché de la nouvelle entité est inférieure à 25 %.
72. Dans les régions où les activités des parties se chevauchent (Île-de-France, Rhône-Alpes, Midi-Pyrénées, Provence-Alpes-Côte d'Azur.), la part de marché de la nouvelle entité est inférieure à 50 %. Sa plus forte position se situe en Île-de-France : [30-40]% (Ramsay GDS : [20-30] % ; Capio : [0-5] %).
73. Par conséquent, l'opération n'est pas susceptible de porter atteinte à la concurrence, par le biais d'effets horizontaux, sur les marchés de la chirurgie esthétique de confort.
B- EFFETS CONGLOMÉRAUX
74. Une concentration a des effets congloméraux lorsque la nouvelle entité étend ou renforce sa présence sur plusieurs marchés dont la connexité peut lui permettre d'accroître son pouvoir de marché. En règle générale, de tels effets sont analysés lorsqu'une opération de concentration étend ou renforce la présence d'une nouvelle entité sur plusieurs marchés distincts mais qui sont considérés comme connexes. Ces effets peuvent également être analysés lorsque le renforcement de la position d'une nouvelle entité prend place sur un même marché, mais qu'il s'agit d'un marché de produits suffisamment différenciés pour que d'une part, un effet de levier puisse être exercé à partir de l'un d'entre eux et que, d'autre part, les mêmes clients achètent régulièrement plus d'un produit au sein de cette gamme de produits. Si les concentrations conglomérales peuvent généralement susciter des synergies pro-concurrentielles, certaines peuvent néanmoins produire des effets restrictifs de concurrence lorsqu'elles permettent de lier, techniquement ou commercialement, les ventes ou les achats des éléments constitutifs du regroupement de façon à verrouiller le marché et à en évincer les concurrents.
75. La pratique décisionnelle des autorités de concurrence considère en principe qu'un risque d'effet congloméral peut être écarté dès lors que la part de l'entité issue de l'opération sur les marchés concernés ne dépasse pas 30 %.
76. Ce type d'effets pourrait trouver à s'appliquer au secteur de la santé si l'on considère que les établissements hospitaliers se font concurrence pour attirer les " meilleurs " praticiens (en termes de réputation, de compétence, de spécialisation, etc.) et que la détention de la seule autorisation de soins de la zone pour une activité donnée et d'un portefeuille d'autorisations connexes d'activités de soin peut servir de levier pour conditionner l'exercice d'un praticien dans un établissement à l'abandon de son exercice dans un établissement hospitalier tiers. Une telle stratégie aurait pour effet de renforcer la réputation et le volume d'activité d'un établissement hospitalier, au détriment des autres établissements implantés dans le même territoire, au risque de les évincer. Cette captation des praticiens d'établissement hospitaliers est donc susceptible, à terme, de réduire les alternatives offertes au patient dans un territoire pertinent.
77. En l'espèce, la nouvelle entité ne sera pas, quelle que soit la zone géographique concernée, le seul opérateur à détenir une autorisation spécifique pour dispenser un certain type de soins. En effet, dans chacune des zones concernées, il existe au moins un autre établissement de santé disposant de chacune des autorisations de délivrer des soins spécifiques.
78. Au cas d'espèce, l'opération n'est donc pas de nature à rassembler, au sein d'un même groupe, plusieurs autorisations connexes d'activités de soins, qui forment un portefeuille que des établissements tiers, dans certains territoires, ne détiendraient pas.
79. Par conséquent, l'opération n'est pas susceptible de porter atteinte à la concurrence, par le biais d'effets congloméraux.
C- LE RISQUE DE CRÉATION OU DE RENFORCEMENT D'UNE PUISSANCE D'ACHAT
80. Une opération de concentration peut porter atteinte à la concurrence par le renforcement d'une puissance d'achat qui place les fournisseurs en situation de dépendance économique.
81. L'Autorité de la concurrence considère que " le renforcement de la puissance d'achat a en règle générale tendance à s'exercer au bénéfice des consommateurs, dès lors que celle-ci n'affecte pas les structures des marchés amont et aval "32. Ainsi, ce n'est que dans la mesure où il porterait atteinte à la concurrence, par exemple en diminuant les capacités financières ou de recherche et d'innovation de certains acteurs, que le renforcement d'une dépendance économique peut porter atteinte à la concurrence sur un marché.
82. Selon la Commission européenne, un renforcement de la puissance d'achat n'est pas considéré comme dommageable pour l'économie lorsqu'il existe (i) une forte concentration de fournisseurs qui détiennent un pouvoir de négociation important et (ii) une concurrence effective sur le marché de la vente au détail forçant les entreprises concernées à répercuter la baisse des prix obtenue sur les consommateurs33.
83. Dans le secteur de l'offre de soins, les achats auprès des fournisseurs sont réalisés soit directement par les établissements, soit par l'intermédiaire de centrales d'achat.
84. Au cas d'espèce, Ramsay GDS procède directement à ses achats, sans que ceux-ci ne soient rattachés à l'une des centrales d'achats du secteur privé, telles que la centrale d'achat de l'hospitalisation privée et publique (CAHPP) ou la centrale d'achat, de conseil et d'information des cliniques (CACIC). Capio est, quant à elle, adhérente de la CAHPP.
85. Faute de disposer de données sur le montant total de l'achat hospitalier en France, la partie notifiante a communiqué une estimation du montant annuel des achats réalisés par les établissements publics de santé qui s'élèverait à environ 18 milliards d'euros (environ 10,8 milliards d'achats médicaux et 7,2 milliards d'achats non médicaux). Le montant annuel total des achats combinés des établissements de Ramsay GDS s'élève à environ [...] d'euros. En supposant que le montant des achats des établissements de Capio est équivalent à celui des établissements de Ramsay GDS34, la part de marché de la nouvelle entité dans le total des achats hospitaliers en France représentera moins de [10-20] %.
86. Par ailleurs, de nombreux fournisseurs pharmaceutiques ou équipementiers sont des groupes de dimension mondiale, et disposent par conséquent d'un poids économique très important au regard des positions des groupes hospitaliers actifs en France ou de leurs centrales d'achat.
87. Selon la partie notifiante, la position de la nouvelle entité n'excédera pas [20-30] % quelle que soit la segmentation envisagée des marchés de l'approvisionnement des établissements hospitaliers35.
88. Enfin, un fournisseur d'équipements chirurgicaux a fait part, en cours d'instruction, de ses préoccupations de concurrence liées au risque d'être évincé dans la mesure où l'opération aurait pour effet de renforcer un duopole entre les deux principaux groupes hospitaliers privés en France, Elsan et Ramsay GDS. Selon lui, les approvisionnements de Capio auprès de petits fournisseurs alternatifs aux deux principaux fournisseurs d'équipements chirurgicaux (Johnson & Johnson et Medtronic) seront réduits et l'opération pourrait compromettre leur viabilité. Toutefois, les marchés de l'approvisionnement des établissements hospitaliers ne sont pas limités aux seuls groupes privés, de sorte qu'il existe, en réalité, de nombreuses alternatives crédibles pour les fournisseurs ainsi que rappelé au paragraphe 86 ci-dessus. En particulier, la part de marché estimée de la nouvelle entité sur l'éventuel marché de l'approvisionnement en équipements chirurgicaux est de [10-20] % au niveau national et inférieur à [5-10] % au niveau européen. Pour mémoire, l'opération porte, en France, sur l'acquisition d'un nombre limité d'établissements (23 cliniques).
89. Par conséquent, l'opération n'est pas de nature à créer ou à renforcer une puissance d'achat, ou à placer les fournisseurs en état de dépendance économique, dans les marchés concernés.
DÉCIDE
Article unique : L'opération notifiée sous le numéro 18-157 est autorisée.
NOTES :
1 Voir la décision de l'Autorité de la concurrence n° 14-DCC-141 du 24 septembre 2014 relative à la prise de contrôle conjoint de Générale de Santé par Ramsay Health Care et Predica (Groupe Crédit Agricole).
2 Capio exploite 180 établissements de santé principalement en Suède, mais également en Norvège, en France, en Allemagne, au Danemark et au Royaume-Uni.
3 " L'opération de concentration doit être notifiée à l'Autorité de la concurrence avant sa réalisation. La notification peut intervenir dès lors que la ou les parties concernées sont en mesure de présenter un projet suffisamment abouti pour permettre l'instruction du dossier et notamment lorsqu'elles ont conclu un accord de principe, signé une lettre d'intention ou dès l'annonce d'une offre publique. "
4 Il n'en va pas de même dans l'ensemble des États membres. Ainsi, la Commission européenne a identifié un marché de soins hospitaliers privés au Royaume-Uni (voir les décisions de la Commission européenne COMP/M.4367 du 16 mars 2007 - APW/APSA/Nordic Capital/ Capio et COMP/M.4788 du 21 août 2007 - Rozier/BHS).
5 Voir, par exemples, les décisions de l'Autorité de la concurrence n° 17-DCC-95 du 23 juin 2017 relative à la prise de contrôle exclusif du groupe MédiPôle Partenaires par le groupe Elsan et n° 15-DCC-146 du 26 octobre 2015 relative à la prise de contrôle exclusif de Vitalia par Vedici Holding (CVC Capital Partners), les lettres du ministre chargé de l'économie C2007-91 au conseil de la société Vitalia Développement 2, relative à une concentration dans le secteur de l'offre de diagnostics et de soins en établissements de santé, C2007-80 du 24 juillet 2007 au conseil de la société Vitalia Développement 1, relative à une concentration dans le secteur des établissements de soins en France ; C2006-105 aux conseils de la société Capio santé SA, relative à une concentration dans le secteur de la production de diagnostics et de soins en établissement de santé du 26 octobre 2006, et les décisions de la Commission européenne COMP/M.7725 du 28 août 2015 - Vedici/Vitalia ; COMP/M.7221 du 24 avril 2014 - Bridgepoint Capital/Medipartenaires, et COMP/M.5805 du 21 mai 2010 - 3i/Védici Groupe.
6 Ibid.
7 Ibid.
8 Voir, par exemple, la décision n° 15-DCC-146 et la lettre C2006-105 précitées.
9 Fondée en 2000, l'Agence technique de l'information sur l'hospitalisation est un établissement public de l'État à caractère administratif, placé sous la tutelle des ministres chargés de la santé, des affaires sociales et de la sécurité sociale.
10 Dialyses, chimiothérapie, radiothérapie, transfusions, etc.
11 Un acte de soins est dit " opératoire " lorsqu'il consiste en une intervention chirurgicale.
12 Voir, par exemple, les décisions n° 15-DCC-146 et COMP/M.7725 précitées.
13 Décision n° 17-DCC-95 précitée.
14 Décisions COMP/M.7725, COMP/M.7221, et COMP/M.5805 précitées.
15 Le département correspond généralement au périmètre des nouveaux " territoires de démocratie sanitaire " définis par les ARS, qui remplacent les territoires de santé depuis l'entrée en vigueur de la loi n° 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation du système de santé. Au cas d'espèce, les parties sont simultanément actives dans deux territoires de démocratie sanitaire qui recouvrent deux départements distincts, à savoir la Haute-Garonne (31) et le Rhône (69). Une analyse concurrentielle sera donc menée dans chacun de ces deux départements.
16 Décisions n° 17-DCC-95 et n° 15-DCC-146 précitées.
17 Décision de l'Autorité de la concurrence n° 14-DCC-79 du 11 juin 2014 relative à la prise de contrôle exclusif du groupe Médi-Partenaires par le groupe Bridgepoint.
18 Décision de l'Autorité de la concurrence n° 15-DCC-155 du 30 novembre 2015 relative à la prise de contrôle exclusif d'Hôpital Privé Métropole par Compagnie Générale de Santé.
19 Voir, par exemple, les décisions de l'Autorité de la concurrence n° 14-DCC-79 précitée et n° 14-DCC-141 du 24 septembre 2014 relative à la prise de contrôle conjoint de Générale de Santé par Ramsay Health Care et Predica (Groupe Crédit Agricole).
20 Si la fusion de régions administratives du fait de la loi n° 2015-29 du 16 janvier 2015 a entraîné une restructuration des ARS, cette réorganisation administrative n'a pas eu pour effet d'élargir le périmètre des marchés géographiques. En l'espèce, les conclusions de l'analyse concurrentielle restent inchangées lorsque l'analyse est conduite au niveau des régions administratives actuelles.
21 Décision COMP/M.7725 précitée.
22 Décision n° 17-DCC-95 précitée.
23 Décision n° 17-DCC-95 précitée.
24 Les effets sur la concurrence par comparaison peuvent être relevés dans le secteur de la santé, dans la mesure où le système de la tarification à l'activité (T2A) est basé sur un mécanisme de concurrence par comparaison, dont l'efficacité repose sur la possibilité pour le régulateur de disposer d'un nombre suffisant de points de comparaison pour fixer les tarifs à partir de l'étude annuelle de coût réalisée par l'ATIH. Toutefois, en l'espèce, l'opération n'est pas susceptible de produire de tels effets, compte tenu de l'impact limité de l'opération sur les outils de comparaison.
25 Certains soins dits de confort, couverts par la CMD 23, ne sont pas conventionnés.
26 Décision n° 17-DCC-95 précitée.
27 Voir notamment la décision n° 15-DCC-155 précitée.
28 Par exemple, en matière de cardiologie, sont connexes les autorisations de cardiologie interventionnelle de type 1, de cardiologie interventionnelle de type 2 et de chirurgie cardiaque.
29 La plus forte position de la nouvelle entité concerne le GAS " chirurgie " sur lequel sa part de marché est estimée à [20-30]% (Ramsay GDS : [20-30] % ; Capio : [0-5] %).
30 En janvier 2019, trois établissements de Capio (la clinique du Tonkin, le centre Bayard et la clinique du Grand Large) seront regroupés au sein du Médipole Lyon-Villeurbanne avec plusieurs établissements du groupe Résamut (la clinique mutualiste de Lyon Eugène André, la clinique de l'Union, SSR Les Ormes, SSR La Fougeraie, SSR Les Ormes Trarieux).
31 Les parts de marché de la nouvelle entité demeureraient inférieures à 50 % dans le département du Rhône, quelle que soit la segmentation retenue (GAS, CMD AO/ANO), dans l'hypothèse conservatrice où l'ensemble des établissements du futur Médipole Lyon-Villeurbanne était pris en compte dans le calcul des parts de marché de la nouvelle entité.
32 Lignes directrices précitées, paragraphe 502.
33 Décision de la Commission européenne COMP/M.1224 du 3 février 1999, Rewe/Meinl.
34 Cette hypothèse est conservatrice, dès lors que Ramsay GDS exploite 120 établissements de santé en France et Capio en exploite 23.