CA Paris, Pôle 5 ch. 4, 9 janvier 2019, n° 16-13453
PARIS
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Difeudis (SARL)
Défendeur :
Eurofix (SARL)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Luc
Conseillers :
Mmes Mouthon Vidilles, Comte
Avocats :
Mes Grappotte-Benetreau, Boucher, Liger, Lebretonnière, Alt
Faits et procédure
La société Difeudis distribue des combustibles et allume-feux.
La société Eurofix importe et commercialise des produits pour barbecue, tel que des allumettes et des allume-feux.
La société Eurofix vendait à la société Difeudis notamment des allume-feux.
Les difficultés entre les sociétés Eurofix et Difeudis sont nées de l'exécution de deux commandes :
- la commande 308 du 23 octobre 2012, qui devait être livrée le 5 décembre 2012, ne l'a été finalement que deux mois plus tard, le 8 février 2013 suite à des reports. Cette commande n'a été payée que partiellement pour un montant de 31 434,33 euros, la société Difeudis retenant une somme de 2 278,52 euros en invoquant aux mois de février et mars 2013 un manque de qualité sur 3000 boites d'allumettes livrées par la société Eurofix au cours de l'été 2012.
- la commande 356 du 17 janvier 2013 portait sur 64 800 allume-feux " Atout Feu 32 " au même prix unitaire de 0,45 euro. Par courriel du 21 janvier 2013, la société Eurofix a confirmé la bonne réception de cette commande à livrer début avril 2013. Par courriel du 26 février 2013, la société Eurofix a informé la société Difeudis qu'elle ne pouvait plus produire la commande " Atout Feu " en dessous du prix unitaire de 0,59 euro y compris la commande en cours, son fournisseur lui ayant notifié de son côté une augmentation importante de son prix de revient. Des pourparlers commerciaux ont été engagés entre les deux sociétés en février et mars 2013, la société Eurofix proposant notamment à son client un produit de substitution.
Par courrier recommandé du 19 avril 2013, la société Eurofix a rappelé que l'augmentation du prix de l'allume-feu " Atout Feu " lui était imposée par son fabricant et a également reproché à son client, d'une part, le décalage de deux mois de la livraison 308 et, d'autre part, une différence de règlement sur la facture correspondant à cette livraison pour un montant de 2 278,52 euros.
Par courrier du 7 mai 2013, la société Difeudis a mis en demeure la société Eurofix d'avoir à livrer la commande 356 du 17 janvier 2013 et a indiqué que les termes du courrier de la société Eurofix du 19 avril 2013 constituaient une rupture abusive des relations commerciales établies depuis de nombreuses années entre les deux sociétés.
Par courrier du 21 mai 2013, la société Eurofix a maintenu sa position et a contesté la retenue opérée au titre des " allumettes défectueuses " ainsi que la qualification de " rupture particulièrement abusive " évoquée par la société Difeudis.
Par acte du 31 octobre 2013, la société Difeudis a assigné la société Eurofix devant le tribunal de commerce de Rennes en paiement des sommes de 10 000 euros au titre de son préjudice d'image, 15 000 euros au titre de son préjudice commercial et 30 000 euros pour rupture brutale des relations commerciales établies.
Le tribunal de commerce de Rennes s'est déclaré compétent par jugement du 29 avril 2014. Par arrêt du 21 mai 2015, la cour d'appel de Paris a rejeté le contredit formé par la société Eurofix. Par arrêt du 11 mai 2017, la Cour de cassation a rejeté le pourvoi.
Par jugement du 22 mars 2016, le tribunal de commerce de Rennes a :
- dit qu'il y a lieu d'écarter les dernières conclusions de la société Eurofix, ainsi que ses pièces numéros 17B, 19B, 25B et 26 à 30,
- dit qu'il n'y a pas lieu de surseoir à statuer,
- condamné la société Eurofix à payer à la société Difeudis la somme de 9 072 euros en réparation de son préjudice commercial et débouté cette dernière du surplus de sa demande,
- condamné la société Difeudis à payer à la société Eurofix les sommes suivantes :
* 2 278,52 euros au titre du solde sur la facture n° FC 997018, cette somme étant majorée d'un intérêt au taux légal à compter du 22 mars 2016 et jusqu'au parfait paiement,
* 2 691 euros au titre des frais de stockage, cette somme étant majorée d'un intérêt au taux légal à compter du 22 mars 2016 et jusqu'au parfait paiement, et a débouté la société Eurofix du surplus de sa demande,
- débouté la société Difeudis au titre de sa demande de dommages et intérêts pour préjudice d'atteinte à son image,
- dit qu'il n'y a pas rupture brutale des relations commerciales au sens de l'article L. 442-6 du Code de commerce et débouté la société Difeudis en sa demande de dommages et intérêts au titre du préjudice subi pour rupture brutale,
- dit qu'il n'y a pas lieu de faire application de l'article 700 du Code de procédure civile et débouté les parties de leurs demandes formées sur ce chef,
- fait masse des dépens qui seront supportés par chacune des parties.
La société Difeudis a relevé appel de ce jugement par déclaration remise au greffe le 17 juin 2016.
La procédure devant la cour a été clôturée le 30 octobre 2018.
Vu les conclusions du 23 octobre 2018 par lesquelles la société Difeudis, appelante, invite la cour, au visa des articles 1101 et suivants, 1136, 1184 anciens du Code civil, et L. 442-6, I, 5° du Code de commerce, à :
- confirmer la décision déférée en ce qu'elle a :
* débouté la société Eurofix de sa demande de sursis à statuer,
* dit que la société Eurofix a engagé sa responsabilité à son préjudice et ce au titre du non-respect de la commande du 17 janvier 2013,
- infirmer la décision déférée sur le surplus,
et statuant à nouveau,
- dire que la société Eurofix a engagé sa responsabilité à son préjudice et ce au titre du non-respect de la commande du 17 janvier 2013, de la défectuosité des produits livrés en exécution de la commande du 23 octobre 2012,
- condamner la société Eurofix à lui verser la somme de 10 000 euros en réparation du préjudice d'atteinte à l'image causé par les allumettes défectueuses,
- condamner la société Eurofix à lui verser la somme de 15 000 euros correspondant au préjudice commercial subi suite à l'absence de livraison,
- dire que la société Eurofix a engagé sa responsabilité en rompant brutalement ses relations commerciales établies avec elle,
- condamner la société Eurofix à lui verser la somme de 30 000 euros en réparation du préjudice subi du fait de la rupture brutale des relations commerciales établies,
- débouter la société Eurofix de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
- débouter la société Eurofix de son appel incident,
- condamner la société Eurofix à lui verser la somme de 5 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,
- condamner la même aux entiers dépens ;
Vu les conclusions du 26 octobre 2018 par lesquelles la société Eurofix, intimée, demande à la cour, de :
- dire l'appel incident de la société Eurofix recevable et bien fondé,
- confirmer le jugement rendu le 22 mars 2016 par le tribunal de commerce de Rennes en ce qu'il a :
* condamné la société Difeudis à lui payer la somme de 2 278,52 euros au titre du solde dû sur la facture n° FC 997018, somme augmentée des intérêts au taux légal à compter du prononcé de la décision soit du 22 mars 2016 jusqu'au parfait paiement,
* débouté la société Difeudis au titre de sa demande de dommages et intérêts pour préjudice d'atteinte à son image,
* dit qu'il n'y a pas rupture brutale des relations commerciales au sens de l'article L. 442-6 du Code de commerce et débouté la société Difeudis de sa demande de dommages et intérêts au titre du préjudice subi pour rupture brutale,
- infirmer le jugement le 22 mars 2016 par le tribunal de commerce de Rennes pour le surplus,
- débouter la société Difeudis de sa demande de dommages et intérêts formulée au titre d'un prétendu préjudice commercial,
- condamner la société Difeudis à lui payer la somme de 5 382 euros TTC correspondant à la facture n° FC 997404 du 19 avril 2013, augmentée des intérêts au taux légal à compter du jour de la décision à intervenir,
- débouter la société Difeudis de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
- condamner la société Difeudis à lui payer la somme de 5 000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile, subsidiairement,
- confirmer le jugement du 22 mars 2016 par le tribunal de commerce de Rennes en toutes ces dispositions,
- condamner la société Difeudis aux entiers dépens ;
SUR CE, LA COUR,
La cour se réfère, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens échangés et des prétentions des parties, à la décision déférée et aux dernières conclusions échangées en appel.
En application de l'article 954 alinéa 2 du Code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions.
Sur la responsabilité contractuelle de la société Difeudis
Sur le défaut de livraison de la commande du 17 janvier 2013
La société Difeudis fait valoir que la société Eurofix n'a pas respecté l'engagement pris le 21 janvier 2013, ayant accusé réception de sa commande passée le 17 janvier 2013 puisqu'elle n'a jamais été livrée desdits produits et ce malgré ses multiples relances. Elle soutient également qu'il résulte des pièces versées aux débats que la société Eurofix lui a livré des allumettes défectueuses qui ne s'allumaient pas au grattage d'une part et n'a pas livré les produits qu'elle s'était engagée à livrer d'autre part. Elle souligne avoir ainsi subi un préjudice d'image.
En réplique, la société Eurofix fait valoir qu'elle a simplement accusé réception de cette commande le 21 janvier 2013, sans la confirmer, et partant qu'il n'existait pas d'accord sur la chose et le prix. Par ailleurs, elle estime que le refus de livraison de son propre fournisseur dû à l'augmentation conséquente du coût de la matière première est une cause étrangère, irrésistible et imprévisible à son égard et constitutif d'un cas de force majeure, l'exonérant de toute responsabilité.
En vertu de l'article 1134 ancien du Code civil, applicable en l'espèce au regard de la date du contrat litigieux, " les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise. Elles doivent être exécutées de bonne foi ".
En l'espèce, il n'est pas contesté que selon l'usage antérieur à la commande du 17 janvier 2013, la société Difeudis faisait parvenir un bon de commande qui était accepté par courriel par la société Eurofix, le prix ayant été déterminé antérieurement à l'envoi de la commande. Il ressort d'ailleurs des échanges produits par les parties concernant la commande du 23 octobre 2012 que la pratique entre les parties est celle-ci, la société Difeudis ayant commandé 64 800 Atout Feu au prix unitaire HT de 0,45 euro et la société Eurofix ayant accepté la commande par courriel retour, sans que d'autres échanges relatifs au prix et à la formalisation du contrat ne soient ensuite nécessaires.
Dans ces conditions, il y a lieu de considérer que la commande du 17 janvier 2013 par la société Difeudis de 64 800 Atout Feu au prix unitaire HT de 0,45 euro et l'acceptation par la société Eurofix de la commande par retour de courriel selon les termes " je vous confirme la bonne réception de votre commande n° 356 à livrer début avril 2013 et je vous en remercie " caractérisent l'accord des parties sur le prix unitaire de la commande, soit 0,45 euro HT.
En outre, la société Eurofix ne démontre pas que l'augmentation du prix des produits Atout Feu par son fournisseur revêt les caractères de la force majeure, en ce qu'elle n'établit pas que cette augmentation de prix annoncée par courriel du 26 février 2013, soit plus d'un mois après la réception de la commande, constitue une circonstance exceptionnelle, ni qu'elle est imprévisible.
Par ailleurs, la société Eurofix ne démontre pas que les conditions de la revente à perte sont réunies, la seule communication de factures du 18 avril 2013 correspondant à un bon de commande du 10 avril 2013 pour une commande effectuée le 17 janvier 2013 devant être livrée au début du mois d'avril 2013, ne peut suffire à démontrer que, s'agissant de cette commande litigieuse, la société Eurofix aurait revendu à perte.
Enfin, la proposition commerciale alternative n'avait pas à être acceptée par la société Difeudis s'agissant de produits différents à un autre prix.
Au regard de l'ensemble de ces éléments, la société Eurofix a commis une faute contractuelle à l'égard de la société Difeudis, en ayant refusé de livrer la commande valablement passée par cette dernière.
La société Difeudis soutient avoir subi un préjudice commercial lié à l'absence de la livraison de la commande du 17 janvier 2013, sans pour autant expliciter son préjudice. Les tableaux internes non datés reprenant les commandes et ce qui a été livré par elle ne peuvent être considérés comme probants. Les échanges courriels de la société Difeudis avec des clients démontrent qu'elle a effectivement reçu des commandes qu'elle n'a pu honorer sur cette période. Toutefois, aucun document comptable n'est produit. Dès lors, il y a donc lieu de fixer le préjudice commercial lié au défaut de livraison de la commande du 17 janvier 2013, au regard des seuls éléments communiqués, à la somme de 2 000 euros. En outre, elle ne démontre aucun préjudice d'image spécifique.
Le jugement doit donc être infirmé en ce qu'il a condamné la société Eurofix à payer à la société Difeudis la somme de 9 072 euros en réparation de son préjudice commercial et a débouté cette dernière du surplus de sa demande. Statuant à nouveau, il y a lieu de condamner la société Eurofix à payer à la société Difeudis la somme de 2 000 euros en réparation de son préjudice commercial.
Sur l'insuffisance de qualité des allumettes livrées en 2012
La société Difeudis soutient qu'il résulte des pièces versées aux débats que la société Eurofix lui a livré des allumettes défectueuses qui ne s'allumaient pas au grattage. Partant, elle sollicite la réparation de son préjudice d'image.
En réplique, la société Eurofix fait valoir que la preuve de ce que les allumettes litigieuses sont défaillantes de son fait n'est pas rapportée.
La société Difeudis démontre que certains de ses clients lui ont fait remonter que certaines des allumettes qu'elle leur avait fournies étaient défectueuses. Toutefois, aucune preuve n'est rapportée de ce que ces produits étaient ceux effectivement livrés par la société Eurofix ni que les problèmes liés à la défectuosité alléguée étaient dus à un défaut de qualité et non pas à des problèmes de stockages ultérieurs à la livraison de la commande par elle.
Il y a donc lieu de débouter la société Difeudis de sa demande de dommages et intérêts de ce chef, ne démontrant aucun préjudice d'image. Le jugement est confirmé sur ce point.
C'est donc vainement que la société Difeudis retient le solde du paiement de la facture du 15 février 2012 n° FC997018 d'un montant de 2 278,52 euros, la preuve des non-conformités alléguées pour justifier le non-paiement de cette facture n'étant pas rapportée. Le jugement doit être confirmé pour avoir condamné la société Difeudis à payer à la société Eurofix la somme de 2 278,52 euros.
Sur la rupture brutale des relations commerciales établies
La société Difeudis soutient que, par courrier du 19 avril 2013, la société Eurofix a rompu brutalement la relation commerciale établie entre elles, sans qu'aucun préavis ne soit respecté. Elle explique que rien ne permet de démontrer que les relations commerciales s'étaient dégradées de son fait. Elle relève également qu'aucune mise en demeure ne lui été adressée afin qu'elle fasse accélérer la livraison de sa commande du mois d'octobre 2012. Par ailleurs, elle estime qu'aucun des griefs mentionnés par la société Eurofix dans sa lettre de rupture du 19 avril 2013 n'était justifié.
En réplique, la société Eurofix soutient qu'elle n'a pas refusé de poursuivre les relations commerciales et qu'à ce titre l'impossibilité de livrer un produit spécifique ne saurait s'analyser en une rupture. Par ailleurs, elle estime que la société Difeudis ne saurait lui faire grief d'une rupture brutale puisque c'est cette dernière qui ne lui a plus passé aucune commande. Elle explique que la société Difeudis est à l'origine de la dégradation des relations commerciales et qu'à supposer que la société Eurofix soit à l'initiative de la rupture, les inexécutions par la société Difeudis de ses obligations (retard de paiement, traite revenue impayée, non-paiement d'une facture) et la force majeure (l'impossibilité de livrer un produit au prix convenu) justifiaient la rupture sans préavis.
Aux termes de l'article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce :
" Engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers (...) de rompre unilatéralement, même partiellement, une relation commerciale établie, sans préavis écrit tenant compte de la durée de la relation commerciale et respectant la durée minimale de préavis déterminée, en référence aux usages du commerce, par des accords interprofessionnels.
Les dispositions qui précèdent ne font pas obstacle à la faculté de résiliation sans préavis, en cas d'inexécution par l'autre partie de ses obligations ou en cas de force majeure ".
Les parties s'accordent sur le caractère établi de leur relation commerciale et sa durée. En revanche, elles s'opposent sur l'auteur de la rupture, sur les fautes de la société Difeudis justifiant l'absence de préavis suite à la rupture et sur le préjudice subi par cette dernière du fait de la brutalité de la rupture.
Sur l'auteur de la rupture
La société Difeudis soutient à juste titre que le courrier du 19 mars 2013 envoyé par la société Eurofix constitue une lettre de rupture sans préavis dépourvue de tout équivoque. En effet, la société Eurofix fait d'abord grief à la société Difeudis de ne pas avoir accepté l'augmentation de prix concernant la commande du 17 janvier 2013, puis rappelle que les relations commerciales entre elles se sont sérieusement dégradées depuis la fin de l'année 2012, en faisant état de sa demande de décalage d'une date de livraison, du retour comme étant impayé de la traite du 31 mars 2013 d'un montant de 33 712,85 euros et du refus de la société Difeudis de lui verser la somme de 2 278,52 euros pour un motif qu'elle conteste, pour conclure qu'elle ne veut " plus prendre de tels risques ". Les termes employés, clairs, démontrent la volonté de la société Eurofix de cesser ses relations commerciales avec la société Difeudis pour l'avenir.
Dès lors, la société Eurofix est l'auteur de la rupture des relations commerciales établies avec la société Difeudis.
Sur les fautes commises par la société Difeudis pouvant justifier l'absence de préavis
Il ressort des éléments du dossier que la commande du 23 octobre 2012 de la société Difeudis auprès de la société Eurofix devait être initialement livrée le 5 décembre 2012 (bon de commande de la société Difeudis, courriel d'accompagnement de ladite commande), puis par courriel du 27 novembre 2012, la société Difeudis demande à la société Eurofix un report de la date de livraison de " quelques jours ", ensuite par courriel du 28 novembre 2012 la société Difeudis indique à la société Eurofix que la livraison ne pourra être reçue avant la première semaine de janvier 2013, puis par courriel du 4 janvier 2013 la société Difeudis signifie à la société Eurofix que la livraison pouvait intervenir la semaine n° 3, et enfin par courriel du 25 janvier 2013 la société Difeudis sollicite encore de la société Eurofix un nouveau report pour la livraison sans préciser de date. Finalement, la livraison de la commande est intervenue le 8 février 2013.
Or, par courriel du 28 novembre 2012, la société Eurofix a fait savoir à la société Difeudis qu'elle ne pouvait accueillir les 30 palettes pendant plus d'un mois, s'agissant d'articles emballés à la marque Difeudis.
En outre, il est établi que la traite relative au paiement de la commande du 23 octobre 2012 est revenue impayée. La société Difeudis a finalement régularisé partiellement la situation en envoyant un chèque d'un montant de 31 434,33 euros mais a retenu le solde correspondant à la somme de 2 278,52 euros, alors qu'il a été jugé ci-dessus qu'il n'est pas justifié que la qualité défaillante des allumettes est imputable à la société Eurofix.
L'ensemble de ces éléments caractérise des fautes suffisamment graves imputables à la société Difeudis justifiant une rupture sans préavis des relations commerciales établies entre les sociétés Difeudis et Eurofix.
Dans ces conditions, la rupture avec la société Difeudis par la société Eurofix de leurs relations commerciales établies n'est pas brutale.
Il y a donc lieu de rejeter la demande formée par la société Difeudis. Le jugement doit être confirmé sur ce point.
Sur la demande reconventionnelle de la société Eurofix
La société Eurofix sollicite le remboursement d'une facture de frais de stockage des allumettes qu'elle n'a pas pu livrer à la société Difeudis.
La société Difeudis conteste cette demande, dans la mesure où, compte tenu des défauts constatés, elle apparaissait bien fondée à se prévaloir d'une exception d'inexécution en application des dispositions de l'article 1184 du Code civil. Elle relève également que la demande en paiement de frais de stockage est infondée, en ce que les différents courriels échangés entre les parties attestent que la société Eurofix savait que ses contraintes matérielles liées au déménagement de ses entrepôts imposaient un report de la livraison des produits commandés.
Il ressort des éléments du dossier que les parties avaient effectivement convenu d'une date de livraison au 5 décembre 2012, date déterminée d'ailleurs initialement par la société Difeudis. Si la société Difeudis a effectivement rencontré des difficultés pour accueillir la livraison, il n'en demeure pas moins qu'un accord entre les parties avait été conclu pour définir une date de livraison au 5 décembre et que la société Eurofix, qui a fait le nécessaire pour livrer dans les temps contractuels alors que la société Difeudis n'a été prévenue que quelques jours avant le 5 décembre que la date ne pouvait plus tenir. Par ailleurs, il n'est pas contesté que la société Eurofix ne dispose pas de l'espace suffisant pour conserver plus d'un mois une telle livraison, qu'elle ne pouvait livrer à un autre client dans l'attente de la confirmation de la date, ces produits étant à la marque de la société Difeudis. La société Eurofix a donc subi un préjudice du fait de ce retard de deux mois dans la livraison de la commande de la société Difeudis. A défaut de communiquer la facture relative aux prestations de gardiennage, il y a lieu de fixer le préjudice subi par la société Eurofix à la somme de 2 000 euros au titre des frais de stockage supplémentaires de la livraison litigieuse.
Le jugement doit donc être infirmé en ce qu'il a condamné la société Difeudis à payer à la société Eurofix la somme de 2 691 euros au titre des frais de stockage, cette somme étant majorée d'un intérêt au taux légal à compter du 22 mars 2016 et jusqu'au parfait paiement, et a débouté la société Eurofix du surplus de sa demande. Statuant à nouveau, il y a lieu de condamner la société Difeudis à payer à la société Eurofix la somme de 2 000 euros au titre des frais de stockage, cette somme étant majorée d'un intérêt au taux légal à compter du 22 mars 2016.
Sur les dépens et l'application de l'article 700 du Code de procédure civile
Le sens du présent arrêt conduit à infirmer le jugement déféré sur le sort des dépens.
La société Difeudis doit être condamnée aux dépens de première instance et d'appel, ainsi qu'à payer à la société Eurofix la somme de 5 000 euros par application de l'article 700 du Code de procédure civile.
Le sens du présent arrêt conduit à rejeter la demande par application de l'article 700 du Code de procédure civile formulée par la société Difeudis.
Par ces motifs, LA COUR, dans les limites de sa saisine ; confirme le jugement sauf en ce qu'il a : - condamné la société Eurofix à payer à la société Difeudis la somme de 9 072 euros en réparation de son préjudice commercial et a débouté cette dernière du surplus de sa demande, - condamné la société Difeudis à payer à la société Eurofix la somme de 2 691 euros au titre des frais de stockage, cette somme étant majorée d'un intérêt au taux légal à compter du 22 mars 2016 et jusqu'au partait paiement, et a débouté la société Eurofix du surplus de sa demande, - fait masse des dépens qui seront supportés par chacune des parties ; l'infirme sur ce point ; Statuant à nouveau ; condamne la société Eurofix à payer à la société Difeudis la somme de 2 000 euros en réparation de son préjudice commercial ; condamne la société Difeudis à payer à la société Eurofix la somme de 2 000 euros au titre des frais de stockage, cette somme étant majorée d'un intérêt au taux légal à compter du 22 mars 2016 ; Y ajoutant ; condamne la société Difeudis aux dépens de première instance et d'appel, ainsi qu'à payer à la société Eurofix la somme de 5 000 euros par application de l'article 700 du Code de procédure civile ; rejette toute autre demande.