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Décisions

Cass. com., 14 novembre 2018, n° 17-12.454

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

PARTIES

Demandeur :

Rey

Défendeur :

Glastint (SAM) , Glass Color (SARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Mouillard

Rapporteur :

Mme Darbois

Avocat général :

Mme Beaudonnet

Avocats :

SCP Zribi, Texier, SCP Le Griel

Bordeaux, 1re ch. A, du 29 nov. 2016

29 novembre 2016

LA COUR : - Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société anonyme monégasque SAM Glastint (la société Glastint), spécialisée dans le traitement de vitrage pour l'automobile et le bâtiment et immatriculée au répertoire du commerce et de l'industrie de Monaco sous la dénomination sociale SAM Glastint le 9 juillet 1992, exerce son activité sous l'enseigne et le nom commercial Glastint et anime un réseau de franchise sous la même enseigne ; qu'elle est titulaire des marques françaises et internationales " Glastint by Curti Solar " et " Glastint le traitement de vitrage " ainsi que de la marque française " Glastint " et des noms de domaine " glastint.com ", " glastint.fr " et " glastint.eu " ; que par lettre recommandée du 21 décembre 2005 avec demande d'avis de réception signé le 27 décembre 2005, elle a mis fin, à compter du 21 mars 2006, à la relation contractuelle existant avec Mme Rey, laquelle, selon facture du 23 mars 1996, avait " acquis " le " concept relais " Glastint " voiture ", la mise en place du développement commercial de la marque et l'exploitation de la pose du film voiture à Castres et procédé, le 18 juin 1996, à son inscription au répertoire SIRENE en qualité d'artisan entretien et réparation de véhicules automobiles, sous la dénomination " Glastint Tarn films protection " ; qu'ayant constaté que Mme Rey poursuivait son activité sous l'enseigne " Mme Françoise Rey Glastint Tarn auto tuning " et utilisait la marque " Glastint ", la société Glastint et son franchisé à Albi, la société Glass Color, l'ont assignée, le 1er avril 2011, en contrefaçon de marque, concurrence déloyale et parasitisme ; que, reconventionnellement, Mme Rey a demandé le transfert à son profit des marques " Glastint le traitement de vitrage " et " Glastint ", dont elle a revendiqué la propriété, ou, subsidiairement, leur annulation, ainsi que la réparation des préjudices résultant de la brusque rupture d'une relation commerciale établie et d'actes de concurrence déloyale commis à son égard ;

Sur le premier moyen, le deuxième moyen, pris en sa première branche, et le troisième moyen : - Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens, qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Mais sur le deuxième moyen, pris en sa seconde branche : - Vu l'article 1382, devenu 1240, du Code civil ; - Attendu que pour dire que Mme Rey a commis au préjudice de la société Glass Color des actes de concurrence déloyale distincts des actes de contrefaçon de marque, l'arrêt retient, par motifs propres et adoptés, qu'en utilisant frauduleusement le terme " Glastint " et en l'apposant sur tout support, Mme Rey a rompu l'égalité du jeu de la concurrence dans la mesure où le franchisé, outre un droit d'entrée élevé, verse aussi des redevances en contrepartie de l'utilisation de la marque et des signes distinctifs " Glastint " ;

Qu'en se déterminant ainsi, par des motifs impropres à établir l'existence d'actes de concurrence déloyale distincts de ceux qu'elle indemnisait au titre du préjudice propre causé à la société Glass Color en sa qualité d'exploitant des marques contrefaites, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;

Et sur le moyen relevé d'office, dans les conditions de l'article 620 du Code de procédure civile, après avertissement délivré aux parties : - Vu les articles L. 442-6, III et D. 442-4 du Code de commerce ; - Attendu qu'en application du premier texte, les litiges relatifs à l'application de l'article L. 442-6 du même code sont attribués aux juridictions dont le siège et le ressort sont fixés par décret ; que le second, issu du décret n° 2009-1384 du 11 novembre 2009, fixe la liste des juridictions de première instance appelées à connaître de ces litiges et désigne la cour d'appel de Paris pour connaître des décisions rendues par ces juridictions ; que toute cour d'appel, autre que celle de Paris, est dépourvue du pouvoir juridictionnel de statuer sur des demandes fondées sur les dispositions de l'article L. 442-6 du Code de commerce ; que la méconnaissance de ces dispositions est sanctionnée par une fin de non-recevoir ;

Attendu que la cour d'appel de Bordeaux a confirmé le jugement du tribunal de grande instance de Bordeaux en toutes ses dispositions ;

Qu'en statuant ainsi, sans relever d'office l'irrecevabilité de l'appel formé devant elle contre le chef de dispositif du jugement qui, rendu par une juridiction spécialement désignée, avait rejeté la demande reconventionnelle de dommages-intérêts formée par Mme Rey sur le fondement de l'article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Par ces motifs, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le quatrième moyen : casse et annule, mais seulement en ce qu'il dit que Mme Rey a commis, au préjudice de la société Glass Color, des actes de concurrence déloyale, pour partie, distincts de ceux qu'elle a indemnisés au titre du préjudice propre causé à cette société par les actes de contrefaçon, condamne Mme Rey à payer à la société Glass Color la somme de 15 000 euros à titre de dommages-intérêts, ordonne des mesures de publication, et en ce qu'il statue sur la demande reconventionnelle de Mme Rey fondée sur l'article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce, l'arrêt rendu le 29 novembre 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Bordeaux ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux, autrement composée.