CA Paris, Pôle 5 ch. 4, 9 janvier 2019, n° 16-22350
PARIS
Arrêt
Infirmation
PARTIES
Demandeur :
Lidl (SNC)
Défendeur :
Puma France (SAS)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Luc
Conseillers :
Mmes Mouthon Vidilles, Comte
Avocats :
Mes Olivier, Kong Thong, Codevelle, Meynard, Luttringer
Faits et procédure
La société Lidl exerce une activité de commerce de détail de tous types de produits alimentaires et de bazar.
La société Puma France conçoit et produit des articles de sport et de loisirs, essentiellement des chaussures et des accessoires tels que des sacs sous la marque Puma. Ces produits sont exclusivement commercialisés, depuis quinze ans, par l'intermédiaire d'un réseau de distribution sélective, d'après la société Puma, à savoir par l'intermédiaire de distributeurs agréés signataires d'un contrat de distribution sélective et sélectionnés d'après un ensemble de critères qualitatifs objectifs.
La société Lidl ne fait pas partie du réseau de distribution sélective Puma. Pourtant, dans le cadre d'une opération promotionnelle pour la journée du jeudi 5 septembre 2013, elle a annoncé une vente de chaussures et de sacs à dos Puma, appuyée par de vastes moyens de communication.
Arguant de la violation de son réseau de distribution sélective, la société Puma a, par courrier du 29 août 2013, mis en demeure la société Lidl de cesser l'offre à la vente et la vente de produits Puma par tous prospectus, sites Internet et dans les magasins Lidl, puis l'a assignée en référé d'heure à heure le 2 septembre 2013 devant le tribunal de commerce de Nancy.
Lors de la première audience en référé du 4 septembre 2013, la société Lidl a sollicité et obtenu un renvoi en s'engageant en contrepartie, afin de démontrer sa bonne foi :
- à suspendre la vente des produits litigieux dans l'attente d'une décision,
- à diffuser dans ses magasins un erratum.
Dès la sortie de l'audience, et précisément à 11h17, la société Lidl a adressé un courriel à l'ensemble de ses Directions Régionales afin de retirer de la vente les articles litigieux. A 15h42, la société Lidl a envoyé aux Directions Régionales l'erratum à afficher dans les magasins
Ayant fait constater par ses salariés la vente de produits dans deux magasins Lidl situés à Créteil et Vitry-sur-Seine, la société Puma a alors reproché alors à la société Lidl d'avoir commis des actes de concurrence déloyale et de parasitisme à son encontre d'une part, et d'avoir porté atteinte à son réseau de distribution sélective.
Par acte délivré le 2 septembre 2013, la société Puma a assigné en référé d'heure à heure la société Lidl devant le tribunal de commerce de Nancy, sollicitant sur le fondement des articles 872 et 873 du Code de procédure civile, le prononcé de diverses mesures de retrait, d'interdiction et de publication ainsi que l'allocation d'une provision.
Par acte du 6 mars 2014, la société Puma a ensuite assigné la société Lidl devant le tribunal de commerce de Paris.
Par jugement du 12 septembre 2016, le tribunal de commerce de Paris a, sous le régime de l'exécution provisoire :
- condamné la société Lidl à payer à la société Puma France une somme de 200 000 euros, augmentée des intérêts au taux légal du jour de l'assignation au jour du paiement à titre de dommages intérêts, déboutant pour le surplus,
- fait interdiction à la société Lidl de mettre en vente et de vendre des produits Puma, sous astreinte de 1 000 euros par jour et par produit, à compter de la présente décision,
- débouté la société Puma France de sa demande de publication de la décision,
- débouté la société Puma France de ses demandes de communication de divers documents comptables et de remise des stocks de chaussures et de sacs à dos,
- débouté la société Lidl de sa demande de condamnation de la société Puma France pour procédure abusive,
- condamné la société Lidl à verser la somme de 20 000 euros à la société Puma France au visa de l'article 700 du Code de procédure civile :
- condamné la société Lidl aux dépens dont ceux à recouvrer par le greffe, liquidés à la somme de 81,90 euros dont 13,43 euros de TVA.
Par déclaration du 9 novembre 2016, la société Lidl a interjeté appel du jugement rendu par le tribunal de commerce de Paris le 12 septembre 2016.
La société Puma France a formé un appel incident à l'encontre de ce jugement.
La procédure devant la cour a été clôturée le 30 octobre 2018.
Vu les dernières conclusions de la société Lidl, appelante, déposées et notifiées le 16 octobre 2018, par lesquelles il est demandé à la cour, au visa du règlement communautaire UE n° 330/2010 de la Commission du 20 avril 2010 et de l'article 1240 (anciennement 1382) du Code civil, de :
- constater l'illicéité du réseau de distribution invoqué par la société Puma,
- constater en tout état de cause que la société Lidl a licitement acquis les produits litigieux,
- constater que la société Lidl n'a commis aucun acte de concurrence déloyale et/ou parasitaire,
- en conséquence : confirmer le jugement en ce qu'il a déclaré que les produits critiqués ont été acquis licitement par la société Lidl,
- infirmer pour le surplus et statuant à nouveau :
débouter la société Puma de l'ensemble de ses demandes comme étant irrecevables et mal fondées,
- condamner la société Puma à verser à la société Lidl la somme de 30 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,
- condamner la société Puma aux entiers dépens de première instance et d'appel qui seront recouvrés conformément à l'article 699 du Code de procédure civile ;
Vu les conclusions de la société Puma France, intimée, déposées et notifiées le 11 septembre 2018, par lesquelles il est demandé à la cour de :
Vu le Règlement (UE) n° 330/2010 de la Commission du 20 avril 2010,
Vu le Règlement (CE) n° 1/2003 du 16 décembre 2002, modifié par le Règlement (CE) n° 411/2004 entré en vigueur le 9 mars 2004, JO L 68 du 6 mars 2004, et par le Règlement (CE) n° 1419/2006 du 18 octobre 2006, JO L 269 du 28 septembre 2006, relatifs à la mise en œuvre des règles de concurrence prévues aux articles 101 et 102 du Traité de l'Union,
Vu l'article 46 du Code de procédure civile,
Vu les articles 1382 et 1383 du Code civil,
Sur l'appel principal
- déclarer la société Lidl mal fondée en son appel,
- l'en débouter ainsi que de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions,
- en conséquence, confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :
* jugé que le réseau de distribution sélective mis en place par la société Puma est justifié et juridiquement étanche,
* jugé que la société Lidl avait porté atteinte à l'image de marque de la société Puma et fragilisé ses efforts pour assurer une distribution sélective de ses produits et avait ainsi commis des fautes de concurrence déloyale et de parasitisme à son encontre,
* fait interdiction à la société Lidl de mettre en vente et de vendre des produits Puma, sous astreinte de 1 000 euros par jour et par produit,
Sur l'appel incident
- déclarer la société Puma recevable en son appel incident,
- l'y dire bien fondé
- en conséquence, infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :
* fixé à la somme de 200 000 euros le montant des dommages et intérêts devant être payés par la société Lidl à la société Puma,
* débouté la société Puma de sa demande de publication de la décision et de sa demande tendant à la communication de divers documents comptables et de remise des stocks de chaussures et de sacs à dos,
et statuant de nouveau de ces chefs,
- condamner la société Lidl à payer à la société Puma France une somme de de 1 441 500 euros à titre de dommages et intérêts, augmentée des intérêts au taux légal du jour de l'assignation au jour du paiement, à titre de dommages et intérêts complémentaires,
- ordonner la publication de la décision à intervenir dans le magazine Télé 7 Jours, dans un journal national tel que le Figaro, les Echos au choix de Puma France, et dans le journal LSA, aux frais avancés par la société Lidl sans que ces frais n'excèdent 100 000 euros HT,
- condamner la société Lidl à payer à la société Puma France une somme de 100 000 euros HT + TVA, au titre de ladite publication, augmentée des intérêts au taux légal à compter du jour de la décision à intervenir jusqu'au jour du paiement,
- condamner la société Lidl à communiquer à la société Puma France :
* les commandes, bons de livraison, factures, comptes fournisseurs, des 5 produits Puma en cause présents sur le prospectus Lidl du 31/08/2013 au 06/09/2013, sans rature,
* ces mêmes documents pour les sacs à dos Puma mis en vente par les Erratum, sans rature,
* un état des approvisionnements et des ventes des produits Puma,
* un état des stocks des produits Puma au jour de l'assignation, le 5 septembre 2013 à 24 heures et au jour de la communication, y compris sous les appellations " non food " et " champagne brut ",
* le tout certifié sincère et conforme par un expert-comptable ou un commissaire aux comptes, et sous astreinte de 1 500 euros par jour, par document et par produit du jour du prononcé de la décision à intervenir,
- condamner la société Lidl à communiquer les commandes, factures et comptes des prospectus publicitaires, des affiches, de l'encartage dans le magazine TV Télé 7 jours, relatifs aux prospectus en annexes 9 et 85, le tout certifié sincère et conforme par un expert-comptable ou un commissaire aux comptes, et sous astreinte de 1 500 euros par jour, par document du jour du prononcé de la décision à intervenir,
- ordonner la remise à la société Puma au lieu qu'elle indiquera, aux frais et risques de la société Lidl, des stocks de chaussures Puma et sacs à dos Puma, sous astreinte de 1 500 euros par jour, par stock de chaussures et par stock de sacs à dos, du jour du prononcé de la décision à intervenir, selon inventaire de stocks correspondants et visés ci-dessus,
- ordonner la capitalisation des intérêts et dire qu'ils porteront intérêts au même taux dès qu'ils seront dus pour une année entière,
- condamner la société Lidl à verser à la société Puma France une somme de 25 000 euros par application de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître Jean-Didier Meynard de la SCP Brodu Cicurel Meynard Gauthier, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile ;
Sur ce, LA COUR,
Sur la pratique de concurrence déloyale pour vente hors réseau
L'action en concurrence déloyale d'un fournisseur contre un distributeur non agréé, pour violation du réseau de distribution sélective, suppose que le réseau soit licite et que le distributeur se soit approvisionné auprès d'un distributeur sélectif qui a violé son interdiction de vente à des distributeurs ne faisant pas partie du réseau de distribution sélective.
La société Lidl soutient que la société Puma ne prouve pas l'existence d'un réseau de distribution licite pour les produit en cause et qu'elle-même justifie d'un approvisionnement régulier auprès d'un distributeur ne faisant pas partie du réseau.
La société Puma maintient ses demandes, en prétendant justifier la licéité de son réseau.
Mais la société Lidl verse aux débats les factures d'achat des produits litigieux auprès d'une société SportTrading Holland (pièce 23), dont la société Puma reconnaît elle-même qu'elle n'est pas un de ses distributeurs agréés.
Ces 73 factures, relatives à des commandes du 19 août 2013, sont régulières, la circonstance qu'y figurent aussi des produits Nike étant indifférente et démontrant le caractère multimarques du négociant SportTrading.
Ces factures sont de plus attestées par le gérant de la société Lidl, qui a, de plus, confirmé que seuls 232 produits avaient été vendus le 5 septembre 2013 et que Lidl ne détenait plus de produits en stock. L'attestation du gérant est confirmée par celle du commissaire aux comptes qui s'est prononcé sur la " concordance de ces informations avec les données internes à Lidl SNC " (" issues du système d'information, notamment des applications de gestion commerciales ").
La société Lidl fait donc bien la démonstration de la licéité de son approvisionnement, n'ayant pas à rechercher et démontrer que la société SportTrading Holland s'était elle-même approvisionnée régulièrement en dehors du réseau.
Si la société Puma prétend que la société Lidl se serait approvisionnée ailleurs, elle n'en rapporte pas le moindre commencement de preuves. Si ses propres salariés se sont rendus dans les magasins Lidl le 5 septembre 2013 pour y constater l'offre de sacs et chaussures Puma, il n'est pas établi que les modèles achetés auraient correspondu à d'autres modèles que ceux énumérés dans les 73 factures ci-dessus.
Aucune pratique de concurrence déloyale ne peut donc être imputée à la société Lidl sur ce fondement. Le jugement querellé sera donc infirmé sur ce point.
Sur la concurrence déloyale
La société Puma France reproche à la société Lidl d'avoir exposé les produits Puma dans des conditions dévalorisantes et à vils prix, et, notamment :
- d'avoir mis en œuvre des moyens publicitaires " pléthoriques dévalorisants pour promouvoir la vente de produits Puma ", la vente du 5 septembre 2013 ayant été annoncée par des moyens disproportionnés et notamment des centaines de prospectus de médiocre qualité dans lesquels étaient mélangés les chaussures et sacs Puma avec des types de produits sans rapport avec eux, à savoir essentiellement des produits alimentaires et de bricolage,
- de ne pas répondre aux critères qualitatifs exigés pour les distributeurs agrées Puma,
- d'avoir assuré la commercialisation de produits Puma aux côtés de produits alimentaires, épices, pâtes, viandes, tronçonneuse etc., et en vrac et à même le sol, ce qui a contribué à l'atteinte portée à leur image de marque et à la fragilisation des efforts de la société Puma pour assurer une distribution sélective de ses produits,
- d'avoir supprimé des dénominations de vente des chaussures Puma Aley, Puma Elsul et Puma Elsul MID et de les avoir remplacées par la dénomination générique " basket ",
- d'avoir supprimé les dénominations Puma des tickets de caisse : la société Lidl aurait vendu les chaussures Puma et les sacs Puma sous des dénominations fausses, puisque les tickets de caisse mentionnaient par exemple : " non food " pour les sacs et les chaussures, et " champagne brut premi " pour les sacs ; or, ces mentions ne permettaient pas au consommateur de prouver qu'il avait acquis des chaussures Puma ou un sac Puma dans un magasin Lidl et le privaient donc de la possibilité de faire valoir ses droits dans l'hypothèse où le produit aurait présenté un défaut ; il s'agirait donc d'une pratique illégale vis-à-vis des consommateurs, également constitutive d'une faute à l'égard de la société Puma,
- l'usurpation de la dénomination sociale de Puma,
- les prix de revente pratiqués par Lidl : Lidl revend les produits Puma à un niveau de prix si bas qu'ils concurrencent déloyalement les distributeurs agréés, non seulement compte tenu des conditions déplorables de leur présentation en vrac avec les produits alimentaires, mais aussi à un niveau de prix qui ne tient pas compte de la valeur réelle des achats, de leur mise en vente et de la vente.
La société Lidl répond que :
- n'étant pas liée par un contrat à la société Puma, elle n'est pas tenue de respecter les obligations que cette dernière impose à ses distributeurs, et notamment les critères qualitatifs. De plus, elle invoque la jurisprudence selon laquelle, le fait de commercialiser hors réseau des produits authentiques couverts par un contrat de distribution sélective n'est pas fautif dès lors que les produits ont été acquis régulièrement,
- les moyens publicitaires de Lidl, à savoir des catalogues, internet, de la publicité dans des magazines, tels Télé 7 jours, sont des moyens usuels fréquemment utilisés par les annonceurs pour promouvoir la vente de produits de sport et de sacs à dos et la qualité médiocre des prospectus Lidl n'est pas démontrée,
- ces publicités n'ont pas perduré suite aux engagements de Lidl devant le tribunal,
- la vente de produits litigieux constatée par la société Puma dans deux magasins Lidl sis à Créteil et Vitry-sur-Seine, alors que la société Lidl s'était engagée devant le tribunal à ne plus vendre ces produits, résulte uniquement d'une erreur individualisée commise en caisse par des salariés ; de plus, concernant la diffusion de l'erratum à laquelle la société Lidl s'était engagée devant le tribunal, les attestations communiquées par la société Puma selon lesquelles certain magasins n'auraient pas affiché cet erratum, sont dénuées de toute force probante, compte tenu du lien de subordination des témoins avec la société Puma,
- les conditions de mise en vente des produits Puma n'étaient pas anormales car ces produits étaient présentés non pas à côté de produits alimentaires et de bricolage, mais dans des racks individualisés, placés au milieu des allées du magasin, dans lesquels n'étaient offerts que des produits Puma, au côté de produits Nike ; en tout état de cause, la société Lidl invoque la jurisprudence selon laquelle le fait de commercialiser des produits dans un environnement dévalorisant ou à proximité de produits dévalorisants ne constitue pas un acte de concurrence déloyale susceptible d'engager sa responsabilité délictuelle,
- aucune pièce de la société Puma ne démontre que les produits Puma étaient commercialisés " à même le sol et en vrac dans ses magasins " et en tout état de cause, les contrats de distribution sélective communiqués par la société Puma prévoient que " les présentations en vrac ou en piles à même le sol " sont autorisées " pendant les périodes de promotions ",
- si le slogan " La Foire aux vins - L'idéal c'est Lidl " figurait bien, au moment des faits, sur les prospectus critiqués ou sur le site Internet de la société Lidl, ce n'était jamais en lien avec les produits Puma ou pour les promouvoir d'une quelconque façon,
- le grief d' " atteinte à la dénomination de vente " n'existe pas en droit et la dénomination " Puma-basket " n'est pas trompeuse ou déloyale au sens de l'article L. 120-1 du Code de la consommation,
- la suppression de l'identité des produits Puma n'est pas constitutive, à l'égard de la société Puma, d'une quelconque faute lui créant un préjudice, susceptible d'engager la responsabilité de la société Lidl et les mentions " non food " ou " champagne brut " sur le ticket de caisse ne constituent pas une pratique trompeuse au sens de l'article L. 121-1 du Code de la consommation, car le consommateur ne peut confondre les produits Puma avec du champagne brut,
- les prix pratiqués par la société Lidl ne sont pas vils, car la société Puma ne le démontre pas et, selon la jurisprudence, la revente à un prix réduit d'un produit dont l'approvisionnement illicite n'est pas établi n'est pas une faute constitutive de concurrence déloyale et de parasitisme.
Le seul fait de commercialiser hors réseau des produits authentiques couverts par un contrat de distribution sélective n'est pas fautif dès lors que la revente concerne des produits acquis régulièrement.
L'action en concurrence déloyale n'est donc possible que si, à la distribution hors réseau, s'ajoute une faute imputable au distributeur hors réseau.
Or, en l'espèce, la société Puma n'en justifie aucune. En effet, d'une part, il a été vu qu'il n'était pas démontré que l'approvisionnement en produits Puma par la société BLT Développement était illicite et d'autre part, le fait pour un distributeur non agréé ni autorisé, de vendre des sacs et chaussures de sport, dont l'approvisionnement illicite n'est pas établi, à des prix inférieurs à ceux pratiqués par les membres d'un réseau, au surplus au cours d'une opération publicitaire ponctuelle, n'est pas constitutif en soi, en l'absence d'autres éléments, d'un acte de concurrence déloyale et de parasitisme.
Par ailleurs, aucune présentation dévalorisante des produits ne résulte des pièces du dossier. Les tracts publicitaires isolaient bien les produits Puma des autres produits vendus, de sorte qu'aucune assimilation ne pouvait être faite entre les différents produits. En magasins, les produits Puma étaient exposés dans des racks ou sur leur boîte, à même le sol, sans que ces conditions puissent être jugées dévalorisantes pour la marque, s'agissant d'une opération publicitaire isolée.
Le fait d'avoir utilisé la dénomination générique " basket " Puma au lieu de chaque nom de modèle de chaussures Puma Aley, Puma Elsul et Puma Elsul MID ne constitue pas une information trompeuse du consommateur ; de même, la suppression, dans les tickets de caisse émis le jour de la promotion litigieuse des dénominations Puma, ceux-ci mentionnant par exemple " non food " pour les sacs et les chaussures, et " champagne brut premium " pour les sacs, réalisée par erreur, à la suite du blocage des caisses, ne constitue pas une tromperie du consommateur qui ne saurait confondre les articles Puma avec lesdits produits.
Enfin, aucune usurpation de la dénomination sociale de Puma n'est démontrée.
Sur la concurrence parasitaire
La société Puma France soutient que la société Lidl a bénéficié sans bourse délier de l'importance des investissements de la société Puma en publicité et en développement de réseau, pour commercialiser des produits Puma sans être soumise aux contraintes des distributeurs agréés et qu'elle a pu, grâce à l'image de luxe et de prestige dont bénéficient les produits Puma, attirer un grand nombre de consommateurs dans ses magasins pour qu'ils y réalisent ensuite d'autres achats.
La société Lidl soutient que :
- vendant avec succès une grande variété de produits, qu'ils soient alimentaires ou non, de marques ou non, de manière à offrir un large choix à ses clients, elle ne s'est pas placée dans le sillage de la société Puma pour commercialiser ses produits,
- elle n'avait pas pour objectif d'attirer, grâce à l'image de luxe et de prestige dont bénéficieraient les produits Puma, un grand nombre de consommateurs pour qu'ils y réalisent d'autres achats, car elle n'a pas plus appelé l'attention du consommateur sur les produits Puma que sur les autres produits.
Le parasitisme consiste, pour un opérateur économique, à se placer dans le sillage d'une entreprise en profitant indûment de la notoriété acquise ou des investissements consentis.
La campagne en cause, portant sur 232 articles, ponctuelle, ne saurait constituer un acte de parasitisme de la société Lidl, aucune démonstration n'étant faite que ces produits auraient fonctionné comme des produits d'appel, de sorte que la société Lidl ne s'est pas placée dans le sillage de la société Puma, n'ayant pas utilisé sa notoriété sans bourse délier.
Au total, le jugement entrepris sera donc infirmé, sauf en ce qu'il a déclaré que les produits critiqués ont été acquis licitement par la société Lidl.
Sur les dépens et frais irrépétibles
Succombant au principal, la société Puma sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel et à payer à la société Lidl la somme de 30 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
Par ces motifs : LA COUR, Infirme le jugement entrepris, sauf en ce qu'il a déclaré que les produits critiqués ont été acquis licitement par la société Lidl, et statuant à nouveau, Déboute la société Puma de l'ensemble de ses demandes, Condamne la société Puma aux dépens de première instance et d'appel, Condamne la société Puma à payer à la société Lidl la somme de 30 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.