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Décisions

CA Aix-en-Provence, 1re ch. A, 28 novembre 2018, n° 17-11860

AIX-EN-PROVENCE

Arrêt

Infirmation partielle

PARTIES

Défendeur :

BMW France (SA), Bavaria Automobiles (Sté), Financo (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Vidal

Conseillers :

Mmes Demont, Vignon

TGI Toulon, du 27 avr. 2017

27 avril 2017

Exposé du litige

M. Ramzi B. A., artisan exerçant sous l'enseigne Carduelis plomberie, a commandé le 22 juin 2012 auprès de la société Bavaria automobiles un véhicule de marque BMW 125 DM Sport immatriculé CK-157-KJ au prix de 54 037€.

Il a accepté le 5 septembre 2012, le jour de la livraison de l'engin automobile, l'offre de location avec option d'achat de la SA Financo.

Invoquant divers désordres, il a obtenu en référé la désignation d'un expert judiciaire le 3 juin 2014 qui a déposé son rapport le 19 janvier 2015.

Par exploit du 3 mars 2015 M. Ramzi B. A. a fait assigner le vendeur, au contradictoire de son bailleur, en garantie des vices cachés aux fins d'obtenir le remboursement à son profit du prix de vente et le versement de dommages et intérêts.

La société Bavaria a appelé en garantie la SA BMW France.

Le bailleur Financo a formé des demandes reconventionnelles en résolution du contrat de bail et en paiement de dommages et intérêts.

Par jugement en date du 27 avril 2017 le tribunal de grande instance de Toulon a :

débouté M. Ramzi B. A. de toutes ses demandes et la SA BMW France de sa demande reconventionnelle de dommages intérêts ;

constaté la résiliation du contrat de location avec option d'achat conclu entre M. Ramzi B. A. et la société Financo au 30 avril 2015 ;

débouté la société Financo de sa demande en paiement dirigée contre M. Ramzi B. A. ;

condamné M. Ramzi B. A. à payer à la société Bavaria automobiles la somme de 10 818 € au titre des frais de gardiennage pour la période du 6 septembre 2013 au 29 avril 2015 ;

condamné la société Financo à payer à la société Bavaria automobile la somme de 19 710 € pour la période commençant au 30 avril 2015 jusqu'au jugement ;

et condamné in solidum M. Ramzi B. A. et la société Financo à payer à la société BMW France la somme de 2000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile outre les dépens.

Le 21 juin 2017 M. Ramzi B. A. a relevé appel de cette décision.

Par conclusions du 15 mai 2018 il demande à la cour :

de réformer le jugement entrepris ;

de dire qu'il est subrogé dans les droits de la société Financo et que le véhicule est affecté de vices cachés ;

de prononcer la résolution du contrat de vente ;

de condamner la société Bavaria à lui payer la somme de 54'037 € correspondant au prix d'acquisition du véhicule augmenté des intérêts au taux légal jusqu'au parfait règlement des sommes ;

de dire que la société Financo fera son affaire de la récupération du véhicule à ses frais ;

de condamner la société Bavaria à lui payer la somme de 1043 € au titre des travaux de carrosserie et 19 712 € au titre du préjudice de jouissance ;

de dire que sur la somme de 54'037,50 € qui lui sera versée par la société Bavaria automobile, il s'engage à payer à Financo les mensualités du contrat de location restant dues, déduction faite des échéances déjà payées ;

à titre subsidiaire,

de condamner la société Bavaria à lui payer la somme de 3168 € au titre de son préjudice de jouissance et de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté la société Financo de sa demande de paiement d'indemnité de résiliation ;

et en tout état de cause de condamner la société Bavaria à lui payer la somme de 3500 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile outre les dépens.

Par conclusions du 4 janvier 2018 la SA Financo demande à la cour :

de constater qu'elle s'en rapporte sur la demande de résolution du contrat de vente ;

en cas de résolution du contrat de vente du véhicule et par voie de conséquence du contrat de prêt , de condamner M. B. A. à lui verser la somme de 54'000 € et de dire que la société Financo aura à lui rembourser les loyers réglés ;

à défaut de résolution, de confirmer le jugement entrepris sauf son appel incident ;

de réformer le jugement en ce qu'il l'a déboutée de sa demande en paiement dirigée contre M. B. a. ;

de condamner M. B. A. à lui payer la somme de 16'894 50 € selon décompte arrêté au 31 octobre 2017 outre les intérêts contractuels jusqu'à parfait paiement ;

de réformer le jugement entrepris en ce qu'il l'a condamnée à payer à la société Bavaria la somme de 19'710 € au titre des frais de gardiennage ;

de dire qu'elle ne saurait être tenue au paiement de quelconques frais ;

de débouter la société Bavaria de toutes ses demandes ;

en cas de condamnation aux frais de gardiennage, de condamner M. B. A. à la relever et garantir ;

en toute hypothèse, de réformer le jugement entrepris sur sa condamnation au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, et de condamner tout succombant à lui payer la somme de 1000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile outre les dépens avec distraction.

Par conclusions du 15 février 2018 la SAS Bavaria automobiles demande à la cour :

Au principal,

de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré irrecevables les demandes formées par M. Ramzi B. A. dépouvu de toute qualité pour agir ;

de débouter M. Ramzi B. A. de toutes ses demandes ;

À titre subsidiaire

de déclarer irrecevables la demande de résolution de la vente du fait du parfait fonctionnement du véhicule au jour de l'introduction de la procédure de référé postérieure à la date du 6 septembre 2013, date à laquelle la société Bavaria automobile a informé M. B. A. de la mise à disposition du véhicule réparé,

À titre très subsidiaire,

de juger que M. Ramzi B. A. ne peut solliciter la restitution d'un prix dont il ne s'est pas acquitté puisque celui-ci a été réglé par la Société Financo et qu'il ne justifie, ni de sa subrogation dans les droits du propriétaire de la chose, ni de l'autorisation de percevoir cette somme en ses lieu et place, ni du maintien du contrat en cours ;

de débouter M. B. A. de sa demande tendant à faire juger que " la somme de 54 037,50 € réclamée au titre du remboursement du prix sera distribuée à hauteur de 39 884,40 € au profit de la Société Financo et de 14 115, 60 € au profit du concluant ";

de dire en outre M. B. A. n'est pas fondé à réclamer au vendeur, tenu de la seule restitution du prix de vente, le remboursement des loyers payés ;

de constater que la Société Financo offre de rembourser à M. B. A. le montant de ces loyers en cas de résolution de la vente qu'elle ne sollicite pas ;

de juger en conséquence que ce dernier recevrait un double remboursement s'il était fait droit à ses prétentions ;

À titre très subsidiaire, en cas de condamnation prononcée à l'encontre de la concluante,

de faire droit à l'appel provoqué formé par cette dernière à l'encontre de la société BMW France ;

de prononcer la résolution de la vente du véhicule litigieux dans les relations de la société Bavaria automobiles et de la société BMW France,

de condamner en pareille hypothèse, la société BMW France à restituer à la société Bavaria automobiles la somme de 46 466,80 € TTC qui constitue le prix effectivement réglé par cette dernière,

de la condamner encore à indemniser la perte de marge subie par la concluante, soit au paiement de la somme de 7 570,70 € par application des dispositions de l'article 1645 du Code civil ;

de condamner en outre, la société BMW FRANCE à relever et garantir la société Bavaria automobiles de l'ensemble des condamnations prononcées à son encontre ;

en tout état de cause

de juger que le véhicule est réparé et disponible depuis le 6 septembre 2013 et que rien ne justifie son abandon par M. B. A. et la société Financo depuis cette date ;

En conséquence :

Vu les dispositions de l'article 1928 du Code civil et la jurisprudence relative au dépôt salarié,

de condamner in solidum ou solidiairement M. B. A. et la société Financo au paiement desdits frais de gardiennage sur la base de la somme de 18 € TTC par jour à compter du 6 septembre 2013 jusqu'à reprise effective du véhicule ;

A titre subsidiaire :

de juger que la société Financo ayant eu connaissance du coût du gardiennage le 14 novembre 2014, c'est au moins à cette date qu'elle devait reprendre le véhicule ;

de condamner en conséquence in solidum ou solidairement M. B. A. à lui payer la somme de 18 € par jour entre le 6 septembre 2013 et le 13 novembre 2014 et la société Financo à la somme de 18 € par jour à compter du 14 novembre 2014 et jusqu'à la reprise effective du véhicule ;

Plus subsidiairement :

de confirmer le jugement entrepris en ce qu'elle a condamné M. B. A. à lui payer la somme de 10 818 € pour la période de gardiennage allant du 6 septembre 2013 au 29 avril 2015 et la société Financo à la somme de 18 € par jour à compter du 30 avril 2015 et ce jusqu'à la reprise effective du véhicule litigieux en possession de la concluante ;

et de condamner tout succombant à verser à la concluante la somme de 3 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi que les entiers dépens en ce compris les

frais d'expertise dont M. B. A. a fait l'avance, distraits.

Par conclusions du 15 février 2018 la société BMW France demande à la cour de confirmer le jugement entrepris, à titre subsidiaire de débouter M. B. A. de ses demandes, de débouter Bavaria et le cas échéant Financo de leurs demandes, de condamner tout succombant à lui verser la somme de 3 000 € pour procédure abusive et la somme de 3 000€ au titre de l'article 700 du Code de procédure civile outre les dépens avec distraction.

La cour renvoie aux écritures précitées pour l'exposé exhaustif des prétentions et moyens des parties.

Motifs

Attendu que le contrat de location avec option d'achat souscrit par M. B. A. le 5 septembre 2012 contient la clause d'usage en la matière de subrogation du locataire, lequel choisit le bien et le vendeur, dans les actions et recours qui appartiennent à l'acheteur (article 5 du contrat) ; que l'action redhibitoire engagée au visa des articles 1641 du Code civil le 31 mars 2015 par M. B. A. contre son vendeur, la SA Bavaria, était recevable, contrairement à ce qui a été jugé en première instance, au moment où l'action a été introduite ;

Mais attendu que la déchéance du terme a été prononcée par la SA Financo le 30 avril 2015, dès lors que le premier loyer impayé date du 10 novembre 2012, Financo ayant attendu l'issue de la procédure d'expertise pour constater que M. Ramzi B. A. ne reprenait pas le réglement de ses loyers pour le véhicule en cause qu'il avait déclaré être à usage professionnel;

Qu'il s'ensuit la perte pour M. Ramzi B. A. en cause d'appel de sa qualité à agir en lieu et place du propriétaire en résolution de la vente ;

Que pour le même motif, la demande de M. B. A. au titre de frais de débosselage pour l'averse de grêle durant l'exécution de son contrat de dépôt présentée contre la société Bavaria sera écartée ;

Attendu que le véhicule a été confié à la société Bavaria le 26 juin 2013 et que les travaux ont pris fin le 6 septembre 2013, date à laquelle le dommage a cessé ; que M. B. A. a donc engagé l'action en garantie des vices cachés le 31 mars 2015, alors même que le véhicule avait déjà été réparé par le vendeur, ce qu'indique l'expert judiciaire qui a constaté, après essai, que le véhicule fonctionnait à nouveau parfaitement après le remplacement des deux chaînes de distribution par BMW France qui a procédé à un échange standard du moteur ; qu'il ne peut donc arguer de l'existence d'un vice caché à la date de son assignation ;

Attendu que M. B. A. est en revanche fondé à solliciter du vendeur la réparation du trouble de jouissance qu'il a subi dans l'usage du véhicule automobile durant son immobilisation ;

Qu'il a droit à la réparation intégrale de son préjudice et n'était pas tenu de chercher à le limiter en acceptant un véhicule de courtoisie ;

Que pour les 72 jours d'immobilisation du véhicule, il lui sera alloué la somme de 3168 € ;

Attendu que la société Bavaria réclame à bon droit d'être relevée et garantie de ce montant de 3168€ par son propre vendeur, le fournisseur-importateur BMW France;

Que le moyen tiré de ce que l'expert n'a pu conclure sur l'origine précise des désordres auxquels il avait déjà été remédié et que les pièces remplacées n'ont pas été conservées est inopérant à cet égard, le vendeur professionnel initial ou intermédiaire étant tenu de tous les dommages et intérêts en lien de causalité avec le vice ;

Attendu, sur les demandes reconventionnelles de Financo, que M. B. A. lui est redevable du montant de 16 894, 50 € selon décompte arrêté au 31 octobre 2017 correspondant aux loyers impayés à la date de la déchéance du terme ainsi qu'aux loyers à échoir (45 123,50€) dont à déduire la valeur résiduelle du bien (28 229 €), calcul non discuté ;

Attendu que la société Bavaria sollicite justement le paiement des frais de gardiennage de l'engin litigieux sur la base contractuelle de 18 € TTC par jour à compter du 6 septembre 2013 jusqu'à reprise effective du véhicule ;

Attendu que le tribunal a estimé à tort qu'il y a lieu de condamner M. B. A. au paiement de ces frais de gardiennage à compter du 6 septembre 2013 jusqu'à la date de la déchéance du terme seulement, la société Financo devant prendre le relais à cette date jusqu'à la reprise effective du véhicule en considérant qu'elle avait eu connaissance du coût journalier de gardiennage le 14 novembre 2014, et participé aux opérations d'expertise et laissé le véhicule en gardiennage chez Bavaria ;

Attendu qu'en effet l'article 7du contrat stipule à l'opposé que :

'Pour la durée de la location et jusqu'à la restitution, vous [le locataire] demeurez gardien exclusif responsable de tous risques résultant de l'utilisation du bien loué en application de l'article 1384 al.1 du Code civil.

En aucun cas, la responsabilité du bailleur ne peut être substituée à celle du locataire ni même être recherchée' ;

Attendu que M. B. A. preneur doit donc assumer seul les frais de garde du véhicule depuis qu'il a été mis en demeure de venir en reprendre possession jusqu'à ce que le véhicule soit restitué à Financo, et qu'il ne peut être reproché à ce propriétaire-bailleur de ne pas avoir exercé sa faculté d'en reprendre possession sur requête ;

Et attendu qu'aucun abus du droit d'ester en justice ne peut être retenu ;

Par ces motifs LA COUR, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort, Confirme le jugement déféré en ce qu'il a constaté la résiliation du contrat de location avec option d'achat conclu entre M. B. A. et la société Sofinco au 30 avril 2015 ; L'infirme pour le surplus de ses dispositions ; statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant : Déclare irrecevable en cause d'appel l'action en résolution de la vente exercée par M. B. A., Condamne la SAS Bavaria à payer à M. B. A. la somme de 3 168 € au titre de son préjudice de jouissance pendant la durée d'immobilisation du véhicule, Dit que la SA BMW France doit relever et garantir la SAS Bavaria du montant de cette condamnation, Condamne M. B. A. à payer à la SAS Bavaria automobiles les frais de gardiennage sur la base de 18 € TTC par jour à compter du 6 septembre 2013 jusqu'à la reprise effective du véhicule ; Condamne M. B. A. à payer à la SA Financo la somme de 16 894 50 € selon décompte arrêté au 31 octobre 2017 au titre des loyers et pénalités du contrat de prêt, Rejette les demandes plus amples des parties et notamment la demande de dommages et intérêts de la SA BMW France pour procédure abusive, Dit que M. B. A. supportera la charge des entiers dépens de première instance et d'appel, et dit que ceux-ci pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile, Vu l'article 700 du Code de procédure civile, Dit n'y avoir lieu de faire application de ce texte.