Livv
Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 4, 14 novembre 2018, n° 16-12078

PARIS

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Minuty (SA)

Défendeur :

Romano Brands (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Luc

Conseillers :

Mmes Mouthon Vidilles, Comte

Avocats :

Mes Hardouin, Ellis, Lefèvre, de Villepin

T. com. Marseille, du 25 avr. 2016

25 avril 2016

Faits et procédure

La société Minuty, de droit français, commercialise des vins.

La société Romano Brands, de droit américain, distribue des vins importés de France. Elle est située à New York.

Après une prise de contact durant l'année 2000 suivie de livraisons effectuées en 2003, un accord a été conclu entre les deux sociétés le 17 novembre 2005 par lequel la société Minuty a confié la distribution de ses vins aux Etats-Unis à la société Romano Brands.

A la fin de l'année 2011, la société Romano Brands a demandé une reconduction du contrat pour 2012 et les années suivantes, et les relations commerciales se sont poursuivies.

Par courriel du 5 décembre 2013, la société Minuty a annoncé à la société Romano Brands l'arrêt de leurs relations commerciales.

Le 27 mai 2015, la société Romano Brands, considérant qu'il y a eu rupture brutale sans préavis des relations commerciales, a assigné la société Minuty devant le tribunal de commerce de Marseille.

Par jugement du 25 avril 2016, le tribunal de commerce de Marseille a :

- condamné la société Minuty à payer à la société Romano Brands la somme de 77 814,99 euros au titre du préjudice financier subi,

- condamné la société Minuty à payer à la société Romano Brands la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 Code de procédure civile,

- débouté la société Minuty de sa demande reconventionnelle à l'égard de la société de droit américain Romano Brands Inc,

- condamné la société Minuty aux dépens toutes taxes comprises de la présente instance tels qu'énoncés par l'article 695 du Code de procédure civile, étant précisé que les droits, taxes et émoluments perçus par le secrétariat-greffe de la présente juridiction sont liquidés à la somme de 82,08 euros.

La société Minuty a relevé appel de ce jugement par déclaration remise au greffe le 31 mai 2016.

La procédure devant la cour a été clôturée le 11 septembre 2018.

LA COUR

Vu les conclusions du 9 décembre 2016 par lesquelles la société Minuty, appelante, invite la cour, au visa des articles L 442-6 du Code commerce, 1382 et 1134 du Code civil ancien, à :

- déclarer recevable son appel, infirmer en toutes ses dispositions le jugement du tribunal de commerce de Marseille du 25 avril 2016, et rejeté l'appel incident de l'intimée,

- dire qu'il n'y a point eu de rupture brutale de relations commerciales pouvant ouvrir droit à un préavis de 6 mois et encore moins de 2 ans en l'absence de tout engagement pour cette durée, subsidiairement, dire qu'eu égard aux circonstances de l'espèce, il ne saurait y avoir, si un défaut de préavis était retenu, de préjudice,

- dire que n'est point démonté le caractère abusif de la rupture et la dépendance économique, le débouté s'impose également sur ce chef de demande, subsidiairement, dire qu'il ne saurait exister de préjudice eu égard aux informations reçues par Romano Brands et au temps dont elle a disposé pour se réorganiser et trouver une solution de remplacement, mais également dire qu'aucun préjudice n'est démontré tant dans son principe que dans son montant en l'absence d'éléments comptables fournis,

- déclarer fondée sa demande reconventionnelle pour parasitisme et concurrence déloyale en utilisant marque et signes distinctifs de ses vins pour créer une confusion auprès de la clientèle alors que les parties n'ont plus de relations commerciales, et à ce titre lui allouer des dommages et intérêts d'un montant d'environ 50% du volume des achats de 2013, soit 75 000 euros,

- condamner à lui payer la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile outre les entiers dépens dont distraction, pour ceux-là concernant, au profit de Me Patricia Hardouin - Selarl 2H avocats et ce, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile ;

Vu les conclusions du 13 octobre 2016 par lesquelles la société Romano Brands, intimée, demande à la cour, au visa des articles L. 442-6, I, 5° du Code de commerce et 1382 ancien du Code civil, de :

- constater que la relation commerciale entre la société Minuty et elle a débuté en 2003 et a été continue jusqu'en 2013,

- dire qu'il existait une relation commerciale établie entre les deux sociétés,

- constater son statut de distributeur exclusif,

- constater l'absence de préavis obligatoire de la part de la société Minuty,

- constater l'assurance de la poursuite de relations commerciales a minima jusqu'au mois de juin 2015,

- dire la rupture brutale et dolosive caractérisée,

- constater la dépendance économique de la concluante à l'égard de la société Minuty,

en conséquence,

- confirmer le jugement querellé en ce qu'il a reconnu la rupture brutale des relations commerciales, et rejeté les demandes reconventionnelles de la société Minuty,

- réformer le jugement querellé, statuant à nouveau

- dire nécessaire un préavis de 2 ans ou à défaut la relation contractuelle inscrite sur une durée de 2 ans,

- condamner la société Minuty à lui verser les sommes suivantes :

* 720 361,24 euros au titre du préjudice économique,

* 100 000 euros au titre du préjudice moral,

* 7 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

- condamner la société Minuty au paiement des entiers dépens ;

Sur ce

LA COUR se réfère, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens échangés et des prétentions des parties, à la décision déférée et aux dernières conclusions échangées en appel.

En application de l'article 954 alinéa 2 du Code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions.

Sur la rupture brutale des relations commerciales établies

La société Minuty soutient que les relations commerciales entre les deux sociétés ont été établies pendant 8 années, soit entre 2005 et 2013, les commandes passées entre 2003 et 2005 n'étant pas suffisamment significatives pour caractériser une relation commerciale établie.

Elle fait valoir que la rupture des relations commerciales n'a pas été brutale, l'examen de tous les courriers échangés démontrant le contraire. Elle en conclut qu'elle n'avait pas à donner un préavis supplémentaire le 5 février 2013 lorsqu'elle a indiqué à la société Romano Brands qu'elle ne distribuerait plus ses vins puisque qu'elle lui avait déjà été fait savoir le 13 novembre 2012 que la reconduction ne valait que pour l'année 2013.

La société Romano Brands réplique que les relations commerciales entre la société Minuty et elle ont duré 10 ans, pour avoir débuté en 2003. Elle fait valoir que par mail du 1er juin 2013, la société Minuty a exprimé son souhait d'abandonner toute idée de rompre les relations. Elle soutient que la société Minuty a fait naître une confiance légitime dans la pérennité de cette relation établie depuis plus de 10 années. Elle explique qu'elle n'a pas été informée d'une rupture, mais d'un partage de marché avec un autre importateur. Elle estime alors que compte tenu de la durée des dix années de relation commerciale, de sa dépendance vis-à-vis de la société Minuty, elle aurait dû bénéficier d'un préavis d'au moins deux années.

Aux termes de l'article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce :

" Engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers (...) de rompre unilatéralement, même partiellement, une relation commerciale établie, sans préavis écrit tenant compte de la durée de la relation commerciale et respectant la durée minimale de préavis déterminée, en référence aux usages du commerce, par des accords interprofessionnels. Les dispositions qui précèdent ne font pas obstacle à la faculté de résiliation sans préavis, en cas d'inexécution par l'autre partie de ses obligations ou en cas de force majeure ". Les parties s'opposent sur la durée de la relation commerciale établie, la brutalité de la rupture, et le préjudice subi par la société Romano Brands.

Sur le point de départ de la relation commerciale établie

Il est de principe que l'article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce s'applique aux cas où la relation commerciale entre les parties revêtait, avant la rupture, un caractère suivi, stable et habituel et où la partie victime de l'interruption pouvait raisonnablement anticiper pour l'avenir une certaine continuité du flux d'affaire avec son partenaire commercial. La société Minuty ne conteste pas que les commandes ont commencé à lui être passées dès 2003 par la société Romano Brands, elle en conteste seulement les conséquences juridiques quant à l'application de l'article précité.

Il ressort de la pièce n° 2 produite par la société Romano Brands, dont les chiffres ne sont pas contestés, que les commandes de celles-ci ont débuté dès l'année 2003, pour se poursuivre de manière continue jusqu'en 2013. Il n'y a pas lieu de vérifier le montant des commandes en 2003 et 2004 dès lors qu'il apparaît que ces commandes étaient régulières tout au long de ces années et que la société Romano Brands pouvait donc dès l'année 2003 raisonnablement anticiper pour l'avenir une certaine continuité du flux d'affaires avec la société Minuty.

Dans ces conditions, la société Romano Brands justifie d'une relation commerciale établie avec la société Minuty débutée en 2003.

Sur la date de la rupture

Il est de principe que le caractère prévisible de la rupture d'une relation commerciale établie ne prive pas celle-ci de son caractère brutal si elle ne résulte pas d'un acte du partenaire manifestant son intention de ne pas poursuivre la relation commerciale et faisant courir un délai de préavis.

Il ressort des échanges entre les parties des 24 février et 1er mars 2012 (pièces 4 et 5 Minuty) que si la société Minuty a informé la société Romano Brands de son intention de commercialiser ses produits par l'intermédiaire d'autres distributeurs aux Etats-Unis, il n'en demeure pas moins que la société Romano Brands n'est pas écartée de cette distribution, la société Minuty souhaitant savoir si une collaboration entre la société Romano Brands et un autre distributeur américain était possible. Cette interprétation de ces échanges est confirmée par le courriel du 1er juin 2013 envoyé par la société Minuty à la société Romano Brands rédigé comme suit, la traduction n'étant pas contestée par les parties :

" Hello Michael,

Juste un petit mail pour avoir quelques nouvelles de vous et des ventes de Minuty aux USA. Je veux seulement que vous sachiez que nous vous maintenons notre confiance ainsi qu'à votre société pour nos ventes de rosés dans votre pays et que mon frère et moi sommes sûrs qu'à la fin de ces 2 années d'essai nous aurons tous du succès et que nous trouverons les vins Minuty dans tous les beaux endroits où nous devons être! Nous voyons que les ventes de cette année ont augmenté et nous sommes contents de cela ; nous espérons que ce sera un succès. Nous voulons vous remercier pour cela et svp dites-nous quand vous aurez un retour que les bouteilles André Ballaz. Avez-vous commencé à trouver d'autres distributeurs pour vendre nos vins dans les Etats principaux en vente de rosés (Californie, Floride, Nevada et autres que vous aurez identifiés) ' Dites-nous ce qu'il en est. Je vous souhaite un été chaud pour la vente de rosés et Michael saluez pour nous Claire ; J'espère que nous nous verrons bientôt ".

Il ressort de l'ensemble de ces éléments que la société Romano Brands ne pouvait légitimement penser que la relation commerciale entre les parties allait cesser, même si elle savait que des négociations étaient par ailleurs engagées avec d'autres distributeurs américains pour les Etats-Unis, sans nécessairement l'exclure du marché.

La société Minuty n'a pas manifesté à la société Romano Brands dans ces différents échanges son intention de ne pas poursuivre la relation commerciale et n'a donc fait courir aucun délai de préavis.

En revanche, par le le courriel du 5 décembre 2013, la société Minuty a indiqué clairement à la société Romano Brands la fin de leurs relations commerciales spécifiant : " Nous sommes dès lors obligés de terminer les accords qui nous liaient ".

Ce courriel constitue donc la lettre de rupture par la société Minuty de ses relations commerciales avec la société Romano Brands, sans préavis.

Sur la brutalité de la rupture

Le délai du préavis suffisant s'apprécie en tenant compte de la durée de la relation commerciale et des autres circonstances prévalant au moment de la notification de la rupture. La disposition légale vise expressément la durée de la relation commerciale et les usages commerciaux. Outre ces deux critères légaux, les paramètres suivants sont également pris en compte pour apprécier la durée du préavis à respecter : la part de dépendance économique (entendue non pas comme la notion de droit de la concurrence, mais comme la part de chiffre d'affaires réalisée par la victime avec l'auteur de la rupture), la difficulté à trouver un autre partenaire sur le marché, de rang équivalent, la notoriété du produit échangé, son caractère difficilement substituable, les caractéristiques du marché en cause, les obstacles à une reconversion, en terme de délais et de coûts d'entrée dans une nouvelle relation, l'importance des investissements effectués dédiés à la relation, non encore amortis et non reconvertibles.

Ces critères doivent être appréciés au moment de la rupture.

En l'espèce, c'est vainement que la société Romano Brands revendique avoir obtenu de la société Minuty un délai de préavis de deux années dans le courriel du 1er juin 2013, celui-ci ne faisant état que de deux années d'essais, dont il convient de comprendre de l'ensemble des échanges entre les parties évoqués supra, que cette période a débuté bien antérieurement audit courriel sans que la preuve du point de départ de ce délai ne soit rapportée par la société Romano Brands. Il convient ainsi de relever qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la durée de deux années portait sur les années à venir ni que cette durée était contraignante entre les parties. En outre, ce délai ne peut être utilement invoqué, en ce que la brutalité d'une rupture n'est appréciée qu'au regard du délai dont n'a pas disposé la victime pour réorganiser son activité.

La société Romano Brands ne communique aucun élément comptable permettant de déterminer son chiffre d'affaires global et la part du flux d'affaires réalisée avec la société Minuty.

Il n'est pas contesté que la société Minuty a vendu à la société Romano Brands en 2011 pour 157 326 euros de marchandises, en 2012 pour 129 606 euros et en 2013 pour 158 586 euros (pièce n° 2 Romano Brands).

Dans ces conditions, au regard du secteur d'activité et de la durée de la relation commerciale établie, la société Romano Brands aurait dû bénéficier d'un préavis de 3 mois. N'ayant bénéficié d'aucun préavis, la rupture des relations commerciales par la société Minuty avec la société Romano Brands est brutale.

Sur le préjudice

Il est constant que le préjudice résultant du caractère brutal de la rupture est constitué par la perte de la marge dont la victime pouvait escompter bénéficier pendant la durée du préavis qui aurait dû lui être accordé. La référence à retenir est la marge sur coûts variables, définie comme la différence entre le chiffre d'affaires dont la victime a été privée sous déduction des charges qui n'ont pas été supportées du fait de la baisse d'activité résultant de la rupture.

La société Romano Brands ne communique aucun élément comptable probant afin de déterminer son taux de marge sur coûts variables ; la liste interne relative au montant de revente des produits de la société Minuty ne peut à lui seul démontrer le taux de marge invoqué par la société Romano Brands, le taux de marge de la victime d'une rupture brutale nécessaire à la détermination de son préjudice n'étant pas constitué par la différence entre le prix de revente et le prix d'achat.

En outre, il ressort des échanges entre les parties qu'il avait été accepté au début de l'année 2012 par la société Romano Brands que la société Minuty fasse appel à d'autres distributeurs qu'elle aux Etats-Unis, soit plus d'une année avant la rupture. La société Romano Brands ne peut donc soutenir être le distributeur exclusif de la société Minuty aux Etats-Unis.

Dans ces conditions, au regard de la nature du marché et de l'ensemble de ces éléments, il y a lieu de fixer le taux de marge sur coûts variables de la société Romano Brands à 20 %.

Afin de déterminer la marge perdue, il convient de calculer la perte au regard de la moyenne du chiffre d'affaires réalisé les trois dernières années de relations entre les parties, soit en l'espèce 148 506 euros annuellement et 12 375,5 euros mensuellement.

Dès lors, il y a lieu de fixer le préjudice de la société Romano Brands à la somme de 7 425,30 euros ([12 375,5 x 20 %] x3).

Il y a donc lieu de condamner la société Minuty à verser à la société Romano Brands la somme de 7 425,30 euros à titre de dommages et intérêts pour rupture brutale des relations commerciales établies.

Le jugement doit être infirmé en ce qu'il a condamné la société Minuty à payer à la société Romano Brands la somme de 77 814,99 euros au titre du préjudice financier subi.

Sur la rupture abusive par la société Minuty

La société Romano Brands soutient que la rupture par la société Minuty de leurs relations commerciales est abusive, étant fondée sur des éléments purement arbitraires, pour avoir :

- eu une attitude dolosive en poursuivant les relations contractuelles avec elle sans l'informer de son souhait de changer de prestataire et tout en recherchant un autre distributeur,

- rompu sans aucun motif légitime,

- été en situation de dépendance économique avec la société Minuty.

La société Minuty conteste avoir rompu les relations commerciales de manière abusive avec la société Romano Brands. Elle relève qu'aucune faute à son égard n'est établie et que la dépendance économique alléguée n'est pas démontrée, commercialisant de nombreux autres vins que les siens.

La société Romano Brands ne démontre aucune faute imputable à la société Minuty, celle-ci ayant été transparente dès 2012 sur ses contacts avec d'autres distributeurs aux Etats-Unis et ne s'étant pas engagée à maintenir des relations commerciales sur plusieurs années de manière certaine.

Par ailleurs, la société Romano Brands ne prouve pas son état de dépendance économique à l'égard de la société Minuty, aucun élément comptable n'étant produit et notamment quant à la part de son chiffre d'affaires réalisé avec cette dernière dans son chiffre d'affaires total.

Enfin, au regard de la nature de leurs relations commerciales, les parties étant liées par un accord, la société Minuty est libre de cesser les relations commerciales avec la société Romano Brands quels que soient ses motifs, sous réserve de respecter un délai permettant à cette dernière de réorganiser son activité et de retrouver de nouveaux partenaires.

Il y a donc lieu de rejeter la demande en dommage et intérêt pour préjudice moral de la société Romano Brands sur ce point. Il y a lieu de confirmer le jugement en ce qu'il a rejeté la demande de ce chef.

Sur le parasitisme et la concurrence déloyale de la société Romano Brands

La société Minuty reproche à la société Romano Brands d'avoir commis des actes de concurrence déloyale et de parasitisme en utilisant sa renommée sur son site internet au mois de juillet 2015 et en 2016, proposant à la vente les vins Minuty, utilisant sa dénomination et la marque " Minuty " sans en avoir obtenu l'autorisation, alors que plus aucune relation commerciale ne subsiste entre ces deux entités.

La société Romano Brands répond que cette demande reconventionnelle est irrecevable d'une part à raison de son absence de lien avec la demande initiale et d'autre part à raison de la compétence exclusive des juridictions américaines. En outre, elle souligne que l'examen des demandes de la société Minuty nécessite que soient démontrés d'une part une faute d'autre part un préjudice et enfin 8un lien de causalité entre les deux premiers éléments, ce qu'elle n'a pas fait. Elle relève que la société Minuty n'établit aucun droit de propriété sur les éléments invoqués.

S'agissant de l'irrecevabilité des demandes formulées dans le corps des conclusions, il ne sera pas statué sur ce point, cette demande n'étant pas reprise dans le corps du dispositif qui seul lie la cour.

Sur les actes de concurrence déloyale

La concurrence déloyale doit être appréciée au regard du principe de la liberté du commerce qui implique qu'un signe qui ne fait pas l'objet de droits de propriété intellectuelle, puisse être librement reproduit, sous certaines conditions tenant à l'absence de faute par la création d'un risque de confusion dans l'esprit de la clientèle sur l'origine du produit, circonstance attentatoire à l'exercice paisible et loyal du commerce.

L'appréciation de la faute au regard du risque de confusion doit résulter d'une approche concrète et circonstanciée des faits de la cause prenant en compte notamment le caractère plus ou moins servile, systématique ou répétitif de la reproduction ou de l'imitation, l'ancienneté d'usage, l'originalité et la notoriété de la prestation copiée.

La société Minuty ne démontre pas de risque de confusion entre ses produits et ceux commercialisés par la société Romano Brands après la rupture, la mention Minuty associée à la mention en rupture de stock ne caractérisant pas une faute dans ces conditions, étant relevé que la société Minuty ne démontre pas de droits de propriété intellectuelle sur ce signe.

De même, il n'est pas plus établi de risque de confusion entre la forme de la bouteille et l'étiquette des nouveaux vins français commercialisés par la société Romano Brands, ces éléments apparaissant peu distinctifs, étant relevé que le nom du vin est très différent du Château Minuty, celui-ci s'appelant " Maison Belle Claire ".

Sur les actes de parasitisme

Le parasitisme est caractérisé dès lors qu'une personne physique ou morale, à titre lucratif et de façon injustifiée, s'inspire ou copie une valeur économique d'autrui, individualisée et procurant un avantage concurrentiel, fruit d'un savoir-faire, d'un travail intellectuel et d'investissements.

Pour les mêmes motifs que ceux-exposés ci-dessus, la société Minuty ne démontre pas que la société Romano Brands s'est inspirée d'éléments constituant une valeur économique, la forme de la bouteille comme les motifs de l'étiquette n'apparaissant pas comme étant le fruit d'un savoir-faire, d'un travail intellectuel et d'investissements.

Il y a donc lieu de rejeter la demande de la société Minuty de ce chef. Le jugement doit être confirmé sur ce point.

Sur les dépens et l'application de l'article 700 du Code de procédure civile

Le sens du présent arrêt conduit à confirmer le jugement sur les dépens et l'application qui y a été faite des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.

La société Minuty doit être condamnée aux dépens d'appel, ainsi qu'à payer à la société Romano Brands la somme supplémentaire de 5 000 euros par application de l'article 700 du Code de procédure civile en cause d'appel.

Le sens du présent arrêt conduit à rejeter la demande par application de l'article 700 du Code de procédure civile formulée par la société Minuty.

Par ces motifs LA COUR, Confirme le jugement sauf en ce qu'il a condamné la société Minuty à payer à la société Romano Brands la somme de 77 814,99 euros au titre du préjudice financier subi ; L'infirmant sur ce point, Statuant à nouveau ; Condamne la société Minuty à verser à la société Romano Brands la somme de 7.425,30 euros à titre de dommages et intérêts pour rupture brutale des relations commerciales établies ; Y ajoutant ; Condamne la société Minuty aux dépens d'appel, ainsi qu'à payer à la société Romano Brands la somme supplémentaire de 5 000 euros par application de l'article 700 du Code de procédure civile en cause d'appel ; Rejette toute autre demande.