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Décisions

ADLC, 31 juillet 2018, n° 18-A-08

AUTORITÉ DE LA CONCURRENCE

Avis

relatif à la liberté d'installation des notaires et à une proposition de carte révisée des zones d'implantation, assortie de recommandations sur le rythme de création de nouveaux offices notariaux

ADLC n° 18-A-08

31 juillet 2018

L'Autorité de la concurrence,

Vu le Code de commerce, notamment son article L. 462-4-1 ; Vu la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques, notamment son article 52 ; Vu le décret n° 2016-216 du 26 février 2016 relatif à l'établissement de la carte instituée au I de l'article 52 de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques ; Vu le décret n° 2016-661 du 20 mai 2016 relatif aux officiers publics et ministériels ; Vu l'avis n° 15-A-02 du 9 janvier 2015 relatif aux questions de concurrence concernant certaines professions juridiques réglementées ; Vu les avis n° 16-A-03 du 29 janvier 2016 et n° 16-A-06 du 22 février 2016 concernant respectivement un projet de décret, et un projet de décret rectificatif, relatifs aux tarifs de certains professionnels du droit et au fonds interprofessionnel de l'accès au droit et à la justice prévu par l'article 50 de la loi du 6 août 2015 ; Vu l'avis n° 16-A-13 du 9 juin 2016 relatif à la liberté d'installation des notaires et à une proposition de carte des zones d'implantation, assortie de recommandations sur le rythme de création de nouveaux offices notariaux ; Vu la notice explicative du 1er juillet 2016 de l'Autorité de la concurrence sur la notion de " recommandations sur le rythme d'installation compatible avec une augmentation progressive du nombre de professionnels " dans les zones mentionnées au I de l'article 52 de la loi du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques ; Vu l'arrêté conjoint du ministre de l'économie et des finances et du garde des sceaux, ministre de la justice, du 16 septembre 2016 pris en application de l'article 52 de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques ; Vu les décisions du Conseil d'État n° 406017 du 19 mai 2017 et n° 403815 du 16 octobre 2017 ; Vu le document de consultation publique publié par l'Autorité de la concurrence le 9 avril 2018 ; Vu les contributions reçues jusqu'au 10 mai 2018 ; Vu les autres pièces du dossier ; Les rapporteurs, le rapporteur général, le commissaire du Gouvernement, et les représentants du ministère de la justice entendus lors de la séance du 5 juillet 2018 ; Les représentants du Conseil supérieur du notariat (CSN) et de l'association " Liberté d'installation des diplômés notaires " (LIDN), entendus sur le fondement des dispositions du deuxième alinéa de l'article L. 463-7 du Code de commerce ; Est d'avis : - de proposer aux ministres de la justice et de l'économie une carte révisée des zones mentionnées au I de l'article 52 de la loi du 6 août 2015, assortie de nouvelles recommandations sur les rythmes d'installation dans ces zones ; - d'établir un bilan sur l'accès aux offices de notaire, et de formuler des recommandations au garde des Sceaux, ministre de la justice, afin d'améliorer cet accès ; Sur la base des observations suivantes :

Résumé1

Après deux années d'application, la première carte des zones d'installation des notaires définie par l'arrêté conjoint des ministres de l'économie et de la justice du 16 septembre 2016 arrivera prochainement à échéance.

L'Autorité de la concurrence a pour mission de proposer au Gouvernement des orientations en vue de la révision de cette carte tous les deux ans. Dans le cadre de cet exercice, l'Autorité s'appuie sur une consultation publique, organisée dans les conditions prévues à l'article L. 462-4-1 du Code de commerce.

Le présent avis procède d'abord à un état des lieux de l'offre notariale dans les 247 zones d'installation libre (vertes) et 60 zones d'installation contrôlée (orange) définies par la première carte. Sur la base de ce bilan et au vu des résultats de la consultation publique lancée en avril 2018 (843 contributions reçues), l'Autorité propose une carte révisée des zones d'installation, assortie de recommandations sur le rythme de création de nouveaux offices. Enfin, elle formule un certain nombre de recommandations qualitatives afin d'améliorer l'accès aux offices de notaire, renforcer la cohésion territoriale des prestations, augmenter de façon progressive le nombre d'offices sur le territoire, améliorer la parité d'accès des femmes et des hommes aux offices et l'intégration des jeunes au sein du notariat.

Avant de formuler ses propositions pour la deuxième phase 2018-2020, l'Autorité s'est attachée à dresser un diagnostic quantitatif et qualitatif de l'offre notariale sur la période 2012-2016, en s'appuyant sur les dernières données économiques et financières consolidées disponibles (chiffre d'affaires et résultat net par exemple). Sur cette base, l'Autorité fait les constats suivants :

- un maillage territorial fort dans les territoires ruraux, mais un déficit d'offre dans les zones densément peuplées, qui comptent certes le plus de notaires libéraux en valeur absolue, mais se situent en dessous de la médiane s'agissant de la densité notariale (14,6 notaires libéraux pour 100 000 habitants);

- un taux de marge élevé, y compris dans les zones les moins dynamiques : 80 % des offices présentent un taux de marge supérieur à 19 % et pour 50 % des offices ce taux dépasse 27 % ;

- une plus grande hétérogénéité du chiffre d'affaires et des revenus sur le territoire que du nombre moyen d'actes : il existe ainsi une forte disparité entre des études qui sont très rentables, situées en zone verte, et des études qui le sont moins, situées en zone orange.

Afin d'élaborer ses recommandations chiffrées pour la période 2018-2020, l'Autorité a tenu compte des effets anticipés de l'arrivée des 1 650 nouveaux notaires libéraux appelés à s'installer en application de la première carte 2016-2018. En effet, comme expliqué dans l'avis (§ 55 et suivants), l'objectif de 1 650 ne pourra être totalement atteint avant que la première carte n'arrive à échéance en septembre 2018.

Dans l'hypothèse prudente susmentionnée, l'évaluation prospective des effets des créations d'offices de la première phase 2016-2018 sur l'offre et l'implantation notariales montre un renforcement sensible de la densité notariale (la médiane passerait de 14,6 à 16,4 notaires libéraux par zone d'installation) et une modération du chiffre d'affaires moyen par notaire libéral (la médiane passerait à 550 k€, contre 669 k€ sur la période 2012-2016 2).

D'un point de vue qualitatif, ces arrivées de nouveaux professionnels libéraux ont un effet bénéfique sur l'offre notariale, avec un plus grand choix pour les clients et une proximité accrue entre ces derniers et leur notaire. Par ailleurs, elles créent des débouchés professionnels pour les notaires diplômés, qui exerçaient jusqu'à présent en tant que notaires salariés ou assistants, en leur permettant d'accéder plus aisément à l'exercice libéral de leur profession.

L'Autorité a fait le choix de reconduire les options appliquées pour élaborer la première carte. La proposition de carte révisée des zones d'installation, assortie de recommandations sur le rythme de création de nouveaux offices, s'appuie ainsi sur une méthodologie identique à celle retenue en 2016. Tel est notamment le cas pour la délimitation des zones d'implantation, la prise en compte de l'offre et de la demande de prestations notariales, la fixation de seuils de chiffre d'affaires pour établir des recommandations chiffrées à l'horizon 2024, et le lissage à deux ans de ces recommandations sur la période 2018-2020, afin d'assurer une augmentation progressive du nombre de professionnels dans les zones concernées.

L'Autorité a en effet considéré, d'une part, que ces critères demeuraient pleinement pertinents et que le maintien d'une méthode identique était un gage d'équité et de lisibilité de l'établissement de la deuxième carte peu de temps après la première. Elle a noté, d'autre part, qu'à l'occasion du contentieux introduit contre la première carte (l'acte attaqué était l'arrêté du 16 septembre 2016 susvisé), le Conseil d'État statuant au contentieux avait examiné de façon détaillée cette méthodologie, qui était contestée sur différents points tel que le choix de délimitation des zones d'implantation, et avait estimé qu'elle était conforme aux dispositions applicables et exempte d'erreur d'appréciation.

En appliquant cette méthode à des données actualisées, l'Autorité estime le chiffre d'affaires théorique lié aux activités notariales, sur le territoire couvert par la carte, entre 6,5 et 7 milliards d'euros en 2024, soit une valeur comparable à celle estimée dans son précédent avis. Au vu de l'évolution " naturelle " des effectifs de notaires libéraux au cours des deux années passées et des nominations intervenues et devant encore intervenir dans le cadre de la précédente carte, l'Autorité estime que le potentiel est compris entre 1 800 et 2 300 installations de notaires libéraux à horizon 2024. Pour atteindre cette cible, elle retient un lissage linéaire des recommandations, dans un souci de progressivité, ce qui la conduit à recommander au Gouvernement la création d'offices supplémentaires permettant l'installation libérale de 700 nouveaux notaires sur la période de validité de la prochaine carte (2018-2020), auxquelles il conviendra d'ajouter le reliquat des recommandations qui n'auraient pu être satisfaites sur la période 2016-2018. Dans l'hypothèse où ce reliquat serait nul, les installations de nouveaux notaires seront possibles dans 230 zones vertes sur un total de 3063 (les 76 autres zones étant orange).

L'Autorité formule enfin six séries de recommandations qualitatives pour améliorer le dispositif régissant la liberté d'installation des notaires.

La première série de recommandations vise à prévoir un régime transitoire entre deux cartes afin de s'assurer que les nominations éventuellement restantes soient effectuées, même si la carte correspondante est arrivée à échéance. Il est conseillé au Gouvernement d'abroger la disposition règlementaire qui prévoit que l'adoption d'une nouvelle carte rend caduques les demandes formées antérieurement par les candidats, mais également de prévoir un régime transitoire pour les zones d'installation, autres que celles sans demandeurs, où l'objectif de nomination fixé pour la période 2016-2018 n'aura pas été atteint à l'échéance de la première carte.

La deuxième série de recommandations vise à améliorer la procédure de nomination en zone orange. L'Autorité constate que, sur la période 2016-2018, cette procédure s'est révélée extrêmement chronophage pour les administrations concernées, pour des résultats quasi-inexistants en termes de nominations. Dans l'hypothèse où le Gouvernement conserverait l'orientation consistant à ne nommer aucun candidat dans ces zones, il semblerait préférable d'inverser la logique actuelle des textes, en prévoyant qu'aucune création d'office n'intervienne en zone orange durant les deux années d'application de la carte, sauf situation exceptionnelle qui justifierait, après avis de l'Autorité, que le ministre de la justice en décide autrement. En cas de maintien de la procédure actuelle, l'Autorité propose à titre subsidiaire, de fixer deux dates d'horodatage différentes (l'une pour les zones vertes, l'autre - postérieure de trois mois par exemple - pour les zones orange), et de ne faire courir par ailleurs le délai d'instruction de deux mois qu'à compter de la saisine de l'Autorité (et non plus du dépôt d'un dossier complet sur le site internet du ministère de la justice, site auquel l'Autorité n'a pas accès).

La troisième série de recommandations vise à améliorer la procédure de nomination en zone verte. Au vu des difficultés liées à la mise en œuvre edu tirage au sort sans aucune limitation du nombre de zones dans lesquelles un même candidat pouvait se présenter, l'Autorité estime nécessaire de revoir les conditions d'organisation du tirage au sort pour y remédier. L'Autorité invite ainsi le Gouvernement à modifier les textes réglementaires applicables, en vue, à titre principal :

- de limiter les candidatures à un nombre réduit de zones (par exemple trois par jour et par candidat),

- de limiter les candidatures par zone à une par personne physique,

- de permettre aux candidats à l'installation postulant dans plusieurs zones d'installation d'exprimer un ordre de préférence entre ces différentes zones (a fortiori si le nombre de candidatures totales n'est pas significativement réduit),

- de réaliser un tirage au sort électronique et simultané dans toutes les zones.

En cas de maintien d'un tirage au sort manuel, l'Autorité recommande, à titre subsidiaire, d'examiner prioritairement les zones d'installation libre à fort potentiel.

De façon générale, l'Autorité invite par ailleurs le Gouvernement à accroître l'information des candidats sur l'état d'avancement de l'instruction de leur candidature, à allonger le délai maximum entre nomination et prestation de serment, et à restreindre les possibilités de renonciation tardive des candidats.

La quatrième série de recommandations vise à réduire les barrières à l'entrée pour les candidats à l'installation. L'Autorité a constaté que les nouveaux notaires nommés dans le cadre de la réforme rencontrent des difficultés importantes pour faire connaître leur office et développer leur activité, du fait des contraintes actuellement applicables en matière de communication. L'Autorité estime qu'il est temps d'assouplir la réglementation relative à la communication destinée à la clientèle des offices, de façon à permettre aux nouveaux notaires nommés de se faire connaître et de développer leur clientèle. Les restrictions aujourd'hui applicables handicapent fortement les nouveaux entrants sur le marché des prestations notariales. Aussi serait-il nécessaire :

- d'adopter à brève échéance le décret en Conseil d'État prévu au III de l'article 3 de la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siècle,

- de laisser au créateur d'un office la liberté de déterminer par lui-même le nombre d'avis à publier dans la presse, pendant la première année suivant la création de l'office,

- de prévoir explicitement le droit du créateur d'office d'organiser une inauguration de ses locaux,

- d'autoriser le recours à tous types de médias pour se faire connaître,

- d'autoriser l'emploi de panneaux et panonceaux pour indiquer que l'office est nouvellement créé,

- de supprimer la procédure d'agrément des sites internet des offices par la chambre pour la remplacer par un contrôle a posteriori,

- d'autoriser explicitement le notaire à communiquer sur ses tarifs, et notamment le fait qu'il pratique une remise le cas échéant.

S'agissant des remises sur émoluments, l'Autorité estime qu'à un niveau plus élevé, elles constitueraient un atout précieux pour permettre aux créateurs d'office d'acquérir une nouvelle clientèle, et ainsi d'animer la concurrence entre offices au profit des usagers. L'Autorité propose d'assouplir le cadre réglementaire applicable, en abaissant le seuil d'assiette de 150 000 € à 75 000 € et en portant, par ailleurs le taux maximal de remise de 10 % à 20 %. Une telle mesure serait de nature à faciliter la mise en œuvre de la réforme tout en permettant de dégager des gains de pouvoir d'achat pour les usagers.

La cinquième série de recommandations vise à améliorer le dispositif d'élaboration de la cartographie en associant l'Autorité à l'élaboration du rapport prévu au VII de l'article 52 de la loi du 6 août 2015 sur l'opportunité d'étendre l'application de la liberté d'installation aux départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle, en élaborant un cadre de transmission systématique d'information nécessaire à l'Autorité et en imposant, dans le cadre de la mise en place de la comptabilité analytique dans les offices (point II de l'article R. 444-20 du Code de commerce), une ventilation des produits et des charges entre l'office principal et son (ou ses) bureau(x) annexe(s).

La sixième série de recommandations vise à améliorer l'accès des femmes et des jeunes aux offices. L'Autorité renouvelle ses recommandations, formulées dans son précédent avis, d'étendre le dispositif prévu par l'ordonnance n° 2015-949 du 31 juillet 2015 relative à l'égal accès des hommes et des femmes au sein des ordres professionnels à la profession de notaire ; d'inciter les instances représentatives du notariat à établir une information statistique par genre retraçant les parcours professionnels par des indicateurs de parité et des indicateurs d'incidence par sexe, assortie d'un rapport thématique annuel consacré à la situation des femmes et des hommes au sein de la profession ; de faciliter l'accès à cette information, en créant par exemple une page dédiée sur les sites internet des instances représentatives ; de faciliter l'articulation entre la vie privée et la vie professionnelle des notaires en améliorant la prise en charge des congés maternité ou paternité des professionnels concernés et en mettant en place un système de " notaire remplaçant " lors de ces congés. Par ailleurs, l'Autorité regrette qu'aucune mesure budgétaire n'ait été jusqu'ici adoptée pour assurer le financement du fonds interprofessionnel de l'accès au droit et à la justice instituée pour procéder à une redistribution entre professionnels, dans un souci de maillage territorial. Enfin, pour assurer l'intégration des cohortes de notaires qui ont pu accéder à l'exercice libéral de leur profession grâce à la loi du 6 août 2015, l'Autorité encourage le CSN à favoriser l'implication et la représentation des créateurs d'offices dans les diverses instances représentatives de la profession et les fonctions d'inspection.

I. Introduction

1. Conformément à l'article L. 462-4-1 du Code de commerce, l'Autorité de la concurrence (ci-après " l'Autorité ") est chargée de rendre " au ministre de la justice, qui en est le garant, un avis sur la liberté d'installation des notaires [...] ". Dans ce cadre, elle " fait toutes recommandations en vue d'améliorer l'accès aux offices publics ou ministériels dans la perspective de renforcer la cohésion territoriale des prestations et d'augmenter de façon progressive le nombre d'offices sur le territoire. Elle établit également un bilan en matière d'accès des femmes et des hommes aux offices publics ou ministériels, sur la base de données présentées par sexe et d'une analyse de l'évolution démographique des femmes et des jeunes au sein des professions concernées. Ces recommandations sont rendues publiques au moins tous les deux ans. ".

2. Ces recommandations sont, en outre, " assorties de la carte mentionnée au I de l'article 52 de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité de chances économiques " (" loi Macron "). Cette carte " identifie les secteurs dans lesquels, pour renforcer la proximité ou l'offre de services, la création de nouveaux offices de notaire [...] apparaît utile " (troisième alinéa 3 du I de l'article 52 précité). " Afin de garantir une augmentation progressive du nombre d'offices à créer, de manière à ne pas bouleverser les conditions d'activité des offices existants, cette carte est assortie de recommandations sur le rythme d'installation compatible avec une augmentation progressive du nombre de professionnels dans la zone concernée " (quatrième alinéa du même I). Enfin, comme les recommandations, cette " carte est rendue publique et révisée tous les deux ans " (cinquième alinéa de ce I).

3. Sur proposition de l'Autorité du 9 juin 2016 (avis n° 16-A-13 susvisé), la première carte des zones d'implantation, assortie de recommandations sur le rythme de création de nouveaux offices notariaux, a été adoptée par arrêté conjoint des ministres de la justice et de l'économie du 16 septembre 2016. Elle a fait l'objet de recours rejetés par décision du 16 octobre 2017 du Conseil d'État statuant au contentieux (décision n° 403815 susvisée) qui a écarté l'ensemble des moyens dirigés contre la carte, notamment s'agissant de sa légalité, de la méthode et de l'appréciation suivies par l'Autorité.

4. Le présent avis porte, sur la révision de cette première carte, qui arrivera à échéance le 17 septembre 2018. Pour mémoire, cette carte a identifié 247 zones d'installation libre (" zones vertes "), dans lesquelles 1 650 nouveaux notaires sont appelés à s'installer en tant que titulaires ou associés des offices créés. Par ailleurs, elle a délimité 60 zones d'installation contrôlée (" zones orange ").

5. Après avoir rappelé brièvement le cadre législatif et règlementaire dans lequel s'inscrit cet avis (II), l'Autorité formule une proposition de carte révisée des zones d'implantation, assortie de recommandations sur le rythme de création de nouveaux offices notariaux, ainsi que diverses recommandations en vue d'améliorer l'accès de nouveaux professionnels libéraux aux offices notariaux (III et IV). Suivent la conclusion (V), ainsi que les annexes (VI), qui font partie intégrante du présent avis.

II. Le cadre législatif et réglementaire

A. PRESENTATION GENERALE DE LA PROFESSION

6. Les notaires sont des officiers publics et ministériels nommés par le garde des Sceaux, ministre de la justice (voir notamment l'avis de l'Autorité n° 16-A-16 du 16 septembre 2016 relatif à un projet de décret modifiant certaines dispositions du titre IV bis du livre IV de la partie réglementaire du Code de commerce, paragraphes 4 et suivants).

7. En tant qu'officiers publics, ils confèrent l'authenticité4 aux actes qu'ils établissent et en assurent la conservation. L'acte authentique, qui dispose d'un haut niveau de sécurité juridique, a pour attributs la date certaine, la force probante et la force exécutoire. Il fait pleine foi de sa date et de son contenu, s'agissant des éléments énoncés et constatés par le notaire, et il est exécutoire de plein droit au même titre qu'une décision judiciaire.

8. En tant qu'officiers ministériels, les notaires sont titulaires d'un office attribué par l'État. Ils disposent d'un monopole pour exercer leur mission dans le cadre d'une délégation de puissance publique conférée par l'État.

9. Au 31 mai 2018, on recense 5 974 offices notariaux, où exercent 9 925 notaires titulaires ou associés, ainsi que 2 503 notaires salariés. Une majorité des notaires exerce dans le cadre d'une société pluripersonnelle, notamment sous la forme d'une société civile professionnelle. Le chiffre d'affaires de la profession en 2016 s'élève à environ 6,7 milliards d'euros.

B. LES NOUVELLES MODALITES D'INSTALLATION DES NOTAIRES

10. Les nouvelles modalités d'installation des notaires sont issues de la loi du 6 août 2015 (1), à la suite de laquelle diverses mesures réglementaires ont été prises (2).

1. PRESENTATION DU DISPOSITIF LEGISLATIF

11. Plusieurs dispositions de la loi du 6 août 2015 ont eu pour effet de faciliter l'accès des diplômés notaires à l'exercice libéral de leur profession (voir l'avis n° 16-A-13 susvisé, paragraphes 26 et suivants). Elles visaient notamment :

- à faciliter l'accès à la profession de notaire en imposant un âge limite d'exercice de la profession à soixante-dix ans, pour favoriser le renouvellement des générations,

- à favoriser le recours au salariat pour l'exercice des fonctions de notaire, dans une optique de promotion sociale des notaires assistants et des anciens clercs habilités.

12. Les dispositions de cette loi visaient également à instaurer une liberté d'installation régulée par les pouvoirs publics, pour favoriser l'accès des diplômés notaires à des offices nouvellement créés, tout en garantissant le maillage territorial et la viabilité des offices existants.

13. À cet égard, l'article 52 de la loi distingue deux types de zones déterminées par la carte proposée par l'Autorité :

- les " zones d'installation libre " dans lesquelles " l'implantation d'offices apparaît utile pour renforcer la proximité ou l'offre de services " ;

- les " zones d'installation contrôlée " où " l'implantation d'offices supplémentaires de notaire, d'huissier de justice ou de commissaire-priseur judiciaire serait de nature à porter atteinte à la continuité de l'exploitation des offices existants et à compromettre la qualité du service rendu ".

2. PRESENTATION DES MESURES REGLEMENTAIRES

a) Décret fixant les critères présidant à l'élaboration de la carte

14. Le décret n° 2016-216 du 26 février 2016 relatif à l'établissement de la carte instituée au I de l'article 52 de la loi du 6 août 2015 précise les critères devant présider à l'élaboration de la carte visée ci-dessus.

15. Il s'agit, d'une part, de " critères permettant d'évaluer le niveau et les perspectives d'évolution de l'offre de service ", à savoir :

- " nombre et localisation des offices installés ;

- chiffre d'affaires global de ces offices et celui réalisé par chacun d'entre eux sur les cinq dernières années, en distinguant les montants respectifs des émoluments et des honoraires ;

- nombre de professionnels nommés dans ces offices (titulaires, associés, salariés) ;

- nombre et localisation des offices vacants ;

- âge des professionnels en exercice ".

16. Afin " d'évaluer le niveau et les perspectives d'évolution de la demande ", ce même décret retient, d'autre part, les critères suivants :

- " caractéristiques démographiques et tendance de leur évolution ;

- évolutions significatives de la situation économique ayant une incidence directe sur l'activité des professionnels, dont l'évolution (...) s'agissant des notaires : des marchés immobiliers et fonciers, et du nombre de mariages et de décès "5.

17. Ce décret précise enfin que les " zones d'installation libre " " doivent être délimitées en tenant compte de la localisation géographique des usagers auxquels les professionnels fournissent habituellement des prestations et du lieu d'exécution de la prestation "6.

b) Actes réglementaires faisant suite aux propositions de l'Autorité

Propositions de l'Autorité

Avis n° 16-A-13 du 9 juin 2016

18. Aux termes de l'avis n° 16-A-13 précité, l'Autorité a identifié 60 zones d'installation contrôlée et 247 zones d'installation libre.

19. À l'égard des zones d'installation contrôlée, l'Autorité a formulé des recommandations ayant trait à la transparence de la pratique administrative dans les nominations (avis n° 16-A-13 précité, paragraphes 418 et suivants).

20. Dans les zones d'installation libre, l'Autorité a proposé la création d'un nombre d'offices permettant l'installation libérale de 1 650 notaires à l'horizon 2018 (avis n° 16-A-13 précité, paragraphe 412). Elle a en outre fait des recommandations ayant trait à :

- l'ordre d'attribution des candidats dans les zones d'installation libre (paragraphes 424 et suivants) ;

- l'information actualisée sur l'état des candidatures (paragraphes 431 et suivants) ;

- l'information actualisée sur l'état des recommandations (paragraphes 437 et suivants).

Notice explicative du 1er juillet 2016

21. Le 1er juillet 2016, l'Autorité a adopté une notice explicative sur la notion de " recommandations sur le rythme d'installation compatible avec une augmentation progressive du nombre de professionnels " aux termes de laquelle elle a précisé que sa recommandation, conduisant à créer un nombre d'offices permettant l'installation libérale de 1 650 notaires à l'horizon 2018, s'entendait de la façon suivante :

- " si, pour chacune des 247 zones d'installation (...), toutes les candidatures sont individuelles, 1 650 nouveaux offices individuels pourront, au plus, être créés dans ces zones ;

- si, dans certaines de ces zones, des candidatures émanant de sociétés comprenant plusieurs associés en exercice sont retenues, le nombre d'offices pouvant, au plus, être créés, sera nécessairement inférieur à 1 650 " (paragraphe 18).

Arrêté identifiant les " zones d'installation libre " et les " zones d'installation contrôlée "

22. Reprenant la proposition de l'Autorité7, l'arrêté du 16 septembre 2016 pris en application de l'article 52 de la loi du 6 août 2015 (ci-après l'" arrêté carte ") a identifié 247 zones d'installation libre et 60 zones d'installation contrôlée.

23. Par ailleurs, l'arrêté carte a, " afin d'assurer un rythme d'installation compatible avec une augmentation progressive du nombre de professionnels " :

- distingué pour chacune des zones d'installation libre, une " recommandation " de créations d'offices et un " objectif " de nomination de professionnels titulaires ou associés ;

- segmenté la période de deux ans de validité de la carte en deux périodes successives d'un an : si, à l'issue d'un délai de douze mois suivant l'ouverture des candidatures, malgré la création d'un nombre d'offices conforme à la " recommandation ", le nombre de professionnels nommés est inférieur à l'" objectif ", alors l'instruction des demandes de créations d'offices reprend jusqu'à satisfaction de ce dernier (article 4).

24. Au total, le nombre d'offices susceptibles d'être créés au cours de la première année a été fixé à 1 002 (" recommandation ") et le nombre de nominations de professionnels titulaires a été fixé à 1 650 (" objectif ") à l'horizon 2018 (annexe III dudit arrêté).

Arrêté fixant les pièces à produire pour une demande de nomination

25. Par arrêté du 16 septembre 2016, le garde des Sceaux a fixé la liste des pièces à produire pour une demande de nomination en qualité de notaire dans un office à créer. À cet égard, l'arrêté prévoit des pièces à produire différentes selon que le demandeur est une personne physique (articles 1 et 2) ou morale (article 3).

26. Ce même arrêté a fixé en outre à 15 jours le délai dont dispose le demandeur pour produire les justificatifs requis en cas de demande incomplète (article 4).

Arrêté fixant la date de lancement de la télé-procédure

27. L'ouverture des candidatures aux nouveaux offices créés a été fixée par un arrêté du 4 novembre 20168 à la date du 16 novembre 2016, 14 heures.

C. LA CONSULTATION PUBLIQUE

28. Conformément à l'article L. 462-4-1 du Code de commerce et à l'article 2 du décret n° 2016-216 précité, l'Autorité a rendu publique l'ouverture de la procédure visant à l'élaboration de la deuxième carte en publiant un communiqué de presse le 9 avril 2018 sur son site Internet9.

29. L'objet de la procédure y a été rappelé et les tiers intéressés ont été invités à présenter leurs observations, en répondant à différentes questions relatives à l'élaboration de la carte (les retours d'expérience des nouveaux notaires installés, l'impact des créations récentes sur les offices en place, les collaborateurs et les clients, la procédure de nomination, l'impact de la réforme sur l'accès aux femmes et " jeunes " à la profession ou encore l'encadrement de la publicité et l'utilisation des nouvelles technologies).

30. Dans ce cadre, 843 contributeurs ont fait parvenir leurs observations à l'Autorité. Ces éléments, dont une synthèse figure en Annexe 1, ont permis de nourrir le présent avis.

III. La révision de la carte d'installation des notaires

31. L'Autorité présente, à la section A du présent III, les statistiques de la profession de notaire sous la forme de cartes et tableaux pour la période 2012-2016, qui sont les cinq dernières années pour lesquelles les données sont disponibles. En effet, le processus de nomination, qui a commencé avec l'adoption par le garde des Sceaux, ministre de la Justice, du premier arrêté10 portant création d'un office à la résident de Lanobre (Cantal), le 15 mars 2017, n'est pas encore achevé à l'heure actuelle. Il n'est donc pas possible de réaliser de bilan définitif à ce stade.

32. Toutefois, afin d'éclairer le débat, l'Autorité réalise à la section B une évaluation prospective des effets sur l'offre et l'implantation notariales des créations d'offices prévues pour la période 2016-2018. Par prudence méthodologique, elle se place dans l'hypothèse où, selon ses recommandations, 1 650 nouveaux titulaires ou associés seraient nommés dans des offices créés d'ici la fin de validité de la première carte. Les installations étant appelées à être moins nombreuses que 1 650 à cette date (§ 55 et suivants ci-dessous) cette hypothèse de travail permet donc de surévaluer l'impact réel des créations sur plusieurs indicateurs économiques.

33. Enfin, pour élaborer sa proposition de carte révisée des zones d'installation, l'Autorité fait le choix de reconduire à l'identique les options méthodologiques qu'elle avait retenues pour l'élaboration de la première carte, s'agissant en particulier de la délimitation des zones d'implantation, de la prise en compte de l'offre et de la demande de prestations notariales, de la fixation de seuils de chiffre d'affaires pour établir des recommandations chiffrées à l'horizon 2024, et du lissage à deux ans de ces recommandations sur la période 2018-2020 dans une optique d'une augmentation progressive du nombre de professionnels dans les zones concernées. Ces différents choix méthodologiques sont détaillés à la section C.

A. ÉTAT DES LIEUX DE L'OFFRE ET DE L'IMPLANTATION NOTARIALES

34. Parmi les 306 zones d'installation définies dans l'avis n° 16-A-13 précité, quatre ne comportaient aucun office au 31 décembre 2016 : Audun-le Ronan, Cirey-sur-Vezouze, Mayotte et Saint-Pierre-et-Miquelon11. Dans la suite de la présente section A, les statistiques concernent les zones d'installation comprenant au moins un office à cette date.

35. Au total, les 306 zones d'installation comptaient 4 382 offices à cette date, soit un office de moins qu'en 2014, pour un nombre médian d'offices par zone d'installation s'établissant à 9. La zone d'installation de Paris était celle comptant le plus d'offices, tandis que celle de La Trinité (Martinique) était la seule à n'accueillir qu'un office.

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36. Les grands centres urbains, Paris et Lyon en tête, sont les zones d'installation qui concentrent le plus d'offices, tandis que les zones rurales et d'Outre-mer présentent un nombre d'offices de quelques unités seulement.

37. La répartition des notaires libéraux suit la même logique que celles des offices. Fin 2016, on recensait 8 283 notaires libéraux, soit une baisse de 72 notaires libéraux par rapport à la situation qui prévalait en 2014. Paris était la zone d'installation en comprenant le plus (729), suivie par Lyon (245), tandis que Porto-Vecchio n'en comptait que 2. La médiane s'établissait à 15 notaires par zone d'installation.

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38. Il convient de rapporter la présence notariale dans une zone d'installation à la population de celle-ci. En calculant le nombre de notaires libéraux pour 100 000 habitants, on obtient la densité notariale.

39. Saint-Barthélemy et Épernay sont les deux zones d'installation avec la plus forte densité notariale, supérieure à 31 notaires libéraux pour 100 000 habitants. Cette densité est inférieure à 5 dans les zones d'installation d'Orly, La Trinité, Pointe-à-Pitre, et La Réunion-Ouest. On trouve la densité la plus faible dans la zone d'installation de Guyane, qui comptait 1,9 notaire pour 100 000 habitants fin 2015. À cette date, la médiane s'établissait à 14,6 notaires libéraux pour 100 000 habitants. Les grands centres urbains, qui comportent le plus de notaires libéraux en valeur absolue, se situent tous en dessous de cette médiane. À titre illustratif, on recensait seulement 12,3 notaires pour 100 000 habitants à Paris.

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40. Comme lors du précédent avis, les taux de marge de la profession restent relativement homogènes et élevés, indépendamment de la structure des offices. La moitié des offices présente un taux de marge supérieur à 27 % sur la période 2012-2016.

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41. En menant cette analyse au niveau des zones d'installation, celle de Saint-Barthélemy présente le taux de marge le plus élevé au 31 décembre 2016, suivie par les zones d'installation de La Réunion-Ouest, de La Trinité et de la Guyane. Dans ces zones, le taux de marge est supérieur à 40 %12. À l'opposé, trois zones d'installation présentent un taux de marge compris entre seulement 13 % et 15 % : Ancenis, Avallon et La Ferté-Bernard.

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42. La répartition du chiffre d'affaires (ci-après " CA ") moyen par office, ainsi que du résultat net par office, reste toujours très hétérogène sur le territoire français. Cela traduit à la fois l'attractivité des zones d'installation et les effets de la structure moyenne des offices, un plus grand nombre d'associés par office entraînant mécaniquement un CA par office plus important.

43. En analysant la répartition du CA moyen par office sur la période 2012-2016 au niveau de la zone d'installation, ce dernier est supérieur à 3,5 M€ dans les trois zones d'installation de La Réunion Nord, Ouest et Sud et Paris. À l'inverse, il n'est inférieur à 500 000 € que dans la zone d'installation de Montbard. La médiane s'établit à 1,1 M€ par zone d'installation.

44. Le résultat net moyen par office est supérieur à 1 M€ dans les trois zones d'installation de La Réunion Nord, Ouest et Sud, ainsi que dans celle de la Guyane. Puis, la zone de Paris arrive en cinquième position avec un résultat net moyen de 981 k€. À l'opposé, seule la zone d'installation de Guingamp présente un résultat net moyen par office inférieur à 100 k€ sur la période 2012-2016, tandis que la médiane par zone d'installation s'établit à 291 k€.

45. Les offices des grands centres urbains, ainsi qu'en Martinique et à la Réunion, présentent le plus grand nombre moyen d'associés par office. Il est ainsi supérieur à 3 dans les trois zones d'installation de La Réunion Nord, Ouest et Sud. À l'opposé, les zones d'installation de Porto-Vecchio, de Châteaubriant et de Le Blanc ne comportent que des offices individuels. La médiane par zone d'installation s'établit à 1,7 associé par office.

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46. La répartition du CA moyen et du résultat net moyen par notaire libéral sur la période 2012-2016 permet de refléter les disparités existantes entre les territoires, en neutralisant l'impact de la structure des offices.

47. Le CA moyen par notaire libéral sur la période 2012-2016 dépasse ainsi un million d'euros dans 12 zones d'installation, essentiellement en région parisienne, en Corse et en Outre-mer, avec celles de Paris et de la Guyane en tête. À l'opposé, il s'établit à moins de 400 k€ pour 6 zones d'installation, toutes situées en milieu rural. La médiane par zone d'installation s'établit à 620 k€ par notaire libéral.

48. Le résultat net moyen par notaire libéral dépasse 500 k€ dans trois zones d'installation d'Outre-Mer : la Guyane, Saint-Barthélemy et Basse-Terre. Il est inférieur à 100 k€ dans 5 zones d'installation rurales de France métropolitaine. La médiane du revenu net moyen annuel par zone d'installation s'établit à 168 k€ par notaire libéral.

49. Enfin le nombre moyen d'actes par notaire libéral et par an est distribué de manière plus homogène que le CA ou le résultat net. Il ne dépasse 700 qu'à Ghisonaccia - Aléria et n'est inférieur à 200 qu'à Saint-Barthélemy, tandis que la médiane par zone d'installation s'établit à 433.

50. Sur l'ensemble des notaires libéraux, le rapport entre le premier décile et le neuvième décile du nombre d'actes moyen par notaire libéral est de 1 pour 2,4. Il s'établit à 1 pour 3,1 pour le CA moyen et même 1 pour 4,9 pour le résultat net moyen, traduisant la forte disparité entre des études très rentables, situées en zone verte, et celles qui le sont moins, situées en zone orange.

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B. ÉVALUATION DES EFFETS DES CREATIONS D'OFFICES REALISEES SUR LA PERIODE 2016-2018

51. Un site internet dédié aux officiers publics ministériels, dénommé OPM (https://opm.justice.gouv.fr/), a été mis en place par la Chancellerie dès le 8 novembre 2016, afin de centraliser toute la procédure de candidature.

52. Ainsi, à compter du 16 novembre 2016 à 14 heures, les candidats à l'attribution d'un office ont pu déposer leurs candidatures dans les zones d'installation. Au cours des 24 premières heures, ce sont plus de 30 000 candidatures qui ont été enregistrées sur le site. À ce jour, le total des demandes avoisine 36 000.

53. Le nombre de candidatures reçues dans les 24 premières heures ayant excédé le nombre de places disponibles dans chacune des zones d'installation libre, des tirages au sort ont été organisés entre le 6 février et le 28 septembre 2017.

54. La première création d'office est intervenue le 15 mars 2017. Le 1002ème office a été créé le 21 décembre 2017. Bien que le processus de nomination ne soit pas achevé au jour d'adoption du présent avis, il apparaît d'ores et déjà que l'objectif de nomination de 1 650 nouveaux professionnels libéraux, fixé par l'Autorité dans l'avis n° 16-A-13, ne pourra pas être totalement atteint, un reliquat devant subsister. Ce constat a été confirmé par la DACS lors de la séance, puis lors de la transmission des dernières données actualisées.

55. Tout d'abord, la consultation du " tableau général des nominations dans un office de notaire à créer ", disponible sur le site internet OPM, actualisé à la date du 13 juillet 2018, indique que 11 zones vertes sont désormais " sans candidat "13, alors que l'installation de 20 nouveaux professionnels libéraux y serait encore nécessaire pour atteindre les objectifs fixés par l'arrêté du 16 septembre 2016 précité. À cette même date, une seule de ces zones avait fait l'objet d'un appel à manifestation d'intérêt14. Il ressort enfin des mêmes données que 87 professionnels manquent encore, dans une trentaine de zones au total, pour parvenir à l'objectif précité de 1 650 nouveaux professionnels.

56. Quand bien même ces nominations interviendraient à court terme, il est vraisemblable que certaines feraient l'objet de renonciations, puisque la DACS estime qu'environ 8 % des notaires nommés dans un office créé ne prêtent finalement pas serment15. Ce défaut de prestation de serment conduit, dans le délai d'un mois, à l'adoption d'un arrêté de démission d'office et de suppression de l'office créé, puis à la reprise de l'instruction des candidatures dans la zone concernée, dans l'ordre déterminé par l'horodatage ou le tirage au sort. L'issue de la procédure de nomination en est retardée d'autant.

57. Un délai moyen d'environ 2 mois s'écoulant habituellement entre l'arrêté de nomination et l'arrêté de suppression, il ne peut être exclu que des démissions d'office interviennent prochainement, s'agissant de nominations récentes. Or, 211 arrêtés portant nomination d'un ou plusieurs notaires dans un office créé ont été publiés au Journal officiel entre le 1er juin et le 15 juillet 2018.

58. Ainsi, certaines nouvelles zones d'installation, en plus des 11 déjà identifiées, pourraient, compte tenu de ces éléments, ne pas atteindre leurs objectifs de nominations, sans qu'il soit toutefois possible de les identifier avec certitude à la date du présent avis.

59. Le fait que l'objectif de nomination ne soit pas atteint ne résulte pas d'un défaut d'attractivité des zones concernées. Les 11 zones identifiées dans le tableau précité ont reçu, en moyenne, 53 demandes de création d'office au cours des 24 premières heures suivant le lancement de la procédure. Les difficultés rencontrées peuvent en revanche être attribuées, au moins en partie, à la lourdeur de la procédure de candidature et aux très longs délais d'instruction : il s'est parfois écoulé plus d'un an entre le dépôt des candidatures et les nominations. Par ailleurs, l'ordre de traitement des zones retenu par la Chancellerie a induit chez les candidats des stratégies d'attente, de nombreux demandeurs, bien que tirés au sort en rang utile dans une zone, ont attendu les résultats des tirages réalisés dans d'autres zones pour prendre leur décision de prêter ou non serment, espérant par ce biais pouvoir prétendre à une nomination dans une localité " plus attractive " pour eux.

60. En raisonnant à partir des effectifs fournis par le CSN, au 31 mai 2018, on recensait 9 653 notaires libéraux et 2 420 notaires salariés répartis dans les 306 zones d'installation, ainsi que 272 notaires libéraux et 83 notaires salariés dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle (qui ne sont pas concernés par le présent exercice de cartographie).

61. Parmi les 9 653 notaires libéraux concernés, l'Autorité en a identifié 1 449 nommés dans le cadre de l'application de la loi du 6 août 2015 précitée. Par prudence méthodologique, elle a fait le choix d'apprécier l'impact des créations d'offices sur la densité notariale et le chiffre d'affaires par notaire libéral à partir d'un majorant, c'est-à-dire d'une évaluation de l'effet maximal possible des nominations récentes sur ces indicateurs, en faisant l'hypothèse de travail " maximisatrice " que l'objectif des 1 650 nouveaux notaires libéraux serait atteint, alors qu'il est désormais établi que tel ne sera pas le cas.

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62. En procédant à l'évaluation selon ces modalités, un renforcement sensible de la densité notariale est déjà perceptible : la médiane passerait de 14,6 à 16,4 notaires libéraux par zone d'installation. En comparant les cartes n° 3 (§ 39) et 11 ci-dessus, cette densification de l'activité notariale serait visible et sensible partout en France, à l'exception de l'Outre-mer (où la densité notariale reste bien inférieure à la moyenne métropolitaine).

63. Les évaluations, menées selon les mêmes modalités, sur l'impact des créations sur le chiffre d'affaires moyen par notaire libéral, permettent de constater que ce ratio ne dépasserait plus un million d'euros par tête que dans 6 zones d'installation (contre 12 sur la période 2012-2016), tandis qu'il demeurerait inchangé dans les zones où il s'établissait à moins de 400 k€ au cours de la même période. La médiane par zone d'installation se situerait désormais à 550 k€ de chiffre d'affaires par notaire libéral.

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64. S'il est encore trop tôt pour apprécier l'impact réel de l'arrivée de nouveaux notaires sur ces deux indicateurs, l'analyse prospective menée par l'Autorité dans son avis n° 16-A-13 (§ 174 à § 221) est donc toujours valable. D'un point de vue qualitatif, ces arrivées de nouveaux professionnels libéraux ont par ailleurs un effet bénéfique sur l'offre notariale, avec un plus grand choix pour les clients, une plus grande proximité entre le notaire et son client, mais également la création de débouchés professionnels pour les notaires diplômés qui exerçaient jusqu'à présent en tant que notaires salariés ou assistants, et qui peuvent désormais accéder plus aisément à l'exercice libéral de leur profession. À titre illustratif, la consultation publique révèle que, pour la moitié des contributeurs qui se sont exprimés sur cette question, les nouveaux offices estiment déjà avoir un impact positif ou très positif pour la clientèle.

C. PERMANENCE DE LA METHODOLOGIE

65. La mission de l'Autorité consiste à délimiter des zones d'installation, respectivement libre et contrôlée, sur le territoire national et à formuler des recommandations de créations d'offices compatibles avec un rythme progressif d'installation de nouveaux professionnels dans ces dernières.

66. Pour classer les zones selon cette typologie, l'Autorité analyse préalablement les critères permettant d'apprécier l'" utilité ", au sens économique du terme, d'une offre notariale supplémentaire, c'est-à-dire l'accroissement de la satisfaction de la demande des clients qu'entraînerait l'installation d'un nouveau notaire libéral dans la zone.

67. Pour rappel, l'Autorité a délimité la France en 306 zones d'installation16, fondées sur le zonage des " zones d'emploi " de l'INSEE. Pour chaque zone d'installation, elle apprécie l'offre et la demande de services notariaux à partir des chiffres d'affaires par notaire libéral et de la dynamique de la population. Enfin, à partir de deux seuils cumulatifs (450 000 euros par notaire libéral à horizon 2024 et 35 % de baisse maximale du chiffre d'affaires par notaire libéral en place avant la réforme), l'Autorité détermine le potentiel de création dans chacune des zones d'installation.

68. Pour réviser la carte 2016-2018, l'Autorité a fait le choix de reconduire à l'identique les options retenues pour l'élaboration de la première carte. La proposition de carte révisée des zones d'installation, assortie de recommandations sur le rythme de création de nouveaux offices, s'appuie ainsi sur une méthodologie identique à celle retenue en 2016. Tel est notamment le cas de la délimitation des zones d'implantation, de la prise en compte de l'offre et de la demande de prestations notariales, de la fixation de seuils de chiffre d'affaires pour établir des recommandations chiffrées à l'horizon 2024, et du lissage à deux ans de ces recommandations sur la période 2018-2020, afin d'assurer une augmentation progressive du nombre de professionnels dans les zones concernées.

69. L'Autorité a en effet considéré, d'une part, que ces critères demeuraient pleinement pertinents et que le maintien d'une méthode identique était un gage d'équité et de lisibilité pour l'établissement de la deuxième carte, peu de temps après la première. Elle a noté, d'autre part, qu'à l'occasion du contentieux introduit contre la première carte (l'acte attaqué était l'arrêté du 16 septembre 2016 susvisé), le Conseil d'État statuant au contentieux avait examiné de façon détaillée cette méthodologie, qui était contestée sur différents points, notamment le choix de délimitation des zones d'implantation, et qu'il avait estimé que cette méthodologie était conforme aux dispositions applicables et exempte d'erreur d'appréciation.

1. LA DELIMITATION DES ZONES D'INSTALLATION

70. L'Autorité estime que l'utilisation de la zone d'emploi pour définir les zones d'installation a prouvé sa pertinence lors du précédent avis et l'élaboration de la première carte. Cette approche reste d'actualité pour le présent avis.

71. Le Conseil d'État, dans sa décision précitée, a retenu que cette approche était fondée en droit et en fait et exempte d'erreur manifeste d'appréciation, par les motifs suivants : " qu'il ressort des pièces des dossiers que les zones d'emploi définies par l'INSEE correspondent à un espace géographique caractérisé par des flux, notamment en termes de déplacement des actifs entre leur domicile et leur lieu de travail, qui dépassent le seul accès aux équipements et services les plus courants, et que, sur le territoire métropolitain, ces zones ont un rayon médian de vingt kilomètres, du même ordre que celui de la zone de chalandise des offices de notaires telle qu'elle ressort de la consultation menée par l'Autorité de la concurrence ; que chacune de ces zones compte au moins un office de notaire ; que c'est, par suite, à bon droit et sans commettre d'erreur manifeste d'appréciation que les ministres de la justice et de l'économie ont pu retenir les zones d'emploi comme référence pertinente pour délimiter les zones d'installation des offices de notaires ; "17.

72. En sus de l'analyse présentée au III de l'avis n° 16-A-13 précité, il convient de noter que, dans le cadre de la consultation publique menée par l'Autorité pour élaborer le présent avis, les notaires créateurs ayant répondu ont indiqué que leur clientèle se situait à 61 % dans le territoire de la zone d'installation et à 21 % dans une zone limitrophe, ce qui confirme la correspondance entre le zonage retenu et l'empreinte réelle de l'activité de ces nouveaux offices.

73. Au cours de l'instruction, certains contributeurs ont mis en avant le caractère prétendument " atypique " de certaines zones, notamment celles intégrant les plus grandes métropoles urbaines.

74. L'Autorité rappelle, qu'en l'absence de données précises relatives à l'origine géographique de la clientèle des offices, le zonage de l'INSEE, construit à partir des flux domicile-travail à des fins statistiques autres que les besoins du présent avis, est le plus pertinent pour identifier les offices qui sont substituables du point de vue des consommateurs comme expliqué dans l'avis n° 16-A-13 précité (§ 89 à 115).

75. Les zones d'emploi illustrent bien l'influence, notamment économique, des grandes métropoles urbaines sur leur environnement direct. Dès lors, une zone d'installation ne saurait s'arrêter aux limites administratives de la métropole.

76. À titre illustratif, il ressort de l'analyse de l'INSEE, que la zone de Paris ne peut être regardée comme " trop étendue ", comme le prétendent à tort certains répondants à la consultation publique. En effet, " [l]'Île-de-France se caractérise par une polarisation très forte de l'emploi et de nombreux flux d'échanges entre les communes ou pôle de la région. Les méthodes de définition des zonages sur la base des données bi localisées mettent en balance les limites inférieures de taille de pôle et les taux de stables par zone créée : plus la limite est importante et plus le taux de stable est fort. Dans le cas de l'Île-de-France, compte tenu des nombreux échanges et de la polarisation importante, la prise en compte de ces paramètres conduit à n'avoir qu'une zone d'emploi (équivalente à l'aire urbaine).

Des travaux plus approfondis sur les flux domicile-travail font ressortir un premier espace composé de Paris et de sa couronne, qui polarise la plus grande partie de ces flux. Il a été décidé d'enlever ce sous-ensemble (plus exactement les flux sortant de ce sous-ensemble) pour analyser les autres polarisations de l'emploi et construire ainsi des ZE.

Pour limiter l'effet distance (de nombreux flux parcourent de grandes distances), le paramètre de distance maximale a été fixé à 60 kilomètres.

Au final, on a sur la région un ensemble de ZE qui semblent cohérentes au regard des taux de stabilité (certes moins importants que pour les autres régions) et dont certaines débordent sur d'autres régions, essentiellement au nord. "18 (Soulignement ajouté).

77. S'agissant de la contestation de la taille des zones délimitées par l'Autorité, dont certains estiment que nombre d'entre elles seraient trop grandes, l'Autorité relève que le Conseil d'État avait été saisi au contentieux d'une contestation de même nature, et qu'il l'a écartée dans la décision précitée : " [...] que si la chambre interdépartementale des notaires de Paris soutient que les zones d'installation de Roissy-Sud Picardie, Paris, Créteil, Orly et Marne-la-Vallée incluent, au sein d'une même zone, des territoires hétérogènes en termes, notamment, de densité de population et d'activité économique, il ne ressort pas des pièces des dossiers que leur délimitation serait entachée d'erreur manifeste d'appréciation au regard de la localisation géographique des usagers auxquels les notaires fournissent habituellement des prestations et des lieux d'exécution de ces prestations ; "19.

78. Certains contributeurs estiment aujourd'hui que la conjonction de zones d'installation jugées " trop grandes " et de la possibilité de transférer librement son office au sein d'une même zone d'installation libre pourrait mener à une " désertification " qui, selon eux, serait contraire à l'objectif de renforcement du maillage territorial. Toutefois, la possibilité de transfert au sein d'une zone d'installation libre n'impacte en rien le maillage territorial, car, au vu des distances limitées à parcourir20, chaque office est substituable aux autres, du point de vue des clients, au sein de chacune de ces zones. Ainsi, un client peut aisément trouver un notaire répondant à ses besoins au sein de la zone, et la possibilité de transfert des offices permet par ailleurs aux notaires de mieux s'adapter à la répartition géographique de la clientèle, qui peut évoluer. L'argument selon lequel la possibilité de libre transfert porterait atteinte au maillage territorial n'est donc pas retenu.

79. Enfin, certains contributeurs estiment qu'en intégrant, au sein d'une même zone d'installation, des localités présentant des prix de l'immobilier très différents, le zonage retenu par l'Autorité ne refléterait pas " fidèlement l'origine de la clientèle des offices ". La DACS indique pour sa part que les " données relatives aux tarifs moyens des offices " (c'est-à-dire le chiffre d'affaires moyen par acte reçu par l'office) pourraient fournir " des indications solides bien qu'indirectes sur ces zones de chalandise " et ainsi conduire l'Autorité à subdiviser certaines zones identifiées jusqu'ici, même si elle reconnaît " que les zones d'emploi présentent une taille qui permettrait en moyenne de reproduire la taille attendue des zones de chalandise des offices ".

80. L'Autorité estime que l'existence de tarifs moyens par acte différents entre des offices, selon leur lieu d'implantation, ne démontre pas que ces offices ne seraient pas substituables du point de vue des consommateurs. Il ne faut pas, en effet, confondre la localisation géographique majoritaire de la clientèle de l'office et la dimension de la zone au sein de laquelle ce dernier exerce une pression concurrentielle sur d'autres offices, cette dernière étant par nature plus étendue que la première. Ainsi, si le tarif moyen à l'acte peut donner une indication sur la localisation géographique d'une majorité des clients d'un office, cet indicateur ne permet pas d'apprécier la dimension de la zone de chalandise de l'office. Par conséquent, les différences constatées dans les tarifs moyens à l'acte correspondent sans doute pour partie à la variance des prix immobiliers dans la zone d'installation considérée, sans démontrer par elles-mêmes la nécessité d'une subdivision du marché géographique pertinent retenu par l'Autorité.

81. Après avoir pris en considération l'ensemble des éléments et observations qui précèdent, l'Autorité a décidé de maintenir les choix méthodologiques retenus pour établir la carte 2016-2018, en estimant que ceux-ci demeurent pertinents. La permanence des critères d'analyse est par ailleurs gage d'équité et de lisibilité pour les personnes intéressées. Aussi l'Autorité conserve-t-elle la même approche systémique, fondée sur une analyse des flux domicile-travail réalisée sur l'ensemble du territoire national par un institut statistique indépendant, pour réaliser une délimitation objective des zones au sein desquelles les déplacements des habitants sont homogènes, notamment pour accéder à l'offre de prestations notariales.

82. En définitive, pour le présent avis, l'Autorité retient pour la définition des zones d'installation :

a. pour la France métropolitaine, sous réserve des exceptions prévues au point ci-après, le périmètre géographique des " zones d'emploi " référencées dans l'atlas établi par l'INSEE et les services statistiques du ministre chargé de l'emploi, selon la géographie communale en vigueur au 1er janvier 2017 ;

b. pour les départements d'Outre-mer et les collectivités d'Outre-mer de Saint-Barthélemy, Saint-Martin et Saint-Pierre et Miquelon, le périmètre des zones d'installation tel que défini dans l'avis n° 16-A-13, pour les raisons explicitées dans cet avis ;

83. S'agissant du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle, en application du VII de l'article 52 de la loi du 6 août 2015 :

a. les 11 " zones d'emploi " (au sens de l'INSEE) de Forbach, Sarreguemines, Saverne, Haguenau, Wissembourg, Strasbourg, Molsheim-Obernai, Sélestat, Colmar, Mulhouse et Saint-Louis ne constituent pas des " zones d'installation " (au sens du présent avis) ;

b. les 5 " zones d'emploi " (au sens de l'INSEE) de Longwy, Thionville, Metz, Nancy, et Sarrebourg ne constituent respectivement les " zones d'installation " de Longwy, Audun-le-Roman, Jarny, Nancy, et Cirey-sur-Vezouze (au sens du présent avis) qu'en ce qu'elles incluent, chacune en ce qui la concerne, les communes des départements de la Meurthe-et-Moselle et des Vosges dont la liste figure aux sections A à E de l'annexe 2 au présent avis.

84. S'agissant de Wallis-et-Futuna, ses statuts21 prévoient une compétence exclusive de l'État en matière d'officiers publics et ministériels et l'Autorité relève que le législateur a prévu, au VI de l'article 52 de la loi du 6 août 2015 précitée, une mention expresse d'applicabilité de l'article L. 462-4-1 du Code de commerce, sur la base duquel le présent avis est adopté. Toutefois, il n'a pas prévu de telle mention pour les I à III du même article 52, qui régissent les conditions de création d'offices de notaire dans différentes zones du territoire et, en l'état des textes règlementaires, les notaires n'y sont territorialement pas compétents pour instrumenter22. Au vu de l'ensemble de ces considérations, le périmètre géographique de la collectivité d'Outre-mer de Wallis-et-Futuna ne constitue pas une " zone d'installation " au sens du présent avis.

85. La liste des 306 " zones d'installation " (au sens du présent avis) est jointe en annexe 3.

2. LA PRISE EN COMPTE DE L'OFFRE ET DE LA DEMANDE

86. Dans son avis n° 16-A-13 précité, l'Autorité a expliqué de façon détaillée comment la prise en compte du chiffre d'affaires par notaire libéral permettait d'apprécier de façon synthétique l'ensemble des critères d'offre notariale, pour chaque zone d'installation (§ 227 à 261) et comment celle de la population, associée à sa dynamique, permettait de prendre en compte de façon synthétique l'ensemble des critères de la demande de services notariaux (§ 262 à 292). Ceci résulte des fortes corrélations entre les différents critères prévus par le décret du 26 février 2016 précité.

87. L'Autorité estime que cette analyse reste pertinente dans le cadre du présent avis et décide de la maintenir.

88. Cette approche a d'ailleurs été validée, en ces termes, par le Conseil d'État statuant au contentieux : " Considérant, en premier lieu, que le I de l'article 1er du décret du 26 février 2016, rappelé au point 1, liste des critères pertinents pour identifier les zones où l'implantation d'offices apparaît utile pour renforcer la proximité ou l'offre de service des notaires ; qu'il appartient à l'autorité administrative, sur ce fondement, de prendre en considérations ces critères seuls ou combinés, sans pouvoir en retenir d'autres, dès lors qu'ils lui permettent de satisfaire aux objectifs poursuivis par le dispositif prévu à l'article 52 de la loi du 6 août 2015 précitée ; qu'ainsi, elle n'est pas tenue de prendre en considération tous les critères prévus au I de l'article 1er du décret du 26 février 2016 si ceux retenus lui permettent de satisfaire à ces objectifs ; que, dès lors, afin de formuler des recommandations chiffrées en termes de nouveaux professionnels et d'offices à créer, l'arrêté attaqué a pu légalement se fonder sur un indicateur quantitatif fondé sur les critères du chiffre d'affaires par notaire et de l'évolution de la population qui lui a permis d'évaluer les perspectives d'évolution de l'offre et de la demande de services notariés, sans être tenu de prendre en compte tous les critères posés par le décret ; que l'arrêté a, ainsi, pu légalement ne pas prendre en compte le critère tiré du nombre de notaires salariés ; "

89. Ainsi, pour évaluer le potentiel d'accroissement de l'offre notariale dans les zones d'installation, l'Autorité retient un indicateur synthétique calculé à partir du chiffre d'affaires par notaire libéral et des projections démographiques, permettant une prise en compte globale des critères prévus par le décret n° 2016-216.

90. L'évaluation du chiffre d'affaires par notaire libéral implique de déterminer le nombre de notaires libéraux actifs dans chaque zone d'installation. Comme préalablement expliqué, le processus de nomination étant toujours en cours, il n'est pas possible de connaître exactement le nombre de nominations pour chaque zone d'installation à la date du présent avis.

91. Par ailleurs, il résulte de l'article 52, alinéa 5, du décret n° 73-609 du 5 juillet 1973 précité que la publication d'une nouvelle carte " entraîne la caducité des demandes formées antérieurement ", étant précisé que la précédente carte, d'une durée de validité de deux ans, est entrée en vigueur le 21 septembre 2016.

92. Compte tenu de ces divers éléments (zones d'ores et déjà sans candidat, démissions possibles de candidats déjà ou prochainement nommés, caducité des demandes formées en application de la précédente carte), il est certain que les objectifs assignés par l'arrêté du 16 septembre 2016 précité ne seront pas atteints dans plusieurs zones, sans que l'Autorité puisse, au jour du présent avis, déterminer toutes les zones qui seront concernées, ni l'ampleur de ce phénomène.

93. Par conséquent, l'Autorité a décidé de raisonner à partir de la situation cible où les 1 650 nominations du précédent avis seraient effectives (situation décrite au § 61 ci-dessus) pour déterminer le nouveau potentiel de création. Cette approche revient à minorer le chiffre d'affaires moyen par notaire libéral par rapport à la réalité et préserve donc les intérêts des notaires déjà installés.

3. LE RECOURS A DES SEUILS DE CHIFFRES D'AFFAIRES

94. Comme dans son avis n° 16-A-13 précité, l'Autorité propose de retenir deux seuils de chiffre d'affaires pour apprécier le potentiel de création dans chaque zone d'installation.

95. Le premier correspond au seuil plancher de chiffre d'affaires par notaire libéral utilisé pour déterminer le caractère libre ou contrôlée d'une zone d'installation. Dans l'avis n° 16-A-13 précité, ce seuil avait été fixé à 450 000 euros par an par notaire libéral. L'Autorité considère que ce seuil garde toute sa pertinence, dès lors notamment qu'il traduit une approche à la fois protectrice et prudente tant vis-à-vis des offices déjà en place avant la réforme, des nouveaux notaires s'étant installés depuis mars 2017, que des futurs candidats à l'installation.

96. Le second seuil vise à ne pas porter atteinte à la valeur du droit de présentation afin de ne pas " bouleverser les conditions d'activités des offices existants ". Il permet de s'assurer que le chiffre d'affaires par notaire libéral ne diminue pas de plus de 35 % à l'horizon 2024. S'il est encore trop tôt pour mesurer l'impact de l'arrivée de nouveaux notaires, à partir de mars 2017, sur les chiffres d'affaires des offices existants, l'Autorité estime que ce seuil protecteur est toujours justifié dans le cadre du présent avis.

97. Sur ces deux points, le Conseil d'État a d'ailleurs indiqué : " Considérant, en deuxième lieu, qu'il ressort des pièces des dossiers que la carte des zones d'installation libre et les recommandations de créations d'office sont fondées sur une estimation du potentiel d'installation de nouveaux notaires jusqu'en 2024 combinant une hypothèse de chiffre d'affaires futur par notaire libéral de 450 000 euros, au-delà duquel existe un potentiel de développement de l'activité, et sur une contrainte tenant à ce que l'installation de nouveaux professionnels n'entraîne pas une réduction du chiffre d'affaires moyen par office de plus de 35 % ; qu'eu égard, d'une part, à l'actuel chiffre d'affaires moyen par notaire libéral ainsi qu'aux seuils que les instances représentatives de la profession regardent comme devant alerter sur la viabilité d'un office ou au contraire encourager une association et, d'autre part, à la période sur laquelle la création d'offices est envisagée, ces chiffres ne sont pas entachés d'une erreur manifeste d'appréciation "23.

98. Dans le cadre du présent avis, l'Autorité estime que les deux seuils précités gardent toute leur pertinence pour élaborer ses recommandations.

99. Elle a donc procédé à une mise à jour des calculs de chiffres d'affaires théoriques à l'horizon 2024 tels qu'évalués dans l'avis n° 16-A-13, à partir des éléments suivants :

a. les chiffres d'affaires réels sur la période 2012-2016 des notaires libéraux ;

b. les résultats, toujours valables, de son étude économétrique de 2016 (avis n° 16-A-13 précité, § 262 à 280) : pour 1 % de croissance démographique dans la zone, le chiffre d'affaires notarial croît de + 0,98 % (même avis, § 353) ;

c. les résultats de son étude pour déterminer l'impact des nouveaux tarifs entrés en vigueur en mai 201624 ;

d. les dernières projections de population réalisées par l'INSEE par zone d'emploi, pour la France métropolitaine, et par département, pour les départements d'Outre-mer. Concernant les zones d'emploi de moins de 40 000 habitants, pour lesquelles les projections de population sont indisponibles, l'Autorité a estimé la population en prolongeant la tendance observée sur la période 1999-2015.

100. Selon ces hypothèses, le chiffre d'affaires du notariat sur le territoire couvert par la présente carte se situerait entre 6,5 et 7 milliards d'euros en 2024, soit une estimation similaire à celle qui avait été faite lors du précédent avis.

101. Concernant l'incidence des marchés immobiliers et fonciers sur la variation des chiffres d'affaires de la profession notariale, bien que l'évolution des marchés immobiliers semble favorable depuis 2016, l'Autorité reconduit la position prudente établie dans l'avis n° 16-A-13, qui consiste à ne pas intégrer les évolutions immobilières possibles aux projections à l'horizon 2024 du chiffre d'affaires.

4. L'IMPERATIF DE PROGRESSIVITE DES CREATIONS

102. Dans son avis n° 16-A-13, l'Autorité a estimé que le potentiel de création à l'horizon 2024 était compris entre 3 500 et 4 000 nouveaux notaires libéraux et a recommandé que 1 650 nouveaux notaires puissent s'installer d'ici 2018.

103. À partir de la méthodologie décrite ci-avant, en se basant sur les effectifs de la profession au 31 juin 2018, et en prenant en compte les éléments transmis par la Chancellerie sur les nominations devant encore intervenir dans le cadre de la précédente carte, l'Autorité estime que le potentiel de création à horizon 2024 est désormais compris entre 1 800 et 2 300.

104. Lors de l'instruction, certains acteurs ont suggéré à l'Autorité d'observer une " pause " dans ses recommandations pour laisser à " la première vague " le temps de bien s'installer. Le CSN a d'ailleurs transmis à l'Autorité au cours de l'instruction les données d'activité des nouveaux offices créés dans le cadre de la loi du 6 août 2015 précitée.

105. En analysant ces données, l'Autorité a constaté que les premiers chiffres d'affaires de ces offices étaient, de fait, peu élevés. Cette situation ne présente toutefois aucun caractère anormal. En effet, l'activité notariale ne peut réellement débuter qu'une fois écoulé le délai incompressible entre la date de nomination du notaire au Journal officiel et son installation effective dans ses locaux. Par ailleurs, comme pour toute activité de service, il existe un décalage de plusieurs semaines, voire de plusieurs mois dans certains cas, entre le début de traitement d'un dossier et l'encaissement des émoluments afférents. De plus, l'encadrement strict de la publicité des nouveaux offices limite fortement les possibilités de se faire connaître auprès de la clientèle.

106. En outre, toute comparaison des données de démarrage d'activité des nouveaux offices créés dans le cadre de la loi du 6 août 2015 précitée avec celles d'une cohorte précédente (offices créés entre 2012 et 2016) s'avère à la fois complexe et peu pertinente, compte tenu notamment de la différence de contexte entre ces deux processus. En tout état de cause, la viabilité économique d'un office notarial ne peut s'apprécier uniquement après quelques mois d'activité. Or, dans l'échantillon transmis par le CSN à partir des " tableaux de bord " collectés mensuellement, seuls 31 offices (échantillon d'ailleurs trop réduit pour en tirer des résultats représentatifs d'un point de vue statistique) présentaient une durée d'activité supérieure à un semestre. Au demeurant, les notaires nouvellement installés ayant contribué à la consultation publique ont indiqué avoir un objectif de rentabilité à un horizon supérieur à 3 ans.

107. Enfin, pour rappel, la méthode développée par l'Autorité identifie un potentiel de création par zone d'installation à horizon 2024. Dans son avis n° 16-A-13, les recommandations formulées pour 2016-2018, à supposer même - quod non -, que cet objectif ait été pleinement atteint, auraient permis de couvrir uniquement 45 % de ce potentiel. À l'issue des 1 650 premières nominations libérales, le potentiel de création de nouveaux offices reste donc important (voire très important dans certaines zones urbaines et littorales). En tous les cas, il apparaît de nature à permettre le développement de l'activité économique des offices créés, au cours des deux périodes concernées : 2016-2018 comme 2018-2020.

108. Il est à noter en outre qu'une " pause " dans les recommandations, se traduirait forcément par un " choc " lors des prochaines révisions biennales, soit en 2020, soit en 2022, ce qui irait à l'encontre même du principe de progressivité, dès lors que la présente analyse confirme la pertinence de la cible définie à l'horizon 2024.

109. Pour la période 2018-2020, l'Autorité est d'avis que la progressivité, objectif fixé par la loi, sera mieux assurée en maintenant le cadre d'analyse défini en 2016 et en retenant un rythme de nominations des nouveaux notaires correspondant à une répartition au prorata temporis des besoins identifiés à l'horizon 2024.

IV. La proposition de carte et les recommandations de l'Autorité

A. PROPOSITION DE CARTE REVISEE DES ZONES D'IMPLANTATION, ASSORTIE DE

RECOMMANDATIONS SUR LE RYTHME DE CREATION DE NOUVEAUX OFFICES

NOTARIAUX

110. L'Autorité estime qu'un lissage linéaire des recommandations entre 2018 et 2024 permettra d'atteindre la cible mentionnée au paragraphe 103 ci-dessus tout en respectant l'impératif de progressivité prévu par la loi. Elle recommande ainsi la création d'offices supplémentaires permettant l'installation libérale de 700 nouveaux notaires sur la période de validité de la prochaine carte (2018-2020).

111. À ces créations, il conviendra d'ajouter le reliquat des recommandations non satisfaites sur la période 2016-2018. Par conséquent, pour la période 2018-2020, le statut proposé pour chacune des zones d'installation (libre/contrôlée) est conditionné, s'il s'agissait précédemment d'une zone d'installation libre, à l'atteinte de l'objectif de nomination fixé par l'arrêté du 16 septembre 2016 susvisé.

112. Sous réserve que l'objectif de nomination fixé par cet arrêté pour la période 2016-2018 soit atteint dans chaque zone, l'Autorité propose de définir 306 zones d'installation, respectivement 230 zones vertes et 76 zones orange, pour la période 2018-2020 sur la base de la carte révisée suivante :

<emplacement carte>

113. Pour chaque zone d'installation, une " fiche détaillée " reprend en Annexe 3 la recommandation de créations d'offices dans les termes suivants :

a. Pour les zones représentées en vert sur la carte ci-dessus (et qui sont " d'installation libre " dans l'arrêté du 16 septembre 2016 susvisé) : " Au vu des caractéristiques de la zone, l'Autorité de la concurrence recommande la création d'un nombre d'offices permettant l'installation libérale de [...] nouveaux notaires pour la période 2018-2020, et le cas échéant du reliquat de l'objectif de nomination pour la période 2016-2018 ". (Soulignement ajouté)

b. Pour les zones représentées en orange sur la carte ci-dessus (et qui sont " d'installation libre " dans l'arrêté du 16 septembre 2016 susvisé) : " Au vu des caractéristiques de la zone, et sous réserve que l'objectif de nomination pour la période 2016-2018 ait été totalement atteint, l'Autorité de la concurrence estime que toute demande d'installation dans cette zone nécessite un examen approfondi tel que prévu par le III de l'article 52 de la loi du 6 août 2015 ". (Soulignement ajouté).

c. Pour les zones qui sont " d'installation contrôlée " dans l'arrêté du 16 septembre 2016 susvisé, il n'y a pas lieu d'inclure les mentions soulignées.

114. Sous les mêmes réserves, cette proposition de carte est assortie des recommandations afférentes à chaque zone d'installation figurant dans le tableau récapitulatif de l'annexe 4. Il en découle que si, à la date d'expiration de la première carte, l'objectif de nomination fixé pour la période 2016-2018 n'est pas atteint pour l'une quelconque des 247 zones d'installation libre identifiées par l'arrêté du 16 septembre 2016 susvisé, le reliquat de cet objectif de nomination s'ajoute à la recommandation afférente à la zone concernée figurant dans le tableau récapitulatif de l'Annexe 4.

B. RECOMMANDATIONS RELATIVES AUX DEMANDES DE CREATIONS D'OFFICES

DANS LES ANCIENNES ZONES VERTES

115. L'article 52, alinéa 5, du décret n° 73-609 précité prévoit que l'adoption d'une nouvelle carte rend caduques les demandes formées antérieurement. Cette disposition peut, dans certaines circonstances, faire peser sur les demandeurs les conséquences de l'allongement des délais de traitement des dossiers, ce qui peut sembler inéquitable.

116. Pour l'avenir, il semblerait opportun d'abroger cette disposition, d'autant que l'article 50 du décret n° 73-609 du 5 juillet 1973 précité prévoit déjà, au moment de la révision biennale de la carte, un délai de 8 mois durant lequel aucune candidature ne peut être déposée, ce qui permet en principe aux services de la Chancellerie de purger la procédure de nomination de notaires au titre de la précédente carte avant de mettre en application la suivante25.

Première série de recommandations (régime transitoire entre deux cartes) :

- abroger le cinquième alinéa 5 de l'article 52 du décret n° 73-609 ;

- pour les zones d'installation libre définies par l'arrêt du 16 septembre 2016 susvisé, autres que celles sans demandeurs, où l'objectif de nomination fixé pour la période 2016-2018 n'aura pas été atteint à l'échéance de la première carte, prévoir un report de cet objectif dans la deuxième carte.

C. RECOMMANDATIONS EN VUE DE RENFORCER LA COHESION TERRITORIALE

1. LA PRESENTATION DES 76 ZONES D'INSTALLATION CONTROLEE PROPOSEES

117. La proposition de carte fait apparaître 76 zones orange (contre 60 dans la précédente carte) dans lesquelles l'Autorité n'a pas identifié de besoin de création d'offices a priori. L'offre de services notariaux y semble actuellement suffisante, de sorte qu'il ne peut être exclu que l'installation d'un office supplémentaire puisse mettre à mal la viabilité des études existantes, ce que l'Autorité vérifiera, le cas échéant, au cas par cas, dans les conditions prévues au III de l'article 52 de la loi du 6 août 2015 précitée.

118. Les zones concernées sont pour l'essentiel des zones rurales : ainsi les zones d'Ambert, Guingamp, Millau, Montbard, Parthenay et Thiers seront d'installation contrôlée. Les zones orange pour la période 2018-2020 (par exemple les zones de Beaune, Figeac, Foix - Pamiers, Lunéville, Vesoul et Vire) étaient en majorité des zones vertes en 2016-2018 et ont ainsi bénéficié de la création d'un ou de plusieurs office(s) en application de la précédente carte, de sorte que l'offre et la demande de services notariaux sont désormais en adéquation.

119. Au final, les cartes proposées par l'Autorité en 2016 et 2018 se combinent pour aboutir à un maillage territorial renforcé, au bénéfice des usagers.

2. LE REGIME APPLICABLE AUX ZONES D'INSTALLATION CONTROLEE

120. Selon la lettre de l'article 52 de la loi du 6 août 2015, et ainsi que l'avait relevé l'Autorité dans l'avis n° 16-A-1326, les zones d'installation contrôlée ne sont pas des secteurs dans lesquels l'installation des notaires doit être interdite. Elles correspondent uniquement à des secteurs dans lesquels un besoin important de notaires n'a pas été identifié a priori.

121. Par conséquent, une demande d'installation en zone orange nécessite un examen préalable pour écarter le risque de porter " atteinte à la continuité de l'exploitation des offices existants et [de] compromettre la qualité du service rendu "27. S'il envisage de refuser une demande de création d'office, le garde des Sceaux, ministre de la justice, saisit donc obligatoirement l'Autorité pour avis. Dans les deux mois suivant le dépôt du dossier de candidature complet, cette dernière procède alors à un examen du potentiel d'activité notariale de la zone concernée. Elle analyse les caractéristiques de cette zone, notamment sa situation démographique et économique, ainsi que la répartition et l'évolution des chiffres d'affaires et des résultats réalisés par les offices existants, à partir de données actualisées. Lorsque l'Autorité identifie un potentiel d'accroissement de la demande de services et/ou une diminution de l'offre de services notariaux, elle rend un avis favorable aux demandes de création d'office présentées dans la zone d'installation concernée.

3. BILAN DE LA PROCEDURE DE NOMINATION AUX OFFICES CREES DANS LES 60 ZONES

ORANGE SUR LA PERIODE 2016 - 2018

122. Sur la période d'application de la première carte, l'Autorité a été saisie de 307 demandes d'avis. Dans 78 % des avis rendus, l'Autorité s'est déclarée défavorable à la création de l'office sollicité, estimant que celle-ci était de nature à porter atteinte à la viabilité des études existantes dans la zone et à compromettre la qualité du service rendu.

123. Au contraire, dans 67 avis relatifs à 17 zones, l'Autorité a estimé qu'il était possible de répondre positivement à une demande de création d'office pour la zone considérée et de permettre l'installation libérale d'un nouveau notaire. Dans ces zones, elle a en effet identifié un potentiel d'accroissement de la demande de services notariaux et/ou une diminution du nombre de notaires libéraux depuis 2014.

124. Sur ces 67 avis favorables, un seul a conduit à la création d'un office à Saint-Pierre et Miquelon, et ce dans un contexte spécifique lié à la cessation de l'activité du seul notaire de cette zone. À la connaissance de l'Autorité, la Chancellerie n'a par ailleurs statué explicitement sur aucune autre demande de création d'office en zone orange.

125. Par ailleurs, alors que l'article 55 alinéa 2 du décret n° 73-609 du 5 juillet 1973 précité dispose que " [L]es avis de l'Autorité de la concurrence rendus dans ce cadre sont publiés sur le site internet du ministère de la justice ", seuls trois avis relatifs à la zone d'installation de Saint-Pierre et Miquelon ont été mis en ligne sur le site Internet OMP. De ce fait, l'Autorité a été saisie de plusieurs demandes de candidats désireux de connaître le sens de l'avis rendu par l'Autorité et l'état d'avancement de leur dossier. Le 25 janvier 2017, afin de garantir la transparence de la procédure et la complète information des candidats, l'Autorité a donc publié elle-même les avis rendus jusqu'alors28.

126. Enfin, de nombreux candidats à l'installation en zone orange avaient déposé des demandes de création d'office dans plusieurs zones et ont finalement été nommés en zones vertes, ce qui a rendu caduques toutes leurs autres demandes de création, conformément aux dispositions du quatrième alinéa de l'article 52 du décret n° 73-609 du 5 juillet 1973 précité. Tel est notamment le cas de trois candidats qui avaient, au total, déposé 84 demandes de création d'office en zone orange et pour lesquels l'Autorité a rendu autant d'avis qui, moyennant des adaptations bienvenues du cadre procédural, telles que celles décrites ci-après, auraient pu être évités.

127. Au final, sur la période 2016-2018, l'Autorité constate que la procédure relative aux zones orange s'est avérée très chronophage, tant pour elle-même que pour la DACS, et n'a débouché sur quasiment aucune installation. Les conditions de mise en œuvre ede cette procédure appellent donc un réexamen. Malgré un lourd travail d'instruction, cette procédure n'a pas permis de répondre aux objectifs de la liberté d'installation régulée, souhaitée par le législateur.

4. AMELIORATIONS POSSIBLES DE CETTE PROCEDURE

a) À titre principal : inverser la logique de la procédure applicable aux zones orange

128. Compte tenu de sa lourdeur et de ses effets pour le moins limités, il pourrait être proposé, à titre principal, d'inverser la logique de la procédure applicable aux zones orange. Les créations d'offices n'y seraient alors pas possibles, durant les 2 années d'application de la carte, sauf situation exceptionnelle, dans laquelle le ministre de la justice pourrait accepter une demande de création après avis de l'Autorité.

129. Le rythme biennal de révision de la carte limite en effet le risque de voir une zone durablement privée de toute possibilité de création d'office, alors même qu'il y existerait une demande de services notariaux non satisfaite. Par ailleurs, le garde des Sceaux pourrait toujours, par dérogation et après avis de l'Autorité de la concurrence, accepter une création d'office dans une zone d'installation contrôlée. Cette hypothèse est précisément celle qui a donné lieu à une création d'office à Saint-Pierre et Miquelon (volonté du ministre de la justice d'assurer la continuité de la délivrance de services notariaux après le départ à la retraite du seul notaire-greffier de ce territoire29).

130. Une telle modification nécessite toutefois une intervention du législateur, la procédure applicable aux zones d'installation contrôlée étant prévue au III de l'article 52 de la loi du 6 août 2015 précitée. La DACS a fait savoir à l'Autorité en séance qu'une telle modification pourrait être accueillie favorablement.

b) À titre subsidiaire : améliorer la procédure existante

131. À périmètre législatif inchangé, la procédure issue du décret n° 2016-661 du 20 mai 2016 relatif aux officiers publics et ministériels (dit " décret OPM ") pourrait être utilement toilettée de façon à limiter le nombre de candidatures superfétatoires déposées en zone orange. Pour ce faire, il conviendrait de fixer deux dates d'horodatage différentes : l'une pour les zones d'installation libre, l'autre - postérieure de trois mois par exemple - pour les zones d'installation contrôlée. De la sorte, la DACS pourrait commencer par instruire les candidatures déposées en zones vertes, ce qui limiterait mécaniquement les candidatures en zones orange. En effet, les candidats nommés, ou en passe de l'être, (compte tenu du nombre de candidatures déposées dans les zones qu'ils demandent ou de leur rang de tirage au sort) en zone verte ne postuleraient pas en zone orange. Il y aurait de plus une certaine logique à traiter et à pourvoir prioritairement les zones vertes, qui sont précisément celles où des besoins en création d'office ont été identifiés.

132. Il conviendrait par ailleurs de garantir à l'Autorité un délai d'instruction de deux mois plein. En effet, le délai de deux mois, opposable à l'Autorité, court actuellement à compter du dépôt d'un dossier complet sur le site Internet du ministère de la justice, site auquel l'Autorité n'a pas accès. Dès lors, il commence à courir à un moment où l'Autorité n'a même pas connaissance de l'existence d'une demande. Par ailleurs, du fait des délais nécessaires à la DACS pour vérifier la complétude du dossier, certaines demandes ont été transmises à l'Autorité parfois plusieurs semaines après leur dépôt. Si l'Autorité a malgré tout réussi à respecter le délai de deux mois pour tous les avis zones orange rendus à ce jour, ce délai contraignant n'est d'aucune utilité pour le demandeur puisqu'une fois l'avis de l'Autorité rendu, aucun délai ne s'impose au garde des Sceaux pour se prononcer sur la demande de création d'office. Il conviendrait dès lors de ne faire courir le délai de deux mois qu'à compter de la saisine de l'Autorité.

133. Ces améliorations procédurales nécessitent de modifier le décret n° 73-609 du 5 juillet 1973 précité, en ses articles 50 (date de dépôt des candidatures) et 55 (point de départ du délai de 2 mois).

Deuxième série de recommandations (procédure de nomination en zone orange) :

Associer l'Autorité de la concurrence aux travaux normatifs visant :

À titre principal, à :

- inverser la logique du régime de création d'offices publics et ministériels dans les zones mentionnées au III de l'article 52 de la loi du 6 août 2015 précitée, en prévoyant que les créations d'offices n'y sont pas possibles durant les deux années d'application de la carte, sauf situation exceptionnelle, dans lesquelles le ministre de la justice pourrait accepter une demande de création après avis de l'Autorité.

À titre subsidiaire, en cas de maintien de la procédure actuelle, à :

- fixer deux dates d'horodatage différentes : l'une pour les zones d'installation libre, l'autre - postérieure de trois mois par exemple - pour les zones d'installation contrôlée ;

- ne faire courir le délai d'instruction de deux mois qu'à compter de la saisine de l'Autorité.

D. RECOMMANDATIONS EN VUE D'AMELIORER LA PROCEDURE DE NOMINATION AUX OFFICES CREES

1. UNE PROCEDURE DE NOMINATION AUX OFFICES CREES COMPLEXE

134. La procédure de nomination aux offices créés sur le fondement de l'article 52 de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 a pour objectif de faciliter l'accès aux offices et, plus précisément, l'installation libérale des diplômés notaires. Or, seulement 22 % des 667 répondants s'étant prononcés sur cette question lors de la consultation publique jugent la procédure de nomination assez ou très satisfaisante. Ce résultat s'explique par le fait que la mise en œuvre effective du dispositif, telle qu'elle résulte de divers textes réglementaires d'application, s'est avérée complexe, notamment du fait de la possibilité pour les candidats de postuler dans l'ensemble des zones, voire de déposer dans certains cas plusieurs candidatures dans une même zone30. Au surplus, cette complexité rend possibles des détournements de l'esprit des textes, puisqu'une même personne physique peut candidater plusieurs fois dans une même zone d'installation, simplement en constituant avec d'autres associés, à chaque fois différents, plusieurs personnes morales qui se porteront candidates aux offices créés. Enfin, les difficultés de mise en œuvre constatées s'expliquent aussi par la possibilité laissée aux demandeurs de renoncer à un classement en rang utile à l'issue d'un tirage au sort, et ce jusqu'à leur nomination.

135. Ainsi, le décret n° 73-609 du 5 juillet 1973 relatif à la formation professionnelle dans le notariat et aux conditions d'accès aux fonctions de notaire, dans sa version issue du décret OPM précité, prévoit que chaque demandeur peut se porter candidat dans plusieurs zones d'installation, sans limitation. Dans cette hypothèse, il est ensuite susceptible d'être nommé par le ministre de la justice dans l'une quelconque des zones où il s'est porté candidat, sans possibilité pour lui d'exprimer un ordre de préférence31. La nomination à tout moment de la procédure, en qualité de titulaire ou d'associé dans un office, rend caduque toute autre demande éventuellement déposée par l'intéressé32. En revanche, tant qu'il n'est pas nommé, le demandeur conserve la faculté de renoncer à l'une de ses demandes, y compris après le tirage au sort, tout en maintenant le bénéfice de ses autres demandes.

136. Dans les zones d'installation libre, le garde des Sceaux nomme les demandeurs en fonction des recommandations dont est assortie la carte, en suivant l'ordre d'enregistrement des demandes (horodatage au millionième de seconde). Toutefois, si le nombre de demandes de création d'offices enregistrées dans les vingt-quatre heures suivant la date d'ouverture du dépôt des candidatures est supérieur, pour une même zone, aux recommandations, l'ordre de ces demandes est déterminé par tirage au sort33. Le tirage au sort est manuel et réalisé à la Chancellerie, en présence de représentants de l'Autorité, du CSN et d'un magistrat, selon des modalités prévues par arrêté.34

137. Le ministère de la justice a précisé qu'il déterminerait l'ordre de traitement des zones en veillant à pourvoir en priorité les zones dans lesquelles l'écart entre les recommandations de création d'offices et le nombre de candidatures est le plus faible en vue, indiquait-il, d'atteindre les recommandations mentionnées dans l'arrêté du 16 septembre 2016 relatif à la carte dans un maximum de zones, pour un maillage territorial adapté aux besoins du public35.

138. S'agissant des personnes physiques, les notaires déjà titulaires ou associés d'un office sont, à l'égal des nouveaux entrants, autorisés par la loi36 à se porter candidat aux offices créés. Dans ce cas, les textes règlementaires prévoient toutefois que leur demande de nomination doit être accompagnée d'une demande de démission (pour un notaire individuel) ou de retrait (pour un notaire associé), sous condition suspensive de nomination dans ce nouvel office. Leur nomination n'interviendra donc, le cas échéant, qu'après ou concomitamment à leur démission ou retrait.

139. S'agissant des personnes morales37, elles ne pouvaient, jusqu'à peu, être titulaires que d'un seul office de notaire. Le gouvernement a toutefois décidé de lever cette restriction, dans le cadre de la réforme des conditions de détention du capital des structures d'exercice. Il l'a fait en deux temps : en juin 2016 pour les sociétés d'exercice libéral (" SEL ")38 et les nouvelles formes sociales introduites par la loi Macron39, puis en novembre 2016, pour les sociétés civiles professionnelles (" SCP ")40, dans un souci de neutralité entre les différentes formes d'exercice. Dans ce cas cependant, comme pour tous les autres demandeurs, l'associé (personne physique) de la société titulaire de deux offices ne pourra exercer que dans un seul de ces offices puisque l'article 46 du décret n° 67-868 dans sa version issue du décret n° 2016-1509 précise que : " Tout associé ne peut être membre que d'une seule société civile professionnelle de notaires et ne peut exercer ses fonctions ni à titre individuel, ni en qualité de membre d'une autre société, quelle qu'en soit la forme, ni en qualité de notaire salarié. / Si la société est titulaire de plusieurs offices, il est nommé et exerce dans un seul de ces offices ".

140. Il doit être noté que la publication du décret relatif aux SCP est intervenue quelques jours avant la date d'ouverture de la procédure de candidatures. Le ministre de la justice a précisé, par un communiqué de presse en date du 10 novembre 2016, que " les SCP de notaires existantes pourront demander, dès le 16 novembre prochain, la création d'un office dans le cadre du dispositif de liberté d'installation prévu par la loi et mis en œuvre par la Chancellerie par voie de téléprocédure "41 (gras ajouté).

2. UNE INCITATION POUR LES CANDIDATS A MULTIPLIER LES CANDIDATURES ET UN

ALLONGEMENT CONSIDERABLE DES DELAIS DE NOMINATION

141. La télé-procédure sur le portail internet OPM a été ouverte le 16 novembre 2016 à 14 heures. Avec plus de 30 000 candidatures, émanant d'environ 7 500 candidats, le nombre des demandes horodatées au cours des 24 premières heures a excédé les recommandations dans toutes les zones, de sorte qu'un tirage au sort a été organisé dans chacune des 247 zones vertes de libre installation, selon l'ordre d'instruction des nominations déterminé par la Chancellerie.

142. Du fait de cet afflux, les délais de nomination ont été extrêmement longs. Ils sont notamment liés au grand nombre de contrôles préalables à effectuer par les services du ministère de la justice parmi les 30 000 demandes, notamment pour éviter les doubles candidatures susceptibles de fausser le tirage au sort et vérifier les pièces justificatives, et à la procédure de tirage au sort manuel. Ainsi, les 247 tirages au sort ont mobilisé pendant 76 demi-journées, du 6 février au 28 septembre 2017, un représentant de l'Autorité, deux fonctionnaires de la DACS, un magistrat et un représentant du CSN.

143. Ces délais ont eu plusieurs conséquences. Certains candidats tirés au sort en rang utile, pensant être nommés rapidement, ont immédiatement démissionné, loué ou acquis des locaux, contracté un emprunt, voire embauché du personnel, puis ont été dans l'obligation d'attendre plusieurs mois avant d'être nommés et de pouvoir exercer leur office, ce qui a pu les placer dans une situation financière délicate.

144. Symétriquement, de nombreux candidats ont renoncé tardivement à un premier tirage au sort en rang utile dans une zone, après avoir été tirés au sort dans une zone jugée par eux plus attractive, conduisant les services de la DACS à compléter leur instruction en allant chercher les suivants dans l'ordre des tirages au sort. Certains se sont également désistés postérieurement à leur nomination, en refusant de prêter serment dans le mois suivant leur nomination au Journal officiel. Si certains de ces refus sont sans doute liés à l'impréparation des candidats, beaucoup de contributeurs ont également mis en avant le manque de transparence dans l'état d'avancement de l'instruction des candidatures. Ainsi, de nombreux notaires, dont le rang au tirage au sort initial ne pouvait laisser présager que leur demande serait acceptée, ont signalé aux services d'instruction avoir appris leur nomination au Journal officiel, sans en avoir été avertis auparavant par les services de la Chancellerie.

145. En effet, alors qu'avant la réforme, les créateurs devaient justifier qu'ils avaient pris les dispositions financières et matérielles pour pouvoir demander leur arrêté de nomination, celui-ci ne requiert désormais plus de démarche supplémentaire du candidat, qui signe la requête demandant sa nomination à l'occasion de sa candidature. Or, la nomination a des conséquences importantes.

a. d'une part, compte tenu de l'incompatibilité des fonctions d'un officier public avec un lien de subordination résultant d'un contrat de travail, l'arrêté de nomination vaut démission pure et simple du candidat (Cass. Soc. 18 janv. 2012), qui ne peut donc percevoir d'allocation de retour à l'emploi ou d'indemnité de licenciement en l'absence de rupture conventionnelle préalable ;

b. d'autre part, la prestation de serment doit avoir lieu dans le mois de la publication de l'arrêté de nomination au Journal officiel, faute de quoi le nouveau notaire est considéré comme " démissionnaire d'office de ses fonctions ", sauf cas de force majeure, et l'office créé auquel il avait été nommé est supprimé par un nouvel arrêté (Art. 45, ordonnance n° 45-1418 ; art. 55-1 décret n° 73-609). Or, dès sa prestation de serment, le notaire peut être requis par toute personne dans le but d'instrumenter, avec le risque théorique, s'il en est dans l'incapacité, qu'il soit considéré comme démissionnaire pour cause d'" inaptitude à assurer l'exercice normal de ses fonctions " (art. 45 ordonnance n° 45-1418). La prestation de serment est aussi le point de départ du versement des cotisations dues aux instances professionnelles, que l'activité effective ait démarré ou non. Par suite, une fois nommés, les candidats perdent leurs revenus éventuels tirés d'une activité salariée et disposent d'un délai très court pour trouver des locaux ou recruter des salariés afin de pouvoir commencer à exercer leur profession.

146. Le ministère de la justice a ainsi dénombré 3 400 renonciations à candidature, 2 350 caducités pour cause de dossier incomplet et 130 refus de prêter serment après nomination.

147. Faute de candidatures suffisantes après les renonciations, il a été nécessaire de procéder à des appels à manifestation d'intérêt dans certaines zones (une trentaine environ). Il apparaît même dans certaines zones que des notaires en nombre suffisant ne pourront être nommés avant l'adoption de la nouvelle carte, alors même qu'un grand nombre de candidatures avait été déposé. Ce serait notamment le cas des zones d'Amiens, Arras, Beauvais, Chartres, Cholet, Compiègne, Laval, Le Mans, Lisieux, Morteau et Rouen, désormais désignées comme " sans candidats " dans le tableau général figurant sur le site OPM.

148. La lourdeur de ce processus est certes liée à l'importance du vivier des candidats aux fonctions de notaire et à l'attractivité de l'exercice libéral de cette profession, mais elle apparaît également due aux modalités mêmes du processus de nomination. Celles-ci incitent en effet les candidats à mettre en œuvre des stratégies consistant à se porter candidat dans différentes zones, voire à multiplier les candidatures au sein d'une même zone sous diverses formes, individuelle et en société. Il en a résulté un grippage du dispositif face à l'afflux de candidatures, aggravé par l'absence d'informations sur l'état d'avancement des dossiers, autres que les mentions génériques figurant sur le site OPM.

149. En dehors de la charge administrative induite, ces modalités de nomination ont également eu des effets sur la qualité des projets d'installation. En effet, les candidats, incités à multiplier les candidatures pour espérer être nommés, l'ont fait sans avoir toujours de projets de création réfléchis, accompagnés d'un plan d'affaires ou d'une analyse de marché de la zone d'installation. C'est ce qui explique sans doute, au moins pour partie, les nombreuses renonciations, même si des considérations personnelles peuvent évidemment aussi en être à l'origine.

150. La procédure a également eu pour conséquence un nombre élevé de nominations en office individuel, alors que les " vraies " préférences des créateurs auraient pu être différentes. En effet, le dispositif actuel incite les demandeurs à multiplier les candidatures. Par exemple, pour deux notaires souhaitant s'associer dans une zone donnée, les chances sont plus grandes pour l'un ou l'autre d'être nommés en déposant trois candidatures, une en société et deux individuelles. Il en résulte une probabilité plus grande que le tiré au sort le soit sous la forme individuelle, même s'il peut dans un second temps s'associer.

3. IL APPARAIT INDISPENSABLE DE PRENDRE DES MESURES POUR RENDRE LA PROCEDURE

PLUS EFFICACE, SANS PORTER ATTEINTE AUX PRINCIPES POSES PAR LA LOI

Limiter le nombre de candidatures par personne physique et par zone

151. Afin de réduire l'afflux de candidatures, mais également de s'assurer que les candidats à l'installation privilégient des projets sérieux, dans des secteurs qu'ils connaissent et pour lesquels ils ont un réel projet d'installation, le nombre de candidatures aux différentes zones pourrait être limité. Il en résulterait non seulement une diminution de la file d'attente, un raccourcissement des délais d'instruction et un moindre recours au tirage au sort, mais également une plus grande sélectivité des projets par les candidats eux-mêmes, favorisant la pérennité de leur future entreprise.

152. Toutefois, dès lors que la loi pose pour principe la liberté d'installation42, il convient de se demander si une telle restriction est susceptible de porter atteinte à ce principe, auquel cas elle exigerait une modification législative, ou si elle relève des modalités d'organisation de cette liberté d'installation, de sorte qu'une modification par décret suffirait. En effet, lorsque le pouvoir réglementaire est habilité à définir les modalités d'application de la loi, il doit en assurer la bonne exécution, sans aller à l'encontre de ses dispositions expresses, ni en altérer l'esprit ou en dénaturer la portée.43

153. En l'espèce, la loi encadre la liberté d'installation des notaires. Comme l'a indiqué le commissaire du gouvernement dans ses conclusions relatives à un recours contre un décret d'application de cette loi devant le Conseil d'État réuni en Assemblée du contentieux :

154. " L'article 52 de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 a procédé à une forme de libéralisation de l'installation des notaires. Le législateur n'a toutefois ni supprimé le système des offices, ni institué un véritable droit à se voir attribuer un office pour tout diplômé remplissant les conditions légales d'exercice. La loi distingue deux types de zones sur le territoire (...) Dans les zones où la création d'offices est estimée nécessaire, la loi parle d'une " liberté d'installation " ; cependant, la carte est assortie, dit la même loi, de " recommandations " sur le nombre d'offices supplémentaires compatible avec une augmentation progressive du nombre de professionnels dans la zone. (...) Juridiquement, la loi n'a pas donc créé une véritable liberté d'installation : celle-ci demeure subordonnée, dans toutes les zones, à l'obtention d'un office qui n'est pas de droit et que le ministre, au-delà des " recommandations " jointes à la carte, peut refuser. Si le nombre de demandeurs remplissant les conditions légales est inférieur au nombre d'offices supplémentaires recommandés, alors chacun pourra, de facto, s'installer. Mais ce n'est pas ce qui s'est passé en pratique : dès l'ouverture des procédures d'attribution de nouveaux offices, après la publication de la carte et des recommandations par l'arrêté du 16 septembre 2016, le nombre des demandes a dépassé le nombre d'offices qu'il était envisagé de créer. Dans un tel cas, l'article 53 du décret n° 79-609 du 5 juillet 1973 modifié prévoit une attribution par tirage au sort. "44 Dans une autre affaire, les conclusions indiquent que : " La liberté d'installation n'est donc pas une liberté juridique : elle constitue une obligation pour l'administration de créer de nouveaux offices, mais pas un droit du demandeur à être nommé sur un office créé pour lui (...) Or l'article 52 de la loi du 6 août 2015 présente une part d'ambiguïté : il parle d'une " liberté d'installation " qui n'existe pas puisque le nombre de création d'offices est limité. "45 (Soulignement ajouté).

155. En réalité, ce dispositif est assez proche de celui qui a été mis en place dans l'enseignement supérieur avec le dispositif Parcoursup. En effet, la question posée est la même :

- dans les deux cas, le principe de liberté est affirmé (liberté d'installation des notaires ; liberté d'accès à l'enseignement supérieur46) ;

- dans les deux cas néanmoins, ce principe est encadré par la loi en raison d'un rationnement de l'offre accessible aux candidats (installations limitées à certaines zones du territoire et dans la limite des recommandations de créations d'offices de notaire47 ; accès à l'enseignement supérieur dans la limite des capacités d'accueil des formations48) ; le Conseil d'État, à propos du dispositif APB, a d'ailleurs admis qu'une restriction puisse être apportée à ce libre accès lorsque, " dans les formations qui sont alors dites "en tension", les candidatures excèdent les capacités d'accueil d'un établissement "49 : le parallèle avec les zones d'installation, où les demandes d'installation excèdent l'offre, est donc là encore pertinent ;

- dans les deux cas, la loi a renvoyé à un décret les conditions d'application de cette liberté encadrée50 ;

- dans les deux cas, a été mis en place un dispositif technique spécifique de traitement des demandes (site OPM pour les notaires ; APB puis Parcoursup pour les lycéens51).

156. En revanche, un choix différent a été effectué s'agissant du nombre de candidatures. Ainsi, la Chancellerie n'a pas limité le nombre de candidatures par zone et les notaires peuvent candidater dans autant de zones qu'ils le souhaitent, même s'ils ne peuvent déposer qu'une candidature au sein d'une même zone52 et ne pourront, in fine, être nommés que dans une seule de ces zones, dès lors que la " nomination en qualité de titulaire d'un office ou en qualité d'associé d'une société titulaire d'un office à tout moment de la procédure entraîne la caducité de toute autre demande de nomination sur un office à créer formée par l'intéressé "53. En revanche, les lycéens ne peuvent formuler qu'un nombre limité de voeux (24 dans ABP, ramené à 10 dans Parcoursup). Cette limitation qui n'était prévue par aucun texte pour l'ancien dispositif APB54, a été posée par décret pour le nouveau dispositif Parcoursup.55

157. Cette limitation du nombre de voeux effectués par chaque lycéen candidat, justifiée par la nécessité de ne pas paralyser le dispositif, relève donc de la bonne administration. Or, s'agissant des notaires, compte tenu d'un afflux inattendu de candidatures, avec un rapport de 1 à 20 entre le nombre de candidatures et le nombre de nominations possibles dans les offices à créer, l'instruction des demandes a duré près de deux ans et entraîné une charge administrative particulièrement lourde. De plus, dès lors que les candidats n'ont pas été en mesure de hiérarchiser leurs choix et que le ministre avait toute latitude pour les nommer dans n'importe laquelle des zones demandées, les affectations n'ont pas toujours été optimales, conduisant à des renonciations tardives. Ainsi, la procédure retenue constitue non seulement un processus chronophage pour l'administration, mais peut également avoir des effets négatifs sur la qualité du service notarial. En effet, elle incite les candidats à multiplier les candidatures, indépendamment de toute considération fondée sur une étude économique précise des zones d'installation où ils forment des demandes de nomination. Limiter le nombre possible de candidatures quotidiennes de chaque demandeur apparaît donc comme une nécessité pour mieux organiser la liberté d'installation et rendre la procédure de nomination plus rapide et efficace.

158. Une telle limitation, a fortiori si elle est limitée dans le temps (par tranche de 24 heures), ne va à l'encontre d'aucune disposition de la loi. En effet, par " liberté d'installation ", l'article 52 vise essentiellement à garantir que lors d'une nomination, le ministre ne puisse opérer aucune sélection des candidats autre que sur les motifs posés par la loi, soit les " conditions de nationalité, d'aptitude, d'honorabilité, d'expérience et d'assurance requises ". Or, la nouvelle procédure préserverait le principe d'une nomination selon l'ordre d'horodatage, corrigé pour les premières 24 heures par un tirage au sort, afin d'éviter toute discrimination fondée sur la vitesse et la qualité de connexion aux moyens de télécommunications.

159. De plus, il est de la responsabilité même du pouvoir réglementaire d'organiser la liberté d'installation dans un contexte de rationnement de l'offre matérialisé par un plafond de recommandations par zone. Dans ce contexte, limiter les candidatures, à la fois dans le temps et par zone, apparaît de nature à assurer une meilleure exécution de la loi, dans le sens de l'intérêt général, en permettant :

- un moindre coût administratif, une accélération conséquente des délais de nomination et un recours limité aux tirages au sort, qui devraient demeurer l'exception ;

- un maintien de la liberté pour les candidats de choisir leur zone d'installation, tout en permettant un meilleur ciblage des demandes et par suite une meilleure adéquation entre les projets des candidats et le lieu d'installation des nouveaux notaires ;

- un maintien de l'égalité de tous les candidats devant la procédure.

160. Cette proposition fait d'ailleurs l'objet d'un certain consensus, tant parmi les candidats que les instances représentatives de la profession. Ainsi, dans sa réponse à la consultation publique, le CSN indique que selon lui : " il faudrait limiter à deux le nombre de candidatures par candidats ". Il considère également qu'un " notaire déjà installé ne devrait pas pouvoir participer à la procédure de nomination des nouveaux notaires libéraux ". La Chambre des notaires de Paris a, pour sa part, proposé une procédure combinant classement des préférences des candidats, limitation à une candidature par zone dans trois zones au plus et recours à un algorithme d'affectation selon les préférences et à un tirage au sort simultané. Suivant des modalités très proches, l'association LIDN préconise également de limiter le nombre de candidatures par zone, de mettre en place un tirage au sort électronique et de laisser la possibilité à un candidat à une installation sous forme individuelle d'être nommé sous forme sociétale. La possibilité de réduire le nombre de candidatures a, au demeurant, été la mesure d'amélioration de la procédure la plus citée au cours de la consultation publique, avec 396 occurrences.

161. En définitive, le nombre de candidatures pourrait par exemple être fixé à trois par jour. Comme dans le dispositif actuel, les candidatures des premières 24 heures donneraient lieu à un tirage au sort dans toutes les zones où le nombre de candidatures dépasse les recommandations en matière de créations d'office. Le dépôt des candidatures resterait possible ensuite, notamment pour pourvoir les zones où le nombre de recommandations excéderait le nombre de candidats. Si l'on craint un afflux de candidature le deuxième jour, les candidatures pourraient également être limitées à trois et départagées selon les mêmes modalités, avec un éventuel recours à un tirage au sort, afin d'éviter toute inégalité liée à l'accès aux candidats au site OPM.56 C'est d'ailleurs une procédure proche de celle qui est en œuvre aujourd'hui dans les zones où les demandes sont insuffisantes pour pourvoir toutes les installations, à travers la procédure d'appel à manifestation d'intérêt.

162. En outre, comme cela est d'ailleurs préconisé par la DACS, il pourrait être envisagé qu'une personne physique ne puisse former qu'une seule demande par zone, quelle que soit la forme sociale souhaitée pour l'office à créer. Toutefois, pour multiplier les chances au tirage au sort, de telles modalités conduiront probablement les candidats à choisir de postuler individuellement, afin de multiplier leurs chances au tirage au sort (A et B préféreront ainsi se présenter individuellement et séparément, plutôt qu'une seule fois sous la forme sociale AB, quitte à envisager ultérieurement à une association). Pour cette raison, après les tirages au sort, il conviendrait de laisser aux candidats retenus en rang utile déterminer leurs modalités d'exercice, seuls ou dans une société constituée entre eux. Là encore, une telle solution serait de nature à alléger la procédure, en réduisant le recours aux tirages au sort, mais également en facilitant les contrôles amont effectués par la Chancellerie (élimination des doubles candidatures...). Elle permettrait par ailleurs de rendre plus transparents les souhaits des candidats sur la forme d'association souhaitée et éviterait des candidatures en société effectuées pour " faire nombre " lors du tirage au sort, mais sans réel projet d'installation. Inversement, " deux candidats " tirés au sort en rang utile dans une même zone pourraient s'associer immédiatement, sans être contraints, comme aujourd'hui, de créer dans une première étape un office individuel.

163. Si la DACS a indiqué en séance les difficultés de gestion qu'un dispositif de limitation des candidatures pourrait poser, en raison de la nécessité de contrôler ex ante que les demandeurs se sont bien limités au nombre maximal de candidatures autorisé, l'Autorité considère que ces difficultés peuvent être résolues. En effet, ces contrôles ne diffèrent pas significativement de ceux des doublons, déjà effectués par la Chancellerie au sein d'une même zone, entre les différentes formes sociales autorisées. Surtout, si cette limitation du nombre de candidatures est combinée à la limitation à une candidature par personne physique et par zone, les contrôles pourraient être effectués très facilement, soit par une recherche combinée des nom, prénom et date de naissance des candidats, soit, idéalement, par la saisine obligatoire par les candidats de leur numéro à 13 chiffres d'inscription au répertoire (le NIR, communément appelé " numéro de sécurité sociale "), qui est un identifiant unique. Ce numéro est utilisé par chaque assuré social dans ses relations avec les organismes de sécurité sociale et les professionnels de santé, mais également pour d'autres démarches administratives : par les employeurs pour le versement des cotisations patronales et salariales de leurs salariés, par Pôle emploi, par les agences locales pour l'emploi, par les organismes d'assurance maladie complémentaires, etc. L'immatriculation des personnes nées en France s'effectue dès la naissance. Les seules exceptions justifiant une démarche volontaire d'inscription concerneraient donc certaines personnes nées à l'étranger, mais celles-ci devraient en toute hypothèse s'y plier en vue de leur immatriculation à la sécurité sociale en tant que travailleurs indépendants.

164. Une autre piste pour réduire les demandes surnuméraires pourrait consister à sanctionner les multi-candidatures non-conformes aux modalités prévues par voie réglementaire, par exemple en prévoyant dans les textes applicables qu'elles entraîneraient la caducité de toutes les demandes effectuées par le candidat.

Recourir à un appariement en fonction des préférences des candidats pour effectuer une première affectation dans les zones où le nombre de candidats ne dépasse pas les recommandations

165. Dans son avis n° 16-A-13, l'Autorité avait recommandé de permettre " aux candidats à l'installation postulant dans plusieurs zones d'installation d'exprimer un ordre de préférence entre ces différentes zones " (Avis n° 16-A-13, recommandation n° 2, § 424-430). Une telle hiérarchisation aurait permis de limiter l'inflation de candidatures inutiles, ou d'examiner en priorité les zones où les besoins les plus forts ont été identifiés. Elle aurait ainsi permis de nommer plus rapidement de nouveaux notaires là où les besoins de la population et de l'économie françaises sont les plus forts. Un tel système est déjà appliqué par d'autres ministères, par exemple celui de l'éducation nationale s'agissant des mutations des enseignants du second degré. Il sera d'autant plus indispensable que le nombre total de candidatures autorisé par notaire sera élevé. Cette proposition est par ailleurs liée à la précédente, dans la mesure où la réduction du nombre de candidatures permettrait implicitement de révéler les préférences géographiques d'implantation des candidats à l'installation.

166. Elle ne pose pas, en outre, de difficultés d'ordre technique, des solutions permettant de procéder rapidement à un appariement optimal entre le classement par les candidats de leurs préférences et leur affectation à une zone étant d'ores et déjà disponibles. Ainsi, la procédure d'inscription dans l'enseignement supérieur APB se fondait sur l'algorithme dit des " mariages stables " ou Gale-Shapley. Or, d'après le député et mathématicien Cédric Villani, si la procédure APB a fait l'objet de nombreuses critiques, " le logiciel en lui-même n'a rien à se reprocher : aucune erreur notable de programmation, aucun abus de pouvoir des programmeurs. Comme le dit le rapport incisif de la Cour des comptes d'octobre [2017], " ces défauts ne sont pas techniques mais relèvent de dispositions juridiques et de décisions politiques ". (...) Les auditions récentes de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST), consultables sur le site de l'Assemblée nationale, l'ont confirmé : ce qui a " buggé " dans APB, ce n'est pas le logiciel, mais bien l'Etat.(...) [Il] s'agissait de laisser les étudiants classer sincèrement les formations selon leur ordre de préférence. Au coeur rdu logiciel, on choisit donc l'algorithme de Gale-Shapley, dit des " mariages stables " (car il s'agit bien de " marier " chaque étudiant à une formation), inventé pour résoudre ce type de situations ".57

167. De même, la validité juridique d'un tel dispositif n'apparaît pas susceptible de poser de problème en soi si les critères retenus sont transparents et assurent une parfaite égalité entre candidats.

Recourir, pour départager les notaires restants, a priori moins nombreux, à un processus électronique de tirage au sort

168. Outre le coût administratif du dispositif retenu, qui sans compter la préparation des bulletins et des séances, a mobilisé 5 personnes pendant 76 demi-journées, le recours à un tirage au sort manuel ne permet pas d'attribuer un rang à chaque candidat de façon simultanée dans toutes les zones. Il est donc source de délais importants. Au contraire, dans le cadre d'une procédure électronique, le tirage en lui-même ne prend que quelques minutes.

169. Sur un plan juridique, dès lors qu'il assure un aléa réel et une " égalité devant l'aléa "58 des candidats, substituer à ce tirage au sort manuel une procédure électronique ne pose pas de problème juridique. Il est d'ailleurs employé dans différentes procédures. Si le Conseil d'État a censuré le recours à un tirage au sort électronique dans la procédure APB, ce n'est pas en raison de ses modalités d'organisation, mais d'une part de l'absence de texte autre qu'une circulaire autorisant le recours à une telle procédure, et d'autre part du fait que les modalités retenues " ne permettent pas de garantir que l'éventuel départage, par tirage au sort entre les candidats ayant obtenu le même classement, n'interviendra qu'à titre exceptionnel et entre un nombre limité de candidats "59.

170. L'essentiel est que les règles posées permettent " de s'assurer de la régularité de la procédure tout au long du déroulement de celle-ci, depuis l'enregistrement de la candidature, jusqu'à la publication des noms des personnes devenues titulaires d'un office notarial dans la zone en cause " (ordonnance de référé du Conseil d'État du 14 décembre 2016, n° 405269). Il conviendra donc de décrire précisément les règles procédurales, ainsi que de rendre public le code informatique utilisé pour effectuer le tirage au sort électronique.60

171. Sur un plan technique, différents générateurs de nombres aléatoires existent et sont susceptibles de remplir cette fonction. Une autre autorité administrative indépendante, l'Autorité de régulation des jeux en ligne (ARJEL), procède d'ailleurs régulièrement à leur contrôle. Au cas d'espèce, un générateur " classique "61 de nombres pseudo-aléatoires qui ne serait pas initialisé au moment du tirage garantirait l'aléa réel du tirage pour les classements au sein de chaque zone d'installation libre.

172. De plus, la conciliation entre un dispositif de tirage au sort électronique et le classement des préférences par les demandeurs, permettrait une affectation rapide des candidats tirés au sort en rang utile dans plusieurs zones directement dans leur zone " préférée ", libérant ainsi, presque en temps réel, une place pour le suivant dans l'ordre du tirage au sort.

Subsidiairement, en cas de maintien d'un tirage au sort manuel, examiner prioritairement les zones d'installation libre à fort potentiel

173. Le décret du 20 mai 2016 n'indique pas dans quel ordre le ministère traitera les différentes zones en cas de pluralité de demandes formées par une même personne et les textes prévoient que l'une quelconque de ces demandes peut donner lieu à nomination, sans possibilité pour le candidat de faire connaître un ordre de préférence.

174. Afin de s'assurer que les créations d'offices interviennent effectivement dans les territoires où les besoins identifiés sont les plus patents, l'Autorité avait proposé, dans son avis n° 16-A-13 précité, que l'examen des candidatures dans les différentes zones d'installation libre procède selon un ordre logique, avec un examen en premier de la zone où le potentiel d'installation est le plus fort, puis de poursuivre de façon itérative jusqu'à examiner la dernière zone d'installation libre, où ce potentiel est le plus faible.

175. La Chancellerie a toutefois fait le choix opposé dans l'arrêté fixant les modalités des opérations de tirage au sort62, qui prévoit un examen prioritaire des zones les moins demandées (sur la base du ratio entre nombre de demandes et nombre de recommandations, qui s'est échelonné de 1 à 7 pour les zones de Mauriac, Tergnier et Vendôme, proportionnellement les moins attractives, à 1 à 244 pour Menton, la plus attractive), au motif que cela permettrait de s'assurer que les recommandations dans les zones les moins attractives soient effectivement pourvues, avant que les zones les plus attractives soient examinées. Quelque légitime que pouvait paraître cet objectif, force est cependant de constater qu'il n'a pas été atteint. En effet, du fait du grand nombre de candidatures et des délais très longs entre l'organisation des tirages au sort et les nominations, beaucoup de candidats, même tirés au sort en rang utile dans certaines zones, se sont ultérieurement désistés après avoir été tirés au sort dans une autre zone jugée par eux plus attractive. En ont résulté des nominations de demandeurs ayant des rangs relativement éloignés dans les classements, ainsi que des appels à manifestation d'intérêt, faute de candidatures en nombre suffisant dans certaines zones. Il n'apparaît donc pas que recourir à cet ordre d'examen ait été une solution efficace pour pourvoir prioritairement les zones les moins attractives.

176. La méthode précédemment proposée par l'Autorité pourrait être à nouveau envisagée. Elle consisterait à procéder en premier lieu à des nominations dans les zones vertes les plus attractives, afin, d'une part, de procéder à des nominations rapides là où elles sont le plus attendues, et, d'autre part, d'éviter la multiplication des désistements et des délais d'instruction allongés. Le nombre important de candidats devrait permettre en tout état de cause l'affectation de notaires dans toutes les zones vertes, y compris dans celles comparativement moins attractives, où in fine le nombre de candidatures a néanmoins toujours excédé le nombre de places.

177. Il existe deux façons de procéder à une telle priorisation63 :

- déterminer a priori, avant l'ouverture des candidatures, comme l'avait fait l'Autorité en 2016, un classement des zones, de celle où le potentiel relatif d'installation est le plus élevé jusqu'à celle où il l'est le moins. Avec un tel dispositif, les préférences des candidats - que l'absence de hiérarchisation des vœux ne permet pas de révéler - seront vraisemblablement respectées, dans la mesure où il serait économiquement rationnel que celles-ci se portent d'abord sur les zones urbaines ou littorales dont le dynamisme économique est fort et qui sont les plus susceptibles de leur assurer un développement économique rapide ;

- procéder comme aujourd'hui a posteriori, sur le fondement des préférences révélées par les candidats lors du dépôt de leurs demandes sur la plateforme OPM, mais en inversant l'ordre d'examen par rapport à celui retenu par la Chancellerie pour la première carte, c'est-à-dire en privilégiant les tirages au sort dans les zones où le ratio de demandes par rapport aux recommandations est le plus élevé.

En tout état de cause, il conviendrait d'accroître la transparence sur l'état d'avancement de l'instruction des candidatures, de restreindre les possibilités de renonciation et de laisser plus de temps entre prestation de serment et installation

178. Il apparaît également opportun d'éviter les effets négatifs causés par la longueur des délais d'instruction des demandes et par l'absence d'informations personnalisées sur leur avancée. En effet, selon les cas de figure, ces dysfonctionnements ont pu conduire les candidats soit à engager des frais importants plusieurs mois avant d'être en mesure de s'installer réellement, soit, à l'inverse, à devoir trouver dans l'urgence des locaux et du personnel, alors qu'ils ne disposent que d'un mois pour prêter serment et qu'ils ont ensuite l'obligation d'instrumenter.

179. Pour ce faire, deux recommandations peuvent être faites :

- assurer plus de transparence et d'information sur les différentes étapes de l'instruction des candidatures, notamment en informant les notaires en amont de leur nomination au Journal officiel ;

- leur laisser plus de temps entre nomination et prestation de serment (qui implique l'obligation d'instrumenter) en portant par exemple ce délai d'un à deux mois. La DACS a indiqué en séance qu'elle pourrait être favorable à une telle modification des textes.

180. Enfin, comme l'a préconisé la DACS en séance, afin d'éviter les délais liés aux renonciations tardives, celles-ci pourraient être limitées dans le temps. La DACS propose ainsi un dispositif en deux temps, avec un délai de deux mois laissé au demandeur pour renoncer à certaines de ses candidatures, au-delà duquel toute renonciation vaudrait renonciation à l'ensemble des candidatures. Si un tel dispositif apparaît tout à fait fondé dans son principe pour éviter les comportements opportunistes de certains candidats, deux remarques peuvent néanmoins être faites :

- d'une part, il apparaît que la limitation du nombre de candidatures à un nombre restreint de zones serait de nature à révéler les préférences des candidats et devrait ainsi de facto limiter les renonciations ultérieures ;

- d'autre part, le délai de deux mois indiqué par la DACS apparaîtrait plus adapté si un dispositif de tirage au sort électronique était mis en œuvre ; en effet, dans le cas contraire, pour éviter de créer une inégalité entre les candidats, il faudrait soit que les tirages au sort n'aient pas débuté avant ce délai de renonciation de deux mois, ce qui allongerait la procédure de nomination, soit que les tirages au sort soient tous achevés avant l'expiration de ce délai, ce qui n'est techniquement possible qu'en ayant recours à un tirage au sort électronique.

Troisième série de recommandations (procédure de nomination en zone verte) :

Modifier les textes réglementaires relatifs à la procédure de nomination de manière à :

À titre principal :

- limiter les candidatures quotidiennes à un nombre réduit de zones (par exemple trois par jour) ;

- limiter les candidatures par zone à une par personne physique ;

- permettre aux candidats à l'installation postulant dans plusieurs zones d'installation d'exprimer un ordre de préférence entre ces différentes zones (a fortiori si le nombre de candidatures totales n'est pas significativement réduit) ;

- organiser un tirage au sort électronique et simultané dans toutes les zones grâce à un algorithme d'appariement.

À titre subsidiaire, en cas de maintien d'un tirage au sort manuel :

- examiner prioritairement les zones d'installation libre à fort potentiel.

En tout état de cause :

- accroître la transparence et l'information sur l'état d'avancement de l'instruction des candidatures ;

- allonger le délai maximum entre nomination et prestation de serment ;

- restreindre les possibilités de renonciation tardive des candidats.

E. RECOMMANDATIONS EN VUE DE L'ABAISSEMENT DES BARRIERES A L'ENTREE

POUR LES CANDIDATS A L'INSTALLATION

1. DISPOSITIONS DEONTOLOGIQUES ET LE LIBRE-ACCES A LA PROFESSION

181. Plusieurs notaires entendus par l'Autorité ont exprimé le regret qu'un encadrement déontologique de la communication destinée à la clientèle trop restrictif les prive, dans les faits, de tout moyen de faire connaître leur office auprès des clients et ont relevé l'inadéquation entre des dispositions anciennes, qui régissent encore l'exercice de la profession de notaire, et le nouveau cadre fixé par la loi du 6 août 2015.

182. Dans son avis de 2016, l'Autorité avait déjà fait ce diagnostic, en estimant que des règles déontologiques inadaptées freineraient le développement des nouveaux offices. Elle rappelait que les " offices existants bénéficient d'une clientèle fidélisée et d'une notoriété certaine, ce qui constituera un avantage concurrentiel indéniable par rapport aux offices nouvellement créés " (Avis n° 16-A-13, § 217). Aussi, recommandait-elle un assouplissement du règlement du CSN sur la publicité " spécialement au bénéfice des créateurs d'offices [qui] pourrait s'avérer utile, afin de faciliter le démarrage de leur activité et donc de stimuler la concurrence " (Avis n° 16-A-13, § 217). Depuis, la Cour de justice de l'Union européenne a jugé, en mai 201764 dans sa décision Luc Vanderborght, pour la profession de chirurgien-dentiste, également soumise à régulation ordinale, que des restrictions générales et absolues à la publicité sont contraires à la libre prestation de services65 et à la directive sur le commerce électronique66. Cette évolution de la jurisprudence européenne ainsi que des attentes du public à l'ère du numérique sont à l'origine d'une étude du Conseil d'État, adoptée en assemblée générale plénière le 3 mai 2018, où sont formulées 15 propositions visant à " enrichir les informations susceptibles d'être communiquées au public par les professionnels de santé "67, notamment sur leurs compétences et pratiques professionnelles.

183. S'agissant des notaires, ils ne sont pas, pour l'heure, autorisés à " recourir à la sollicitation personnalisée, notamment par voie numérique "68, bien que la loi en prévoie le principe depuis 2016, faute de publication du décret en Conseil d'État nécessaire à cette fin. En outre, la garde des Sceaux, ministre de la justice, a approuvé par arrêté du 22 mai 2018 - sans consultation préalable de l'Autorité - plusieurs modifications du règlement national proposées par le CSN qui, entre autres, clarifient l'étendue de l'interdiction générale de publicité qui s'applique au notaire.

184. Ainsi, en vertu de l'article 4.2.1 du règlement national des notaires, " le notaire doit laisser s'exercer le libre choix du client, et s'abstenir de démarches tendant à détourner ce choix ou bien encore s'abstenir de tirer profit de manœuvres extérieures qui auraient pour résultat de détourner ce choix " et son article 4.4.1 nouveau prévoit également que " toute publicité personnelle est interdite au notaire (y compris sur les réseaux sociaux) ".69

185. Si, s'agissant de l'utilisation des réseaux sociaux, notamment des comptes Twitter, des pages Facebook et des sites Internet des notaires, le président du CSN a déclaré en séance devant l'Autorité, en réponse à une question qui lui était posée, que d'après lui, leur utilisation, par exemple, pour envoyer un message sur l'ouverture de son office à son réseau d'amis ou de connaissances sur Facebook ou LinkedIn, " il ne s'agi[ssai]t pas de publicité ", il ressort des auditions et de la consultation que certaines instances locales ont une lecture plus stricte et effectuent un contrôle a priori de toute communication sur ces médias.

186. Sur d'autres points, comme la possibilité pour un notaire nouvellement installé de procéder à une inauguration de ses nouveaux locaux, il est apparu que le règlement était trop imprécis et que les chambres ont pu avoir des positions divergentes sur ce point, les autorisant ou non selon les territoires. Certaines chambres auraient ainsi reconnu, sur le principe, le droit à inauguration des locaux, mais interdit d'en faire la publicité, assimilée à du démarchage, empêchant ainsi de facto le recours à cette modalité pour se faire connaître.

187. L'Autorité encourage ainsi le gouvernement à adopter le décret relatif à la sollicitation personnalisée, rappelle qu'elle doit être saisie de tous les textes règlementaires restreignant l'exercice d'une profession (arrêté approuvant le règlement national, décrets...) et réitère fermement ses propositions relatives à l'assouplissement des règles relatives à la publicité personnelle.

188. Plusieurs mesures pourraient ainsi être envisagées :

- libre détermination du nombre d'avis à publier dans la presse pendant la première année suivant la création de l'office. Actuellement, le règlement national limite à 3 avis dans la presse dans un délai de six mois à compter de la prestation de serment (article 4.4.3) ;

- possibilité de recours à d'autres types de média ;

- autorisation de l'emploi de panneaux et panonceaux indiquant que l'office est nouvellement créé ;

- droit explicite d'organiser une inauguration de ses locaux ;

- suppression de la procédure d'agrément a priori des sites internet des offices par la chambre, pour la remplacer par un contrôle a posteriori ;

- autorisation explicite pour le notaire de communiquer de façon générale sur ses tarifs et, notamment, la pratique de la remise.

189. D'autres pratiques, massivement souhaitées par les créateurs, pourraient par ailleurs être favorisées, dès lors qu'elles ne portent pas atteinte à la sécurité des actes (autorisation du télétravail des collaborateurs sur réseau sécurisé, réception des actes à titre habituel en dehors de l'étude, mutualisation de services support etc.). De telles mesures constituent autant de pistes à explorer afin d'améliorer les pratiques professionnelles et les conditions de travail des collaborateurs. À cet égard, de nombreux contributeurs à la consultation publique, notamment les instances ordinales, ont attiré l'attention de l'Autorité sur le fait que la réforme a eu pour conséquence un fort taux de rotation du personnel au sein des offices existants et une certaine tension sur le marché de l'emploi des notaires salariés, caractérisée par des difficultés pour recruter ou conserver ses salariés.

2. SUR LES STRATEGIES DE CONTOURNEMENT DU DISPOSITIF ET L'ACCES AUX

RESSOURCES PAR LES CREATEURS D'OFFICES

190. L'Autorité se félicite des actions entreprises par les différents acteurs, notamment le CSN, les chambres locales ou la Caisse des dépôts et consignations, pour faciliter l'accueil des créateurs d'offices.

191. Toutefois, plusieurs difficultés lui ont été signalées à l'occasion de la consultation, qui tiennent aux conditions d'accueil des nouveaux professionnels par leurs pairs, mais également par les prestataires historiques du notariat. Ces difficultés auraient par exemple pu concerner la recherche d'un local, l'accès au matériel informatique et l'absence de liberté dans le choix des prestataires, la possibilité de développer des activités nouvelles, voire une instrumentalisation des inspections d'offices.

192. Sur ce point, l'Autorité procède actuellement à un certain nombre d'investigations et rappelle que la sanction des pratiques prohibées notamment par les articles L. 420-1 et L. 420-2 du Code de commerce relève de sa compétence, y compris lors qu'elles sont mises en œuvre par des instances exerçant, par ailleurs, des prérogatives de puissance publique.

3. SUR LA PRATIQUE DES REMISES

193. L'Autorité propose d'accroître les possibilités de remise partielle prévues par le Code de commerce70, aujourd'hui plafonnées à 10 %, sur la part d'émolument calculée au-delà de 150 000 euros d'assiette. En effet, de facto, ces remises sont réduites à la portion congrue pour les biens de valeur moyenne : 40 euros d'émoluments en moins sur la vente d'un bien à 200 000 euros, soit environ 2 % de l'émolument total71. Ces montants mériteraient d'être augmentés pour créer une réelle émulation par les prix et permettre aux notaires souhaitant l'appliquer de se différencier. Ainsi, comme elle l'avait déjà proposé72, l'Autorité estime possible et nécessaire d'augmenter le taux de remise de 10 % à 20 %.

194. En outre, le second levier pour renforcer l'attractivité de la remise consiste à abaisser le seuil d'assiette de 150 000 euros. Si on reprend l'exemple d'un bien à 200 000 euros, le montant de la remise pourrait passer à 102 euros (multiplication par 2,5)73 si le seuil était abaissé à 75 000 euros, voire à 114 euros (multiplication par 2,8) si le seuil était abaissé à 60 000 euros74.

195. Il convient par ailleurs que les notaires souhaitant pratiquer ces remises n'en soient pas dissuadés. L'Autorité rappelle que la remise de 10 % doit précisément pouvoir être utilisée comme un argument commercial dans le but de stimuler la concurrence.

4. SUR LA FORMATION

196. Une réforme de la formation notariale est en cours. Cette dernière concerne aussi bien les organismes responsables de la formation que le contenu des programmes. Elle vise notamment à rationaliser l'organisation de l'enseignement notarial et à assurer une plus grande uniformité des formations, notamment en fusionnant les établissements en charge de celle-ci en un seul établissement national.

197. Si ces objectifs apparaissent légitimes, l'Autorité sera vigilante à ce que ces changements ne se traduisent pas par l'apparition de nouvelles barrières, quantitatives ou qualitatives, à l'entrée de la profession. Par ailleurs, pour favoriser leur démarrage d'activité, les modules de formation (en comptabilité, gestion de l'office et déontologie par exemple) pourraient être rendus accessibles aux notaires candidats à l'installation, en remplacement du " stage futur notaire " en cours d'intégration à la formation initiale. Pour l'heure, cette mission d'accompagnement des nouveaux notaires est assurée sur une base volontaire par certaines instances locales du notariat.

Quatrième série de recommandations (abaissement des barrières à l'entrée pour les candidats à l'installation) :

- Assouplir la réglementation relative à la publicité à caractère personnel et aux sites internet, de façon à permettre aux nouveaux notaires nommés de se faire connaître et de développer leur clientèle, notamment en :

1. adoptant le décret en Conseil d'État prévu au III de l'article 3 de la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siècle ;

2. laissant au créateur d'un office la liberté de déterminer par lui-même le nombre d'avis à publier dans la presse, pendant la première année suivant la création de l'office ;

3. prévoyant explicitement le droit d'organiser une inauguration de ses locaux ;

4. permettant le recours à d'autres types de médias (radio...) ;

5. autorisant l'emploi de panneaux et panonceaux indiquant que l'office est nouvellement créé ;

6. supprimant la procédure d'agrément des sites Internet des offices par la chambre pour la remplacer par un contrôle a posteriori ;

7. autorisant explicitement le notaire à communiquer sur ses tarifs et notamment la pratique de la remise.

- Abaisser le seuil d'assiette des remises partielles de 150 000 euros à 75 000 euros et porter le taux maximal de 10 % à 20 %.

F. RECOMMANDATIONS EN VUE D'AMELIORER LE DISPOSITIF D'ELABORATION DE

LA CARTOGRAPHIE

1. SUR L'EXTENSION DU CHAMP D'APPLICATION TERRITORIAL DE LA LIBERTE D'INSTALLATION A L'ALSACE-MOSELLE

198. Dans son avis de 2016, l'Autorité avait mis en avant les spécificités du régime particulier d'installation des notaires dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle. En effet, si l'absence de droit de présentation apparaît plus méritocratique, le concours comme seule modalité d'accès à l'exercice de la profession vient en réalité renforcer la situation déjà très favorable des notaires de ces départements. D'une part, les lauréats du concours ne sont qu'inscrits sur une liste d'aptitude pour postuler à un office, leur nomination étant laissée à la discrétion du garde des Sceaux, sur proposition d'une commission de présentation comprenant un grand nombre de notaires en exercice dans la région. D'autre part, les cas de création d'offices sont particulièrement rares (une dizaine en près de deux décennies75) et en tout état de cause, leur adéquation aux besoins réels de la population et de l'économie locales n'est pas garantie.

199. D'un point de vue économique, il semble ainsi difficilement compréhensible qu'aucun mécanisme d'évaluation des besoins en nouveaux offices de notaires ne soit prévu dans ces départements. Cette nouvelle mission, très proche de celle qui lui a déjà été confiée à l'Autorité par le législateur, en constituerait le prolongement naturel.

200. Or, si un projet de décret, en cours d'examen par le Conseil d'État, vise à assouplir les conditions d'accès au notariat en Alsace-Moselle et le dispositif de passerelle pour les clercs habilités (qui était plus strict dans ces départements), le rapport prévu au VII de l'article 52 de la loi du 6 août 2015 sur l'opportunité d'étendre l'application de la loi à ces départements, qui aurait dû être rendu au plus tard le 6 août 2017, non seulement n'a toujours pas été rendu mais son processus d'élaboration n'a toujours pas été engagé à la date du présent avis. Interrogée sur ce point, la DACS a fait part à l'Autorité de son intention de confier une mission sur ce sujet à l'Inspection générale de la justice durant l'été.

201. L'Autorité réitère son souhait d'être associée à l'élaboration du rapport prévu au VII de l'article 52 de la loi du 6 août 2015 sur l'opportunité d'étendre l'application de la liberté d'installation aux départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle.

2. SUR LA TRANSMISSION SYSTEMATIQUE D'INFORMATION A L'AUTORITE

202. L'article 2 du décret n° 2016-661 du 20 mai 2016 relatif aux officiers publics et ministériels prévoit un mécanisme de remontée annuelle d'informations des conseils régionaux au CSN (avant le 15 février) puis, du CSN au ministre de la justice et à l'Autorité de la concurrence (au plus tard le 31 mars). Cette disposition concerne des données économiques et démographiques essentielles à la réalisation de la mission dévolue à l'Autorité :

"1° Le nombre de notaires, leur localisation et un état des créations, des transferts ou des suppressions d'offices, des ouvertures de bureaux annexes ou de leur transformation en offices distincts survenus durant l'année écoulée ;

2° Les données économiques et démographiques permettant d'apprécier les besoins de création de nouveaux offices."76

203. En 2017 et 2018, le CSN n'a pas été en mesure de recueillir et de transmettre à l'Autorité ces informations, selon les modalités prévues par le décret.

204. De manière générale, il ressort de l'instruction que le dispositif pourrait être adapté afin de mieux répondre aux besoins de l'Autorité. En effet, la tâche confiée à l'Autorité à l'article L. 462-4-1 du Code de commerce nécessite que cette dernière dispose d'un ensemble d'éléments lui permettant d'apprécier les conditions d'accès aux offices, la situation réelle des offices existants et l'adéquation de l'offre et de la demande de services notariaux, autant d'éléments qui, à l'heure actuelle, ne sont pas énumérés par l'article 2 du décret du 20 mai 2016 précité.

205. À titre illustratif, la liste des informations fournies régulièrement à l'Autorité par le CSN pourrait être utilement complétée par des données relatives aux prix de l'immobilier au niveau local77 (indicateur utile à l'appréciation du niveau de la demande de services notariaux), une répartition par âge et par sexe des effectifs de nouveaux notaires diplômés ou bien encore des membres des instances représentatives de la profession.

206. Si la plupart de ces données ont finalement été communiquées, à la demande de l'Autorité, par le CSN aux fins d'instruire le présent avis, il conviendrait pour l'avenir de mieux encadrer cette transmission, notamment par le biais du mécanisme prévu par le décret du 20 mai 2016. L'efficacité des échanges entre le CSN et l'Autorité s'en verrait ainsi renforcée (calendrier prévisible des transmissions d'information, format standardisé des données, ...).

207. Dès lors, il serait utile que l'Autorité, en concertation avec la DACS, soit associée aux travaux du CSN d'élaboration du dispositif prévu par le décret du 20 mai 2016 précité, notamment en ce qui concerne la fréquence, le contenu et les modalités des transmissions.

208. Par ailleurs, en complément des données transmises par le CSN, la collecte et l'actualisation des données pourraient être facilitées si l'Autorité recevait régulièrement (par exemple chaque trimestre) du ministère de la justice, un document récapitulant tous les événements influençant le nombre total de notaires et d'offices (y compris les bureaux annexes), ainsi que leur localisation sur le territoire (exemples : offices supprimés, offices créés, bureaux annexes transformés en offices distincts, nominations, retraits, radiations, démissions de notaires).

3. SUR LA PRISE EN COMPTE D'UNE COMPTABILITE ANALYTIQUE PERMETTANT UNE VENTILATION DE L'ACTIVITE ENTRE L'OFFICE PRINCIPAL ET SON (OU SES) BUREAU(X) ANNEXE(S)

209. L'Autorité renouvelle sa recommandation relative à l'instauration d'une obligation de ventilation des produits et des charges entre l'office principal et son (ou ses) bureau (x) annexe (s) (voir les points 461 à 463 de l'avis n° 16-A-13 du 9 juin 2016 précité). Cette disposition permettrait à l'Autorité d'analyser précisément la part d'activité réellement imputable à chacun des bureaux annexes dans le cadre de l'élaboration des futures cartes d'installation.

210. Dans les deux avis rendus sur des demandes de créations d'office notarial à Mayotte, où il n'existait aucun office en janvier 2017, mais seulement deux bureaux annexes d'offices de La Réunion, l'Autorité déplorait par exemple que " faute de comptabilité séparée, [elle] n'a pas eu communication des données comptables exhaustives relatives aux bureaux annexes présents à Mayotte, de sorte qu'il n'est techniquement possible, en l'état des données disponibles, ni d'y déterminer le niveau actuel de la demande, ni de s'y prononcer sur l'adéquation de l'offre notariale au potentiel d'accroissement de cette demande " Sans que ces données ne soient plus disponibles aujourd'hui, l'ouverture d'un bureau annexe supplémentaire a récemment été autorisée à Mayotte par arrêté du 6 juillet 201879. En ce qu'elle a préféré la création d'un bureau annexe à celle d'un office principal, dont le titulaire aurait consacré l'intégralité de son temps de travail au développement de cet office, cette décision ne tient que partiellement compte des constats de l'Autorité, qui avait relevé dans ses avis précités " que les données partielles obtenues au cours de l'instruction témoignent de l'activité soutenue d'un des deux bureaux annexes de Mayotte qui, combinée au fort dynamisme démographique de l'île, pourrait justifier une transformation de ces bureaux annexes en offices de plein exercice "80.

211. Pour l'ensemble de la France, l'Autorité rappelle que 954 offices de notaires sur 4 382 disposent de bureaux annexes ou secondaires (jusqu'à 6), pour un total de 1 326 bureaux. 198 bureaux annexes sont par ailleurs situés dans une zone d'emploi différente de leur office de rattachement.

Cinquième série de recommandations (amélioration du dispositif d'élaboration de la cartographie) :

- Associer l'Autorité à l'élaboration du rapport prévu au VII de l'article 52 de la loi du 6 août 2015 sur l'opportunité d'étendre l'application de la liberté d'installation aux départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle.

- Élaborer un cadre de transmission systématique d'information à l'Autorité en :

1. impliquant l'Autorité, en concertation avec la DACS, dans les travaux d'élaboration du dispositif prévu par le décret du 20 mai 2016 précité, notamment en ce qui concerne la fréquence, le contenu et les modalités des transmissions ;

2. prévoyant une transmission régulière, du ministère de la justice à l'Autorité, d'une information synthétique sur les différents événements influençant le nombre total de notaires et d'offices (y compris les bureaux annexes), ainsi que leur localisation sur le territoire (exemples : offices supprimés, offices créés, bureaux annexes transformés en offices distincts, nominations, retraits, radiations, démissions de notaires).

- Imposer une ventilation des produits et des charges entre l'office principal et son (ses) bureau (x) annexe (s), dans le cadre de la mise en place de la comptabilité analytique imposée par l'article R. 444-20, II, du Code de commerce.

G. RECOMMANDATIONS EN VUE D'AMELIORER L'ACCES DES FEMMES ET DES JEUNES AUX OFFICES

212. La réforme a eu un effet important, tant sur la féminisation que sur le rajeunissement de la profession de notaire.

213. À la date du précédent avis de l'Autorité, rendu sur la base des données disponibles au 1er janvier 2016, la profession ne comptait que 35 % de femmes, et ce de manière très inégalement répartie, puisqu'elle représentait 32 % des notaires libéraux mais 64 % des notaires salariés. La proportion de femmes accédant à l'exercice libéral était ainsi en très net décalage avec celle constatée chez les diplômés, les femmes représentant environ 70 % des dernières promotions.

<emplacement tableau>

214. La libre-installation a conduit à des nominations bien plus conformes à la démographie des diplômés. Au 31 décembre 2017, les femmes représentaient 43 % des notaires (+ 8 points). Surtout, 58 % de femmes figurent parmi les créateurs d'offices, ce qui représente une proportion bien plus importante que pour les nominations relevant du droit de présentation, y compris au titre de ces mêmes années (seulement 45 %).

<emplacement tableau>

215. C'est le signe que, pour promouvoir la parité femme-homme dans l'accès à la profession, la voie du droit de présentation est moins efficace que la liberté d'installation régulée introduite par la loi du 6 août 2015. En effet, alors que beaucoup de contributeurs indiquaient lors de l'élaboration du précédent avis de l'Autorité que la forte proportion de femmes dans des fonctions de notaire salarié relevaient d'un choix personnel et que ces dernières ne souhaitaient pas accéder aux responsabilités impliquées par l'exercice libéral, le nombre de femmes notaires nommées aux offices créés, qui - compte tenu des modalités de tirage au sort - doit être à peu près équivalent au pourcentage de candidates, indique au contraire une appétence certaine de ces dernières pour l'entreprenariat.

216. S'agissant du rajeunissement de la profession, en grande majorité (90 %), les créateurs sont des primo-installants. Leur âge moyen est de 37 ans, ce qui rajeunit de deux ans la profession, avec un âge moyen ramené à 46,8 ans.

217. Au-delà de cet effet mécanique lié aux nouvelles installations, le CSN a indiqué qu'il avait engagé des démarches de promotion de l'égalité entre hommes et femmes et en faveur d'un meilleur équilibre entre vie professionnelle et vie privée, dans le cadre du plan managérial du notariat, adopté par l'Assemblée Générale du CSN le 25 avril 2017. Il prévoit notamment de favoriser les expérimentations pour améliorer la qualité de vie au travail (QVT) et de conduire des actions pour promouvoir l'égalité réelle femme-homme.

218. Ces mesures sont notamment les suivantes :

- rapport sur la qualité de vie au travail remis au CSN le 12 décembre 2017, qui doit donner lieu à la rédaction d'un vadémécum ;

- journée annuelle du Club des certifiés du notariat du 24 janvier 2018 organisée sur le thème de la " Qualité de vie au travail " ;

- communications dans le cadre de la Journée internationale pour l'élimination de la violence à l'égard des femmes du 25 novembre 2017 et de la Journée internationale des droits des femmes du 8 mars 2018, notamment à travers l'organisation d'une conférence sur les stéréotypes de genre ;

- adoption d'une résolution à l'Assemblée générale du CSN du 17 avril 2018 et mise en place de groupes de travail afin de proposer des mesures favorisant la parité et l'égalité réelle dans les instances professionnelles et dans les offices ;

- communication le 8 mai 2018 auprès des présidents de conseil régional sur les engagements pris.

219. Surtout, le Président du CSN a indiqué en séance que l'assemblée générale des 3 et 4 juillet 2018 avait adopté une " Résolution relative à la mise en œuvre ede l'égalité réelle dans le notariat " prévoyant notamment :

- d'améliorer la représentation des femmes dans les instances, par exemple, s'agissant de l'élection des délégués de cour, en " [encourageant] la présentation de la candidature d'un binôme composé de délégués de sexe différent " ou la " présentation de candidats de sexe différent à chaque nouvelle élection, permettant une alternance " en fonction du nombre de délégués à élire, ou encore en " [préconisant] la présentation à la candidature au sein des conseils d'administration et de surveillance, des commissions, des groupes de travail, des bureaux et de tout organe de direction des instances et des organismes du notariat, d'une proportion de personnes d'un même sexe comprise entre 40 % et 60 % " ;

- d'intégrer le sujet de l'égalité réelle entre les hommes et les femmes dans le notariat aux thèmes de réflexion et de prospective de la Commission du CSN en charge du management ;

- de mettre " d'ores et déjà (...) en œuvre " des " actions concrètes " afin " d'accompagner les femmes et les hommes exerçant des responsabilités professionnelles et de leur permettre de mieux concilier leur vie privée et leur vie professionnelle " (création d'une cellule de coaching, formation à la prise de parole en public) et " d'accompagner l'ensemble de la profession : sensibilisation à l'égalité des droits, aux stéréotypes de genre, à l'autocensure, par la diffusion de guides pédagogiques et de supports ".

220. L'Autorité salue cette démarche ambitieuse, qui rejoint en partie les mesures qu'elle avait préconisées dans son avis n° 16-A-13 pour assurer une meilleure représentation des femmes dans les instances professionnelles et une meilleure conciliation entre vie familiale et vie professionnelle.

221. Compte tenu de la sous-représentation des femmes dans les plus hautes instances du notariat (1 femme sur les 7 membres du bureau du CSN, sans vice-présidence ; 12 femmes présidant les 64 chambres départementales, interdépartementales et régionales recensées, soit 18 %), elle invite le CSN à concrétiser cette résolution au plus vite, en modifiant les règles applicables en la matière conformément au principe de parité, tel qu'affirmé notamment par la loi n° 2014-873 du 4 août 2014 pour l'égalité réelle entre les femmes et les hommes. Pour assurer l'effectivité de ce principe, l'Autorité considère par ailleurs que les règles destinées à améliorer la représentation des femmes dans les instances pourraient être rendues obligatoires, en poursuivant ainsi le mouvement initié par la résolution des 3 et 4 juillet 2018.

222. L'Autorité réitère par ailleurs ses recommandations précédentes, qui visaient à établir une information statistique spécifique et à prendre des mesures concrètes permettant une meilleure conciliation entre vie professionnelle et familiale.

223. De la même manière, pour l'accès des jeunes, l'Autorité a fait plusieurs propositions dans son avis de 2016, dont une en particulier concernait l'aide financière à l'installation prévue par la section 2 du titre IV bis du livre IV du Code de commerce81, qui a précisé les conditions dans lesquelles le fonds interprofessionnel de l'accès au droit et à la justice (FIADJ) versera aux professionnels concernés, notamment les notaires, des aides à l'installation.

224. En effet, il est prévu que dans les zones du territoire82 arrêtées par le ministre de la justice " en fonction du nombre de professionnels installés, du nombre de projets d'installation, et des besoins identifiés "83, le FIADJ puisse octroyer des aides à l'installation dans un office vacant ou créé84 aux professionnels répondant à trois conditions d'éligibilité85 cumulatives : n'avoir perçu ni d'autre aide à l'installation au cours des cinq années civiles précédentes, ni perçu des revenus cumulés supérieurs à 210 000 euros au cours des trois années précédentes, ni dégagé un résultat annuel supérieur à 70 000 euros lors du dernier exercice comptable. Les aides à l'installation peuvent être versées pendant les trente-six mois suivant l'installation86.

225. Or, ce dispositif d'aide prévu par la loi n'a toujours pas été mis en œuvre L'Autorité recommande ainsi à nouveau l'adoption rapide de mesures budgétaires pour alimenter le FIADJ.

226. L'Autorité encourage enfin le CSN à favoriser l'implication et la représentation des créateurs d'offices dans les diverses instances et les fonctions d'inspection, à proportion de leur importance démographique dans la profession, ce qui en favorisera la féminisation et le rajeunissement.

Sixième série de recommandations (accès des femmes et des jeunes aux offices) :

1. étendre le dispositif prévu par l'ordonnance n° 2015-949 du 31 juillet 2015 relative à l'égal accès des hommes et des femmes au sein des ordres professionnels à la profession de notaire ;

2. inciter les instances représentatives du notariat à établir une information statistique par genre retraçant les parcours professionnels par des indicateurs de parité et des indicateurs d'incidence par sexe, assortie d'un rapport thématique annuel consacré à la situation des femmes et des hommes au sein de la profession ; faciliter l'accès à cette information, en créant par exemple une page dédiée sur les sites internet des instances représentatives ;

3. faciliter l'articulation entre la vie privée et la vie professionnelle des notaires en améliorant la prise en charge des congés maternité ou paternité des professionnels concernés et en mettant en place un système de " notaire remplaçant " lors de ces congés ;

4. prévoir l'adoption rapide de mesures budgétaires pour assurer le financement du FIADJ ;

5. favoriser l'implication et la représentation des créateurs d'offices dans les diverses instances représentatives de la profession et les fonctions d'inspection.

V. Conclusion

227. Le processus progressif que le Gouvernement a engagé, en adoptant le 16 septembre 2016, sur proposition de l'Autorité, un premier arrêté pris en application de l'article 52 de la loi du 6 août 2015 précitée donne des résultats extrêmement encourageants. Il doit donc se poursuivre.

228. Les récentes créations d'offices ont contribué à rééquilibrer partiellement le nombre de notaires titulaires et associés aux besoins de l'économie nationale. Ce renouvellement de l'offre de services s'est avéré bénéfique tant pour les clients que pour le notariat lui-même. La première carte a été, comme la loi le prévoit, protectrice du maillage territorial et de la viabilité des offices les plus fragiles, les créations étant réservées aux seules zones où le potentiel d'activité notariale est le plus élevé. Enfin, la réforme a joué un rôle actif dans la féminisation du notariat et a permis de lever certaines barrières auxquelles se heurtaient de nombreux diplômés notaires désireux d'accéder à l'exercice libéral de leur profession.

229. Le succès de cette première étape ne doit toutefois pas masquer les difficultés rencontrées au cours de ces deux dernières années, ni faire oublier que la mise en œuvre de la réforme souhaitée par le législateur s'inscrit dans le temps long : l'objectif poursuivi est le rééquilibrage des fondamentaux économiques du notariat à l'horizon 2024.

230. L'article 52 de loi du 6 août 2015 précitée invite le Gouvernement à " garantir une augmentation progressive du nombre d'offices à créer " et de prévoir " une augmentation progressive du nombre de professionnels dans la zone concernée ". Cet impératif de " progressivité ", qui a été au cœur des débats parlementaires et qui est inscrit à plusieurs reprises dans la loi impose de procéder par étapes, de façon continue, sans rupture, pour atteindre l'objectif assigné par le législateur. Le potentiel d'activité notariale identifié par l'Autorité il y a deux ans demeure important, et le vivier des candidats est substantiel.

Ainsi, dans le cadre de la consultation publique, plusieurs centaines de contributeurs - pour l'essentiel des notaires assistants (112 personnes) - ont manifesté leur volonté de candidater sur la période 2018-2020. Ces considérations conduisent l'Autorité à proposer au Gouvernement de permettre l'installation libérale de 700 nouveaux notaires dans au moins 230 zones du territoire, ce qui permettra de couvrir environ un tiers de l'objectif fixé à l'horizon 2024.

231. Sur près de 130 créateurs d'offices ayant répondu à la consultation publique organisée par l'Autorité, une écrasante majorité se montre confiante sur ses perspectives de développement : 66 % estiment que leur office sera rentable d'ici 3 ans ; 27 % entre 3 et 5 ans. Pour que ces perspectives puissent se concrétiser, l'Autorité estime indispensable que la concurrence par les mérites puisse s'exercer pleinement. À cet égard, l'encadrement actuel de la publicité dans le notariat est identifié comme un blocage très important au développement de ces nouveaux entrants, qui doivent se faire connaître auprès de leurs futurs clients. Il est ainsi temps d'assouplir ces règles, comme la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne y invite d'ailleurs87.

232. Enfin, l'Autorité est d'avis qu'il serait opportun de simplifier au maximum les démarches administratives relatives aux créations d'offices. Certains choix procéduraux ne permettent pas au dispositif d'atteindre son efficacité maximale. Ainsi, l'Autorité estime nécessaire de limiter les candidatures, de sorte que les demandeurs privilégient la qualité des projets de création d'office, plutôt que la quantité, pour accroître leurs chances d'être tirés au sort. En contrepartie, il serait légitime de tenir davantage compte des préférences géographiques des candidats, en recourant à un algorithme d'appariement transparent et mis en œuvre par voie électronique, pour automatiser les tâches chronophages pour l'administration. Enfin, il apparaît légitime et opportun de répondre aux souhaits des demandeurs visant d'une part, à disposer d'une meilleure information sur l'avancement de l'instruction de leurs dossiers (par exemple, en les informant de leur nomination avant sa publication au Journal officiel) et d'autre part, à leur laisser davantage de temps pour organiser leur prestation de serment et leur installation matérielle (locaux, personnel, matériel informatique, etc.).

233. C'est dans ce nouveau cadre que l'Autorité invite le Gouvernement à inscrire les nouvelles perspectives de créations d'offices pour les deux années à venir.

Délibéré à la suite de l'instruction de Mme Lucile Fournereau, Mme Aurélie Jean, Mme Audrey Sabourin, M. Antoine Callot et M. Yann Guthmann, rapporteurs et M. Thomas Piquereau, rapporteur général adjoint et sur le rapport oral des rapporteurs précités et l'intervention de M. Stanislas Martin, rapporteur général, par Mme Isabelle de Silva, présidente, M. Emmanuel Combe, Mme Élisabeth Flüry-Hérard, et Mme Fabienne Siredey-Garnier vice-présidents, Mme Séverine Larere, Mme Reine-Claude Mader, Mme Patricia Phéné, Mme Pierrette Pinot, Mme Carol Xueref et M. Jean-François Bohnert, membres.

NOTES

1 Ce résumé a un caractère strictement informatif. Seuls font foi le corps de l'avis et ses annexes ci-après.

2 Les installations étant appelées à être moins nombreuses que 1 650 au total, leur impact réel sur ces indicateurs sera nécessairement inférieur à ces estimations.

3 Contrairement à l'avis n° 16-A-13, Wallis-et-Futuna ne constitue plus une " zone d'installation " au sens du présent avis.

4 Article 1369 du code civil, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations, applicable à compter du 1er octobre 2016 : l'acte authentique " est celui qui a été reçu par officiers publics ayant le droit d'instrumenter dans le lieu où l'acte a été rédigé, et avec les solennités requises ".

5 Art. 1, I, du décret n° 2016-216 précité.

6 Art. 1, II, du décret n° 2016-216 précité.

7 Avis n° 16-A-13, précité. Voir. en particulier son annexe 4 " Fiche détaillée par zone d'installation ".

8 Arrêté du 4 novembre 2016 pris en application du V de l'article 16 du décret n° 2016-661 du 20 mai 2016 relatif aux officiers publics et ministériels et fixant la date de l'ouverture du dépôt des demandes de nomination sur un office notarial à créer

9 http://www.autoritedelaconcurrence.fr/user/standard.php?id_rub=683&id_article=3155&lang=fr

10 Arrêté du 15 mars 2017 portant nomination d'un notaire (NOR : JUSC1708550A).

11 Dans cette zone, un office a été créé à la résidence de Saint-Pierre par arrêté du 7 juin 2017 portant nomination d'une notaire (NOR : JUSC1716628A).

12 Toutefois, la zone d'installation de Saint-Barthélemy devrait voir son taux de marge baisser lors des prochains exercices comptables, la majoration de 40 % applicable aux tarifs règlementés des notaires ayant été abrogée en 2016.

13 Il s'agit des zones d'Amiens, Arras, Beauvais, Chartres, Cholet, Compiègne, Laval, Le Mans, Lisieux, Morteau et Rouen.

14 Au cours des mois de février et mars 2018, conformément aux articles 52, II de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 et 54 du décret n°73-609 du 5 juillet 1973 précité, l'attention des candidats potentiels à l'installation a été appelée sur une trentaine de zones dans lesquelles la Chancellerie avait constaté un nombre insuffisant de demandes de créations d'office.

15 " Création d'offices notariaux : Analyse du ministère de la justice ", 28 juin 2018, document transmis par la DACS.

16 Voir le § 84 du présent avis, s'agissant du cas particulier de Wallis-et-Futuna.

17 CE 16 octobre 2017.

18 Insee Méthodes n° 129, mars 2015, Les zonages d'étude de l'Insee, Une histoire des zonages supra-communaux définis à des fins statistiques, Chapitre 4 - Les zones d'emploi (p. 58).

19 CE 16 octobre 2017.

20 Pour mémoire, la taille médiane des zones d'installation correspond à un cercle de rayon théorique de 20,5 km ; le 9ème décile, à un cercle théorique de 34,3 km de rayon. Dans le cadre de la consultation publique réalisée en 2016, " un grand nombre de contributeurs [a souligné] que 80 % de la clientèle des offices notariaux serait localisée dans un rayon de 15 à 25 kilomètres de la résidence de l'office, ce rayon pouvant varier en fonction des spécificités locales, des contraintes topographiques ou des infrastructures de transport. " (Avis n° 16-A-13, § 80).

21 Article 4 de la loi n° 61-814 du 29 juillet 1961.

22 Dans sa rédaction actuelle, l'article 8 du décret n° 71-942 du 26 novembre 1971 relatif aux créations, transferts et suppressions d'office de notaire, à la compétence d'instrumentation et à la résidence des notaires, à la garde et à la transmission des minutes et registres professionnels des notaires dispose : " Les notaires exercent leurs fonctions sur l'ensemble du territoire national, à l'exclusion de la Nouvelle-Calédonie, de la Polynésie française et des îles Wallis et Futuna. " (Gras ajouté). Cette exclusion trouve son origine dans l'article 1er du décret n° 2012-580 du 26 avril 2012 relatif à l'organisation des professions de notaire et d'huissier de justice outre-mer. Elle n'a pas été modifiée par le décret n° 2017-711 du 2 mai 2017, qui a étendu en dernier lieu la compétence d'instrumentation des notaires à Saint-Pierre-et-Miquelon.

23 CE 16 octobre 2017.

24 Décret n° 2016-230 précité.

25 En effet, l'article 50 du décret n° 73-609 du 5 juillet 1973 précité ne permet aux candidats de déposer leur demande de nomination dans un office à créer que durant un délai de dix-huit mois à compter de la publication de la carte. Par ailleurs, la publication d'une nouvelle carte fait courir un délai minimal de deux mois avant que les postulants aient la possibilité de déposer leur candidature.

26 Paragraphes 418 et suivants.

27 Article 52, III, de la loi du 6 août 2015.

28 Communiqué de presse du 23 novembre 2017 : " Liberté d'installation des notaires : bilan d'étape " ; http://www.autoritedelaconcurrence.fr/user/standard.php?lang=fr&id_rub=662&id_article=3069

29 Voir les avis n° 17-AN-84 du 20 janvier 2017, n° 17-AN-120 du 23 janvier 2017, n° 17-AN-227 du

20 février 2017 et n° 17-AN-297 du 6 juin 2017 relatifs à une demande de création d'un office de notaire à la résidence de Miquelon-Langlade, dans la zone d'installation contrôlée de Saint-Pierre et Miquelon.

30 Arrêté du 24 janvier 2017 fixant les modalités des opérations de tirages au sort prévues à l'article 53 du décret n° 73-609 du 5 juillet 1973 relatif à la formation professionnelle dans le notariat et aux conditions d'accès aux fonctions de notaire, article 6 : " II. - En cas de pluralité de demandes déposées pour un même demandeur dans une même zone, seule la première demande enregistrée, l'horodatage faisant foi, donne lieu à la constitution d'un bulletin./ Pour l'application de l'alinéa précédent, sont considérées comme émanant du même demandeur les demandes présentées par une même personne physique ou pour une même personne morale, ainsi que les demandes présentées par une personne physique et celles présentées pour une ou plusieurs personnes morales ayant cette même personne physique pour associé unique ou pour seul associé demandant sa nomination en tant qu'associé exerçant au sein de l'office à créer. Il en va de même des demandes présentées pour des personnes morales différentes comprenant strictement les mêmes associés exerçants demandant leur nomination dans l'office à créer. "

31 Article 51 du décret n° 73-609 précité.

32 Article 52 alinéa 4 du décret n° 73-609 précité.

33 Article 53 du décret n° 73-609 précité.

34 Arrêté du 24 janvier 2017 fixant les modalités des opérations de tirages au sort prévues à l'article 53 du décret n° 73-609 du 5 juillet 1973 relatif à la formation professionnelle dans le notariat et aux conditions d'accès aux fonctions de notaire

35 Foire aux questions - Site Internet : https://opm.justice.gouv.fr/

36 À l'évidence, ces derniers, déjà nommés, satisfont toutes les " conditions de nationalité, d'aptitude, d'honorabilité, d'expérience et d'assurance requises pour être nommé en qualité de notaire " prévues par le II de l'article 52 de la loi du 6 août 2015.

37 Article 49, alinéas 2 et 3, du décret n° 73-609 : " Les personnes physiques titulaires d'un office au jour de leur demande ne peuvent être nommées dans l'office créé qu'après ou concomitamment à leur démission. Celle-ci est présentée au garde des Sceaux, ministre de la justice, avec la demande de nomination dans un office à créer, sous condition suspensive de nomination dans ce nouvel office. / Les associés exerçant dans une société titulaire d'un office au jour de leur demande ne peuvent être nommés dans l'office créé qu'après ou concomitamment à leur retrait de cette société, dans les conditions prévues par les textes applicables à cette forme de société. La demande de retrait, sous condition suspensive de nomination dans le nouvel office, doit être présentée au garde des Sceaux, ministre de la justice, avec la demande de nomination dans l'office à créer ".

38 Décret n° 2016-880 du 29 juin 2016 relatif aux sociétés d'exercice libéral constituées pour l'exercice des professions d'huissier de justice, de notaire ou de commissaire-priseur judiciaire et aux sociétés de participations financières constituées en vue de la détention de parts sociales ou d'actions dans ces sociétés qui a modifié le décret n°93-78 du 13 janvier 1993 pris pour l'application à la profession de notaire de la loi n° 90-1258 du 31 décembre 1990 relative à l'exercice sous forme de sociétés des professions libérales soumises à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé.

39 Décret n° 2016-883 du 29 juin 2016 relatif à l'exercice des professions d'huissier de justice, de notaire et de commissaire-priseur judiciaire sous forme de société autre qu'une société civile professionnelle ou qu'une société d'exercice libéral.

40 Décret n° 2016-1509 du 9 novembre 2016 relatif aux sociétés constituées pour l'exercice de la profession de notaire (modifiant le décret n°67-868 du 2 octobre 1967 pris pour l'application à la profession de notaire de la loi n° 66-879 du 29 novembre 1966 relative aux sociétés civiles professionnelles).

41 Publication des décrets relatifs aux sociétés civiles professionnelles de notaires, d'huissiers de justice et de commissaires-priseurs judiciaires, Communiqué de Jean-Jacques URVOAS, garde des Sceaux, ministre de la justice, http://www.presse.justice.gouv.fr/archives-communiques-10095/societes-civiles-professionnelles-publication-de-trois-decrets-29442.html

42 Article 52 de la loi du 6 aout 2015 précitée : " I. - Les notaires (...) peuvent librement s'installer dans les zones où l'implantation d'offices apparaît utile pour renforcer la proximité ou l'offre de services. "

43 Section, 21 décembre 1973, Commune de Cours de Pile, n° 85192, p. 743 ; 27 février 1970, B..., n° 71374, Rec. p. 139.

44 Conseil d'État, Nos 406017, 406071, M. T..., M. P..., 6ème et 1ère chambres réunies, 19 mai 2017.

45 Nos 400675, 400698, 400858, 401795, 401810, M. Lo... et autres, Assemblée du contentieux, 18 mai 2018

46 Code de l'éducation, article L. 612-3 : " I.- Le premier cycle est ouvert à tous les titulaires du baccalauréat et à ceux qui ont obtenu l'équivalence ou la dispense de ce grade (...)".

47 Article 52 de la loi du 6 aout 2015 précitée : " Afin de garantir une augmentation progressive du nombre d'offices à créer, de manière à ne pas bouleverser les conditions d'activité des offices existants, cette carte est assortie de recommandations sur le rythme d'installation compatible avec une augmentation progressive du nombre de professionnels dans la zone concernée. "

48 Code de l'éducation, article L. 612-3 : " III.- Les capacités d'accueil des formations du premier cycle de l'enseignement supérieur des établissements relevant des ministres chargés de l'éducation nationale et de l'enseignement supérieur sont arrêtées chaque année par l'autorité académique après dialogue avec chaque établissement.(...) IV.- Pour l'accès aux formations autres que celles prévues au VI, lorsque le nombre de candidatures excède les capacités d'accueil d'une formation, les inscriptions sont prononcées par le président ou le directeur de l'établissement dans la limite des capacités d'accueil.

49 Conseil d'État, N° 410561, 4ème - 5ème chambres réunies, 22 décembre 2017.

50 Article 52 de la loi du 6 aout 215 : " II. - Dans les zones mentionnées au I, lorsque le demandeur remplit les conditions de nationalité, d'aptitude, d'honorabilité, d'expérience et d'assurance requises pour être nommé en qualité de notaire (...) le ministre de la justice le nomme titulaire de l'office de notaire, d'huissier de justice ou de commissaire-priseur judiciaire créé. Un décret précise les conditions d'application du présent alinéa " ; Code de l'éducation, article L612-3 : XII.- Un décret précise les modalités d'application des I à XI du présent article.

51 Code de l'éducation, article L. 612-3 : " I. (...) L'inscription dans une formation du premier cycle dispensée par un établissement public est précédée d'une procédure nationale de préinscription " ; Article D. 612-1 : " La procédure nationale de préinscription dans une formation initiale du premier cycle de l'enseignement supérieur mentionnée à l'article L. 612-3 est dématérialisée et gérée par un téléservice national, dénommé Parcoursup, placé sous la responsabilité du ministre chargé de l'enseignement supérieur. "

52 Article 52 du décret n° 73-609 du 5 juillet 1973 tel que modifié par le décret n° 2016-661 du 20 mai 2016 relatif aux officiers publics et ministériels : " En cas de demandes formées par une même personne et portant sur plusieurs zones, l'une quelconque de ses demandes est susceptible de donner lieu à la nomination de son auteur, sans possibilité pour lui d'exprimer un ordre de préférence ". Article 53 : " " le ministre de la justice nomme les demandeurs au regard des recommandations dont est assortie la carte et suivant l'ordre d'enregistrement de leur demande ".

53 Article 52, quatrième alinéa, du décret n° 73-609 du 5 juillet 1973 tel que modifié par le décret n° 2016-661 du 20 mai 2016 relatif aux officiers publics et ministériels.

54 Ni les articles L. 612-1 et suivants du code de l'éducation dans leur rédaction alors en vigueur, ni les articles D. 612-1 et suivants du même code, ni l'arrêté du 8 avril 2011 " relatif à la procédure de préinscription en première année d'une formation post baccalauréat ", ni la circulaire 24 avril 2017 signée du directeur général par intérim de la DGESI ne prévoient cette règle qui ne figure que dans une brochure d'information : le " guide d'admission post-bac ".

55 Article D. 612-1-1 : " La procédure nationale de préinscription comporte une phase principale et une phase complémentaire./ La phase principale permet aux candidats de formuler des vœux d'inscription dans une ou plusieurs des formations initiales du premier cycle de l'enseignement supérieur proposées sur la plateforme Parcoursup, lesquels seront examinés dans les conditions fixées à l'article D. 612-1-13./ La phase complémentaire permet aux candidats, à partir d'une date fixée par le calendrier mentionné à l'article D. 612-1-2, de se porter candidat, à titre subsidiaire, dans les formations au sein desquelles des places sont restées vacantes à partir de la date d'ouverture de cette phase ou le deviennent du fait des réponses des candidats. " / Article D. 612-1-10 : " Le nombre total de vœux d'inscription est limité à dix par candidat lors de la phase principale./ Le candidat ne peut formuler qu'un vœu pour une même formation./ Il dispose de dix vœux supplémentaires au plus lorsqu'il se porte candidat à des formations dispensées par la voie de l'apprentissage et auxquelles l'accès est conditionné à la signature d'un contrat d'apprentissage ".

56 Le Conseil d'État a en effet considéré dans un avis du 15 janvier 1997, n° 182777 que la " procédure d'inscription par voie télématique mise en œuvre epar (...) l'université de Rennes II en 1996, pour l'accès à certaines filières de l'université, consiste à retenir, dans l'ordre chronologique des connexions effectives, les confirmations de demande d'inscription reçues sur un serveur "minitel", la date et l'heure précises auxquelles seraient prises en compte ces connexions ayant été annoncées à l'avance à tous les candidats. Une telle procédure méconnaît le principe de l'égalité de traitement entre ces candidats, eu égard aux conditions d'équipement télématique et informatique des intéressés, aux possibilités techniques de connexion et aux différences qui en résultent dans les conditions d'acheminement de leurs appels vers le serveur télématique de l'université ". Voir également CE, 5 nov.2011, Min. éduc. nat., n° 215351, T

57 Le Monde, 6 février 2017.

58 Conclusions du commissaire du gouvernement, Conseil d'État, avis du 15 janvier 1997, n° 182777.

59 Conseil d'État, N° 410561, 4ème - 5ème chambres réunies, 22 décembre 2017. Extrait de l'analyse de la décision : " En vue de répondre à l'objectif d'intérêt général d'assurer l'accès aux formations "en tension" dans lesquelles les candidatures excèdent les capacités d'accueil d'un établissement du plus grand nombre de candidats les ayant demandées, l'article L. 612-3 du code de l'éducation doit être regardé comme ayant donné compétence au ministre pour fixer les règles selon lesquelles il est, le cas échéant, procédé au départage des candidats ayant obtenu le même classement. Un tel départage, dont aucun texte ni aucun principe ne fait obstacle à ce qu'il repose sur le tirage au sort, ne peut toutefois, sauf à méconnaître le caractère limitatif des critères fixés par ce même article, intervenir qu'à titre exceptionnel pour départager un nombre limité de candidats. "

60 La mise en place d'un tel dispositif nécessitera une mise à disposition du code, tant à l'égard des intéressés que du public. En effet, aux termes des dispositions de l'article L. 311-3-1 du Code des relations entre le public et l'administration (" CRPA ") les administrations ont l'obligation d'avertir leurs usagers (lorsqu'une décision individuelle est prise sur le fondement d'un traitement algorithmique, et doivent publier les règles définissant les principaux traitements algorithmiques utilises pour de telles décisions (article L. 312-1-3).

61 Pour générer des nombres pseudo-aléatoires, le logiciel Microsoft Excel utilise par exemple l'algorithme de Mersenne Twister.

62 Arrêté du 24 janvier 2017 fixant les modalités des opérations de tirages au sort prévues à l'article 53 du décret n° 73-609 du 5 juillet 1973 relatif à la formation professionnelle dans le notariat et aux conditions d'accès aux fonctions de notaire : " Article 3 : Il est calculé, pour chaque zone mentionnée à l'article 1er, l'écart existant entre les recommandations quant au nombre de créations d'office assortissant la carte mentionnée à l'article 52 de la loi du 6 août 2015 susvisée et le nombre total de demandes de création d'office enregistrées sur la zone. Cet écart est exprimé en pourcentage desdites recommandations. / Article 4 : L'ordre de réalisation des tirages au sort mentionnés à l'article 1er est déterminé par ordre croissant des écarts définis à l'article 3. "

63 Si les deux approches devraient théoriquement converger vers un même résultat, en réalité on observe que ce n'est pas le cas, les candidats intégrant d'autres critères dans leur raisonnement que le potentiel économique de la zone (localisation d'un réseau professionnel ou personnel, par exemple).

64 C.J., 4 mai 2017, Luc Vanderborght, aff. C-339/15, Rec. num., ECLI:EU:C:2017:335.

65 Article 56 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (" TFUE ").

66 Directive 2000/31/CE du Parlement européen et du Conseil, du 8 juin 2000, relative à certains aspects juridiques des services de la société de l'information, et notamment du commerce électronique, dans le marché intérieur (" directive sur le commerce électronique ").

67 Communiqué de presse du Conseil d'État du 21 juin 2018 sur la publication de l'étude du 3 mai 2018 sur " Les règles applicables aux professionnels de santé en matière d'information et de publicité ".

68 Article 3, III, de la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siècle.

69 Mention entre parenthèses ajoutée par la modification arrêtée le 22 mai 2018.

70 Article L444-2 : " Des remises peuvent être consenties lorsqu'un tarif est déterminé proportionnellement à la valeur d'un bien ou d'un droit en application du deuxième alinéa du présent article et lorsque l'assiette de ce tarif est supérieure à un seuil défini par l'arrêté conjoint prévu à l'article L. 444-3. Le taux des remises octroyées par un professionnel est fixe, identique pour tous et compris dans des limites définies par voie réglementaire. "

71 L'émolument dû au titre d'une vente ou cession de gré à gré (article A. 444-91 du Code de commerce) s'élève à un peu plus de 2 000 euros pour un bien d'une valeur de 200 000 euros. À titre de comparaison, pour un bien d'une valeur d'un million d'euros, l'émolument total s'élève plus de 8 500 euros et la remise à près de 700 euros, soit environ 8 %.

72 Voir les points 220 à 222 de l'avis n° 16-A-03 du 29 janvier 2016 concernant un projet de décret relatif aux tarifs de certains professionnels du droit et au fonds interprofessionnel de l'accès au droit et à la justice prévu par l'article 50 de la loi du 6 août 2015.

73 Soit 5 % de l'émolument total.

74 Borne inférieure de la dernière tranche d'assiette de la plupart des tarifs proportionnels.

75 Dans ces départements, les créations d'offices de notaire sont extrêmement rares : respectivement à Yutz (57), Fegersheim-Eschau (67) et Colmar (68), par arrêté du 21 mai 2001 (NOR: JUSC0120291A), à Wissembourg (67) et Saint-Louis-Huningue (68) par arrêté du 11 juillet 2003 (NOR: JUSC0320465A), à Hettange-Grande (57), Illkirch-Graffenstaden (67), et Rixheim (68) par arrêté du 24 avril 2009 (NOR: JUSC0909572A), à Strasbourg-Robertsau (67) et à Kingersheim (68) par arrêté du 12 avril 2012 (NOR: JUSC1220232A) et enfin, à Horbourg-Wihr (68) par arrêté du 14 septembre 2016 (NOR: JUSC1625878A). Notons que l'office de Wissembourg (67) créé le 11 juillet 2003 a été supprimé par arrêté du 21 juin 2004 (NOR: JUSC0420502A).

76 Article 2-2 du décret n° 71-942 du 26 novembre 1971 relatif aux créations, transferts et suppressions d'office de notaire, à la compétence d'instrumentation et à la résidence des notaires, à la garde et à la transmission des minutes et registres professionnels des notaires.

77 Conformément au décret n° 2013-803 du 3 septembre 2013 relatif aux bases de données notariales portant sur les mutations d'immeubles à titre onéreux, le CSN dispose de statistiques précises concernant les prix de l'immobilier.

78 Avis n° 17-AN-03 du 16 janvier 2017 relatif à une demande de création d'un office de notaire à la résidence de Mamoudzou, dans la zone d'installation contrôlée de Mayotte, § 25 ; Avis n° 17-AN-54 du 18 janvier 2017 relatif à une demande de création d'un office de notaire à la résidence de Mtsamboro, dans la zone d'installation contrôlée de Mayotte, § 23.

79 Arrêté du 6 juillet 2018 relatif à l'ouverture d'un bureau annexe (NOR : JUSC1819043A).

80 Avis n° 17-AN-03, § 28 ; Avis n° 17-AN-54, § 26.

81 Insérée par le décret n° 2016-230 du 26 février 2016 précité.

82 Art. R. 444-22, C. com.

83 Art. R. 444-26, C. com.

84 Art. R. 444-23, C. com.

85 Art. R. 444-23, C. com.

86 Art. R. 444-24, C. com.

87 CJUE, 4 mai 2017, Luc Vanderborght, aff. C-339/15 précitée.